Les juridictions du Cameroun (organisation judiciaire)

L’organisation judiciaire du Cameroun

 

Depuis son indépendance, le Cameroun a adhéré au principe de la séparation des pouvoirs formulé par John Locke et Montesquieu pour prévenir les abus du pouvoir en confiant celui-ci à plusieurs organes chargés chacun d’une fonction différente et en mesure de se faire mutuellement contre poids.

Toutefois, ce n’est qu’en 1996 qu’un véritable pouvoir judiciaire sera affirmé par les articles 37 à 42 de la loi № 96/ 06 du 18 janvier modifiée par la loi du 14 Avril 2008 portant révision de la constitution du 02-06- 1972. D’après l’article 37de la loi précitée, le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour Suprême, les Cours d’Appel et les tribunaux (lesquels font partie de l’organisation judiciaire).

L’organisation judiciaire au Cameroun est très originale du fait non seulement de la coexistence du Droit Civil et de la Common Law, fruit de la colonisation Franco-Britanique, mais encore du fait de la coexistence de la Coutume et du droit écrit.

A – Les juridictions de droit commun

 

On entend par juridiction de droit commun celles qui ont le pouvoir de connaitre de toutes les affaires à l’exception de celles qui leur sont expressément retirées par un texte.

Du faite du pluralisme judiciaire existant au Cameroun, c’est-à-dire de la coexistence des juridictions de droit moderne appliquant le droit Civil et la Common Law et des juridictions traditionnelles appliquant la coutume, nous allons présenter d’une part les juridictions de droit moderne et d’autre part les juridictions traditionnelles.

Les juridictions de droit commun sont régies au Cameroun par la loi № 2006/015 du 29 décembre 2006, le décret № 69/DF/544 du 19 Décembre 1969 modifiée par le décret № 71/DF/607 du 3 décembre 1971 portant organisation des juridictions traditionnelles du Cameroun oriental, complété par la loi № 79/4 du 29 juin 1979.

  1. 1) Les juridictions de droit moderne de premier degré

Les juridictions de premier degré sont celles qui connaissent d’une affaire pour la première fois. Au Cameroun, il s’agit du TPI et du TGI en ce qui concerne les juridictions de droit moderne.

  1. Tribunal de première instance

Il est crée un tribunal de Première Instance par arrondissement. Toutefois, suivant les nécessités de service, le ressort dudit tribunal peut être étendu à plusieurs arrondissements. Sur le plan matériel, le tribunal de première Instance est compétent pour connaitre;

En matière pénale

. Des infractions qualifiées de délits ou de contraventions

. Des demandes de mise en liberté formées par toute personne détenue et poursuivre devantlui, pour une infraction de sa compétence ;

. Des crimes commis par les mineurs sans co-auteur ou complicemajeur.

En matière civile, commerciale ou sociale

. Desactionsenrecouvrement,parprocéduresimplifiéedescréancescivilesoucommerciales certaines, liquides et exigibles n’excédant pas 10.000.000FCFA

. Des différends dont le montant de la demande est inférieur ou égal à 10.000.000FCFA.

  1.  Tribunal de grande instance

Sa compétence territoriale couvre le ressort d’un département et peut être étendue à plusieurs départements en cas de nécessité.

Sur le plan matériel, le tribunal de grande instance est compétent pour connaître;

En matière pénale

. Des crimes et délits connexes

. Des demandes des mises en liberté formées par toute personne détenue et renvoyéedevantlui, pour des infractions de sa compétence ;

En matière civile, commerciale et sociale

Des actions et procédures relatives à l’état des personnes, à l’état civil, au mariage, au divorce, à la filiation, à l’adoption et aux successions ;

Des demandes de recouvrement, par procédure simplifiée, des créances civiles ou commerciales certaines, liquides et exigibles d’un montant supérieur à 10.000.000FCFA ainsi que des créances commerciales, certaines, liquides et exigibles quel qu’en soit le montant, lorsque l’engagement résulte d’un chèque, d’un billet à ordre ou d’une lettre de change.

