Le jusnaturalisme et le positivisme juridique

Le jusnaturalisme et le positivisme juridique

Ce qui va nous intéresser maintenant c’est le XIXème siècle. On ne parle pas d’un rejet du droit naturel mais ces doctrines ouvrent le chemin du positivisme (positivisme juridique) mais il y a toujours dans les théories du contrat social une dualité entre droit positif et droit naturel. Seulement, ce nouveau droit naturel n’est plus issu des choses, du cosmos mais de la raison humaine, c’est un droit rationnel. Ce droit naturel est abstrait. Donc on devrait comme Kant l’appeler droit rationnel. Il n’est pas réel mais idéalisé, il est décrété. Issu du cogito humain : je pense donc je suis. Ce droit naturel il est pensé dans le secret des études, des philosophes, il n’est pas expérimenté. En cela on peut dire qu’il est bel et bien décrété. Il est donc volontariste. De sorte qu’il n’y aura aucune difficulté à observer un glissement inéducable, fatal, logique du jusnaturaliste moderne vers le positivisme classique. Il y a un lien tout à fait naturel entre ces 2 termes. Si il est aisé d’observer ce glissement, il est tout à fait aisé d’observer au XIXème siècle (en pleine période positiviste, légaliste) une réminiscence, une sorte de refus du naturalisme. Autrement dit, il va y avoir au XIXème siècle une sorte de religion de la loi, de réification de la loi.

Section 1 : le glissement du jusnaturalisme moderne vers le positivisme juridique

Le droit naturel moderne est un droit naturalisé, abstrait qui se détache des choses pour se loger dans la raison de sujets. Il est le fruit de la déconstruction nominaliste de cette dissolution de ces universaux que l’on considère comme purement artificiel (famille, cité, état). Ce droit naturel n’a plus que pour seul assise l’individu. Ce droit à donc deux caractéristiques : Universel et Individuel.

Universel: comme il n’est plus logé dans la nature des choses, et que cette nature des choses et divers et varié. La conclusion de ce syllogisme c’est en se détachant de cela le droit naturel gagne en universalité. Ce qu’il perd en richesse, il le gagne en universalité puisqu’il se détache de ce qui n’est pas universel, pluriel, contingent, luxuriant. Autrement dit, il faut avoir 3 plans géométriques à l’esprit : le plan individuel (avant il y avait seulement la communauté), il y a le plan communautaire (les groupes) et puis il y a le plan universel (inconcevable chez les anciens qui restaient attachés au seul plan communautaire). Dès l’instant où la pensée juridique et philosophique a fait sauter le plan communautaire il ne reste plus que les 2 autres. L’individu mis à nu face à l’univers. C’est ce qui s’est passé dans la DDHC de 1789.

Mais l’universalisme est né de la déconstruction des communautés mais à l’époque au XVIIIème siècle, au lendemain des théories du contrat social, il y avait un conflit entre 2 sensibilités qui s’opposaient sur cette question de l’universalisme :

  • Les rationalistes avec la France cad les hommes de la révolution.
  • Les romantiques cad ceux qui attribuaient à l’esprit d’un peuple, à l’âme d’une culture une réalité qu’elle n’a pas. Réalité vis-à-vis de laquelle la DDHC ou le code civil étaient incomptables. C’est la vision historique. HERDER est l’inventeur du concept de l’esprit du peuple. Il voulait qualifier le particularisme de la culture allemande. L’Allemagne a un génie culturel qui fait que lui imposer des principes issus d’une autre culture n’est pas bien. Il a écrit un contre texte à celui de Kant (il explique notamment, que ce n’est pas le cogito qui énonce des principes qui n’ont rien d’universel ce qui fabrique les principes c’est l’histoire, la culture, le droit. Savigny était contre la greffe du code civil en Allemagne en vertu du principe de l’esprit du peuple.

Le romantisme allemand a trouvé son apogée dans SAVIGNY c’est un anti universalisme, il disait que le droit c’est comme la cuisine, la langue, le droit c’est spécifique à un peuple, c’est ancré dans l’histoire, dans un génie culturel. Le droit est historique. Ca c’est une réminiscence du droit naturel ancien. Du coup Napoléon Bonaparte à utiliser la force pour braver cette résistance allemande. Donc ce sont les conquêtes de Napoléon qui a permis au Code Civil de se répandre dans toute l’Europe continental. Les rationalistes français ne le sont donc pas tant que ça puisqu’on a du utiliser la force. Ce conflit entre universalisme et communautarisme on le retrouve en Amérique du Nord (Canada et un peu des USA) entre les partisans du Libéralisme et du communautariens (accorde aux groupes, aux communautés une importance).

