Le transfert de propriété et le transfert des risques

TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ ET DE RISQUE 

  Le contrat de vente entraine des effets réels et des effets personnels. Ici nous évoquerons les effets réels que sont le transfert de propriété et le transfert des risques.

En principe, le transfert de propriété et le transfert des risques ont lieu dès que le vendeur et l’acheteur se sont mis d’accord sur la chose et sur le prix, même si le prix n’est pas payé et si la chose n’est pas livrée. Mais il y a un certain nombre d’exceptions à cette règle.  

 Section 1 – La distinction entre transfert de propriété et le transfert des risques

Paragraphe 1er : Le transfert de propriété.

A/ Prévu par le Code civil.

C’est un effet du contrat et non une obligation du vendeur. Le contrat de vente ne fait pas naitre une obligation de dare (transfert de propriété). Un tel transfert n’existe pas même si le Code civil prévoit à l’article 1101 l’obligation de donner. Ce transfert de propriété solo consensu a été instauré par les rédacteurs du Code mais jusque la il était établit que le transfert avait lieu grâce à la tradition (sans remise matérielle, pas de transfert de propriété). Cette condition de la tradition avait toutefois revêtu de plus en plus un caractère abstrait. Aboutissant à une clause type, même présumée, selon laquelle l’acheteur avait été mis en possession du bien. Les rédacteurs du Code civil ont parachevé une pratique bien achevée. Un transfert de propriété solo consensu est parfaitement adapté tant que le transfert de propriété est occulte, ce qui pose un problème car il s’agit d’un système d’opposabilité erga homnes. D’où l’existence de tous les systèmes de publicité en vu de protéger le transfert de propriété.

 

B/ Aménagé par les parties.

Nous retiendrons deux hypothèses:

–          La vente en grande surface, en libre service. Si on applique 1583, dès lors que l’on prend un article, on en est propriétaire, on pourrait donc partir sans payer. Soit on considère que les parties ont conclue une clause implicite de réserve de propriété, soit il a été exprimé que la vente est retardée au moment de la remise du prix.

–          Il s’agit de la clause de réserve de propriété selon laquelle l’acheteur ne devient propriétaire qu’après le paiement intégrale du prix. Ici, la propriété joue le rôle de garantie de paiement. Ce droit réel principal joue alors un rôle de droit réel accessoire.

Quelques règles de droit commun :

–          Toujours préciser si le prix est rétroactif ou pas.

–          Puisque le vendeur est propriétaire jusqu’au complet paiement du prix c’est sur lui que pèsent les risques (car le transfert de propriété n’est toujours pas effectif). Si le prix n’est pas entièrement payé le vendeur pourra revendiquer son bien, il ne fait pas valoir un droit de créance mais il fait valoir un droit réel. La condition est que la chose soit encore en nature dans le patrimoine de l’acheteur. Or un acheteur peut déjà avoir revendu l’immeuble.

En matière de procédure collective, l’efficacité de la Clause de Réserve de Propriété est maximale. La stipulation unilatérale du vendeur est considérée comme acceptée par le vendeur sauf disposition contraire. Cela aboutit à une incohérence de notre droit, tant que l’acheteur est in bonis, il n’a pas acheté la Clause de Réserve de Propriété mais dès qu’il est en procédure collective, alors que rien n’a changé, la Clause de Réserve de Propriété sera considérée comme acceptée.

Deuxième infléchissement : un vendeur ne pourra revendiquer son bien que s’il est en nature dans le patrimoine de l’acheteur ainsi qu’individualisée. Autrement dit la revendication des choses fongibles n’est pas possible. Sauf en procédure collective L621-122 du Code de commerce. La jurisprudence va encore plus loin car considère qu’il peut se faire rendre des marchandises dont ont sait qu’il ne les a pas livrées : Com 5 mars 2002. Le propriétaire en cas de revente du bien, pourra revendiquer la créance du prix.

 

Paragraphe 2ème : Le transfert des risques.

