La corruption : définition, éléments constitutifs, peine
La corruption peut se définir comme l’agissement par lequel une personne investie d’une fonction déterminée, publique ou privée, sollicite ou accepte un don, une offre ou une promesse en vue d’accomplir, retarder ou omettre d’accomplir un acte entrant, d’une façon directe ou indirecte, dans le cadre de ses fonctions.
La délinquance n’ayant pas de frontière, et même encouragée dans les relations internationales, la France est tenue par des accords au sein de l’Union Européenne. Convention du 26 janvier 95 sur la protection des intérêts financiers des Communautés Européennes. Convention du 26 mai 1997 sur lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés Européennes ou des Etats membres de l’Union Européenne. Convention de l’OCDE du 17 décembre 1997 sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers. Convention du 31 octobre 2003 des Nations Unies contre la corruption. La France a transposé des règles contenues dans ces Conventions par : loi 30 juin 2000 à des fins de lutte contre corruption internationale, loi du 13 novembre 2007 sur la lutte contre la corruption :
- est venu modifier sur certains points ces dispositions, pour meilleure adaptation aux exigences internationales.
- ajoute une section sur les « atteintes à la justice » ayant pour objet de réprimer les atteintes à l’action de la justice au plan international → réprimer les actions qui se développent à l’égard du personnel judiciaire international.
En matière interne, il existe une pluralité d’incrimination :
- Cours de Droit pénal des affaires
- L’intention frauduleuse, l’élément moral de la faute de gestion
- L’acte du dirigeant contraire à l’intérêt social?
- La sanction et la réparation des fautes de gestion
- Les fautes de gestion des dirigeants contraires à l’intérêt social
- Le caractère trompeur des pratiques commerciales
- Qu’est ce que la pratique commerciale de l’article L121-2 ?
- article 439-9 : réprimande la corruption des autorités judiciaires.
- articles 441-8 et suivants : délivrance de faux certificats.
Deux infractions de corruption sur la vie des affaires :
- infraction de corruption passive (article 432-11).
- infraction de corruption active (article 432-1).
Point commun : le corrompu présente une certaine qualité par la loi : exerce une fonction publique :
- article 432-11 : « exerce une fonction publique ».
- article 432-1 : à l’encontre d’une personne « exerçant une fonction publique ».
A coté de ces deux incriminations sur le secteur public, il existe une incrimination dans le secteur privé, autrefois, on parlait d’infractions commises par les salariés d’une entreprise privée, et figuraient dans le Code du travail. Depuis la loi 4 juillet 2005 transposant une décision cadre du Conseil de l’Union Européenne, elle trouve désormais sa place dans les articles 445-1 à 445-4 du Code pénal : prévoit l’infraction de corruption active commise par des personnes n’exerçant pas une activité publique. Elle n’est pas fondamentalement différente de celle commise dans secteur publique. La seule distinction essentielle : la qualité du corrompu.
Cet éclatement des incriminations dans le secteur pénal témoigne :
- une influence des sources internationales, et du fait que la France, étant tenue par divers engagements internationaux, se doit de les transposer en droit interne (c : loi 2000/2007).
- un souci croissant de moralisation dans le secteur public, privé, dans la justice, se traduisant par une pénalisation croissante.
A la lecture de ces infractions, on pourrait penser que la nature active ou passive de l’infraction révèle l’élément moral de l’infraction :
- Infraction de corruption passive : correspond à des abstentions.
- Infraction de corruption active : correspond à des actes positifs.
- révélant la distinction en droit pénal : infraction d’action/d’omission.
La distinction est en réalité relative à l’auteur de l’infraction :
- Infraction de corruption passive : commise par la personne corrompue.
- Infraction de corruption active : commise par la personne qui corrompt.
- I) Définition de la corruption
C’est ainsi que l’article 432-11-1° incrimine la corruption dans le secteur public : « 1) le fait pour une personne, dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou d’un mandat électif public ; 2) de solliciter sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, promesses ,dons, présents et avantages quelconque ; 3) pour elle-même ou pour autrui ; 4) pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir, un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou faciliter celui-ci ». Article 433-1 : corruption active est le fait par quiconque, de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres ou promesses dons, présents et avantages quelconques pour elle-même, ou à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif…..etc..
Distinction infraction de corruption passive/infraction de corruption active
- Matérialité différente : les infractions de corruption sont des actes qui, dans la matérialité, revêtent une nature différente :
- Infraction de corruption passive : le corrompu se rend coupable : aussi bien
- le fait de répondre aux sollicitations de corruption,
- que de proposer, de la part de la personne exerçant une fonction publique, de verser un avantage en échange de sa corruption
- Infraction de corruption active : se rend coupable
- de répondre au sollicitant émanant de la personne exerçant une fonction publique,
- soit en sollicitant elle-même cette personne à des fins de corruption
- Infraction de corruption passive : le corrompu se rend coupable : aussi bien
- Intérêt de la dualité de l’incrimination : présence de deux infractions autonomes, indépendantes, en ce sens qu’elles répondent à des EC propres
– permet de détacher la répression du corrupteur par rapport à celle du corrompu
le corrompu/corrupteur pourront être poursuivi de manière indépendante l’une de l’autre : présence de 2 auteurs d’infractions différentes
permet de la distinguer de l’infraction de concussion (article 432-10 réprime le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique, ou chargée d’une mission de service public, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions impôts ou taxes publiques, une somme qu’elle sait ne pas être due ou excéder ce qui est dû. réprimé de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amendes).
