L’acquisition de la propriété par transfert

Acquisition de la propriété par transfert

Quelques mots sur l’évolution historique :

En droit romain la vente était seulement génératrice des obligations autrement dit le contrat de vente était insuffisant pour transférer la propriété, il fallait en outre accomplir un rite, une formalité publique. Ce fut un rite judiciaire : «in jure sessio», les contractants présentaient la chose céder à un magistrat et le magistrat déclarait l’acquéreur propriétaire. Puis, ce rite devint extrajudiciaire avec la «mancipatio» pour les biens immeubles et puis ces rites est devenu la tradition les «res mancipatio».

Quelques observations sur le droit comparé :

Cette conception romaine se trouve encore dans le droit allemand et en droit suisse, la transmission est l’acquisition consécutive de la propriété découle :

pour les meubles de la tradition c’est à dire de livraison

pour les immeubles elle résulte d’un acte de dessaisissement qui est distinct du contrat de vente lui même lié à une inscription au livre foncier.

La propriété passe d’un patrimoine de l’aliénateur dans le patrimoine de l’acquéreur qui est l’ayant cause du 1er. Et elle passe d’un patrimoine dans l’autre à l’exécution d’un contrat. Le transfert de propriété n’a pas besoin d’être manifesté car aucune forme particulière ne l’annonce (l’article 1138 du Code Civil). Il précise que l’obligation de livrer la chose rend le créancier propriétaire ; on retrouve la même idée dans l’article 938 pour la donation et dans l’article 1589 pour la vente, c’est ainsi que le transfert de propriété est différent de la prise de possession dans notre car elle est un fait public.

  • 1 : Transfert de propriété inter partes

A) Le principe

Le principe du consensualisme est une conséquence car la propriété se transmet selon consensus (articles 1138 et 1583 du Code Civil), aucune formalité n’est requise certes un acte notarié pour les biens immeubles sera nécessaire mais uniquement pour les formalités de publicité foncière. Aucune formalité n’est requise. Un écrit est utile mais «ad probationem» mais pas ad voilidatem.

Autrement dit l’aliénateur n’est pas débiteur d’une obligation de donner, donc de transférer la propriété, car la propriété est transférée avec la conclusion du contrat.

L’attribution des risques et liée à la propriété, conséquence la perte dans le principe ou la détérioration de la chose est supporté par le propriétaire (adage : res perit domino).

B) Les exceptions

Le transfert de propriété peut n’être pas concomitant à la formation du contrat, il peut être retardé pour plusieurs raisons :

En raison de la nature de la chose dans un certain nombre d’hypothèse, tel est le cas des choses futures pour lesquelles le transfert de propriété n’intervient que quand la chose est achevée. En raison des choses de genre car le transfert de propriété n’intervient qu’avec l’individualisation de la chose.

En raison le transfert de propriété des instruments financiers n’a lieu qu’avec leur inscription sur le compte du cessionnaire disposition de l’art L 432-2 Code monétaire et financier.

En raison de la volonté des parties.

Le transfert peut être retardé, les parties conviennent que le transfert interviendra à la livraison ou après paiement complet du prix ou en matière immobilière transfert au jour du passage devant notaire (très fréquent dans la vente de marchandise). Lorsque les parties sont convenus du transfert de la chose, l’accord des volontés sur la chose et sur le prix n’en constituent pas moins une vente parfaite et définitive. Le transfert de propriété n’est pas un effet nécessairement instantané de la vente.

Clause de réserve de propriété : clause extrêmement utilisée dans les ventes de marchandises et de matériaux, elle est fréquente car elle fournit au vendeur une garantie importante en faisant jouer à la propriété un rôle d’une sûreté, car tant que le vendeur n’est pas payé il reste propriétaire, dans le cas d’une procédure collective contre l’acheteur. En revanche une limite à l’efficacité de ces clauses avec l’article 2279 alinéa 1er ancien / 2276 nouveau du Code Civil : Si un tiers vend a B mais que C possède la chose de bonne foi l’article 2279 faisant obstacle à la clause pour la raison que A ne pourra pas revendiquer contre C s’il est de bonne foi.

