La notion d’acte administratif unilatéral
Un acte administratif unilatéral est un acte unilatéral normateur lorsqu’il est édicté par une autorité administrative dans le cadre de ses fonctions. Il existe des actes administratifs pris par des personnes privées sous certaines conditions. La notion d’acte administratif est souvent liée à son statut contentieux en ce qu’un acte administratif est susceptible de recours pour excès de pouvoir.
Distinction entre acte administratif unilatéral et un contrat : un acte unilatéral administratif produit des effets de droit en dehors de toute acceptation par son destinataire alors que le contrat est un accord de volonté.
Attention, la distinction entre un acte administratif unilatéral et un contrat est de plus en plus floue : le contenu des contrat est de plus en plus souvent réglementé et il y a moins d’acceptation car le contrat est imposé dans certains cas.
En principe, un acte pris par une personne publique est un acte administratif. La qualité de l’auteur de l’acte dans ce cas là suffit. Le critère organique suffit dans ce cas là.
Si l’acte est réglementaire, on se réfère à l’arrêt du Conseil d’Etat du 6 décembre 1907 « compagnie des chemins de fer de l’est ».
Si l’acte est individuel, on se réfère à l’arrêt du 13 juillet 1967 « Allegretto ».
A) Les actes de droit privé pris par des personnes publiques
Cette hypothèse, on la doit aux conclusions de Romieu dans un arrêt du Conseil d’Etat du 6 février 1903 « Terrier ». Romieu énonce que tout ce qui concerne la gestion des services publics relève de la gestion publique et du droit administratif mais il arrive qu’une personne publique puisse agir comme un simple particulier, c’est ce qu’il appelle la gestion privée.
Dans ce cas, leurs actes sont des actes de droit privé. Par exemple, on la gestion de tout le domaine privé des collectivités publiques ou tous les actes individuels concernant le fonctionnement des services publics industriels et commerciaux (eau, électricité, téléphone, transport…).
B) Les actes administratifs pris par des personnes privées
1) La reconnaissance du caractère administratif des actes d’organismes privés participants à un service public
On a trois arrêts :
– L’arrêt du Conseil d’Etat du 13 mai 1938 « caisse primaire aide et protection » : en France les caisses primaires d’assurance maladie sont des personnes privées. Le Conseil d’Etat admet l’existence de personnes privées chargées de l’exécution d’un service public.
– L’arrêt du Conseil d’Etat du 13 juillet 1942 : le Conseil d’Etat admet que les décisions prises par un organisme privé participant à un service public constituent des actes administratifs.
– L’arrêt du 2 avril 1943 « Bouguen » du Conseil d’Etat : le conseil applique son principe à une juridiction ordinale.
2) La détermination précise des critères
On distingue deux hypothèses :
– La personne privée gère un service public industriel ou commercial (un SPIC) : ses actes individuels sont toujours de droit privé. Ses actes réglementaires (caractère général) ne sont de droit administratif que s’ils concernent l’organisation du service public.
Arrêt du tribunal des conflits du 15 janvier 1968 « époux Barbier ».
– La personne privée exploite un service public administratif (tout ce qui est éducation, justice, services sociaux) : il peuvent prendre des actes administratifs si ces actes expriment des prérogatives de puissance publique. C’est une prérogative normalement inconnue en droit privé.
Pour les actes réglementaires, on a l’arrêt du 22 novembre 1974 et pour les actes individuels on a l’arrêt du Conseil d’Etat du 13 janvier 1961.
II) Acte administratif / fonction administratives
L’administration relève de l’exécutif. Il n’y a pas de problème pour les services administratifs des ministères qui peuvent édicter des actes administratifs. On a un problème dans deux cas :
– Le Président, le Premier ministre et le gouvernement assurent à la fois une fonction administrative mais aussi une fonction politique.
– Les pouvoirs judiciaire et législatif ont des services qui peuvent être considérés comme administratifs et dont les décisions peuvent être considérées comme administratives.
A) Les actes administratifs des institutions juridictionnelles et parlementaires
1) Les organes parlementaires
Les règlements des assemblées, les décisions des bureaux des assemblées ne sont pas des actes administratifs. Le Conseil d’Etat dans son arrêt du 5 mars 1999 « Président de l’Assemblée nationale » dit que les actes relatifs à la passation des marchés publics de l’Assemblée nationale relèvent du juge administratif.
