La confirmation du contrat: définition, conditions, prescription

L’extinction du droit d’invoquer la nullité par la confirmation du contrat.

La confirmation est un acte juridique par lequel une personne pouvant se prévaloir de la nullité d’un autre acte renonce à l’invoquer ; à la confirmation correspond la renonciation à l’action en nullité.

paragraphe 1 – La confirmation des actes nuls.

C’est un acte juridique unilatéral, un accord des parties n’est pas nécessaire. Le lien juridique qui va unir les parties à un contrat confirmé est un lien qui a été créé par le contrat qui se trouve validé ad initio.

La réfection du contrat nécessite un nouvel accord de volontés des deux parties, le lien juridique en cas de réfection du contrat ne naît qu’avec cette réfection, c’est-à-dire sans rétroactivité.

1°/ Le domaine de la confirmation.

La confirmation suppose que la disposition de l’action en nullité appartienne à une partie déterminée, il doit s’agir en principe d’une nullité relative. La confirmation est exclue dans le principe en cas de nullité absolue.

a) Les nullités relatives.

Le principe est que la confirmation est possible, les intérêts en jeu sont des intérêts privés ; il est normal que la personne protégée puisse renoncer à cette protection. La confirmation est toujours possible lorsque la nullité a pour fondement une incapacité, un vice du consentement, une lésion, un défaut de consentement.

Mais le principe connaît un certain nombre de limites : en premier lieu, la confirmation est écartée lorsqu’elle conduirait à mettre à néant le principe même de la protection mise en place par le législateur en le rendant illusoire ; quelque soit la cause de la nullité, il est impossible de confirmer un contrat nul en même temps qu’on le forme, la confirmation est nécessairement postérieure, on ne peut pas renoncer à faire valoir une nullité par une stipulation dans le contrat même qui en serait frappé.

Dans la rescision pour cause de lésion, le vendeur d’un immeuble ne peut valablement renoncer dans le contrat à la possibilité de rescision (si le vendeur a été lésé de plus de 7/12e dans le prix d’un immeuble, il a le droit de demander la rescision de la vente, quand même il aurait expressément renoncé dans le contrat à la faculté de demander cette rescision, et qu’il aurait déclaré donner la plus-value: article 1674 du Code civil).

En second lieu, l’inobservation des formes protectrices du consentement n’est pas susceptible de confirmation «le donateur ne peut réparer par aucun acte confirmatif les vices d’une donation entre vifs, nulle en la forme; il faut qu’elle soit refaite en la forme légale» (article 1339 du Code civil) ; toutefois, l’article 1340 permet aux héritiers de confirmer l’acte de leur auteur (la confirmation, ratification, exécution volontaire d’une donation par les héritiers ou ayants cause du donateur, après son décès, emporte leur renonciation à opposer soit les vices de forme, soit toute autre exception).

b) Les nullités absolues.

Le principe est inverse, la confirmation n’est pas possible. La nullité est fondée sur une atteinte à des intérêts généraux de la collectivité, or la renonciation d’une seule personne à la demande en nullité n’éteindrait que son propre droit alors que l’action appartient à tout intéressé.

Le principe connaît des limites, il arrive que la cause de la nullité absolue vienne à cesser, à disparaître ; il est logique que la confirmation devienne possible, lorsqu’une loi vient permettre un contrat antérieurement prohibé (vente passée au-dessus d’un prix taxé par exemple).

Quant à la nullité des donations déguisées consenties entre époux, dès lors que la nullité est liée à l’état de mariage, la donation peut être confirmée après la dissolution du lien conjugal (Civ. 1, 1er décembre 1976 ; D. 1977 p177 note Breton ; JCP 1977 n°18625 ; Defrénois 1977 p1244 obs. Aubert).

2°/ Les conditions de la confirmation.

a) Les conditions de fond.