En matière non administrative

De toute requête tendant à obtenir l’interdiction à toute personne ou autorité, d’accomplir un acte pour lequel elle est légalement incompétente;

Des requêtes tendant à obtenir l’accomplissement par toute personne ou autorité, d’un acte qu’elle est tenue d’accomplir en vertu de la loi.

L’article 18 de la loi № 2006/015 précitée attribue des compétences particulières au président du Tribunal de Grande Instance ainsi que du président du Tribunal de Première Instance.

2) Les juridictions de second degré : les cours d’appel et la Cour suprême

D’après l’article 19 de la loi № 2006/015, il est crée une Cour d’Appel par région. Toutefois, suivant les nécessites de service, le ressort de cette Cour peut comprendre plusieurs régions. Elle siège au chef lieu de la région.

D’après l’article 22 de la loi précitée, la Cour d’Appel est compétente pour connaitre; Desappelsinterjetésàl’encontredesdécisionsrenduesparlesjuridictionsautresquelaCour Suprême et la Cour d’Appel elle même ;

. Des appels formés contre les ordonnances du juge d’instruction;

. Du contentieux de l’exécution des décisions;

. De tout autre cas prévu par laloi.

D’après l’article 38 de la loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996 révisée, « la Cour Suprême est la plus haute juridiction de l’Etat en matière judiciaire, administrative et de jugement des comptes ».

La Cour Suprême trône au sommet de la pyramide judiciaire camerounaise et est constituée de trois chambres à savoir :

. La Chambre judiciaire

. La chambre administrative

. La chambre des comptes

La Cour Suprême est l’organe de contrôle du système judiciaire Camerounaise. Son ressort territorial couvre toute la République du Cameroun.

Sur le plan de la compétence matérielle, chacune des Chambres de la Cour Suprême a des attributions propres.

  1. Compétence de la Chambre judiciaire

D’après l’article 39 de la loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996 révisée, « la Chambre judiciaire statue souverainement sur:

. Les recours en cassation admis par la loi contre les décisions rendues en dernier ressort parles cours et les tribunaux.

. Lesdécisionsdesjuridictionsinférieuresdel’ordrejudiciairedevenuesdéfinitivesdanslescas où l’application du droit est en cause. – Toute matière qui lui est expressément attribuée par laloi.

  1. Compétence de la Cour Suprême en matièreadministrative

D’après l’article 40 de la loi constitutionnelle précitée : « la Chambre administrative connaît de l’ensemble du contentieux administratif de l’Etat et des autres collectivités publiques.

Elle connaît en appel du contentieux des élections régionales et municipales. Elle statue souverainement sur les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions inférieures en matière de contentieux administratif.

Elle connaît de tout autre litige qui lui est expressément attribué par la loi.

  1. La Compétence de la Chambre des Comptes

D’après l’article 41 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996 révisée : « La Chambre des Comptes est compétente pour contrôler et statuer sur les comptes publics et ceux des entreprises publiques et para- publiques. Elle statue souverainement sur les décisions rendues en premier et dernier ressort par les juridictions inférieures des comptes. Elle connaît de toute autre matière qui lui est expressément attribuée par la loi »

La Chambre des Comptes a une importance capitale dans la lutte contre le détournement des derniers publics à travers ses missions de contrôle.

Les juridictions d’exception que sont le Tribunal Militaire, la Cour de Sûreté de l’état, la haute cour de justice et la Commission Provinciale du contentieux de la Prévoyance Sociale feront l’objet d’un travail ultérieur.

 

B) Les juridictions d’exception

Les juridictions d’exception sont celles qui ne peuvent statuer que dans les matières pour lesquelles un texte particulier leur donne expressément compétence. (Le tribunal militaire, la haute cour de justice, lacour des suretés de l’Etat, le tribunal criminel spécial et la Commission régionale du contentieux de la prévoyance sociale.