L’Accès des étrangers au Territoire Français
C‘est la question la plus délicate car c’est la question la plus concernée directement par les préoccupations relevant de la politique de l’immigration et par le souci de maitriser les flux migratoires.
Il existe un régime de droit commun qui est côtoyé par des régimes particuliers réservés à certaines catégories d’étrangers sachant que ces catégories d’étrangers sont liées non pas à l’origine nationale des étrangers mais liées à des situations particulières que le législateur français entend traiter avec une certaine bienveillance.
- Le droit de la nationalité
- La nationalité des sociétés ou des personnes morales
- Les droits des étrangers en France
- L’éloignement des étrangers (expulsion, reconduite à la frontière…)
- Le séjour des étrangers en France
- L’entrée des étrangers sur le territoire français
- Le contentieux et la preuve de la nationalité française
&1) Le régime de droit commun
Normalement, l’entrée en France ne peut pas se faire sans l’obtention préalable d’un visa. Cette obtention est alors une condition nécessaire de l’entrée en France mais ce n’est pas nécessairement une condition suffisante car l’étranger qui a un visa pourra dans certains cas se voir refuser l’entrée en France.
A) L’obtention préalable d’un visa
La règle selon laquelle nul ne peut entrer sur le territoire français visa est une règle ancienne : article 5 de l’ordonnance de 1945.
En droit international public, il n’a jamais été reconnu de droit inconditionné des étrangers à accéder à un territoire national pas plus d’ailleurs que le droit d’y séjourner. C’est une différence majeure entre la situation des nationaux et la situation des étrangers.
Un national a en règle général un droit inconditionné du territoire c’est-à-dire qu’un français peut toujours venir ou revenir en France sans que les autorités françaises puissent s’y opposer et qu’il ne peut être menacé d’être expulsé par les autorités française : c’est une prérogative fondamental des nationaux.
Les étrangers n’ont pas ce droit mais ce droit est conditionné en en droit commun, l’une des conditions est l’obtention préalable d’un visa. Ainsi, sauf texte contraire, un étranger ne pénètre en France régulièrement que si on lui a délivré un visa par les autorités diplomatiques ou consulaires françaises dans son pays.
Ce visa est accordé ou non en fonction d’un certain nombre éléments figurant dans le dossier de l’étranger notamment en fonction des garanties que l’étranger peut fournir sur les conditions de son
séjour en France et des moyens dont il dispose pour son rapatriement en fin de séjour c’est-à-dire
montrer qu’il peut subvenir à ses besoins pendant son séjour et qu’il est porteur de son billet de retour. La question de l’accès des étrangers est une question qui touche les intérêts de l’Etat.
Le visa est accordé ou pas : s’il est accordé alors il n’y a pas de problème.
Mais s’il est refusé, est-ce que l’étranger n’a aucun moyen de faire valoir ses prétention ? En principe, le refus est discrétionnaire car il n’a pas à être motivé et l’article L211-2 CESEDA énonce que « par dérogation aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et l’amélioration des relations entre l’administration et le public, les décisions de refus de visa d’entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires ne sont pas motivées ».
Cet article ajoute que « le refus visa doit cependant être motivé par exception pour les étrangers appartenant à plusieurs catégories spécifiques parmi lesquels on peut relever entre autre : les membres de la famille de ressortissant d’Etats membres de l’UE, les conjoints et les enfants de ressortissants français, les travailleurs autorisés à exercer une activité salariée en France, les bénéficiaires d’une autorisation de regroupement familiale… »
Exemple : si on suppose qu’un ressortissant allemand dont le conjoint a la nationalité d’un pays non communautaire veut accéder à notre territoire, l’allemand est dispensé de visa mais son conjoint doit commander un visa, qui peut lui être refusé mais dans ce cas, le refus devra être motivé.
Mais en pratique, l’obtention d’un visa peut être plus ou moins rapide et plus ou moins facile suivant les postes diplomatiques et consulaires, le nombre de candidats aux visas dans ces postes, la vision que les autorités en causes ont des intérêts français.
B) L’entrée sur le territoire
Nous avons un ressortissant étranger qui a obtenu un visa et qui se présente sur notre territoire : le titulaire d’un visa n’est pas pour autant absolument assuré de l’entrée réelle et régulière sur notre territoire qui peut être refusée par les autorités françaises si sa présence en France constituerait une menace pour l’Ordre Public : article L213-1 CESEDA.
