La charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne

La charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne

La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne est un document qui a reflète la volonté commune des États membres d’ancrer les droits et libertés dans le cadre juridique de l’Union européenne (UE). Voici les raisons principales pour sa rédaction, ainsi que l’actualisation de certains points à la lumière des évolutions récentes du droit de l’UE:

Justifications pour la rédaction de la Charte:

  • Justification politique:
    • Depuis les discussions autour d’une Europe à caractère politique, il y a eu un consensus parmi les États membres sur la nécessité de fonder l’UE sur un accord clair concernant les droits et libertés qui doivent être garantis.
  • Raisons juridiques sérieuses:
    • Au sein de l’UE, il existait une structure à trois piliers, jugée hétérogène, avec des différences marquées dans la manière de raisonner selon qu’on se trouvait dans le pilier de la Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) ou dans les autres piliers. Cette structure a été abolie par le Traité de Lisbonne, qui est entré en vigueur le 1er décembre 2009, consolidant les piliers en un cadre juridique unique. Néanmoins, avant cela, la protection des droits fondamentaux n’était pas uniforme à travers ces piliers, car les instruments juridiques applicables différaient.
    • L’inconvénient résidait dans le fait que la protection des droits au sein de l’UE reposait fortement sur la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui se référait à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et aux traditions constitutionnelles des États membres. Cela pouvait conduire à une certaine incohérence et imprévisibilité.
    • La compétence de la CJUE en matière de droits et libertés n’était pas uniforme et était souvent limitée ou contrainte par la nécessité d’interpréter les droits à partir d’autres juridictions ou textes, ce qui lui laissait une marge d’interprétation importante.

Solution:

  • La rédaction d’un texte spécifique à l’Union européenne, à savoir la Charte des droits fondamentaux de l’UE, a été envisagée comme une solution à ces problèmes. Cette Charte a été proclamée le 7 décembre 2000 à Nice et est devenue juridiquement contraignante avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.

Mises à jour et informations complémentaires:

  • La Charte des droits fondamentaux de l’UE regroupe en un seul document les droits civils, politiques, économiques et sociaux des citoyens européens ainsi que de toutes les personnes résidant sur le territoire de l’UE.
  • Les droits et principes de la Charte sont désormais juridiquement contraignants pour les institutions de l’UE et pour les États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’UE.
  • Les articles précédemment mentionnés du Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TECE) ont été intégrés et actualisés dans le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui, avec le Traité sur l’Union européenne (TUE), forme le cadre juridique principal de l’UE après le Traité de Lisbonne.

La Charte est aujourd’hui une pierre angulaire de l’identité européenne en matière de droits et libertés, reflétant les valeurs communes de l’UE et renforçant la protection juridique des individus dans l’application du droit de l’UE.

I. L’élaboration de la charte des droits fondamentaux

Élaboration de la Charte des Droits Fondamentaux de l’UE

Procédure innovante :

  • Le texte représentait un tournant majeur, envisagé comme le fondement d’une Europe davantage intégrée et politique, s’inscrivant dans un cadre quasiment constitutionnel.
  • Décisions clés prises lors des Conseils européens de juin et octobre 1999 : il fut résolu de former une instance originale, nommée « Convention » lors de sa première réunion, caractérisée par une composition représentative de quatre groupes :
    • Représentants des chefs d’État et de gouvernement
    • Membres de la Commission européenne
    • Députés du Parlement européen
    • Membres des parlements nationaux
  • Structure de 62 membres délibérant publiquement, dans l’esprit d’une assemblée constituante et selon des principes de transparence. La Convention a élaboré sa propre méthodologie de travail, en commençant par une phase de consultation auprès de la société civile, où les organisations non gouvernementales (ONG) jouissaient d’un rôle prééminent.

Participation élargie et démocratie participative :

  • En octobre 1999, sachant quels étaient les États candidats à l’élargissement, la décision fut prise de leur permettre de participer aux discussions. Le principe d’un débat ouvert avec les citoyens fut établi.
  • Forum de discussion en ligne : Mise en place d’un forum interactif sur Internet, engendrant une riche interaction avec entre 5 000 et 10 000 contributions par article.

Calendrier et issues :

  • L’objectif initial de la Convention était de conclure ses travaux pour septembre 2000, afin d’éviter tout chevauchement avec le Traité de Nice.
  • En raison de la crise autrichienne et du contexte européen tendu, c’est lors du Conseil européen de décembre 2000 que la Charte fut présentée aux chefs d’État et de gouvernement. Elle fut proclamée mais non signée, sans disposition concernant une éventuelle ratification, laissant sa mise en vigueur incertaine.

Actualisation des références législatives :

  • L’articulation du Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TECE) a été remplacée par les dispositions correspondantes du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).
  • La Charte des Droits Fondamentaux de l’UE a depuis été juridiquement contraignante pour les institutions de l’UE et les États membres lors de l’application du droit de l’UE, suite à l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne le 1er décembre 2009. Elle est désormais citée dans le TFUE et a le même statut juridique que les Traités.

