La compétence juridictionnelle en droit des entreprises en difficultés
Si le code de commerce établit des règles relativement précises, il n’envisage pas les modalités de résolution de conflits de compétence. Cette question relève du décret du 27 décembre 1985.
Avant de saisir le tribunal, il convient de se poser deux questions :
On sait que Les tribunaux de commerce connaissent (L.721-3 du code de commerce) des actions en “procédure collective ” à l’égard de toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, et de toutes les actions qui s’y rattachent (voir l’article L.621-2)
I – La détermination de la compétence
En matière de compétence des tribunaux habilités à statuer sur les procédures collectives, le législateur institue un régime dérogatoire au droit commun. Il établit des règles spécifiques aussi bien à propos de leur compétence d’attribution que de leur compétence territoriale.
A / La compétence d’attribution.
1 ) La qualité du débiteur.
La compétence d’attribution dépend de la qualité du débiteur.
Le tribunal compétent est le tribunal de commerce si le débiteur est commerçant ou artisan, le TGI dans les autres cas. Cette dernière juridiction connaît donc des procédures collectives ouvertes à l’encontre des agriculteurs, des professionnels indépendants, des personnes morales de droit privé non commerçantes (sociétés civiles, coopératives…).
Il y a donc dérogation au droit commun de la compétence concernant les artisans qui, exceptionnellement, en cas de difficultés donnant lieu à une procédure collective, dépendent du tribunal de commerce. Il faut y voir une manifestation de la volonté du législateur d’assimiler de plus en plus l’artisan au commerçant.
2 ) L’extension de compétence.
Le code de commerce confère la compétence au tribunal initialement saisi s’il se révèle que la procédure ouverte doit être étendue à une ou plusieurs personnes.
Ainsi, le tribunal de commerce saisi d’une procédure collective diligentée à l’égard d’une société commerciale reste compétent pour connaître de l’extension de la procédure fondée sur la fictivité de la société où la confusion de patrimoine à l’égard d’une personne physique ou morale même si celle-ci n’a pas la qualité de commerçant.
B / La compétence territoriale.
Le tribunal territorialement compétent pour statuer sur la procédure collective est celui dans le ressort duquel le débiteur, personne morale, à son siège ou le débiteur, personne physique, a déclaré l’adresse de son entreprise ou de son activité. À défaut de siège sur le territoire français, la compétence revient au tribunal dans le ressort duquel le débiteur a le centre principal de ses intérêts en France et où le professionnel indépendant exerce l’activité.
De plus, tous les tribunaux de commerce et TGI sont compétents sans distinction du régime général et de la procédure simplifiée puisque la loi de sauvegarde des entreprises a supprimé cette distinction.
Le siège social n’est pris en considération que s’il est réel ; s’il s’avère qu’il est fictif et que le véritable centre des intérêts de la personne morale se situe dans un autre lieu, il faut, conformément à l’intérêt des créanciers et à la réalité économique, retenir la compétence de la juridiction où se situe effectivement ce centre.
Néanmoins, le législateur pose des règles particulières au transfert du siège social et dérogatoires au droit commun des règles de compétence territoriale. Le transfert du siège d’une entreprise est en principe opposable aux tiers s’il a été régulièrement publié. À défaut, la compétence devrait revenir au tribunal du lieu du siège social. Cependant, l’article 1er du décret du 28 novembre 2005 dispose qu’en cas de changement du siège d’une personne morale dans les 6 mois de la saisine du tribunal, demeure seul compétent le tribunal dans le ressort duquel se trouvait le siège initial. Délai qui court à compter de l’inscription modificative ou de la radiation de la société du RCS ; cette disposition vise à faire échec au transfert intempestif du siège social en fraude du droit des créanciers ; cependant, cette règle a suscité des critiques doctrinales et n’a pas été strictement respectée par les juridictions. La cour d’appel de Paris a écarté cette disposition dans un cas où son application se serait révélée inopportune et a reconnu la compétence du tribunal du lieu du nouveau siège qui correspondait au siège réel, bien que le transfert ait eu lieu dans un délai inférieur à 6 mois.
II – Les conflits de compétence
2 situation : – quand le débiteur possède plusieurs établissements
– lorsque la nature commerciale ou civile de son activité n’est pas clairement établie. À cet égard, le droit des entreprises en difficulté adopte des dispositions de simplification du droit commun : il faut régler sans délai ces conflits afin d’éviter que le débiteur profite d’un retard pour organiser son insolvabilité. Quand le tribunal saisi s’estime incompétent, son président doit transmettre immédiatement le dossier au premier président de la cour d’appel qui désignera la juridiction compétente, sa décision étant insusceptible de recours.
En attendant cette décision, le tribunal peut nommer un administrateur judiciaire habilité à prendre des mesures conservatoires destinées à sauvegarder la vie de l’entreprise. Il peut également ordonner, en guise de mesures provisoires, l’inventaire des biens et l’apposition dès des scellés afin de prévenir les créanciers contre toute dilapidation des biens du patrimoine du débiteur.
Ensuite, en cas de conflit de compétence, le tribunal qui se déclare incompétent peut ordonner des mesures conservatoires ou provisoires.
Enfin, lorsque sa compétence est contestée, la juridiction, si elle se déclare compétente, doit dans le même jugement statuer sur le fond. Cette obligation présente l’intérêt d’éviter qu’un conflit de compétence retarde l’ouverture de la procédure.
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