- Points communs :
- commise dans un contexte général de pouvoir.
- protègent la même valeur sociale : pour objet de dissuader les personnes exerçant une fonction publique, de s’enrichir en faisant un usage abusif des pouvoirs qu’elles détiennent. La personne se rend coupable de l’infraction en utilisant les prérogatives attaché es à sa fonction afin d’en faire un usage détourné. Cette infraction est évoquée dans le Livre IV.
- Différence :
- la personne exerçant une fonction réclamera une somme excessive ou même totalement indue à une personne qui est sa victime. Illustré par la Chambre criminelle : s’est rendu coupable de concussion, le maire qui imposait à chaque promoteur ou particuliers, le paiement d’une certaine somme d’argent, souhaitant construire un logement nouveau ou sollicitant un permis de construire, les sommes étaient ainsi déposé es sur un compte occulte.
- Dès lors que la proposition de corruption sera acceptée par celui qui la sollicite, repose sur une dualité de délinquant. Cependant, il se peut que la démarche entreprise par l’un (proposition de corruption), ne reçoit pas l‘agrément de son destinataire. L’infraction sera dès lors commise par celui qui l’aura commise en sollicitant la corruption sans succès. Arrêt de la Cour de cassation du 4 novembre 1948 : l’infraction de corruption passive constitue un délit distinct de celui de l’infraction de corruption active.
- Conséquence pratique : l’infraction de corruption active ne saurait jamais être envisagée sous l’angle d’un acte de complicité de l’infraction de corruption passive : (rappelé par un arrêt de la Chambre criminelle du 30 janvier 1989)
Conclusion : bien que Infraction de corruption active/infraction de corruption passive : différentes, points commun essentiel tenant à la qualité du corrompu : personne exerçant une fonction publique. On peut voir en cette qualité une condition préalable, préexistantes à ces infractions,
- II) Condition préalable commune tenant à la qualité de corrompu.
Corrupteur : toute personne peut être corrupteur et se rendre coupable d’une infraction de corruption active (article 433-1 vise « quiconque »)
Corrompu : en revanche, tant pour l’infraction de corruption active/infraction de corruption passive, seules certaines personnes peuvent être corrompues : personnes dépositaires de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investit d’un mandat électif. Le corrompu est soit :
- auteur de l’infraction de corruption passive (article 32-11 « celui qui se rend coupable »..) : celui qui commet l’infraction de corruption passive.
- celui que le corrupteur, auteur de l’infraction de corruption active, aura voulu corrompre ou aura effectivement corrompu.
- Personnes dépositaires de l’autorité publique.
- représentants de l’Etat : Président, membres du gouvernement, préfets, sous-préfets, ambassadeurs consuls
- fonctionnaires de l’Etat : membre de l’administration qui exercent quelque soient leur place dans la Hiérarchie, des attributions de puissance publique, dans l’ordre administratif :
- fonctionnaires de l’administration fiscale.
- fonctionnaires de police/gendarmerie, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 5 février 2001 : commissaire de police délivrait des autorisations tardives de débits de boissonsen contrepartie d’avantages (repas gratuits..) sont des dépositaires de l’autorité publique.
- professeurs : arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 1985 : étudiant en droit, ajourné de ses examens glisse un chèque dans la poche de son correcteur pourréévaluation de ses notes : l’enseignant est coupable d’une infraction de corruption passive.
- fonctionnaires de l’administration pénitentiaire.
- magistrats ne sont pas concernés, car infractions particulières leurs sont propres.
- Personnes chargées d’une mission de service public.
Doctrine : personne dont il résulte de son statut légal ou réglementaire que, sans disposer de pouvoirs qui lui seraient conférés en vertu d’une délégation de service public, est cependant chargé, à titre permanent ou temporaire, d’exercer une fonction, ou d’accomplir des actes qui ont pour but de satisfaire à un intérêt général, permet de retenir :
- pré posés et agents de l’administration placés sous le contrôle de la puissance publique :
- chambre de commerce et d’industrie.
- hôpitaux (arrêt de la Chambre criminelle de 2006 : employé d’une morgue est une personne chargée d’une mission de service public).
- auxiliaires de justice (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 1998 : AJ, arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation de 2005 : mandataire judiciaire).
- membres des commissions ayant pour objet de donner des avis à des autorités publiques (A.M.F., C.O.B., arrêt de la Chambre criminelle de 2003 : journalistes engagés par une chaine de TV de service public).