Le statut juridique de ce refus n’est pas le même que celui du refus de visa : il est plus protecteur car la personne a un visa donc le refus d‘entrée sur notre territoire doit être formulée par une décision écrite de l’administration française, spécialement motivée et dont un double est remis à l’intéressé.
Les garanties de procédure accordées à l’étranger sont très limitées :
- il a le droit d’avertir du refus qui lui est opposé la personne chez laquelle il se rendait, – d’avertir son consulat
- d’avertir éventuellement le conseil ou l’avocat de son choix.
- Il peut aussi s’opposer à tout rapatriement forcé dans son pays ou dans un autre pays avant l’expiration du délai d’1 jour
L’étranger a en fait peu de temps pour se retourner et engager une procédure. Dans cette période d’attente, l’étranger peut être placé dans une zone d’attente (aéroport, port).
Les chances de passer outre ce refus sont minces.
&2) Les régimes particuliers
—> Le premier régime particulier concerne les ressortissants communautaires qui sont dispensés de tout visa et qui peuvent librement pénétrer sur le territoire national dès lors qu’ils ont un document d’identité. Mais ils ne sont pas à l’abri d’un refus d’entrée pour menace à l’Ordre Public.
—> Le second régime particulier concerne les étrangers non communautaires qui ont obtenu préalablement une autorisation d’entrée dans un autre pays de l’UE et qui veulent se rendre en France depuis cet autre pays.
Dans le cadre de l’espace Schengen, ces étrangers qui ont eu une autorisation d’entrée dans un pays de l’UE peuvent ensuite entrer en France sans visa, en faisant une simple déclaration. A l’inverse, l’étranger qui s’est vu refuser l’autorisation d’entrée se voit refuser l’entrée en France.
La Convention de Schengen consiste à communautariser la politique des visas entre les Etats concernés
et à faire en sorte que la décision de visa ou de refus de visa prise par l’un des Etats concernés, vaillent pour tous les autres Etats. Cette convention ne concerne pas tous les Etats de l’UE mais un grand nb d’entre eux (Espagne, Luxembourg, Belgique, Allemagne..)
—> Le troisième régime particulier concerne les étrangers non communautaires dont le pays a conclu des traités de police administrative avec la France.
—> Le quatrième régime concerne le régime organisé dans le cadre du regroupement familial aux articles L411-1 et suivant du CESEDA : famille d’un étranger déjà régulièrement installée en France et qui souhaite faire venir son conjoint et ses enfants.
C’est un droit au regroupement familial car il n’y a aucune raison sérieuse de refuser à un étranger résidant régulier, de mener une vie familiale normale. Mais ce droit qui est un régime plus favorable que celui du droit commun, est soumis à des conditions rigoureuses qui lui sont propres :
- l’étranger doit être installé en France régulièrement depuis au moins 18 mois
- il doit disposer de ressources suffisantes au moins égale au SMIC et un logement décent pour accueillir sa famille
- il doit se conformer aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.
Pour les bénéficiaires de ce regroupement, ils peuvent se voir opposer un refus de regroupent si leur présence sur le territoire forme une menace pour l’Ordre Public ou s’ils sont atteints d’une maladie inscrite au règlement sanitaire international. Si ces conditions positives sont réunies alors les bénéficiaires pourront entrer en France sans visa mais avec les vérifications, cela ressemble au régime de droit commun.
—> Le cinquième concerne le droit d’asile :
Un visa n’est pas obligatoire pour tout autre raison quand l’étranger demande l’asile sur notre sol parce qu’il s’estime en danger dans sa vie ou dans sa liberté dans son pays d’origine, ou exposé à subir des traitements inhumains ou dégradants. Dans ce cas, l’étranger peut bénéficier d’une admission exceptionnelle au séjour en France.
La question du droit d’asile est une question intéressante et difficile, elle relève d’une grande tradition de la République car depuis 1789, la France a toujours voulu être une terre d’asile et le souci d’offrir un asile à ceux qui luttent pour la démocratie dans leur pays a toujours été très fort en France. Mais l’application pratique de ce droit est aujourd’hui contestée dans la mesure où l’on peut craindre que certaines demandes d’asile soient plus des motifs économiques que des motifs politiques. De plus, dans l’avenir, les désordres climatiques que semblent connaitre certains pays entrainent un afflux de réfugiés climatiques : ouverture du droit d’asile à d’autres situations que celles traditionnelles.
