L’état de nécessité, un fait justificatif d’irresponsabilité pénale

L’état de nécessité 

L’état de nécessité correspond à la nécessité dans laquelle se trouve une personne de commettre une infraction pour sauver un autre intérêt. La Légitime Défense ne s’opère que dans le cas d’une attaque. La nécessité est une notion plus large. Pour simplifier, il s’agit d’une infraction commise pour la bonne cause.

L’état de nécessité est un fait justificatif qui exclut la responsabilité pénale de celui qui s’est trouvé dans l’obligation d’accomplir un acte infractionnel pour neutraliser un péril.

Exemple :       Vol d’un canot pour sauver une personne de la noyade

                       Dégradation de bien pour éviter un accident

L’état de nécessite ne se confond pas avec la contrainte car, pour être une cause de justification, cette dernière devait être irrésistible. Or ici, l’auteur a choisi l’infraction pour sauvegarder un intérêt. Ce choix correspond à l’intérêt social dès lors que l’intérêt sauvegardé est supérieur à l’intérêt sacrifié.

L’état de nécessité est une cause de justification (fait justificatif) qui n’a été définitivement consacrée que par le Code Pénal de 1992  —> crée une cause d’irresponsabilité.

L’état de nécessité  laisse un choix  —> commission de l’infraction correspond à la meilleure solution = l’intérêt social.

CA Paris du 10 juin 1977 :une personne qui a participé à la réalisation d’un film pornographique = ancien code pénal  —> poursuivi pour outrage aux bonnes mœurs. La personne répond   qu’elle était obligée car elle était au chômage. La CA considère que l’alternative n’était pas inévitable. La personne aurait pu chercher un autre travail dans un autre domaine.

1.La naissance de l’état de nécessité 

Dans le Code de 1810, il n’y avait que quelques manifestations de l’état de nécessité. Ces textes punissaient ceux qui sans nécessité avaient tué des animaux. (ancien articles 453 et 454 Code Pénal).

Exemple :Tuer un chien qui saute sur un enfant (Extension de la notion de contrainte morale : caractère irrésistible) + Vol de nourriture par une femme affamée pour nourrir sa famille (Bon juge de Château Thierry : Contrainte morale irrésistible).

C’est en 1958 que la Cour de Cassation crée un fait justificatif autonome (distinct de la contrainte) fondé sur l’inutilité sociale de punir.

Arrêt du 25 juin 1958 Ch.Crim, D. 1958, p. 693

Conducteur poursuivi pour blessures volontaires car il a volontairement donné un coup de volant et a causé un accident avec une autre voiture pour éviter d’écraser sa femme et ses enfants tombés de la voiture. La Cour de Cassation pose 3 conditions à ce fait justificatif :

  •        La valeur sauvegardée doit être au moins aussi grande que celle sacrifiée (ici : vie contre vie).
  •          L’alternative doit être inévitable. Il ne doit pas y avoir de 3ème voie (Ici, les experts n’ont pas admis que l’alternative était inévitable).
  •         Il ne faut pas que l’état de nécessité soit dû à une faute antérieure (Ici, le père avait mal fermé la porte du passager)  —> empêche que ce fait justificatif ne prenne trop d’ampleur.

 

2.La consécration législative de l’état de nécessité 

Art. 122-7 Code Pénal : « N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace » = 1ère fois que la nécessité est envisagée comme fait justificatif en 1992.

NB : Dans la Légitime Défense, le danger provient d’une attaque. En quelque sorte, la Légitime Défense est une forme particulière de l’état de nécessité.

Pour résumer, le danger doit être IMMINENT et ACTUEL, et l’acte doit être NÉCESSAIRE et PROPORTIONNÉ. Les tribunaux réintroduiront la condition d’absence de faute antérieure. L’état de nécessité ne peut être invoqué pour sauver son emploi.

Arrêt du 25 octobre 1998, Ch.Crim, Droit pénal 1998, Commentaire n° 112

Comptable d’un hôtel accusé de complicité de proxénétisme. Des produits de la prostitution passaient sur son compte. On exerçait des pressions sur lui pour accepter. Pas d’état de nécessité car il y avait un choix possible pour le comptable.

Trib. Correctionnel de Paris, 28 novembre 2000, D. 2001, p. 512

Squatteur poursuivi pour destruction de biens d’autrui dans un appartement inoccupé. Il habitait avant cela dans un appartement de 8m2. Le tribunal a estimé que la réaction était nécessaire et proportionnée au danger auquel il était confronté.  —> pas de distribution.

11 avril 1997 Mère de famille vole de la nourriture pour nourrir ses enfants. Vols répétés + Compte créditeur par moment. Réaction non proportionnée  —> appréciation précise des circonstances.

Nécessité et proportionnalité = subjectives. Sur la nécessité  —> arrêt de CA de 2002 : quelqu’un est poursuivi pour avoir détenu des pieds de cannabis. Il invoquait le fait qu’ils étaient nécessaires à la fabrication de tisanes = seul moyen de soulager ses douleurs du à un accident. Face au danger de souffrir = détention de stupéfiants = nécessaires. Sur la proportionnalité  —> arrêt de la CA de Toulouse du 15 février 2001 : il s’agissait d’un étranger qui doit être reconduit à la frontière et refus de monter dans l’avion. Mais il invoque l’état de nécessité car il craint des réactions hostiles de la part des services de sécurité de son pays. Les tribunaux ont admis l’état de nécessité car c=tout cela était accompagné d’aucune violence. Dans un arrêt du la CA de Poitiers de 1977 une mère de famille qui vole plusieurs fois des quantités importantes de denrées alimentaires  invoque ses difficultés financières. Cela a été admis en 1ère instance mais la CA refuse cette interprétation en considérant que des difficultés financières ne sont pas un danger réel car la banque aurait pu faire crédit et les quantités volées étaient vraiment importantes.  

Laisser un commentaire