La Démocratie et la souveraineté
La démocratie est le régime dans lequel le peuple (ou la Nation) est souveraine. Le terme « démocratie » a été utilisé dès la fin du XIVème siècle (1370) à propos de l’Antiquité, avant d’être repris dans l’usage moderne à la fin du XVIIIème siècle (1791).
- Montesquieu, l’Esprit des lois : « Lorsque, dans la république, le peuple en corps a la souveraine puissance, c’est une démocratie (…) Le peuple, dans la démocratie, est à certains égards le monarque; à certains autres, il est le sujet ».
- Rousseau, Du contrat social, III : « Le souverain peut, en premier lieu, commettre le dépôt du gouvernement à tout le peuple ou à la grande partie du peuple, en sorte qu’il y ait plus de citoyens magistrats que de citoyens simples particuliers. On donne à cette forme de gouvernement le nom de démocratie ».
Comment des règles de Droit peuvent être établies pour mettre en œuvre la Démocratie. Question de savoir comment un citoyen participe, mais aussi de savoir comment à l’occasion d’un vote on peut décompter le choix des électeurs.
I- La notion de démocratie
On fait référence souvent à cette formule de Lincoln: « La Démocratie est le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». La Démocratie est choisie par le peuple, elle lui appartient et a pour objectif d’assurer la meilleure vie en commun du peuple. Définition imprécise de Lincoln, mais elle est reprise dans un certain nombre de textes dont la Constitution de 1958.
Démocratie est un régime politique dans lequel la souveraineté est attribuée au peuple, qu’il exerce lui même ou par ses représentants, et dans lequel le citoyen a le Droit de participer à l’exercice du pouvoir et le Droit de contester les conditions d’exercice du pouvoir. Il a le Droit de vote et Droit de contester les conditions d’exercice du pouvoir: Droit d’opposition politique, et Droit de résistance à l’oppression. Résistance à l’oppression possibilité de plus en plus rare en Europe, et qu’on a vu l’an dernier s’exercer dans un certains nombre de pays, le Droit de renverser le pouvoir en place.
Pour le juriste, il y a trois mots clef: le citoyen qui possède un lien juridique avec un régime politique, et qui possède la citoyenneté, c’est un lien juridique qui permet d’exercer des Droits politiques, citoyen est celui qui va pouvoir exercer; la participation, l’opposition… Le principe même de souveraineté de l’Etat entendu comme la possibilité pour l’Etat de fixer les règles de l’exercice du pouvoir politique pour les citoyens. On a lié citoyenneté et nationalité, alors que d’autres Etats ont fait le choix de déconnecter ces deux notions. Débat en France d’ouvrir citoyenneté aux étrangers dans municipales. On va décliner en trois temps la démocratie, en s’attachant à notion de démocratie, puis en voyant les systèmes qui permettent d’assurer participation des citoyens, puis allant vers le plus spécifique et le plus technique, nous verrons quelles sont les techniques qui permettent de prendre en compte le vote du citoyen.
II- Les principes de la démocratie libérale
Personne morale qui exerce la souveraineté est un Etat dans cadre défini, déterminé, et dont gouvernants sont choisis par le peuple. S’oppose à la théocratie où on considère que pouvoir appartient à Dieu qui désigne gouvernants, ou les monocraties où le titulaire du pouvoir est un seul, monocratie pouvant dériver vers dictature. Deux grands modèles qui longtemps se sont opposés dans Guerre Froide: Démocratie libérale à laquelle se rattache la France, les Etats Européens, et Démocratie marxiste adoptée par les pays d’Europe de l’Est jusqu’à fin de l’URSS. Plusieurs variantes à ces modèles. Démocratie libérale fait primer l’individu, démocratie marxiste fait primer le groupe. C’est la Démocratie libérale qui l’a remporté.
Trois principes qui permettent de comprendre ce qu’est la Démocratie libérale:
1° Primauté de l’individu. La pouvoir politique n’a de sens qu’en temps qu’il permet à chacun d’être libre dans les meilleures conditions possibles. C’est la théorie du contrat social, avec idée que chacun ne peut pas être libre si attente à liberté d’autrui. Chacun doit accepter limites à exercice de liberté, limites que si nécessaires et proportionnées; les mieux à même d’évaluer ce qui est nécessaire et proportionné sont cela mêmes qui sont citoyens, titulaires de la souveraineté.
2° Ils peuvent participer à exercice du pouvoir, mais participer suppose qu’on ait le choix de différentes formes de pouvoirs. Pluralisme signifie qu’en démocratie, tous les courants d’opinion peuvent s’exprimer, et signifie qu’au moment où citoyens opèrent des choix, ils votent, lors d’élections et référendums. Faut qu’ils aient choix entre différentes options, liberté d’opinion et d’expression de l’opinion, raison pour laquelle tous les textes qui énoncent les Droits et libertés des individus ne commencent pas énoncer principe d’élection libre, liberté de choix en matière politique.