Dans son arrêt du 4 juillet 2003 « Papon », le Conseil d’Etat a décidé que le régime des pensions des anciens parlementaires fait parti du statut de parlementaire et se rattache à l’exercice de la souveraineté nationale par le membre du parlement est n’est donc pas une décision administrative.
2) Les organes juridictionnels
Les décisions relatives à l’organisation du service public de la justice sont des actes administratifs (arrêt du tribunal des conflits du 27 novembre 1952 « préfet de la Guyane »).
En revanche, la distinction entre une décision de justice et un acte administratif n’est pas toujours aisée à établir notamment parce qu’on a des institutions à cheval entre l’administration et la justice. Une décision de justice est contestable par voix de justice (voie d’appel) alors qu’un acte administratif est contestable par la voie du recours pour excès de pouvoir. Dans l’arrêt du 12 décembre 1953, le Conseil d’Etat retient un critère matériel reposant sur la mission de l’organe dont on veut contester la décision.
On a l’arrêt « Brouant » du 25 octobre 2002 où le Conseil d’Etat dit que le règlement intérieur du conseil constitutionnel n’est pas un acte administratif. Le Conseil d’Etat a été accusé de peu de courage à l’encontre du conseil constitutionnel.
B) Les actes non administratifs du pouvoir exécutif : les actes de gouvernement
Cette catégorie d’acte de gouvernement permet de distinguer la fonction administrative et la fonction gouvernementale. A l’origine, le critère de distinction reposait sur le mobile de l’auteur de l’acte. Etait un acte de gouvernement un acte reposant sur un mobile politique. L’arrêt qui met en œuvre ce critère est l’arrêt du Conseil d’Etat du 19 février 1875 « prince Napoléon » à propos de la révocation de Napoléon.
Aujourd’hui, la définition repose sur la notion de fonction gouvernementale. Il y a deux catégories qui relèvent normalement de la fonction gouvernementale et qui sont des actes de gouvernement.
La particularité de l’acte de gouvernement est qu’il bénéficie d’une immunité juridictionnelle car il n’est pas susceptible de recours devant le juge administratif et il n’y a pas de juge compétent pour les actes de gouvernement.
1) Les relations entre l’exécutif et les autres pouvoirs institués
Ce sont les relations entre l’exécutif d’une part et le pouvoir judiciaire ou législatif d’autre part. Entrent dans la catégorie des actes de gouvernement toutes les décisions liées à la procédure législative : le dépôt d’un projet de loi, le refus d’un tel dépôt, l’engagement de la responsabilité du gouvernement et toutes les décisions du type demande du dernier mot à l’Assemblée nationale. Aussi, la décision de mettre en application l’article 16 est un acte de gouvernement. C’est l’arrêt du 2 mars 1962 du Conseil d’Etat « Rubin de Servens ».
L’arrêt du Conseil d’Etat du 9 avril 1999 dit que la nomination d’un membre du conseil constitutionnel par le Président est un acte de gouvernement.
Le refus de délasser une loi qui empiète sur le domaine réglementaire n’est pas un acte de gouvernement : c’est un acte administratif car c’est la première étape de l’expression du pouvoir réglementaire. En effet, quand le gouvernement déclasse une loi, c’est pour édicter un acte administratif. L’arrêt du 3 décembre 1999 du Conseil d’Etat « association ornithologique et mammalogique de Saône-et-Loire » confirme cela.
2) Les relations internationales
Les décisions relatives à la conduite des relations internationales et diplomatiques échappent au juge administratif. C’est l’arrêt de 1995 « Greenpeace » : la décision de Chirac de reprendre les essais nucléaires est un acte de gouvernement. L’arrêt du Conseil d’Etat du 5 juillet 2000 « Mégret » dit que la décision d’envoyer les troupes au Kosovo est un acte de gouvernement.
Est un acte administratif l’acte détachable des relations internationales ; par exemple, les décrets d’extradition
III) Acte administratif / acte normateur
La notion d’acte administratif est liée à son statut contentieux. Certains actes pris par des administrations ne sont pas susceptibles de recours car ce ne sont pas des actes normateurs. Un acte normateur est un acte modifiant l’ordonnancement juridique. Par définition, un acte administratif est un acte normateur.