  • 2 : Opposabilité du contrat translatif de propriété au tiers

Le transfert de propriété à l’égard des tiers est un fait juridique qu’ils ignorent souvent au moment où il se produit, d’où la nécessité de porter ce fait à la connaissance des tiers et les modalités sont différentes selon qu’il s’agisse d’une chose meuble ou immeuble.

A) Transfert du droit de propriété portant sur un immeuble

1) La publicité foncière

Elle est réglementée par un décret du 4 janvier 1955 et par un décret du 23 juin 1998 ; ce dernier est venu adapter les règles de publicité à l’informatisation de l’administration. Tous les actes translatifs de droit réel immobilier ainsi que les actes constitutifs de tels droits doivent être publiés sur un registre tenu par la conservation de l’hypothèque.

Condition requise pour la publication :

Authenticité de l’acte : l’acte de vente en matière immobilière est passé ou réitéré nécessairement devant notaire.

Les formalités sont compliquées ; et il faut quelqu’un d’extrêmement spécialisé.

Effet relatif de la publicité foncière :

Rien à voir avec effet relatif des contrats (article 1165 du Code Civil).

Aucune publication ne peut être effectuée si le titre de propriété de l’aliénateur (celui qui aliène) n’a pas été précédemment publié.

2) Les sanctions du défaut de publication

La sanction consiste dans l’inopposabilité au tiers de l’acte translatif non publié.

Cela étant, tous les tiers ne peuvent pas se prévaloir du défaut de publicité. Peuvent s’en prévaloir seulement les acquéreurs qui sur un même immeuble ont acquis du même auteur des droits concurrents en vertu d’actes soumis à la même obligation de publicité et publiée (article 30 al 1er du décret du 4 janvier 1955).

Exemple : A vend un immeuble à B le 1er janvier 2006 et l’acte n’est pas publié. Trois mois plus tard, A vend le même immeuble à C et l’acte est publié. => La première acquisition de l’immeuble par B est inopposable à C car elle n’a pas été publiée.

Cet effet qui découle d’un défaut de publicité est écarté par la jurisprudence si le deuxième acquéreur est fautif. La jurisprudence considère que le fait d’acquérir un immeuble en ayant connaissance d’une précédente aliénation par le même vendeur constitue une faute. Si C a connaissance de la première acquisition non publiée, il est en faute. Le préjudice sera réparée en nature, cela voudra dire que la publicité effectuée par le deuxième acquéreur se trouvera paralysée (30 janvier 1974, cour de cassation).

Situation plus compliquée :

C fautif car il n’ignore pas que l’immeuble a déjà été vendu a B, C revend l’immeuble à D. D fait procédé à la publication de son titre d’acquisition. D, sous acquéreur de bonne foi est étranger à la faute de son auteur. Il ne peut par conséquent être tenu pour responsable. D n’a pas à réparer un préjudice subit par le premier acquéreur B.

L’acquisition de l’immeuble par le sous acquéreur de bonne foi est donc tout à fait opposable au premier acquéreur : —> Civ 3ème, 11 juin 1992

Le préjudice subsiste pour B, le juge ne pourra pas prononcer l’inopposabilité de la publication de la seconde acquisition à l’égard du premier. Plus de réparation en nature possible.

La réparation va donc s’effectuer par équivalent sous forme de dommages et intérêts. C’est le second acquéreur devra indemniser le premier.

B)Le transfert du droit de propriété portant sur un meuble

Les règles de la publicité foncière ne sont pas transposables aux meubles.

Pourtant les tiers ont aussi besoin d’être informés. Seule la possession va pouvoir ici jouer le rôle de publicité.

L’article 1141 du Code civil règle le conflit possible entre les deux droits concurrents sur un même meuble.

Si la chose qu’on s’est obligé de donner ou livrer à 2 personnes successivement est restée purement mobilière, celle des 2 personnes qui a été mise en possession réelle est préférée et en demeure propriétaire, encore que son titre soit postérieur en date, pourvu que la mise en possession soit de bonne foi.

L’acquisition efficace est celle qui a été suivie par une tradition réelle, c’est à dire une remise effective du bien meuble dans les mains de l’acquéreur et à condition qu’elle soit de bonne foi. Ce n’est pas celle consentie en premier.