Article 1138 alinéa 2 « res perit domino » prévoit que si la chose périt, c’est le propriétaire qui doit en supporter le risque. La charge des risques est liée à la propriété. Si la chose périt après la conclusion de la vente, se sera à la charge de l’acheteur, il devra verser le prix bien que le vendeur n’ait plus rien à lui transmettre. Si la vente est annulée, elle l’est rétroactivement, les risques demeurent à la charge du propriétaire (il y aura restitution du prix et pas de l’objet). En cas de vente à distance, le transfert a lieu lors de la remise du bien au transporteur sauf lorsque la vente a lieu sous condition suspensive. L’article 1182 du Code civil prévoit la solution inverse. Qui a les risques doit s’assurer.

La Convention de vienne, qui contrairement au droit français de la vente, dissocie le transfert des risques du transfert de propriété. Le transfert a lieu soit lorsque de la chose est livrée soit lorsque la chose est remise au premier transporteur.

Section 2 – D’après l’Article 1582. Le principe est que le transfert intervient immédiatement.

 

  • 1 Le principe du transfert immédiat de la propriété

Parfois quelques exceptions. Principe selon lequel dès que ya accord sur chose et prix, la propriété est transférée.

Ce principe du transfert immédiat est intéressant d’un double point de vue :

  •     intérêt pratique : ce principe présente de l’intérêt. Lequel ? Traditionnellement on fait valoir que le principe du transfert immédiat de la propriété est un encouragement à la circulation des biens au commerce et à l’industrie au sens de l’activité productive. En effet, donner à l’acheteur la possibilité de devenir immédiatement propriétaire, c’est lui donner la possibilité d’acheter pour revendre ou d’acheter pour transformer, sans attendre d’avoir complètement financé ce qu’il a acheté.
  •     intérêt théorique : sur le plan théorique, c’est qu’il interdit de présenter le transfert de propriété comme une obligation véritable qui pèserait sur le vendeur. Ce n’est pas une obligation du vendeur, car l’intervention du transfert de propriété n’implique aucune action du vendeur. Le transfert de la propriété est immédiat donc c’est un effet légal de la vente, même si on peut jouer sur le transfert.

 Quoiqu’il en soit, la portée de ce principe est à priori totale, le transfert de la propriété s’entend, d’un transfert d’une propriété parfaite, d’une propriété accompagnée de tous ces accessoires. Le transfert de la propriété s’accompagne d’un transfert des risques.

 Sur qui pèsent les risques ? Cette question se pose lorsque à la suite d’un évènement présentant les caractères de la force majeure, p.ex la chose est détruite par la foudre, l’une des parties ne peut plus satisfaire à ses obligations. Puisque par hypothèse la perte n’est imputable à personne, le débiteur de l’obligation rendue impossible est exonéré de toute responsabilité sauf dans le cas ou l’obligation est obligation de résultat absolue p.ex payer une somme d’argent.

 Une question toutefois se pose : et l’autre obligation qui à priori reste possible, est-elle encore due ou au contraire est-ce que les 2 parties sont libérées. La question est celle de savoir qu’elle est l’incidence de l’impossibilité fortuite sur l’existence de l’autre.

 Exemple : Une agence de voyage organise une croisière. Un évènement présentant les caractères de la force majeur survient présentant rendant le voyage impossible. Doit-on payer le prix ?

 L’agence nous a promis un voyage qui est impossible. L’agence est libérée de son obligation. Est-ce que nous aussi ? Doit-on payer ou non ? Non on ne doit pas payer. Si on considérait que c’est au client de supporter les risques on exigerait d’eux qu’ils payent car l’agence a fait son travail.

 Les clients sont libérés comme l’agence de voyage elle-même. L’impossibilité d’exercer une obligation va avoir une influence sur l’exécution sur l’autre. Res perit debotori «  la perte doit être mise à la charge du débiteur de l’obligation rendue impossible » donc ici les 2 parties sont libérées. C’est un contrat emportant transfert de propriété d’un corps certain. S’agissant de ces contrats, particulièrement la vente, la règle veut que res perit domino «  la perte doit incomber au propriétaire. Si la chose périt fortuitement entre le moment de la formation du contrat l’acquéreur et le moment de la livraison doit payer le prix à moins que les parties se soient conçues spécialement d’un non transfert des risques.

