La filiation établie par une reconnaissance

La filiation établie par une reconnaissance

La reconnaissance d’enfant est un acte juridique par lequel un homme ou une femme avoue être le père ou la mère de l’enfant désigné dans l’acte (article 316 du Code Civil).

L’ordonnance du 4 juillet 2005 abolissant les notions de filiation légitime et de filiation naturelle n’a pas explicitement entendu réserver la reconnaissance aux enfants issus d’un couple non marié à la différence des solutions retenues par le droit antérieur.« Lorsque la filiation n’est pas établie dans les conditions prévues par la section I du présent chapitre (= texte qui traite des modes d’établissement de la filiation par l’effet de la loi), elle peut l’être par une reconnaissance de paternité ou de maternité… ». Ce texte semble donc ouvrir la voie à la souscription d’une reconnaissance lorsque les modes d’établissement de la filiation n’ont pu produire leurs effets.

Sur la filiation maternelle : an application de l’article 311-25 du code civil, pour tout enfant sans distinction, la filiation maternelle est établie par la seule désignation de la mère dans l’acte de naissance de l’enfant Il faut et il suffit que la mère qui a accouché de l’enfant accepte que son nom soit indiqué en qualité de mère dans l’acte de naissance de l’enfant. Précisément, l’article 311-25 du code civil dispense la mère de faire une reconnaissance. En revanche, une reconnaissance prénatale par la mère pourrait être préférée pour s’assurer de donner son nom à l’enfant (article 311-21 du Code Civil). Encore faudrait-il qu’elle s’assure aussi que le père ne procède pas lui-même par reconnaissance prénatale. En somme, il est probable que les reconnaissances par les mères demeurent exceptionnelles, à la suite de la simplification apportée par la réforme.

Section I – les conditions

La reconnaissance d’enfant est subordonnée à des conditions de fond et de forme.

1) Les conditions de fond :

  • Par rapport à l’auteur de la reconnaissance

La reconnaissance d’enfant suppose l’existence d’un consentement libre et non vicié.Par contre, aucune condition de capacité n’est exigée : tout mineur ou majeur incapable agissant dans un intervalle lucide peut reconnaître un enfant. Article 458 du Code Civil: c’est un acte libre, on ne peut forcer quelqu’un à effectuer une reconnaissance.L’article 458, dans sa rédaction nouvelle (en vigueur depuis le 1erjanvier 2009), énonce, d’une part, que l’assistance et la représentation sont exclues pour les actes « dont la nature implique un consentement personnel » et, d’autre part, que « sont réputés strictement personnels la déclaration de naissance d’un enfant, sa reconnaissance… ». Ces actes peuvent être le fait de majeurs protégés, si du moins ils sont aptes à manifester un consentement suffisant. Une telle solution doit a fortiori être transposée au mineur.

  • Par rapport à celui qui est reconnu
  • Reconnaissance possible avant ou après la naissance,
  • Quel que soit l’âge de l’enfant, même après son décès.
  • Il peut s’agir d’un enfant simplement conçu. L’article 316 alinéas 1 du Code Civil in fine consacre la reconnaissance prénatale. La jurisprudence avait admis son efficacité avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 4 juillet 2005.
  • La reconnaissance ne produira ses effets que si l’enfant né vivant et

Ceci peut susciter des difficultés que l’ordonnance n’a d’ailleurs pas résolues. Se pose en particulier la question de la préservation de la faculté pour le père de reconnaître un enfant né d’un accouchement anonyme (référence notamment à l’arrêt du 23 février 2004 rendu par la Cour de Cassation dans l’affaire Benjamin.)De plus, malgré l’affirmation générale d’un principe chronologique dans l’article 320, une reconnaissance prénatale par un tiers (exemple: l’amant de la mère) suffirait-elle à paralyser le jeu de la présomption de paternité du mari de celle-ci ?Cependant, par un arrêt du 7 avril 2006 rendu par la Cour de Cassation a cassé cet arrêt en admettant que « la reconnaissance prénatale avait établi la filiation paternelle de l’enfant avec effet le jour de sa naissance ».

Malgré les précautions prises par le nouveau droit de la filiation, un conflit de filiation pourrait néanmoins surgir. La loi de 2009 a préféré en constater l’existence à faire trancher judiciairement et a rajouté l’article 336-1:« Lorsqu’il détient une reconnaissance paternelle prénatale dont les énonciations relatives à son auteur sont contredites par les informations concernant le père que lui communique le déclarant, l’officier de l’état civil compétent en application de l’article 55 établit l’acte de naissance au vu des informations communiquées par le déclarant. Il en avise sans délai, le procureur de la République qui élève le conflit de paternité sur le fondement de l’article 336». L’article 336-1vise le cas où une reconnaissance prénatale de l’enfant est contredite par les déclarations de la personne qui déclare l’enfant à l’état civil avec des indications différentes. L’OEC établit l’acte de naissance d’enfant du mari de la mère et le MP doit élever le conflit et saisir le juge. On doit décider qui est le vrai père. (Hypothèse où il y a atteinte à la prévalence de la présomption de paternité).