La confirmation doit émaner des personnes pouvant se prévaloir de la nullité ; le vice qui infectait le contrat doit avoir cessé au moment de la confirmation ; l’auteur de la confirmation doit agir en pleine connaissance de cause, c’est-à-dire avec une connaissance précise du vice cause de la nullité et avec la volonté de la réparer.

b) Les conditions de forme.

La confirmation peut être expresse : elle résulte d’une volonté manifestée dans des termes exprimant formellement la volonté de confirmer l’acte qui encourait la nullité.

Une triple mention est exigée : «l’acte de confirmation ou ratification d’une obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en rescision n’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l’action en rescision, et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée» (article 1338, al. 1 du Code civil).

Cette exigence n’a trait qu’à la preuve de l’acte confirmatif, si une mention est omise, l’acte ne fera pas par lui-même preuve de la confirmation ; la confirmation ne sera pas pour autant nulle, sa preuve pourra être rapportée par tout autre moyen de preuve.

La confirmation peut être tacite, elle résulte de tout agissement de la partie qui a la possibilité de confirmer révélant l’intention de renoncer à invoquer la nullité, à condition de disposer en toute connaissance de cause d’une chose obtenue au terme du contrat dont on pouvait demander la nullité.

Celui qui allègue la confirmation tacite de l’acte par son cocontractant devra établir non seulement l’existence de ces agissements de l’autre partie, de nature à fonder la nullité, mais encore que le cocontractant connaissait le vice et avait l’intention de le réparer, intention qui doit résulter clairement des circonstances.

3°/ Les effets de la confirmation.

  • a) Entre les parties.

La nullité ne peut plus être invoquée ni par voie d’action ni par voie d’exception ; la confirmation emporte un effet rétroactif, l’acte est considéré valable ad initio; s’il existe plusieurs titulaires à l’action en nullité et que la confirmation n’est le fait que de certains, l’acte sera validé seulement à l’égard des confirmants, les autres conservent leur droit d’agir en nullité.

  • b) Réserve du droit des tiers.

La confirmation de tout acte nul produit ses effets «sans préjudice du droit des tiers» (article 1338, al. 3 du Code civil in fine). Les tiers sont les ayants cause à titre particulier du confirmant, ceux qui, entre la formation du contrat et sa confirmation, ont acquis un droit auquel la confirmation pourrait porter atteinte, la confirmation sera donc inopposable à ces tiers.

A, mineur, vend un bien à B, le contrat encourt la nullité ; devenu majeur, A revend le bien à C, puis confirme la première vente ; l’application de la règle selon laquelle la confirmation produit ses effets rétroactivement se traduit par une seconde vente sans valeur. L’article 1338, al. 3 doit éviter ce résultat, la seconde vente est régulière, la confirmation de la première vente est sans effet à l’égard du second acquéreur.

paragraphe 2 – La prescription.

La règle selon laquelle les actions s’éteignent par le jeu de la prescription s’applique aux actions en nullité absolues ou relatives, mais le délai varie : il est de 30 ans pour la nullité absolue (toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par 30 ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d’en rapporter un titre, ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi: article 2262 du Code civil), de 5 ans pour l’action en nullité relative (article 1304, al. 1 du Code civil). Les délais de 30 et 5 ans sont des délais ordinaires, il existe des délais plus courts dans certaines matières. La nullité peut être invoquée par voie d’action ou par voie d’exception.

1°/ Par voie d’action.

a) Les nullités absolues.

L’action en nullité absolue se prescrit par 30 ans, c’est la prescription de droit commun, dont le point de départ est le jour de la conclusion du contrat, mais parfois la loi admet une prescription plus courte : la nullité des actes constitutifs d’une société se prescrit par 3 ans (droit des sociétés).

b) Les nullités relatives.

«Dans tous les cas où l’action en nullité ou en rescision d’une convention n’est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure 5 ans» (article 1304, al. 1 du Code civil) ; en dépit de ces termes généraux, ce texte n’intéresse que l’action en nullité relative. Ce délai était autrefois de 10 ans, la loi du 3 janvier 1968 l’a réduit à 5 ans.

