L’autorité de la chose décidée
Hauriou : actes administratifs doivent avoir ce caractère (comme décisions de justice). 3 éléments :
– Décision s’impose aux destinataires dès qu’elle est rendue publique, jusqu’à ce que le juge l’ait suspendue ou annulée. Obligation : destinataires, auteur (opposable à l’administration).
– Possibilité de contestation : tout acte administratif faisant grief est susceptible de recours et donc d’annulation. Délai court (2 mois). Après, on peut toujours invoquer illégalité par exception
– Hiérarchie des normes : actes administratifs = normes subordonnées (constitution, lois, traités) + hiérarchie au sein de ces actes. Il faut tenir compte de la nature de l’acte et de son auteur.
Sous-section 1 : Les conditions de l’autorité de la chose décidée
1) Élaboration des décisions administratives :
Façon dont l’autorité doit décider –> légalité externe.
A. La compétence :
Textes disent que telle décision administrative doit être prise par telle autorité. Normalement un seul titulaire –> mécanismes pour permettre agencement et cohérence des décisions.
1. Les composantes de la compétence :
3 éléments (élément matériel est primordial).
ELEMENT MATERIEL
–> Domaine d’action et pouvoirs attribués dans ce domaine. Exemple typique : débordement d’une autorité sur la compétence d’une autre (=incompétence matérielle). Parfois cela arrive car l’autorité n’est pas allée au bout de ses pouvoirs (= incompétence négative) –> juge administratif préfère dire ‘erreur de droit’.
ELEMENT TERRITORIAL
Les compétences se superposent sur le territoire.
ELEMENT TEMPOREL
Influe parfois sur la compétence :
– Ordonnance : gouvernement peut agir dans domaine législatif pendant période déterminée.
– Mouvement préfectoral : préfet doit être formellement installé avant de pouvoir agir en tant que tel.
Ces 2 cas ≠ exercice temporel de la compétence : autorité a la compétence, mais on lui demande de l’exercer dans un certain délai.
Ex : temps donné par législateur au gouvernement pour prendre décrets d’application de la loi. Législateur ne donne pas la compétence, il ordonne délai d’exécution.
–> Après délai, actes ne sont pas entachés d’incompétence.
2. Les assouplissements de la compétence :
Titulaire peut être empêché –> mécanismes de remplacement (suppléance ou intérim).
Circonstances exceptionnelles provoquant absence durable. Jurisprudence : de simples particuliers peuvent se substituer.
Ex : fonctionnaires de fait.
Autorité ayant beaucoup de compétences (ministre) peut déléguer.
a. Conditions de la délégation :
Exigence d’un texte expresse prévoyant la possibilité de délégation. La délégation doit être claire et précise :
– A qui on délègue
– Ce qu’on délègue
– Délégation ≠ abandon complet de la compétence
Délégation = acte réglementaire (même avec effets personnels) –> mesure d’organisation du service public. Délégation doit être publiée.
DELEGATION DE POUVOIR
Transfère compétence de décision dans un domaine –> titulaire ne peut plus intervenir pendant délégation.
Délégation de pouvoir est consentie d’autorité à autorité (≠ personnes physiques) –> pas affectée par changement de la personne en fonction.
DELEGATION DE SIGNATURE
Simple autorisation de signer au nom du titulaire (acte toujours pris à son nom). Transfert de l’opération physique de signature. Titulaire garde compétence.
==> Délégation consentie de personne à personne : changement de personne en fonction –> nouvelle délégation doit être faite.
Décret de 2005 : a simplifié système de délégation de signature.
B. La procédure :
Souvent lourdeur procédurale, pour que l’autorité soit bien informée.
Inconvénient : alourdissement des processus, longueur, danger psychologique.
Consiste en des règles de consultation et contradiction.
– 1. Les obligations de consultation :
Titulaire du pouvoir doit solliciter l’avis de certains instances –> avis.
– 2. La contradiction :
Permet de recueillir un avis sur un projet de décision : ouvre une vraie discussion. On permet aux personnes concernées par décision future d’émettre des observations –> dialogue contradictoire.
Principe du contradictoire –> PFRLR à valeur constitutionnelle, lié aux droits de la défense –> quand prise de sanction contre un individu.
