La cession des créances professionnelles

Le bordereau de cession des créances professionnelles

C’est un nouvel instrument pratiqué par les établissements bancaires. Institué par la loi du 2 janvier 1981 dite loi « Dailly » pour faciliter le crédit aux entreprises. Régime précisé par un décret du 9 septembre 1981.

Motivations

Cet instrument a été créé pour faciliter l’escompte des effets de commerce. Avec la Lettre de Change, l’escompte était trop lourd formellement, trop couteux aussi et in nécessitait de créer une Lettre de change de par créance. L’escompte de la Lettre de change nécessite de créer un instrument par créance. On ne peut mobiliser un ensemble de créances. Le bordereau Dailly fournit les garanties de paiement plus simples que la Lettre de change tout en restant relativement efficace. Le bordereau Dailly se présente comme une forme de Lettre de change allégée. Il conserve le support papier comme base de l’opération. Il existe 2 types de cession par bordereau Dailly. Il y a d’abord la cession escompte et ensuite la cession en propriété à titre de garantie.

(i) Cession-escompte.La cession escompte est «l’opération par laquelle le banquier « achète » la créance du cédant, son client, en créditant son compte du montant de ladite créance, diminuée de celui des agios perçus». Le montant du crédit correspond alors au montant des créances déduction faite de la rémunération du banquier. Le banquier devient alors propriétaire des créances et se rembourse en agissant contre le débiteur cédé. Dans ce schéma, celui qui a cédé des créances à la banque n’a plus rien à rembourser à la banque. Le remboursement se fera par le débiteur cédé.

(ii) Cession en propriété à titre de garantie

Ici, la banque octroi un crédit à son client et, en garantie du remboursement de son crédit, demande au client de lui transférer la propriété des créances de ce dernier. Il y a 2 conséquences :

– Il n’y a pas vraiment de correspondance entre le montant de crédit et le montant des créances ex. le client peut obtenir un crédit de 5000 € et la banque demande au client de garantir le crédit avec une créance qu’il a de 2000 €.

– Le cédant, en transférant les créances au banquier, n’est pas libéré. Il doit toujours rembourser le crédit que lui a fait la banque et s’il ne rembourse pas le prêt, la banque se servira des créances pour se faire rembourser par le débiteur cédé. En revanche, si le cédant rembourse tout son crédit, la banque restitue les créances. (C’est un gage portant sur les créances).

I ) Création du bordereau Dailly

Sa création obéit à des conditions qui seront analysées dans la forme et dans le fond.

A) Conditions de fond

(i) Caractère des créances

Caractère professionnel (CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER, article L. 313-23)

Indifférence des autres qualités

Opération de crédit

Des créances objet de la cession Dailly doivent avoir un caractère professionnel. Elles doivent être nées à l’occasion d’une activité professionnelle. Elle doit lier des entreprises. Toutefois, cette qualité de professionnelle des parties à la créance n’est vérifiée que pour les personnes physiques. La qualité professionnelle est présumée pour les personnes morales.

Les créances n’ont pas besoin de présenter des qualités spécifiques. Cela signifie que peuvent être cédées aussi bien des créances exigibles que des créances à terme ou sous condition ou encore des créances qui ne sont pas liquides, l’essentiel étant qu’on puisse les identifier avec une certaine précision dans leur objet et quant aux parties qu’elles conservent. Même des créances futures (virtuelles) peuvent être cédées par bordereau Dailly. C’est à la banque ensuite de juger de la pertinence de ces créances futures c’est-à-dire des garanties qu’elles pourront procurer.

Autre avantage du bordereau Dailly, c’est qu’il permet de céder un ensemble de créances en une fois, là où la Lettre de change n’impose de céder que les créances une par une.

Il faut que la cession soit liée à une opération de crédit. La cession doit avoir pour cause un crédit octroyé au cédant par la banque.

(ii) Qualité des bénéficiaires

Le bénéficiaire de la cession Dailly ne peut être qu’un établissement de crédit. Cet instrument n’est prévu que pour les relations des entreprises avec leur banque.

B) Conditions de forme

La sécurité du bordereau réside dans son formalise.

Art. L. 313-23 al. 3 énonce des mentions obligatoires devant figurer sur le bordereau.

La date du bordereau est très importante car c’est cette date qui réalise le transfert et le rend opposable aux tiers. Autrement dit, pas de date, pas de transfert. L’apposition de la date est une mention importante avec des effets juridiques importants. Ce formalise est présent tout en étant un peu plus souple que pour les effets de commerce classique.

Cass. com., 7 juin 2006 : désignation du débiteur cédé n’est pas une mention obligatoire du bordereau, mais seulement un moyen alternatif pour les parties d’effectuer l’identification des créances cédées.

II) Effets du bordereau Dailly

  • A) Le transfert des créances

Ce transfert des créances se produit au profit des bénéficiaires (cessionnaires) (i) et aux tiers (ii).

