Les juridictions civiles de première instance
La loi de modernisation de la justice de 2016 a supprimé des juridictions comme les tribunaux de proximité, TASS et tribunaux d’incapacité, transférant leurs compétences au tribunal judiciaire (TJ), une juridiction unifiée. Le TJ remplace le TGI et le TI, gérant la plupart des litiges civils, sauf exceptions spécifiques. Des juridictions spécialisées, telles que le tribunal de commerce, le conseil de prud’hommes, et le tribunal paritaire des baux ruraux, maintiennent leurs compétences particulières.
Voici les juridictions supprimées depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice :
- Juridictions de proximité : supprimées au 1er juillet 2017. Elles étaient compétentes pour les litiges civils d’un montant inférieur à 4 000 euros.
- Tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) et Tribunaux de l’incapacité : supprimés au 1er janvier 2019. Leur contentieux a été transféré à des Tribunaux de grande instance (TGI) spécialement désignés.
- Tribunal d’instance (TI) : supprimé au 1er janvier 2020. Il a été absorbé par le Tribunal judiciaire dans le cadre de la fusion des TGI et TI.
A) Le tribunal judiciaire
Le tribunal judiciaire (TJ), remplaçant à la fois le tribunal de grande instance (TGI) et le tribunal d’instance (TI) depuis le 1er janvier 2020, constitue désormais la juridiction de droit commun compétente pour l’ensemble du contentieux civil. Ce tribunal unifié conserve l’ancienne compétence étendue du TGI, en l’absence de disposition spéciale attribuant une affaire à une autre juridiction. Le TJ est ainsi appelé à trancher les litiges privés, sauf si une loi confie cette compétence à une juridiction spécifique.
Le TJ ne juge cependant pas toutes les affaires, car certaines sont partagées selon la nature du litige ou sa valeur. Avant sa fusion avec le TI, le TGI traitait principalement des affaires civiles où le montant en jeu dépassait 10 000 euros, tandis que le TI s’occupait des litiges inférieurs à cette somme. Le TJ conserve ce critère, tout en ayant absorbé les compétences des anciennes juridictions de proximité, supprimées au 1er juillet 2017. Les juridictions de proximité traitaient les petits litiges jusqu’à 4 000 euros, une compétence désormais intégrée au sein des tribunaux judiciaires.
Certains domaines relèvent exclusivement du tribunal judiciaire, quels que soient les montants en jeu. Parmi ces matières à compétence exclusive, on trouve :
- Les affaires d’état civil, telles que la filiation, l’adoption et la nationalité ;
- Les successions ;
- Les litiges relatifs aux accidents de la circulation ;
- La propriété immobilière et les baux commerciaux ;
- Les actions en réparation du préjudice corporel.
La loi de modernisation de la justice du 18 novembre 2016 a profondément remanié le paysage juridictionnel, transférant une partie du contentieux auparavant confié aux juridictions de sécurité sociale vers des TJ spécialement désignés. Ce transfert a pris effet avec la disparition des juridictions spécialisées au 1er janvier 2019, consolidant ainsi le contentieux général de la sécurité sociale et de l’aide sociale sous l’égide des TJ.
En ce qui concerne les anciens tribunaux d’instance (TI), ceux-ci avaient une compétence spécifique pour juger les affaires civiles dont le montant n’excédait pas 10 000 euros. Avec la suppression des juridictions de proximité, le TI a assumé la compétence pour les litiges jusqu’à 4 000 euros, avant d’être également fusionné avec le TGI dans le cadre de la réforme judiciaire.
Le tribunal d’instance, désormais intégré au TJ, avait une compétence particulière dans des domaines spécifiques, tels que :
- Les expulsions d’occupants sans droit ni titre ;
- Les litiges relatifs aux baux d’immeubles.
Il avait aussi la responsabilité des tutelles, et était compétent pour les injonctions de payer ou de faire. Une autre caractéristique importante de l’ancien TI était qu’il statuait généralement à juge unique, contrairement aux compositions plus nombreuses du TGI. L’un des objectifs du TI était d’encourager la résolution amiable des conflits, d’où l’importance accordée à la conciliation.
