L’élément matériel de l’infraction punissable

Quel est l’élément matériel de l’infraction pénale?

Le cheminement qui mène à la commission d’une infraction, commence toujours par une intention. Celle-ci est elle punissable? La réponse est non. Cette limite a été posée car elle constitue une garantie nécessaire pour les libertés individuelles. Pour que l’infraction soit punissable, il faut un élément positif ou négatif.

L’élément matériel est donc l’élément positif ou négatif réprimé par la loi. Par exemple, l’élément matériel dans un meurtre c’est de tuer…

Il existe des grandes catégories de classification par une des différentes infractions dans leur matérialité. Les classifications extra temporelles et temporelles :

Les classifications extra temporelles : il existe une 1ère distinction entre les délits matériels et formels.

Délit matériel : l’infraction n’existe que si l’agent a obtenu ou tenté d’obtenir le résultat recherché. Ex : il y a meurtre que si la victime est morte. Il y a viol que si la personne a obtenu la chose convoitée.

Délit formel : l’infraction existe indépendamment du résultat. Exemple : l’empoisonnement : il est constitué par le seul fait d’avoir administré une substance mortelle même si cela se révèle inefficace ou si le dosage n’aurait jamais pour cause la mort.

Il existe dans ces classifications des distinctions entre délits d’action, d’inaction et de commission, d’omission. Le délit d’action se réalise par un acte positif qui consiste à faire ce que la loi interdit : tuer, violer, blesser…. On parle de commission par action. Le délit d’inaction réside dans un acte négatif qui consiste à ne pas faire ce que la loi ordonne (défaut de vaccination des enfants, paiement de la pension alimentaire). Le délit de commission par omission consiste à assimiler pleinement l’omission à l’action positive. Exemple : non assistance à personne en danger (NAPER).

Les classifications temporelles : il convient de faire la distinction entre les délits simples et les délits complexes.

L’infraction peut consister soit un acte unique (délit simple: vol) soit dans une pluralité d’actes (délits complexes : escroquerie qui suppose des manœuvres et une remise de fait de ces manœuvres).

Dans ce 2ème cas (complexe) soit ces actes sont de même nature, on parlera de délit d’habitude (chaque acte isolément n’est pas punissable) soit les actes sont de nature différente et on parlera de délits complexes proprement dit. L’intérêt de la distinction entre délit simple et délit complexe réside dans la prescription des faits. Par exemple pour le délit d’habitude, la prescription débutera dans au dernier acte commis. Le délit d’habitude suppose la répétition des actes identiques. Délit complexe suppose une pluralité d’acte de nature différente coordonné et concourant à une fin unique.

Il existe une autre distinction entre les instantanés et les délits continus. Pour les délits instantanés, le temps est indifférent. Pour les délits continus, le temps est un élément constitutif du délit (construction sans permis…). L’infraction instantanée est un fait, l’infraction continue est un état de fait. Intérêt de la distinction : en matière de procédure, la compétence de la juridiction pour le délit instantané est déterminée par le lieu de commission de fait. Alors que pour l’infraction continue, cette compétence est multiple. En matière de prescription, pour les délits instantanés, au jour de la commission, la prescription commence. Pour les délits continus, la prescription commence lors de la cessation de l’état de fait.

En matière de l’application de la loi pénale plus sévère : le délit instantané est impossible. Délit continu : sanctions même si les faits sont antérieurs. Intérêt par rapport à la qualification des faits : exemple : la peine peut varier en fonction de la durée des faits. Une séquestration est un délit et devient un crime au bout de 15 jours.

Voici le plan du cours surl’élémentmatériel de l’infraction punissable :

  • A) La nécessité de l’élément matériel
  • 1) L’impunité de la phase de la résolution criminelle
  • 2) L’impunité de la phase de la préparation de l’acte
  • 3) Le repentir actif et le désistement volontaire
  • B) Les degrés de l’élément matériel
  • 1) Les tentatives et le cumul des conditions (article 121-5 du Code pénal)
  • a) Les conditions cumulatives de la tentative
  • b) La répression de la tentative
  • 2) L’exécution infructueuse
  • a) L’infraction manquée
  • b) L’infraction impossible

  • A) La nécessité de l’élément matériel

On ne peut appliquer une mesure pénale a quelqu’un que s’il s’est levé à une activité condamné par la loi. On ne peut être puni que si l’auteur a matériellement exprimé l’acte. Toute intervention judiciaire ou policière peut avant la matérialisation du délit est donc prohibée. Il convient de vérifier où l’on se trouve dans les étapes menant à la constitution d’un délit. Cette idée s’exprime chez les auteurs sous la dénomination d’Iter criminis : le chemin du crime. Ainsi, échappe à la répression 2 sortes de comportement. La résolution criminelle et la simple préparation de l’acte.

1) L’impunité de la phase de la résolution criminelle

C’est la 1ère étape sur le chemin de l’infraction. L’infraction est réfléchie, décidée par l’individu mais celles ci ne sont pas des méandres de la pensée de l’auteur. L’infraction n’est pas consommée et donc pas punissable. De plus, il existe une réelle difficulté de preuve. Il est difficile de sonder les âmes. Cette étape psychologique échappe au principe de la répression.