Lois exigent respect du principe du contradictoire de l’administration :
– Loi 22 avril 1905 : fonctionnaire doit avoir accès à son dossier pour connaitre le contenu, et formuler observations. Juge administratif a élargi :
Ø Cela vaut pour « toutes les mesures prises en considération de la personne »
Ø Cela ne vaut pas que pour les agents publics (plus rare)
– Loi 11 juillet 1979 : décision individuelle doit être motivée.
– Loi 12 avril 2000 : procédure de contradictoire avant prise de décision individuelle.
Contradiction = connaissance de la décision prévue + délai pour réflexion + formulation possible d’observations + assistance d’un avocat en cas d’audition.
C. La forme :
Droit administratif pas formaliste. Intérêt de l’écrit : pérennité, preuve.
Peu de règles de forme, rarement obligations. Exigences à peine de nullité :
– Signature
– Contreseing prévu par un texte
– Exigence de motivation (loi de 1979) pour :
Ø Décisions défavorables : 7 hypothèses mentionnées dans la loi
Ø Décisions individuelles dérogeant aux règles générales fixées par loi/règlement
≠ Décisions stéréotypées.
Exception : urgence, décision implicite.
Délai : loi prévoit motivation a posteriori (1mois).
2) Entrée en vigueur des décisions administratives :
Entrée en vigueur : quand l’acte déploie l’intégralité de ses effets de droit. 3 conditions :
– Existence
– Opposabilité
– Applicabilité
A. Existence de la décision :
Existence avérée à compter de la signature (≠ publication)
Existence déploie effets de droit :
– Légalité appréciée au jour de la signature (≠ plein contentieux –> jour du jugement).
– Jour de la signature ==> possibilité de REP (même sans publication)
– Signature –> acte est parfait. Actes postérieurs n’auront pas d’impact sur sa légalité.
Acte individuel –> effets déployés –> bénéficiaire peut opposer ses droits à l’administration (CE section 19 décembre 1952 DEMOISELLE MATTEI)
– Retrait de l’acte : délai de 4mois à compter de la signature.
B. Opposabilité de la décision :
Acte administratif pas rendu public ≠ opposable aux administrés –> exigence de publicité.
1. Opposabilité, conséquence de la publicité :
Principe : il faut que l’acte soit publié pour être opposable aux particuliers. 2 nuances :
– Jurisprudence Mattei –> administré tire ses droits d’un acte individuel dès la signature
– Décisions implicites –> pas de publication
Jurisprudence –> PGD = publication dans délai raisonnable –> CE 12 décembre 2003 SYNDICAT DES COMMISSAIRES ET HAUTS FONCTIONNAIRES DE LA POLICE NATIONALE.
Publicité ≠ conséquence sur légalité.
Problème si publication est postérieure à date d’entrée en vigueur prévue (rétroactivité de l’entrée en vigueur est illégale).
3 remarques :
– Acte réglementaire pas publié –> on peut quand même prendre mesures réglementaires d’application (≠ décision individuelle d’application)
– Publicité déclenche délai de recours.
Exception : théorie de la connaissance acquise.
– Publicité ne déclenche pas toujours opposabilité.
Ex : actes importants des collectivités –> opposabilité = publicité + transmission au préfet pour examen de légalité.
2. Modalités de la publicité :
a. Publicité des actes réglementaires :
Objet général –> publication ou voie d’affichage. Actes nationaux –> JO ou Bulletin Officiel.
Région/département/commune<3500habitants –> insertion dans recueil des actes administratifs
Petite commune –> affichage.
Parfois, mesures de publicité supplémentaires quand nécessaires.
Juge administratif peut toujours vérifier la suffisance de la publicité. Exigence de connaissance complète (problème des extraits)
b. Publicité des actes non réglementaires :
Acte individuel –> notification (publicité supplémentaire parfois)
Décision d’espèce –> effets impersonnels –> publication, affichage.
3. Mécanisme de l’accès aux documents administratifs :
Loi 17 juillet 1978 : droit de toute personne à l’information –> liberté d’accès aux documents administratifs.
a) Les documents administratifs :
Ce sont tous les éléments que l’administration conserve dans l’élaboration d’une décision (rapport, étude, dossier, courrier, statistiques…). Etat, EP, collectivités, personnes privées gérant SP.