Depuis la loi de modernisation de la justice, la conciliation est devenue une procédure obligatoire pour tous les litiges civils d’un montant inférieur ou égal à 4 000 euros. Pour ces affaires, les parties doivent tenter de trouver une solution à l’amiable avec l’aide d’un conciliateur avant d’engager un procès. Dans les autres cas, cette tentative de conciliation demeure facultative, mais fortement encouragée, favorisant ainsi la résolution des conflits en dehors du cadre strictement judiciaire.
Ce nouveau cadre, marqué par la fusion des anciennes juridictions civiles, renforce l’efficacité et l’accessibilité du système judiciaire tout en conservant les spécialisations nécessaires à la gestion des divers types de contentieux.
B) Le tribunal de commerce
Le tribunal de commerce (TC) est une juridiction spécialisée qui se distingue par la nature du litige, et non par la valeur des intérêts en jeu. Sa compétence s’étend à tous les conflits liés aux activités commerciales, qu’ils opposent des commerçants, des établissements de crédit ou les deux. De plus, avec la loi de modernisation de la justice de 2016, la compétence du TC a été élargie pour inclure les litiges impliquant des artisans, une évolution marquante dans le champ d’intervention de cette juridiction.
Le TC traite également des litiges concernant les actes de commerce impliquant des personnes physiques ou morales, par exemple dans le cadre d’opérations de banque, de change ou de courtage. Par ailleurs, il intervient dans les contestations relatives aux sociétés commerciales et gère les procédures liées aux redressements et liquidations judiciaires des entreprises, ainsi que tout ce qui touche au traitement des difficultés des entreprises.
Une des particularités du tribunal de commerce réside dans la nomination de ses juges. Contrairement aux autres juridictions, les juges du TC ne sont pas des magistrats professionnels, mais des commerçants élus par leurs pairs. Ces juges consulaires exercent leur fonction à titre gratuit pour un mandat de quatre ans renouvelable. La France se distingue en Europe par ce modèle unique, où des commerçants jugent des affaires commerciales, à l’exception des juridictions d’Alsace-Moselle, où le système d’échevinage associe un magistrat professionnel à des juges élus, en raison de la persistance du droit local d’origine allemande.
C) Le conseil de prud’hommes
Le conseil de prud’hommes, quant à lui, est chargé de trancher les litiges individuels nés de contrats de travail ou d’apprentissage. Sa compétence est limitée aux conflits individuels, excluant donc les conflits collectifs du travail, comme ceux liés aux grèves ou aux syndicats. Cette juridiction se distingue également par sa composition paritaire, reflétant une représentation équitable entre les salariés et les employeurs. Les juges qui la composent ne sont pas des magistrats professionnels, mais des représentants élus pour un mandat de cinq ans, moitié pour les salariés et moitié pour les employeurs.
L’une des règles fondamentales du conseil de prud’hommes est la parité entre les deux catégories de juges. Cependant, en cas de partage des voix lors d’un jugement, un juge du tribunal judiciaire intervient comme juge départiteur pour trancher le différend.
La procédure prud’homale comprend toujours deux étapes principales :
- La phase préalable de conciliation, qui se déroule devant le bureau de conciliation et d’orientation. Cette étape vise à trouver un accord amiable entre les parties.
- Si la conciliation échoue, le litige est porté devant le bureau de jugement, qui tranche définitivement l’affaire.
Ce modèle repose sur une volonté de favoriser une résolution pacifique et équitable des conflits entre salariés et employeurs, tout en garantissant une implication directe des acteurs du monde du travail dans le processus judiciaire.
D) les tribunaux paritaires des baux ruraux
En droit français, le tribunal paritaire des baux ruraux (TPBR) est la juridiction compétente pour régler les litiges relatifs aux exploitations agricoles, notamment ceux qui opposent les propriétaires de terres (bailleurs) et les exploitants agricoles (preneurs). Ce tribunal, bien qu’assis au sein du tribunal judiciaire, est régi de manière spécifique par le titre IX du livre IV du Code rural et de la pêche maritime.
Histoire
Le TPBR trouve son origine dans la loi du 4 septembre 1943, qui a d’abord mis en place des commissions paritaires de conciliation et de jugement pour les conflits agricoles. Ces premières instances ont évolué avec l’ordonnance du 4 décembre 1944, qui a instauré un double degré de juridiction : une commission de première instance et une commission paritaire d’arrondissement. Cette ordonnance confiait la présidence de ces commissions à des magistrats professionnels. Finalement, la réforme judiciaire du décret du 22 décembre 1958 a consolidé l’organisation actuelle : les juridictions d’appel spécifiques ont été supprimées, et les cours d’appel ordinaires sont désormais compétentes pour statuer sur les appels des décisions rendues par les TPBR.