- C) Personnes investies d’un mandat électif.
- élus traditionnels :
- membres d’un Conseil général, municipal,
- arrêt de la Chambre criminelle de 1966 : président élu d’une Chambre d’héritiers.
- sont exclus : personnes élus dans le cadre d’un mandat privés (ex : PDG d’une SA).
- élus traditionnels :
- Du point de vue international
Si le corrompu est un fonctionnaire européen ou membre de la Commission Européenne ou président Européen, ou plus largement, personne dépositaire de l’autorité publique, chargé d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif public, dans un Etat étranger, ou au sein d’une organisation internationale publique –> application des articles 435-1 et 435-3 sur la corruption internationale
III) Éléments constitutifs.
La corruption implique donc la violation, par le coupable, des devoirs de sa charge. Le droit pénal français distingue deux sortes de corruption :
− La corruption passive (article 432-11 du Code pénal) lorsqu’une personne exerçant une fonction publique profite de cette fonction en sollicitant ou en acceptant des dons, promesses ou avantages en vue d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir un acte de sa fonction cette personne reçoit le nom de corrompu.
− La corruption active (article 433-1 du Code pénal) lorsqu’une personne physique ou morale obtient ou essaie d’obtenir, moyennant des dons, des promesses ou avantages, d’une personne exerçant une fonction publique, qu’elle accomplisse ou retarde ou s’abstienne d’accomplir ou de retarder un acte de sa fonction ou un acte facilité par elle ; le tiers reçoit le nom de corrupteur.
- Répression.
-
- Personne physique.
Peines principales applicables aux personnes physiques sont identiques, qu’il s’agisse de punir infraction de corruption passive/infraction de corruption active :
– dans le secteur public (articles 432-11 et 433-1) : 10 ans et 150 000 euros
– dans le secteur privé (articles 445 – 1 et 445-2) : 5 ans et 75 000 euros.
Peuvent s’ajouter les peines complémentaires des articles 432-17 (infraction de corruption active) et 433-22 (infraction de corruption passive) : elles sont identiques infraction de corruption active/Infraction de corruption passive. Deux fois plus élevée pour la corruption dans le secteur public que privé → témoigne de la sévérité que le législateur veut manifester par rapport au secteur public.
2) Personne morale.
Article 131-38 : règle générale : amende = quintuple de celle encoure par une personne physiques = 750 000 euros.
- B) Procédure.
- Prescription de l’action publique.
- a) Durée.
Ces infractions sont des délits : durée de l’action publique est de 3 ans.
- b) Fixation du point de départ.
Dépend de la nature de l’infraction (instantané e/continue). Or, les infractions de corruption active/infraction de corruption passive sont instantanées –> le point de départ fixé au jour de la proposition car c’est à ce moment qu’est définitivement consommé l’infraction de corruption.
Précision de la jurisprudence (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 31 décembre 1972) lorsqu’il y a une perception d’un avantage corrélatif à cette proposition, c’est au jour de cette perception que le point départ sera fixé.
Il se peut que l’infraction implique une pluralité de remises : Chambre criminelle : chaque remise constitue l’expression d’une criminalité globale. Analyse : les délits successifs se sont renouvelés aussi longtemps qu’a existé le concert frauduleux. Dès lors, la prescription ne commencera à courir qu’à compter du dernier versement (arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 novembre 1995).
2) Exercice de l’action civile.
La question qui se pose est de savoir si l’action civile qui aurait pour objet la réparation d’une telle infraction de corruption est recevable, en raison de la valeur protégée par l’incrimination.
- a) En théorie : protection de l’intérêt général.
On peut y voir en effet le souci de protéger l’intérêt général (c’est pourquoi, figurent dans Livre IV « Délits c/ la nation ») ce qui aurait pour conséquence d’exclure toute possibilité d’action civile, cette dernière supposant qu’une personne soit victime à titre particulier d’une infraction.
- b) Prise de position par la jurisprudence.
La Chambre criminelle n’a pas repris cette analyse d’incompatibilité entre infraction de corruption/valeur protégé. Elle considère que, si l’infraction de corruption doit s’analyser comme ayant vocation à protéger l’intérêt général, elle ne doit pas exclure la possibilité de protéger un intérêt particulier.
Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er décembre 1992 : un contribuable avait été sollicité par un fonctionnaire de l’administration fiscale d’une diminution de l’impôt moyennant rémunération. Est recevable la constitution de partie civile du contribuable ainsi sollicité par le corrompu.
Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 21 mai 1997 : recevabilité de l’action civile d’une personne morale (office public d’HLM) victime d’une infraction de corruption.
Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 8 février 2006 : la ville de Cannes demandait la réparation de son préjudice moral résultant d’une infraction de corruption commise par le maire de la ville. La victime, qu’elle soit personne physique ou personne morale, peut demander réparation de son préjudice résultant de l’infraction de corruption, qu’il s’agisse d’un préjudice maté riel ou même moral.