Issu du cogito le droit naturel est aussi d’essence volontariste (c’est ça qui fait son paradoxe), il est universel mais artificiel. Dans la mesure où il est détaché de l’ordre naturel des choses : il est artificiel. Autrement dit, c’est un coup de force l’universalisme théorique. Prétendre à l’universalité des valeurs c’est aller contre la nature des choses. C’est d’autant plus contre nature que puisque ce droit naturel se détache du droit des choses et dissout la communauté, il n’a pour seul siège que l’individu or les sujets sont tous différents les uns des autres. Le risque de détacher le droit naturel de l’ordre des choses, le risque serait de le livrer à la subjectivité de chacun. Le risque c’est d’exposer l’individu au chaos. C’est le risque qui a été mis en index par les contre révolutionnaire à la révolution. Le résultat c’est que l’individu est livrer à lui-même et il s’en suit un choc des subjectivités et donc l’anarchie il faut donc un outil : la loi. Elle va jouer le rôle d’instrument artificiel destinée à combler le vide qu’à engendrer la déconstruction des universaux. Et donc le rôle que tenait le rôle naturel ancien, sera tenu par la loi, d’où le volontarisme.

A tel point que certains ont pu dire que la révolution française serait nationale, nationaliste et particulariste. Il s’agit d’amener la loi comme objectivation du droit. On va dire, c’est la volonté d’un état, c’est une volonté générale particulière, la volonté nationale à tel point qu’on va rentrer dans l’air des états nations. Il va ya voir une nationalisation du droit et donc un risque de compromettre le projet universaliste. Et bien non, même si la loi est la loi d’un état, elle obéit à un même état (état jacobin), la loi n’est pas le fruit d’un quelconque esprit du peuple, c’est une loi artificiel dont on peut exporter la logique dans n’importe quel état. De même, la liberté cela n’a rien avoir avec les libertés anglaises (aristocratiques : ordre naturel des choses). Des contres révolutionnaires vont vanter les mérites du système anglo-saxon.

On observe une tension dans la DDHC cde 1789 entre l’universalisme des DDH et le volontarisme. Dans la DDHC il y a un renvoi systématique à la loi pour arbitrer les conflits entre les droits naturels. Cad que la déclaration proclame le caractère inaliénable et sacré des DDH (liberté, propriété, sureté et la résistance à l’oppression). Mais en même temps, elle renvoie à la loi le soin de concilier ces droits entre eux et avec l’intérêt général. En effet, dans les articles 7 et 8 de la Déclaration (légalité des délits et des peines) cet article dit que seule la loi peut incriminer certaines actions donc la loi doit dire ce qui est nuisible à la société. IL y a des tensions, car il y a des contradictoires, l’article 7 dit que la loi n’a le droit que de réprimer ce qui est nuisible à la société. Il y aurait donc une notion de nuisible qui s’imposerait à la loi (il y aurait comme un naturalisme). Mais cette nature des choses n’est rien s’il n’y a pas la loi.

Il y a un autre article qui révèle cette tension. Article 17 de la DDHC : droit de propriété. Cet article dispose que le droit de propriété est un droit inaliénable et sacré, nul ne peut en être privé si ce n’est lorsque la nécessité publique légalement constatée l’exige évidement. Moyennant une justice et préalable indemnité. Ici, il y a un mélange des 2 conceptions. L’universalisme, le naturalisme du droit de propriété serait là avant la loi. Et le légalisme on ne peut y porter atteinte qu’en cas de nécessité publique légalement constatée.

De manière générale, il faut considérer que c’est le légalisme qui prime.

L’Ostracisme dont les juges ont été victime traduit bien ce volontarisme, c’est la loi et non les juges qui dont ce que sont les droits.

Section 2 : La confusion du droit et de la loi (réminiscence du jusnaturalisme)

En dévitalisant les droits naturels subjectifs l’universalisme livre l’individu à l’autorité de l’état. Ce droit appelle, le recours à la loi. Mais s’il y a des germe du volontarisme dans les droit naturel moderne, en même temps, la période qui va suivre le XIXème, va voir renaitre la rhétorique du droit naturel.