α) Le fondement.

Selon la conception classique, le fondement est une présomption de confirmation, le contractant renoncerait à exercer l’action en nullité s’il a laissé passer le délai pendant lequel il pouvait agir en nullité. Le délai prévu par l’article 1304 du Code civil est bien un délai de prescription, qui peut être suspendu (article 2251s cc) et non pas un délai préfix.

En réalité, le fondement de cette règle réside dans l’intérêt général, plus précisément dans un souci de sécurité des relations juridiques : à la différence de la nullité absolue, la nullité relative ne peut souvent être invoquée que par une personne, il est normal que les autres, au premier rang desquelles le cocontractant, ne demeure pas trop longtemps exposées à un risque d’annulation du contrat.

β) Le domaine de cette prescription.

L’article 1304 du Code civil ne vise que l’action en nullité, en rescision : il s’agit de la sanction de certaines conditions de validité des conventions.

Il est inapplicable à des actions autres que l’action en nullité, qui peuvent avoir pour effet de priver le contrat de ses effets (action en résolution), à des actions en révocation d’une donation ou d’un testament, à l’action paulienne, à l’action en déclaration de simulation.

D’autre part, toutes les actions en nullité relative ne sont pas soumises à ce délai de 5 ans, certaines sont enfermées dans un délai plus court : l’action en rescision d’un contrat de vente immobilière est enfermée dans un délai de 2 ans (la demande n’est plus recevable après l’expiration de 2 années, à compter du jour de la vente: article 1676 du Code civil), c’est un délai préfix.

γ) Le point de départ du délai.

Il devrait s’agir du jour du contrat, mais il est retardé dans deux hypothèses : en cas de nullité fondée sur un vice du consentement «ce temps ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé; dans le cas de dol ou d’erreur, du jour où ils ont été découverts» ; par ailleurs, en cas de nullité résultant d’une incapacité, «le temps ne court, à l’égard des actes faits par un mineur, que du jour de la majorité ou de l’émancipation; et à l’égard des actes faits par un majeur protégé, que du jour où il en a eu connaissance, alors qu’il était en situation de les refaire valablement » (article 1304, al. 2 & 3 du Code civil), c’est-à-dire à partir de la cessation de l’incapacité.

2°/ Par voie d’exception.

A l’action en nullité éteinte va survivre indéfiniment l’exception, «quae temporalia ad agendum perpetua sunt ad excipiendum» : les droits qui sont temporaires lorsqu’on les exerce par voie d’action sont perpétuels lorsqu’on les exerce par voie d’exception. Après l’expiration du délai, l’action en nullité est éteinte, le titulaire du droit d’invoquer la nullité n’a plus la possibilité d’introduire une instance pour agir en nullité, mais si son cocontractant lui oppose le contrat (action en exécution), il pourra toujours invoquer sa nullité comme un moyen de défense.

Si le contrat a été exécuté par les deux parties, une fois écoulé le délai il est impossible de revenir sur l’exécution. Si le contrat n’a pas encore été exécuté, il est alors impossible d’obtenir l’exécution du contrat, la partie à laquelle le cocontractant demandera l’exécution pourra opposer perpétuellement la nullité par voie d’exception. Le fondement de la règle doit être recherché dans le fondement de toute prescription, c’est-à-dire dans le souci de consolider les situations juridiques.

En outre, la règle fait obstacle à une possible fraude ; en effet, à une partie qui attendrait l’expiration du délai de prescription pour agir en exécution forcée, l’autre pourra toujours invoquer l’exception de nullité. Quant au domaine d’application, la maxime s’applique que la nullité soit relative ou absolue ; en revanche elle ne s’applique pas aux délais préfix, notamment de l’article 1676 sur la rescision pour cause de lésion.