(i) Au regard du bénéficiaire

Art. L. 313-24 du CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER : «Même lorsqu’elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d’un prix, la cession des créances transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée».

Le transfert se fait à la date apposée sur le bordereau, selon l’article L. 313-27 CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER. Le transfert se fait de la propriété des créances et ce, quelque soit le type de cession. Dans les 2 types de cession, la banque devient propriétaire des créances.

C’est la date du bordereau qui le rend opposable aux tiers. Le problème de l’opposabilité surgit lorsque plusieurs personnes prétendent avoir des droits concurrents sur ces mêmes créances. Plusieurs personnes revendiquent la propriété des créances qui ont été transférées.

Celui qui l’emporte est celui dont la date sur le bordereau est la plus ancienne mais il est possible que l’un des cessionnaires ait notifié la cession au débiteur pour l’informer que celui-ci doit lui payer à elle. Cette notification oblige le débiteur à payer l’auteur de la notification. Donc, c’est le cessionnaire qui a notifié avant les autres qui l’emporte. S’il y a eu plusieurs notifications, on se réfère à la plus ancienne.

Si le débiteur paie le cédant alors que la banque l’a notifié. Il arrive souvent que le cédant encaisse le prix en tant que mandataire de la banque.

Le problème se pose aussi entre le porteur d’un bordereau Dailly et le porteur d’une lettre de change ?

Théoriquement c’est le cessionnaire du bordereau qui doit l’emporter si la date de celui-ci est antérieure à la date de la Lettre de change parce qu’avant l’échéance de la LC, la provision est disponible, donc un autre peut s’en servir dont un cessionnaire de bordereau Daily. Il faut combiner cela avec l’acte d’acceptation de la Lettre de change qui rend la provision indisponible.

Si la lettre n’a pas été acceptée par le tiré, le conflit se résout en comparant la date d’échéance de la Lettre de change et la date du bordereau Dailly. Si la date du bordereau Dailly est antérieure, il l’emporte. Si le porteur de la Lettre de change a accepté la provision, cette provision devient indisponible.

(ii) Au regard des tiers

Conflits entre cessionnaires successifs. Le premier cessionnaire qui a apposé une date sur le bordereau l’emporte. Prior tempore, potior jure.

Mais parfois, le transfert a été notifié au cédé. Dans ce cas, le cédé doit payer à la banque auteure de la notification, ou à celle (quand plusieurs notifications) qui est l’auteur de la plus ancienne.

Conflit avec le porteur d’une lettre de change

– Si le débiteur a accepté une lettre de change

En l’absence d’acceptation

Si la Lettre de change a été accepté par le tiré, elle vaut engagement du tiré à payer la Lettre de change au porteur, c’est un engagement nouveau. On peut considérer que le cédé qui a accepté de payer la Lettre de change même après la cession Dailly, doit payer le porteur. Le cédé n’est pas au courant du bordereau Dailly, il serait injuste de faire payer au cédé 2 fois. L’acceptation prime même si elle date postérieurement au bordereau Dailly.

Conflit avec un créancier saisissant

Conflit avec le bénéficiaire d’une réserve de propriété

B) Le recouvrement des créances

Le recouvrement peut se faire par 2 personnes

(i) la banque cessionnaire

Le recouvrement peut se faire par 2 personnes, la banque cessionnaire, pour s’assurer de ses droits, peut notifier sa cession au cédé – Article L. 313-28. Cette notification interdit au cédé de se libérer entre les mains d’un tiers.

La banque peut confier le recouvrement de la créance au cédant lui-même et dispense à la banque d’opérer une notification.

Se pose la question des moyens de défense du débiteur cédé.

Le principe est que c’est le droit commun qui s’applique i.e. l’opposabilité des exceptions. Le cédé peut opposer des exceptions. Cette solution est cependant renversé lorsque le cédé s’est engagé envers le cessionnaire par un acte d’acceptation qui est un engagement formaliste du cédé envers le cessionnaire. Il est possible lorsque le cessionnaire est de mauvaise foi même si l’on accepte de payer le bordereau mais que la banque est de mauvaise foi i.e. qu’elle a conscience que la créance qu’elle réclame n’est pas valable, il y a la possibilité d’opposer les exceptions.

(LIRE CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER)

Le cessionnaire Dailly qui ne serait pas payé par le cédé, peut-il se retourner contre le cédant ?

Non parce que l’article 1694 du Code Civil dispose que le cédant garantit l’existence de la créance cédée n’est pas la solvabilité du débiteur cédé. Selon l’article L. 311-24, le cédant est garant du paiement de la créance cédée.

Recouvrement par l’Et de crédit

Recouvrement par un tiers

Moyens de défense du cédé. Hocquet-De Lajartre, « La protection des droits du débiteur cédé dans la cession Dailly », RTD com. 1996, 211.

« Acte d’acceptation »

Recour du porteur : droit commun un peu spécial