Considérations finales :

  • La Charte constitue un exemple significatif de l’évolution institutionnelle et démocratique de l’Union Européenne, en renforçant la protection des droits fondamentaux au sein de l’UE.
  • La mise en œuvre et le suivi de ces droits relèvent tant des institutions européennes que des États membres, dans le respect des compétences qui leur sont attribuées par les Traités.

 

II. Le contenu de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne

Le contenu de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

  • La Charte comprend 54 articles, qui sont organisés en chapitres. Ces chapitres étaient précédemment dénommés titres dans le Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TCE), mais ont été renumérotés.Intégration de la Charte dans le Traité de l’Union européenne (TUE) et le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE):
    • Intégration physique: Oui, la Charte a été intégrée physiquement.
    • Placement dans les traités: Elle a été insérée en tant que corps de texte plutôt qu’en préambule.
  • La Charte est considérée comme une « photographie » des droits et libertés garantis à un moment donné. C’est un texte déclaratif qui reconnaît un ensemble de droits déjà consacrés par d’autres instruments juridiques.
    • Le préambule souligne que la Charte réaffirme les droits découlant d’autres textes juridiques.
    • Elle comprend des droits qui n’avaient pas été consacrés auparavant mais qui sont devenus essentiels, comme le principe de dignité et l’interdiction du clonage reproductif.
  • Son originalité juridique réside dans la méthodologie adoptée pour sa classification, qui se base sur une approche thématique plutôt que générationnelle:
    • Dignité
    • Libertés
    • Égalité
    • Solidarité
    • Citoyenneté
    • Justice

    Chaque chapitre commence par l’énonciation d’un principe fondateur suivi de sa déclinaison spécifique.

  • Le chapitre sur la justice couvre les droits classiques tels que le droit à un recours effectif, l’égalité devant la loi, et la proportionnalité, reflétant les moyens d’accès au droit.
    • La Charte combine des principes et des droits pour les appliquer de manière plus effective.

    Concernant l’interprétation et l’application de la Charte:

    • Interdiction de l’abus de droit: C’est une norme classique.
    • Champ d’application: La Charte s’applique aux institutions, organes et organismes de l’Union ainsi qu’aux États membres lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union européenne.
    • Portée et interprétation des droits et principes: Les droits et principes doivent être interprétés de manière à éviter les contradictions avec d’autres textes juridiques, notamment la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), avec les mêmes conditions d’exercice des droits (proportionnalité, poursuite d’un objectif légitime, etc.).
    • Des explications relatives à la Charte (environ 60 pages) ont été annexées pour servir de guide d’interprétation et d’application, bien qu’elles n’aient pas de valeur juridique contraignante.

Statut juridique de la Charte des droits fondamentaux de l’UE

  • Depuis sa proclamation, la Charte a acquis une valeur juridique contraignante avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne en 2009, contrairement à ce qui est mentionné dans votre texte qui date d’avant cette période.
    • Elle est invoquée et utilisée par les requérants dans les cours de justice, comme la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

    Cas jurisprudentiels impliquant la Charte:

    • CEDH, 11 juillet 2002, cas Goodwin : La CEDH a interprété le droit au mariage de la Convention de 1950 à la lumière de la Charte, sans spécifier le sexe des personnes se mariant.
      • CJUE, 27 juin 2006, affaire Parlement contre Conseil : Pour la première fois, la CJUE a utilisé la Charte comme un élément d’interprétation des droits et libertés, soulignant ainsi l’importance de la Charte en tant que source d’inspiration et de contexte pour la protection des droits et libertés fondamentaux.

      Il est important de noter que la valeur de la Charte a été renforcée après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne en 2009. Avec cette entrée en vigueur, la Charte des droits fondamentaux de l’UE a le même caractère juridique contraignant que les Traités eux-mêmes.

      Mise à jour concernant le Traité de Lisbonne:

      • Article 6 du TUE: Il stipule désormais que la Charte a la même valeur juridique que les traités.
      • Article 52 du TFUE: Concernant les principes généraux du droit de l’UE, y compris ceux énoncés dans la Charte.

      Impact de la Charte depuis le Traité de Lisbonne:

      • La Charte est désormais régulièrement invoquée devant la CJUE et les juridictions nationales.
      • Elle est considérée comme une référence essentielle pour l’interprétation et l’application du droit de l’UE par les États membres.
      • Les décisions de la CJUE font fréquemment référence à la Charte pour éclairer la portée des droits et obligations découlant du droit de l’UE.

      En somme, la Charte des droits fondamentaux de l’UE représente une pierre angulaire dans le régime des droits fondamentaux au sein de l’Union européenne, ayant une influence significative non seulement sur le plan juridique, mais aussi sur la manière dont les droits et libertés sont perçus et appliqués dans l’ordre juridique de l’UE et de ses États membres.