Limites :
– Ne concerne que les documents achevés
– Actes de droit privé ≠ documents administratifs
– Actes des assemblées parlementaires ≠ documents administratifs
3 catégories de documents administratifs :
– Documents communicables à quiconque (catégorie de principe)
– Documents pas communicables du tout (en général couverts par un secret)
– Documents communicables uniquement à l’intéressé.
b) La procédure :
Principe : consultation sur place (et copie).
AAI : Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) :
– Intéressé demande communication d’un document
– Si administration refuse, 2 mois pour saisir la CADA
– CADA donne avis, administration a 2 mois pour répondre :
Ø Majorité des cas, administration s’incline
Ø Si administration persiste dans son choix, possibilité de REP
C. Applicabilité de la décision
Publicité assure opposabilité, pas entrée en vigueur. La plupart du temps, ça suffit pour applicabilité.
Auteur de l’acte peut définir modalités d’application temporelle de la décision –> date postérieure à publicité ==> acte opposable après mesure de publicité, et applicable après entrée en vigueur.
CE ass. 24 mars 2006 KPMG : administration a parfois obligation de prévoir applicabilité différée pour sécurité juridique.
Acte réglementaire nécessitant mesures réglementaires d’application –> applicable quand ces mesures sont prises, signées et publiées.
CE ass. 25 juin 1948 SOCIETE DU JOURNAL L’AURORE : administration ne peut pas choisir comme date d’entrée en vigueur une date antérieure à la publicité (PGD)
Sous-section 2 : Les effets nuancés de l’autorité de la chose décidée
1) Les garanties :
TC 2 décembre 1902 SOCIETE IMMOBILIERE DE SAINT JUST : exécution forcée ou d’office est possible dans 3 cas : cas légalement autorisés, urgence, aucune autre voie possible.
Sinon, possibilités de sanctions, notamment pénales –> Code pénal « sera puni d’amende le manquement aux règlements de police ».
Sanctions administratives : possibles pour certaines administrations –> certaines AAI (Autorité de la Concurrence, des Marchés Financiers) prononcent amendes / sanctions professionnelles.
–> Sanctions soumises aux grands principes du procès pénal (droits de la défense, contradictoire…)
2) La modulation des effets de la chose décidée :
Autorité de la chose décidée ≈ autorité de la chose jugée. Auteur peut moduler effets dans le temps.
A. La rétroactivité :
1. Le principe de non-rétroactivité :
Article 2 code civil : « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif ». C’est aussi un PGD (jurisprudence Journal l’Aurore) pour actes réglementaires comme non réglementaires.
Principe fondamental pour sécurité juridique.
Quand applicabilité est antérieure à publicité –> juge administratif peut annuler portée rétroactive de l’acte sans l’annuler lui.
Problème quand situation préexiste à entrée en vigueur d’un nouvel acte et persiste :
– Situation définitivement constituée : nouvelle règle de droit pas applicable
– Situation pas encore constituée : on lui applique nouvelle règle.
Ex1 : changement de modalités pour le permis de conduire. Ceux qui l’ont déjà (situation constituée) n’auront pas à le repasser
Ex2 : changement de statut des fonctionnaires. Ceux qui le sont (situation pas définitivement constituée) seront touchés par changements.
2. Les dérogations au principe :
4 dérogations :
– Quand la loi le prévoit
– Exigence pragmatique pour combler vide juridique. Ex : annulation d’une révocation –> octroi des salaires quand il aurait du être fonctionnaire
– Actes de certaines administrations soumis à approbation d’une autorité de tutelle –> approbation a effet rétroactif au moment de la signature de l’acte subordonné
– Retrait d’actes administratifs est rétroactif
B. La disparition des effets des décisions administratives :
Décision de justice définitive = intangible. Pour les décisions administratives, plus de nuances. Autorités administratives peuvent parfois remettre en cause des décisions prises. Cela varie selon droits créés.
