L’autorité de la chose jugée

Qu’est ce que l’autorité de la chose jugée?

La principale caractéristique d’un jugement est d’être dotée d’une autorité spécifique qui consiste dans l’impossibilité de remettre en cause le point sur lequel le tribunal a tranché. Cette autorité est reconnue par l’article 1351 du code civil au titre de la preuve. C’est un caractère attribué par la loi au contenu du jugement. On lui attache une présomption de vérité. Faut-il encore déterminer clairement le domaine et les conditions de cette autorité.

  • Le domaine :

Cette autorité de la chose jugée est attachée au jugement définitif relativement à la contestation qu’il tranche. C’est ainsi que ne possèdent pas cette autorité sur le principal les jugements avant dire droit qui se limitent à ordonner une mesure d’instruction ou une mesure provisoire. Cette autorité n’est attachée qu’aux dispositifs, c’est-à-dire à ce qui a été réellement jugé par le juge, c’est-à-dire à sa constatation. Mais il arrive que cette autorité de la chose jugée s’étende aussi aux motifs lorsqu’ils constituent le soutien du dispositif. Enfin, l’autorité de la chose jugée ne joue qu’entre les parties à l’instance. Le jugement est seulement opposable aux tiers.

  • Les conditions :

Il faut tout simplement se référer à l’article 1351 qui dispose que : « l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en même qualité.» Cela veut dire que l’on opposera à une personne l’autorité de la chose jugée que lorsqu’il y aura une triple identité de parties, d’objet et de cause. Autrement dit, une demande avec le même objet fondée sur la même cause et formée entre les mêmes parties ne pourra pas prospérer si une décision a déjà été rendue. Prenons un exemple pratique : une action en revendication de la propriété d’un terrain entre François d’un côté et Philippe de l’autre. Imaginons que le juge ait décidé que Philippe était le propriétaire du terrain. François ne peut en aucun cas exercer une action dans le même but que la précédente. Mais si François a été débouté de sa revendication de la propriété d’un terrain, rien ne s’oppose à ce qu’il revendique dans le cadre d’un autre procès la construction présente sur ce même terrain. De la même manière, si François a été débouté de son action en nullité de la vente sur le fondement d’un vice du consentement, rien ne lui interdit de former une nouvelle demande en invoquant par exemple un vice de violence. Enfin, si Philippe a été reconnu propriétaire, rien n’interdit à un troisième intervenant, Mathieu, d’agir en revendication de la propriété du terrain. Autrement dit, cette autorité de la chose jugée est soumise à une triple condition.

  • La portée :

La portée de cette autorité de la chose jugée, elle s’impose aux parties à un double point de vue, en ce qui concerne le fond du droit, l’autorité de la chose jugée implique que le plaideur dont le droit a été reconnu peut se prévaloir du jugement. Le fait que le juge se soit prononcé en sa faveur est acquis. A l’inverse, pour celui qui a perdu le procès, il lui est désormais interdit de soumettre à un même tribunal ce qui a déjà été jugé. En ce qui concerne la procédure, ce jugement va bénéficier d’une double présomption de validité et de régularité. Mais au lendemain du jugement, cette présomption a une force provisoire qui ira en se fortifiant au fur et à mesures que les voies de recours seront utilisées ou au contraire auront fait l’objet d’une renonciation. Plusieurs distinctions :

– Lorsque le jugement est rendu, il a autorité de la chose jugée ce qui implique que lorsque l’exécution provisoire est possible, il peut être exécutoire mais il n’a pas encore force de chose jugée. Ce jugement ne va acquérir force de chose jugée que lorsqu’il n’est plus susceptible d’aucun recours suspensif.

– Lorsque ce jugement a force de chose jugée, il est exécutoire mais il n’est pas encore irrévocable. En effet, un jugement n’est irrévocable que lorsque les délais des voies de recours extraordinaires sont expirés ou qu’il en a été fait usage sans succès.

L’autorité de la chose jugée n’est que relative à l’égard des tiers. Le jugement ne peut créer de droits ou d’obligations à leur encontre. Néanmoins, les tiers ne peuvent pas ignorer l’existence de la situation juridique née du jugement, le jugement leur est donc opposable. Enfin, cette autorité de la chose jugée va produire son effet à l’égard du juge auquel on interdit de connaître à nouveau de la même affaire.