Compétence
Le tribunal paritaire des baux ruraux est principalement compétent pour les litiges entre bailleurs et preneurs de biens agricoles, qu’il s’agisse de terres ou de bâtiments dédiés à l’exploitation agricole. Les affaires couramment traitées par cette juridiction incluent :
- Les conflits relatifs aux baux ruraux, tels que les conditions de mise à disposition des terres ;
- Les différends sur le montant du fermage (loyer agricole) ;
- Les questions portant sur la durée du bail d’une terre ou d’un bâtiment agricole ;
- Toute autre affaire liée à la gestion, à l’usage ou à la location de biens ruraux.
En fonction de la valeur du litige, le tribunal statue soit en premier et dernier ressort si le montant est inférieur à 5 000 €, soit en premier ressort avec possibilité d’appel pour les montants supérieurs.
Composition
La particularité du TPBR réside dans sa composition mixte, associant des juges professionnels et des juges non-professionnels issus du monde agricole. Le tribunal est ainsi composé de :
- Un juge professionnel du tribunal judiciaire, qui préside les audiences ;
- Quatre juges non-professionnels élus : deux représentants des bailleurs (propriétaires) et deux représentants des preneurs (exploitants agricoles). Ces juges citoyens doivent être âgés de plus de 26 ans et justifier de cinq ans d’expérience en tant que bailleur ou preneur.
Ce modèle d’élection permet de garantir une impartialité et une meilleure compréhension des réalités agricoles lors des délibérations, en raison de l’expérience pratique des juges non-professionnels, tout en assurant un encadrement judiciaire avec la présidence d’un magistrat de carrière.
Questions fréquentes sur les juridictions civiles de première instance
Quelles juridictions ont été supprimées par la loi de modernisation de la justice de 2016 ?
La loi de 2016 a supprimé plusieurs juridictions, dont les juridictions de proximité (au 1er juillet 2017), les tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) et les tribunaux d’incapacité (au 1er janvier 2019), ainsi que les tribunaux d’instance (au 1er janvier 2020). Leurs compétences ont été transférées aux tribunaux judiciaires.
Quel est le rôle du tribunal judiciaire (TJ) ?
Le tribunal judiciaire (TJ) est la juridiction de droit commun compétente pour la majorité des litiges civils depuis sa création en 2020. Il remplace le tribunal de grande instance (TGI) et le tribunal d’instance (TI), gérant les affaires civiles générales, notamment les litiges relatifs à l’état civil, aux successions, et aux accidents de la circulation.
Quelle est la compétence principale du tribunal de commerce (TC) ?
Le tribunal de commerce (TC) est compétent pour les litiges liés aux activités commerciales, qu’ils concernent des commerçants, des entreprises ou des artisans. Il traite aussi des redressements et liquidations judiciaires des entreprises.
Qu’est-ce qui distingue les juges du tribunal de commerce des autres juridictions ?
Les juges du tribunal de commerce ne sont pas des magistrats professionnels. Ce sont des commerçants élus par leurs pairs, qui exercent leur fonction à titre bénévole pour un mandat de quatre ans, renouvelable.
Quels litiges sont traités par le conseil de prud’hommes ?
Le conseil de prud’hommes est compétent pour résoudre les litiges individuels issus des contrats de travail ou d’apprentissage. Il ne traite pas les conflits collectifs du travail, comme les grèves ou les litiges syndicaux.
Comment fonctionne la procédure au conseil de prud’hommes ?
La procédure au conseil de prud’hommes commence par une phase de conciliation visant à trouver un accord entre les parties. Si cette conciliation échoue, l’affaire est portée devant le bureau de jugement qui tranche le litige.
Qu’est-ce que le tribunal paritaire des baux ruraux (TPBR) ?
Le tribunal paritaire des baux ruraux (TPBR) est compétent pour régler les conflits entre bailleurs et preneurs agricoles. Il statue principalement sur les litiges relatifs aux baux ruraux, tels que les conditions de location des terres agricoles ou le montant du fermage.