Sous la révolution, la loi est érigée au rang de norme suprême et la loi est soustraite au regard du juge. Il va falloir créer un juge administratif et plus tard le juge constitutionnel.

Il y a cette dualité de juridiction mais est institué le référé législatif cad que dès qu’il y a pb d’interprétation de la loi, le juge et en particulier le tribunal de cassation ne peut pas régler la question de l’interprétation et doit suspendre le procès et faire un référé législatif. C’est ainsi que les professeurs de droit civil organise leur cour, de façon à ce contenter de lire les lois. Demolongue, « je n’enseigne pas le code civil, j’enseigne le code napoléon ». Toujours dans ce discours légaliste se développe toute une théorie de l’interprétation : elle est mécanisme, le juge est la bouche de la loi. Telle est la phrase de Montesquieu (mais qu’il avait prononcé dans un autre état d’esprit).

Au XVIIIème, Montesquieu qui était un juge du parlement à Bordeaux n’avait pas d’intérêt à prononcer ces paroles, cela signifiait que le juge n’émet pas une volonté mais incarne une loi naturelle. C’est la vision anglo-saxonne, le juge n’est pas une volonté c’est un oracle. Ce que Montesquieu cherchait à faire, c’était à justifier le pouvoir des juges pour le faire passer pour un non pouvoir. On va donc déformer la pensée de Montesquieu pour la mettre au profit du législateur et non pas des juges. Les révolutionnaires échaudés par la résistance que les juges ont fait sous l’ancien régime, ils vont vouloir reléguer le juge dans l’ombre du législateur et dire que le juge doit être la bouche qui prononce les paroles de la loi. Les révolutionnaires étaient conscient que le juge était un homme comme un autre et que sa raison n’était pas du tout divine, c’est une raison naturel que tout le monde a. et donc dans la mesure ou les droits naturels sont abstraits il faut confier au législateur de les définir et non pas au juge. On était sceptique quant à la place du juge.

Tout au long du XIXème siècle il y a cette sanctuarisation de la loi, on veut soustraire la loi au travail de la fonction d’interprétation des juges que l’on sait subjective dont on dénit la neutralité. Pour mieux légitimer cette sanctuarisation de la loi, les juristes ne vont pas se contenter de dire que la loi est l’expression d‘une majorité numérique et que donc le juge ne peut pas lui opposer une interprétation qui serait elle aussi subjective. Ils vont aller jusqu’à faire passer la loi pour l’expression de la vérité, de la rationalité du législateur (c’est en fait le droit naturel). On cherche a justifier la loi par la raison, par la rationalité du législateur.

La loi de l’époque, le code civil c’est le reflet d’une classe contre une autre. La bourgeoisie libérale à triompher, elle a vaincue l’aristocratie sous la révolution française. Et elle voudra conserver cette victoire contre le prolétariat. IL faut préserver la loi contre deux dangers :

  • L’aristocratie (que l’on a exclu du système de pouvoir) danger qui appartient au passé
  • Le prolétariat, c’est le danger à venir, nous somme en 1848 il y a déjà Marx.

Contre cette transformation de la société, la bourgeoisie, tente de sauvé le code civil. De quelle manière ? en le faisant passé pour la vérité d’où le dévoiement de ce relativisme (de l’essentialisme). En effet, qu’est-ce que c’est le code civil ? (3 principes) :

  • Le droit de propriété
  • L’autonomie de la volonté
  • La responsabilité civile

Ces 3 principes ne servent que les intérêts de la bourgeoisie, droit de propriété (il faut de l’argent) « droit d’ignorait la misère d’autrui », autonomie de la volonté, c’est la liberté contractuelle dont profite le fort contre le faible qui ne peut pas négocie et enfin la responsabilité civile : elle ne fonctionne qu’à l’encontre de l’individu libre et conscient. Ce n’est pas une responsabilité destinée à mettre à la charge du patron les risques liés au patron. Le patron ne répond des dangers auxquels sont confrontés les ouvriers.

Le droit naturel c’est un instrument rhétorique que l’on se sert afin d’éliminer le conflit entre le droit naturel et le droit positif.