2) L’impunité de la phase de la préparation de l’acte

Ce sont les agissements matériels qui permettent à l’agent de réunir les instruments de son crime. Ex: l’achat d’une arme pour tuer quelqu’un. De même que la résolution criminelle, cette phase doit rester impunie; cela s’explique par une difficulté de preuve par rapport à l’acte qui reste équivoque. L’impunité est également justifiée dans un souci candide d’inciter l’agent à ne pas persévérer dans la voie du crime. Toutefois, certaines incriminations viennent sanctionner la préparation pour les actes graves. Exemple : législation sur les ventes d’armes ou produits toxiques. Cette impunité a des effets quant à la procédure puisqu’il est interdit d’intervenir ou de procéder à une mise en détention provisoire pour de faits qui ne sont que préparatifs à l’infraction.

3) Le repentir actif et le désistement volontaire

Le désistement volontaire se situe avant la consommation de l’infraction. Le repentir actif se situe par contre après la commission de l’infraction. L’infraction est consommée. Il consiste par exemple à réparer le préjudice subit par la victime par exemple en lui restituant l’objet qu’on avait précédemment volé. Le repentir actif est inefficace même si les conséquences de l’acte peuvent être intégralement réparées. Ces notions sont indispensables à la définition de tentative.

  • B) Les degrés de l’élément matériel

1) Les tentatives et le cumul des conditions (article 121-5 du Code pénal)

La tentative n’existe pas pour les contraventions, elle existe pour les délits si cela est précisé par le texte. Elle est toujours punissable pour le crime. Sa définition est donnée par l’article 121-5 qui dispose que : « la tentative est constituée dès lors qu’elle est manifesté par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendu ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ».

  • a) Les conditions cumulatives de la tentative

Les problèmes posés sont d’une part celui de la tentative interrompue (à partir de quand peut on sanctionner une tentative) et celui de la tentative infructueuse (la non atteinte du résultat peut elle permettre une sanction). D’autre part il faut qu’il y ait commencement d’exécution, absence de désistement volontaire. Ce sont 2 conditions cumulatives pour retenir la tentative.

Le commencement d’exécution :

Il est toujours réprimé parce qu’il est trop proche de la consommation de l’infraction. Les actes préparatoires n’entrent pas dans le cadre de commencement d’exécution. Cependant, si l’acte préparatoire constitue au contraire une partie intégrante d’une infraction, la tentative pourra être punissable. Exemple : l’appréhension matérielle de la chose est un commencement d’exécution du vol.

La frontière entre commencement d’exécution et acte préparatoire est souvent difficile à tracer. 2 théories : la théorie subjective = le commencement d’exécution est l’acte qui tend directement au délit lorsqu’il a été accompli avec l’intention de le commettre. La théorie objective = le commencement d’exécution c’est l’acte devant avoir pour conséquence directe et immédiate la consommation du délit, l’agent est alors entré dans la période d’exécution. Il convient alors de rapporter 2 éléments :

Intention irrévocable : c’est la volonté arrêté de commettre l’infraction appuyée par des éléments entourant la scène du crime. Exemple : 3 personnes munis d’une pince coupante devant une grille munie d’un cadenas (acte équivoque) mais complété par des aveux antérieurs qu’il voulait commettre un vol alors il y a commencement d’exécution.

Il faut un lien de causalité. Il permet de situer le CE Dans un temps proche des opérations de consommation. Exemple : des malfaiteurs arrêtés au moment où ils commençaient à pénétrer dans une banque. Il existe des exemples de refus de sanctionner la tentative. Exemple : le propriétaire d’un camion l’incendie sans faire de déclaration de sinistre (tentative escroquerie). L’investigateur d’un crime qui a payé un homme de main mais celui ci n’a pas encore commencé l’acte de crime. Mais le commencement d’exécution ne suffit pas.

L’absence de désistement volontaire. La tentative volontairement arrêtée échappe à l’incrimination. Il faut distinguer le désistement volontaire de l’involontaire. Il n’y a pas de difficulté si la désistement est spontané (peur, remords…) ou s’il est involontaire lié à une cause externe (qqn baisse le bras de celui qui entrain de tirer sur qqn). 1er cas : pas de sanction. 2ème cas : sanction. Le problème se pose en cas de nature mixte c’est-à-dire une cause externe qui a posé sur la volonté de l’auteur. Ex : après avoir mis en jour, l’auteur renonce à son projet. La qualification est souvent difficile mais en général il y a répression.

  • b) La répression de la tentative

Dans certains cas, la tentative n’est pas punissable en raison de l’infraction considérée. Exemple : en matière d’infraction non intentionnelle, article 121-4 du Code pénal dispose que l’auteur de la tentative encourt les mêmes peines que si l’infraction avait été condamnée. Il est donc possible de sanctionner les infractions manquées et les infractions impossibles.

2) L’exécution infructueuse

Il s’agit du cas dans lequel le résultat poursuivi par l’agent n’a pas été atteint. Tous les actes matériels tendant à la réalisation de l’infraction ont été accomplis mais pas couronnés de succès.

  • a) L’infraction manquée

Le délit manqué est du à la maladresse de l’agent. Il ne soulève aucune difficulté. La culpabilité ne fait aucun doute (on tire sur quelqu’un et on le loupe).

  • b) L’infraction impossible

Le délit impossible traduit une impossibilité matérielle d’exécution ignorée par l’agent. Exemple : on tire sur quelqu’un qui est déjà mort. L’infraction impossible a suscité des controverses :

Conception objective : c’est l’impunité car il ne peut exister de commencement d’exécution (absurde)

Conception subjective : on sanctionne car l’attitude révèle une intention coupable de l’auteur.

La conception aujourd’hui est subjective (ex : répression de la tentative d’avortement par ingestion massive d’eau de Cologne)dans une célèbre affaire Perdereau il avait été jugé de la tentative d’homicide sur une personne déjà morte. Si la mort est ignorée de l’agent, il y aura répression car la circonstance est inapte de la volonté.