3° Cela étant dit, démocratie régime politique, donc à un moment donné dans intérêt des individus qui ont pu s’exprimer sur base pluraliste, suppose qu’ils doivent prendre des décisions, que des gouvernants doivent être désignés sur base de la majorité. Inimaginable qu’à l’issu d’une élection, il y ait unanimité. Il faut qu’il ait une règle qui l’emporte, et cette règle sera majoritaire, règle du plus grand. Une fois ces principes identifiés, savoir comment on qualifie ces citoyens.
III – Les théories de la souveraineté
On évoque classiquement deux théories: la souveraineté nationale et la souveraineté populaire. Qui sont citoyens de la Nation? Citoyens étant titulaires de la souveraineté, comment l’envisagent t-ils?
1- Théorie de la souveraineté nationale
Notion la plus importante en Droit constitutionnel. L’Etat naît souverain que parce que citoyens ont créé Etat qui va exercer pouvoir en leur nom. Terme de Nation, un peu daté, largement a été dévoyé, peut faire penser à « nationalisme », et à ses conséquences. Etat est une personne juridique abstraite, mais la Nation est un terme abstrait qui va se transformer en Etat. C’est un concept qui résume à une unité un ensemble de citoyen, et qui en résumant les citoyens à une unité va faire écran entre citoyens et l’Etat. Cet écran présente la particularité d’être opaque.
Chaque citoyen existe, mais quand on est dans logique de Nation, il y a transfiguration. Nation a été le support de la naissance des Etat. C’est une unité à l’intérieur de laquelle il n’y a pas de différence. La France comme de nombreuses autres sociétés politiques dans une histoire reculée était un ensemble de communautés féodales séparées, et pour créer un Etat, on a utilisé la notion de Nation pour créer unité. A permis de fédérer, souder une communauté politique, idée de Nation structurante, il y a des différences juridiques, démocratiques, mais cèdent le pas devant une unité structurante, unité politique, la Nation, qui donne naissance à l’Etat.
On a insisté en France sur unité parce qu’on voulait créer un Etat. Conséquence, si la Nation est une unité qui gomme les différences, la souveraineté est indivisible, inaliénable, nul ne peut s’arroger le Droit de s’exprimer au nom de la Nation. Seule la Nation peut avoir une existence juridique. On s’est méfié des corporations, et un groupe ne peut s’exprimer au nom de la Nation car la Nation est un tout. Mais comme la Nation est une abstraction, elle peut exprimer un choix politique.
Souveraineté nationale fonde démocratie représentative, opérée au nom de la Nation par des représentants. Si on va au bout de la logique, puisque Nation est une abstraction, il est légitime aussi que ceux qui votent soient ceux qui sont les mieux à même de s’exprimer dans l’intérêt de la Nation. L’électorat est une fonction, pendant longtemps le suffrage était restreint, ce suffrage restreint conduit aussi à considérer que vote est une obligation. Belgique entre autre continue à considérer que vote est obligatoire, et abstention pénalement sanctionné.
2- La souveraineté populaire
Différence de perception des citoyens. Dans cadre de souveraineté populaire, le pouvoir appartient au peuple, ce qui est une entité concrète. Le peuple, ça n’est pas une idée unitaire qui gommerait citoyens, mais chaque citoyen est visible. Dans souveraineté populaire, chaque citoyen est titulaire de la même part de citoyenneté. Différence est dans l’idée que dans le peuple, chacun peut à chaque instant s’exprimer. Démocratie directe, chaque citoyen exprime son choix à chaque décision. Chaque citoyen vote directement. On est dans logique de démocratie permanente. Mais impossible à appliquer, même avec internet. Le fait d’élire des représentants permet de faciliter tout cela. Même ceux qui ont pensé cela comme Rousseau ont vu limite de la chose. Pour Rousseau, au lieu que 100% des citoyens votent, délègueraient leur droit à d’autres, on donne mandat à une partie des citoyens, ce mandat impératif. Comme dans vie civile, on peut donner mandat à quelqu’un, on veut acheter ou vendre un bien, pour une certaine raison on ne peut pas se déplacer chez le notaire, on donne mandat à quelqu’un pour le faire. On donne mandat de faire ce que physiquement on ne peut pas faire, et cette personne ne peut pas faire autre chose que notre volonté. Quand on vote pour un député, on veut qu’il prenne décision en notre nom sans qu’il ait à demander si on est d’accord à chaque fois. Dans Constitution de 1958, modèle hybride, la souveraineté nationale est donnée au peuple, on est dans un entre deux.