 P.ex on achète une voiture. Il y a accord sur la chose et le prix pendant la veille. La foudre s’abat sur la voiture le soir. Le propriétaire doit payer le prix car il est devenu propriétaire de la voiture et de tous les risques à moins que les parties se soient conçues spécialement d’un non transfert des risques.

 

  • 2 Exceptions et aménagement apportés au principe

 Hypothèse dans laquelle le transfert est retardé conventionnellement par une clause du contrat : clause de réserve de propriété. Elles sont licites. Le principe du transfert immédiat n’a rien d’impératif. Les clauses de réserve de propriété sont quasi systématiques dans les ventes à tempérament. Le vendeur sera payé en plusieurs fois. Généralement le contrat contiendra une clause de réserve de propriété. Tu seras le propriétaire le jour ou tu m’auras complètement payé. Tu peux l’utiliser mais c’est le vendeur le propriétaire. Intérêt pour le vendeur ?

 Il pourra bénéficier d’une garantie de paiement. S’il n’est pas payé de l’intégralité de ce qui lui est du, il ira récupérer sa chose chez l’acheteur.

 Le retard d’un transfert de propriété ne s’accompagne pas nécessairement du transfert des risques ! C’est un peu évident car on utilise la chose.

 Comment on récupère la chose si on n’est pas payé : par une action en revendication. On n’est pas payé mais on est resté propriétaire de la chose. Cette action est soumise à un certain nombre de conditions.

 Ces conditions ont été posées par le droit de la faillite. Ordonnance du 23 mars 2006 les règles ne figurent pas dans le Code civil.

 Conditions de l’action en revendication.

Conditions prévues par le droit des conventions collectives (droit des faillites) :

  •         Il faut que la CRP ait été rédigée par écrit et que l’acquéreur ait pris connaissance de cette clause au plus tard lors de la livraison (sur le bon de commande) : la jurisprudence avait accepté le fait qu’une société avait mis dans ses conditions générales d’achat qu’elle n’accepte aucune CRP.
  •           Si ventes successives entre les parties : on n’est pas obligé de le rappeler dans chaque vente. Une CRP peut donc être stipulée dans un contrat cadre.
  •              L’exigence d’écrit est écartée en cas de liquidation.
  •            Il faut que la chose n’ait pas été revendue entre temps : le prix de la revente peut être revendiqué par le vendeur réservant à la place de la chose elle-même. L 621-24.

L 121-116 : on peut publier son droit afin de prévenir les risques liés à la revente du bien (si le prix de revente a déjà été versé au vendeur initial).

Dans le cas où la RP a fait l’objet d’une publicité, il est prévu que le bien ne peut être revendu avant d’être pleinement payé qu’à condition d’obtenir que le prix de revente soit tenu à la disposition du vendeur initial à la Caisse Dépôt et Consignation.

 L 121-115 : l’action en revendication doit être exercée dans les trois mois suivant la faillite (publication du jugement du redressement judiciaire).

L 621-22 : la chose vendue existe encore en nature quand elle n’a pas fait l’objet d’une corporation ou transformation.

 De manière générale, on considère toutefois que la chose qui a fait l’objet d’une incorporation reste dissociable de son support sans que cette dissociation n’entraîne une dégradation.

 La condition suppose aussi que la chose n’ait pas fait l’objet d’une transformation : les animaux de boucheries une fois découpés ne peuvent plus être revendiqués (ils deviennent des produits de boucherie).

Le bois simplement étuvé et tronçonné demeure immeuble par nature : il n’en est qu’à son stade de transformation.

 L 121-122 alinéa 3 : Les choses fongibles peuvent être revendiquées, pourvu que l’on puisse trouver entre les mains de l’acquéreur des biens de la même espèce et de la même qualité.

 Loi du 10 juin 1994 : le vendeur avec CRP est disposé d’agir en revendication lorsque le contrat de vente a fait l’objet d’une publicité.

Cette publicité, facultative, peut être effectuée dans les conditions du décret du 10 juillet 1992 (décret relatif à la publicité du crédit-bail).

Le vendeur pourra alors simplement demander la restitution du bien : c’est l’action qui, normalement, va simplement accompagner l’action en revendication. La revendication est inutile parce qu’on sait déjà qui est le propriétaire par la publicité. But de simplicité et de rapidité et aucune condition de loi.

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