Ne sont pas normateurs les actes préparatoires. Ce sont tous les avis, les consultations, les recommandations, ou les propositions d’organismes qui n’aboutissent à aucune décision ou qui préparent une décision.
Lorsque l’acte prépare une décision, le requérant doit attendre l’édiction de la décision finale pour former un recours mais il pourra contester la régularité de l’acte préparatoire lors de sinon recours contre la décision finale.
On a les décisions confirmatives ou les actes recognitifs qui sont des actes non normateurs : ce sont des actes qui confirment un acte antérieur.
A) Les circulaires
La circulaire est un texte d’application d’une norme de droit supérieure. On deux arrêts fondamentaux : Conseil d’Etat du 29 janvier 1954 « notre dame du Kreisker » :
La vrai circulaire est celle qui est uniquement interprétative et fait partie de ces actes non normateurs.
La fausse circulaire, la circulaire réglementaire, est celle qui modifie le droit et devient alors un acte administratif normateur susceptible de recours.
L’arrêt « Duvignère » du 18 décembre 2002 du Conseil d’Etat change l’Etat du droit : la recevabilité du recours est liée ay caractère impératif de la circulaire. Ce n’est pas le caractère normateur de la circulaire qui permet de dire que c’est un acte administratif, c’est son caractère impératif.
B) Les directives
Il s’agit d’une mesure d’encadrement édictée par un supérieur hiérarchique à l’égard de son subordonné lui indiquant une attitude à adopter et encadrant sa conduite par la définition d’orientations générales.
La situation est particulière car l’administration disposait dans un domaine d’un véritable pouvoir discrétionnaire ou d’une grande marge de manœuvre et elle se pose des limites par elle-même grâce aux directives.
La question est de savoir si l’administration est en droit de s’encadrer, de se poser des règles pour le traitement d’un ensemble de dossier dans un domaine particulier. L’administration va fixer des règles de droit nouvelles là où avant il n’y en avait pas.
L’arrêt du Conseil d’Etat du 11 décembre 1970 « crédit foncier de France » : il s’agissait d’un problème de refus de subventions. Le commissaire du gouvernement se propose d’admettre qu’une mesure individuelle puisse consister en une référence à la doctrine que l’administration s’est donnée dès lors que la même doctrine est appliquée à toutes les situations semblables.
Le Conseil d’Etat a adopté le raisonnement de son commissaire de gouvernement : une directive régulière doit se borner à définir des conditions générales en vue de diriger les interventions de l’autorité publique compétente sans édicter de conditions nouvelles et sans méconnaître le but poursuivi lors de la création du fond de subvention.
Une directive peut être écartée pour deux raisons: d’abord pour examiner la situation particulière du demandeur ou bien pour faire prévaloir un motif d’intérêt général.
Le recours direct contre une directive est impossible car le recours pour excès de pouvoir n’est pas recevable contre une directive. Pour contester une directive, le requérant va attaquer la décision prise par l’administration sur le fondement de la directive et à l’appui de ce recours, il pourra invoquer l’irrégularité de la directive.
C) Les mesures d’ordre intérieur (MOI)
Ce sont des mesures faiblement normateurs ne concernant que le fonctionnement interne d’un service. L’idée est que certaines mesures ont un impact tellement faible sur l’ordonnancement juridique et/ou sur le droit des administrés que le recours contre ces actes est irrecevable.
Le Conseil d’Etat dans son arrêt du 11 janvier 1967, a dit qu’un étudiant ne pouvait attaquer son affectation dans un groupe de TD.
La tendance est à la réduction de la catégorie des MOI. Cela signifie que le juge a admis le recours contre des décisions antérieurement considérées comme des MOI.
On a trois arrêts:
– Celui du Conseil d’Etat du 2 novembre 1992 « Kerouaa »: le recours est possible contre un règlement intérieur d’un établissement d’enseignement. C’est le problème du port du foulard.
– CE ass. du 17 février 1995 « Hardouin »: les militaires peuvent attaquer les punitions dont ils font l’objet.
– CE ass. du 17 février 1995 « Marie »: recours possible contre la punition infligée à un détenu.
Un acte considéré antérieurement comme une MOI va être susceptible de recours lorsqu’il porte atteinte aux droits fondamentaux ou aux libertés publiques de son destinataire.
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