1. Les droits créés :
Deux types de droit :
– Droits aux effets de la décision : cela vaut pour tous les actes (réglementaire ou non)
– Droit au maintien des effets de la décision : ne vaut que pour les actes individuels. Ce droit est variable :
Ø Droit passé et futur : droit le plus protecteur
Ø Droit seulement passé : cela concerne les actes créateurs de droits acquis
Acte réglementaire et décision d’espèce –> aucun droit au maintien des effets.
Décision individuelle : droit au maintien des effets (pas toutes).
Actes individuels ne créant pas de droit au maintien :
– Acte inexistant
– Acte obtenu par fraude
– Acte délivrant autorisation de police
– Autorisation d’utilisation du domaine public
– Acte assorti d’une condition résolutoire/extinctive
– Décision récognitive
– Nomination à un emploi à la discrétion du gouvernement
– Liquidation de créance
2. L’abrogation :
Abrogation : disparition d’une décision uniquement pour le futur.
Peut-être parfois implicite : apparition d’une nouvelle est interprétée comme abrogeant l’ancienne.
a) L’abrogation des actes réglementaires :
Acte réglementaire –> pas de droit au maintien des effets –> administration libre de le modifier.
==> Abrogation spontanée totalement libre.
CE section 10 janvier 1930 DESPUJOL : obligation d’abroger un acte réglementaire si une illégalité est apparue après édiction.
CE ass. 3 février 1989 COMPAGNIE ALITALIA : obligation d’abroger un acte même pour une illégalité ab initio.
CE section 14 novembre 1958 PONARD : administration doit s’abstenir d’appliquer un acte réglementaire dès qu’elle a connaissance de son illégalité.
b) L’abrogation des actes non réglementaires :
Question des droits créés par l’acte –> plus il y en a, moins on admet leur cessation. Actes non réglementaires peuvent créer droit au maintien.
– Actes non réglementaires non créateurs de droits acquis : abrogation libre. Ex : décision d’espèce et acte individuel non créateur de droit
MAIS : si l’acte est illégal –> obligation d’abrogationsi l’illégalité est postérieure à l’édiction de l’acte (CE section 1990 LES VERTS)
– Actes non réglementaires créateurs de droits acquis : abrogation peut seulement être fondée sur illégalité (≠ opportunité). Exception : acte contraire(= acte abrogeant un autre acte pour des motifs d’opportunité), ou si la loi le prévoit.
Abrogation possible si l’acte est illégal, explicite, et abrogé dans les 4 mois après sa signature (CE section 2009 COULIBALY).
Nuances :
– Jurisprudence Coulibaly est supplétive –> texte législatif ou réglementaire peut prévoit autre chose
– Bénéficiaire de l’acte peut demander l’abrogation à tout moment et pour tout motif.
– Juge administratif tient compte de la nature des droits créés :
Ø Acte déployant instantanément des effets : jurisprudence Coulibalys’applique.
Ø Acte déployant des effets de manière continue : abrogation ouverte à tout moment. CE section 2002 MME SOULIER
3. Le retrait :
C’est une disparition rétroactive.
– Actes non créateurs de droit : retrait possible à tout moment et pour tout motif.
Limite : si des décisions individuelles déployant des effets et des droits ont été prises sur le fondement de cet acte, le retrait n’est plus possible. CE 2009 MME LAVERGNE.
– Actes créateurs de droit : plusieurs situations :
Ø Retraitimpossible quand l’acte est légal.
Ø Retrait possible si le bénéficiaire le demande (sans affecter droit des tiers)
Ø Retrait possible si l’acte est illégal et non définitif (CE 1922 DAME CACHET)
Retrait possible si l’acte explicite est illégal et dans les 4 mois après signature (CE ass. 2001 TERNON).
Ø Jurisprudence Ternon limite droit du bénéficiaire : il n’a aussi que 4 mois pour en demander le retrait.
Ø Exceptions législatives existent. Ex : retrait permis de construire –> 3 mois.
Ø Pour les actes implicites de rejet créateurs de droits –> jurisprudence Dame Cachet s’applique (CE 2007 KAEFER WANNER)
Ø Pour les actes implicites d’acceptation créateurs de droits : loi du 12 avril 2000 :
· S’il y a eu mesures d’information aux tiers : retrait possible pendant délai de recours contentieux.
· Pas de mesure d’information : retrait possible pendant 2 mois.
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