Ce problème n’est pas purement ou exclusivement français d’autant plus que les règles applicables en la matière ne sont pas seulement des règles internes à la France mais des règles internationales avec une Convention de Genève du 28 juillet 1951.
Ces règles tentent de maintenir un fragile équilibre entre les garanties qui sont dues au demandeur d’asile et la prudence parfois nécessaire en la matière.
En réalité les dispositions relatives au droit d’asile sont assez complexes et on distingue aujourd’hui, deux types de droit d’asile, celui dit conventionnel et celui dit constitutionnel :
- le droit d’asile conventionnel se réfère à la convention de Genève de 1951 sur les réfugiés et il s’agit des personnes qui sont menacés dans la vie et leur liberté dans leur pays.
- le droit d’asile constitutionnel car il se réfère au Préambule de 1946, cité par la Constitution du 4 octobre 1958, ce préambule étant considéré par le Conseil constitutionnel comme faisant parti du bloc de constitutionnalité et ce Préambule comporte une disposition sur le droit d’asile pour les combattant de la liberté. La demande d’asile faite par l’intéressé tend à la délivrance d’un document provisoire de séjour en vue d’avoir la reconnaissance de la qualité de réfugié par l’office français de protection des réfugiés et des apatrides. Si la décision est négative, elle peut faire l’objet d’un recours devant le Cour national du droit d’asile qui est une juridiction administrative.
Le contentieux du droit d’asile tourne autour de la motivation du droit d’asile avec la suspicion que certaines demandes d’asile sont fondées sur des motifs plus économiques que politiques et il tourne autour de l’évaluation des menaces et des dangers qui pèsent effectivement dans leur pays sur les demandeurs d’asile.
De plus quand le pays d’origine du demandeur présente une situation hétérogène du point de vu de la sécurité ou de l’insécurité des personnes : si seule une région du pays qui est caractérisée par une grave insécurité doit-on admettre la demande ou doit on admette qu’il s’installe dans une région plus sure ?
CONCLUSION SUR LE DROIT DES ETRANGERS
Il y a un lien étroit entre le droit de la nationalité française et la condition des étrangers car par
hypothèse.
Selon l’article L111-1 du Nouveau Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
(CESEDA) « sont considérés comme étrangers, tous ceux qui n’ont pas la nationalité française ».
Selon ce texte, sont considérées comme étrangers au sens du présent code, les personnes qui n’ont pas la nationalité française :
– soit qu’elles aient une nationalité étrangère, – soit qu’elles n’aient pas de nationalité.
On parle d’étrangers alors que ce sont les personnes d’où une formulation étrange.
définition absolue de l’étranger qui vaudrait en toute hypothèse qu’à une définition relative car c’est La rédaction de cet article attire l’attention par le fait que le texte semble se référer non pas à une
au sens du présent code que l’on considère comme étranger, toute personne n’ayant pas la nationalité.
Mais l’article est moins surprenant lorsqu’il assimile à la catégorie d’étranger, les apatrides car cette assimilation est traditionnelle, ce qui ne signifie pas qu’ils ont droit à un traitement particulier.
L’article L111-1 CESEDA ne fait aucune distinction selon qu’il s’agit de personnes physiques ou morales
La Condition des Personnes Physiques Etrangères
Le terme de « condition des étrangers » est un terme ancien classique qui concerne la jouissance des droits des étrangers en France c’est-à-dire la question de savoir quels sont les droits qui sont reconnus aux étrangers sur notre territoire. En réalité, la condition des étrangers englobe aussi les devoirs que doivent assumer les étrangers sur notre territoire mais c’est surtout la question des droits qui a fait et qui peut faire encore difficulté.
Dans les droits concernés, il faut distinguer les droits publics et les droits privés :
- les droits publics sont reconnus aux étrangers mais ils sont limités
- les droits privés sont plus largement entendus et ils sont reconnus aux étrangers sur la base d’une interprétation libérale de la jurisprudence d’un texte du Code civil pourtant a priori restrictif qui est l’article
Dans l’époque contemporaine, un autre aspect de la condition des étrangers tend à prendre le dessus et tant à occuper le devant de la scène : il s’agit de la police administrative des étrangers c’est-à-dire tout ce qui touche l’entrée des étrangers sur le territoire français et leur séjour sur ce territoire. Cette question est liée étroitement à la politique de l’immigration et qui est aujourd’hui très discutée en France comme dans les autres pays européens.