Le juge peut-il interpréter et compléter le contrat?

Force obligatoire du contrat à l’égard du juge

Selon l’article 1103 du Code Civil, « les contrats valablement formé tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

Si elles ne respectent pas le contrat, elles s’exposent à des sanctions. La force obligatoire du contrat s’impose en premier lieu aux parties, à ceux qui ont conclu le contrat. Mais pas seulement : elle s’impose également aux tiers et en particulier aux juges.

La loi contractuelle s’impose au juge, ce qui doit se manifester d’une part dans la manière dont il va interpréter le contrat, mais c’est également ce qui lui interdit de réviser ou modifier le contrat.

  • &1- Force obligatoire du contrat et interprétation du juge

Il est fréquent qu’un contrat comporte des zones d’obscurité ou des contradictions. Il vaut donc pour appliquer le contrat s’entendre sur les sens de ses dispositions.

Si les parties sont d’accord sur l’interprétation à donner à telle ou telle clause imprécise, pas de problèmes. Mais si elles ne sont pas d’accord c’est au juge d’interpréter le contrat

LUBERT arrêt du 02/02/1808: La Cour de Cassation a affirmé que l’interprétation du contrat relevait du pouvoir souverain des juges du fond.

Lorsque le juge interprète le contrat, il doit respecter sa force obligatoire et donc respecter la volonté des parties. En effet, c’est ce que les parties ont voulu qui a force obligatoire à l’égard des parties et du juge.

L’article 1188 du Code Civil considère que « le contrat s’interprète d’après la commune intention des parties

plutôt qu’en s’arrêtant sur le sens littéral de ces termes ». Ce premier alinéa est totalement conforme au principe de la force obligatoire à l’égard du juge.

Toutefois, l’alinéa 2 de cet article précise que « lorsque cette intention ne peut pas être décelée, le contrat s’interprète dans le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation » –> si le juge ne peut pas identifier la volonté des parties, au lieu de faire de la divination, le Code Civil lui conseille de procéder par logique, en retenant l’interprétation la plus raisonnable.

Les articles 1189 à 1192 donne au juge d’autres conseils relatifs à l’interprétation du contrat –> on constate que la force obligatoire du contrat à l’égard du juge est totalement étrangère à ses conseils dans la mesure où le Code Civil lui-même l’invite à tenir compte de critère totalement étranger à l’intention des parties.

(Par exemple art 1190)

On voit donc que dans le pouvoir du juge d’interpréter le contrat, la force obligatoire de ce contrat ne s’impose pas à lui dans toute sa rigueur car il peut se détacher de sa recherche de l’intention des parties.

  • &2- Force obligatoire et complètement du contrat par le juge

Le principe de la force obligatoire du contrat interdit également au juge de compléter le contrat, d’ajouter à ce que les parties ont voulu.

Pourtant l’article 1194 du Code Civil dispose que  « le contrat obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toute les suites que leurs donnent l’équité, l’usage ou la loi. »

Il reprend dans des termes quasiment similaires les dispositions de l’ancien article 1135. Cet article pose une limite à la force obligatoire du contrat à l’égard du juge en permettant à ce dernier de procéder au complètement du contrat, c’est-à-dire d’ajouter aux stipulations contractuelles qu’ont voulu les parties.

Sous l’empire de l’ancien article 1135, le juge a très souvent été amené à utiliser cette possibilité dans de nombreux contrat et dans le silence des parties sur ce point, une obligation accessoire que les parties n’avaient pas expressément conclut.

Le plus bel exemple en jurisprudence concerne l’obligation accessoire de sécurité mise à la charge par le juge de l’une des parties à l’égard de l’autre. La première fois que cette jurisprudence a été appliqué, c’est à propos du contrat de transport :

Par un arrêt du 21/11/1911 a priori le contrat de transport ne prévoyait pour le transporteur qu’une seule obligation principale : transporter le passager et une obligation pour le passager : payer le transporteur.

En se fondant sur l’article 1135, la Cour de Cassation a décidé que l’équité commandait comme suite équitable de transporter que le transporteur soit également tenu d’une obligation de sécurité à l’égard des passagers, même si cette obligation ne figurait pas dans le contrat.

–> Avant cette jurisprudence pas d’attaque possible puisque le passager blessé ne pouvait pas prouver que le transporteur avait manqué à ses obligations.

En admettant que le transporteur, même dans le silence du contrat, été tenu à une obligation de sécurité, cela permettait au passager victime d’un accident d’invoquer sa responsabilité contractuelle puisque, si le passager est blessé, le transporteur n’a pas respecté son obligation de sécurité.

 

Le juge a bien compléter le contrat : il a ajouté une obligation non prévu par les parties au contrat. Mais c’est la loi qui l’y a autorisé comme l’y autorise aujourd’hui l’article 1194 si il démontre que l’obligation qu’il ajoute est la suite juste ou logique de l’obligation principale prévue au contrat.

Par la suite, l’obligation de sécurité est devenue une obligation de résultat qui pesait sur le transporteur à partir du moment où le voyageur commençait à monter dans le véhicule et jusqu’au moment ou il achève d’en descendre.

(obligation posée par l’arrêt VALVERDE 07/03/1989)

De la même manière, le juge a découvert une obligation de sécurité dans de nombreux autres contrats, c’est le cas par exemple dans tous les contrats qui proposent une activité loisir. Il considère que même si le contrat ne le prévoit pas que l’obligation principale implique une obligation accessoire de sécurité.

C’est parfois une obligation de sécurité (transports, manèges forains,…), parfois une obligation de moyens (club d’équitation ou de parachutisme) = mettre tous les moyens en œuvres pour garantir la sécurité des usagers.

Permettre au juge de compléter le contrat en y insufflant les suites que l’équité commande est une atteinte à la force obligatoire du contrat mais c’est une atteinte autorisé par la loi (art 1994).

  • &3- Force obligatoire du contrat et révision du contrat par le juge

Force obligatoire du contrat et révision du contrat par le juge

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