2) Les conditions de forme :

La reconnaissance doit être expresse, personnelle et solennelle.Acte de volonté unilatéral, la reconnaissance à des caractères participant de sa définition même : solennel, individuel, personnel, discrétionnaire, irrévocable et déclaratif.Il faut qu’elle exprime sans aucune ambiguïté la volonté d’avouer sa paternité ou sa maternité et d’établir le lien de filiation avec l’enfant.Cette reconnaissance doit comporter les énonciations prévues à l’article 62 du Code civil ainsi que la mention de ce que l’auteur de la reconnaissance a été informé du lien de filiation ainsi établi : article 316 alinéa 4 du Code civil.C’est un acte juridique individuel, personnel : il ne peut être fait que par son auteur en personne.L’article 316 alinéas 3 du Code civil prévoit que la reconnaissance soit faite dans l’acte de naissance ou dans « tout autre » acte authentique.

  • Par l’officier d’état civil : soit en même temps que la naissance, soit par acte séparé, mention en est faite en marge de l’acte de naissance de l’enfant.
  • Par notaire ou par testament authentique, cet acte notarié présentant l’avantage de ne pas être obligatoirement transcrit en marge de l’acte de naissance, information dévoilée qu’à la mort de l’auteur de la reconnaissance.
  • Par déclaration effectuée en justice dans le cadre d’une action, enregistrée par le greffier puis inscrite dans un PV qui vaut acte authentique.

Section II – Les effets

Article 316 al 2 du Code Civil : La reconnaissance établit la filiation et ne produit des effets qu’à l’égard de son auteur.

  • L’acte de reconnaissance a un effet probatoire absolu c’est à dire que la reconnaissance est opposable non seulement à son auteur mais à toute personne. Aux termes de l’article 320 du Code civil, tant qu’elle n’a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à une autre filiation qui l’a contredirait. (C’est pourquoi, pour établir une filiation contraire à celle constatée par la reconnaissance, il est d’abord nécessaire de démontrer l’inexactitude de cette dernière).
  • La reconnaissance à un effet déclaratif, elle constate une filiation préexistante, elle rétroagit au jour de la naissance de l’enfant ce qui a des conséquences importantes (une pension alimentaire peut être mise à la charge de l’auteur de la reconnaissance non seulement pour l’avenir mais rétroactivement à compter de la naissance de l’enfant).
  • Le caractère irrévocable de la reconnaissance empêche son auteur de la rétracter à son gré. (Cependant, rien n’interdit à l’auteur de la reconnaissance de la contester lui-même par la suite en démontrant son caractère inexact ou mensonger : reconnaissance paternelle ou reconnaissance maternelle impliquant une substitution ou une dissimulation d’enfant …).

Les effets de la reconnaissance sont importants. Cependant ils sont limités à la fois :Lorsqu’il y a contestation du lien de filiation qui se trouve alors juridiquement établi ou lorsqu’il y a annulation de cette reconnaissance.

  1. Contestation de la reconnaissance. L’ordonnance du 4 juillet 2005 a profondément modifié le droit de contestation de la reconnaissance. Deux grandes hypothèses doivent être distinguées :
  • Si la reconnaissance n’est pas confortée par la possession d’état, d’une part, l’article 321 du code civil s’applique (article 334 du Code Civil) : tout intéressé peut agir, pendant un délai de dix ans à compter de la reconnaissance, mais ce délai est suspendu à l’égard de l’enfant pendant sa minorité. La preuve doit être faite que la filiation ainsi déclarée ne correspond pas à la filiation biologique.
  • Si la reconnaissance est confortée par la possession d’état, d’autre part, le droit restreint l’action pour « protéger le lien affectif, dans l’intérêt de l’enfant, de l’adulte en cause, de la société ».L’article 333 s’applique alors. Seuls peuvent agir l’enfant, l’un de ses père et mère ou celui qui se prétend parent véritable ou le ministère public, depuis la loi no2009-61 du 16 janvier 2009 (article 333 du Code Civil). L’action se prescrit de deux façons possibles : délai de cinq ans à compter de la cessation de la possession d’état ; existence d’une conformité de la possession d’état au titre qui dure cinq ans à compter de la reconnaissance.
  1. Nullité de la reconnaissance. – Il ne s’agit pas tant de contester la filiation qu’elle établit que la reconnaissance elle-même. Une action en nullité de la reconnaissance peut être intentée et prononcée pour défaut de consentement intègre, irrespect des règles de forme, violation de l’interdiction d’établir le double lien de filiation incestueuse… Le silence de la loi porte a priori à faire application de la distinction entre nullité absolue et nullité relative :
  • Lorsque la reconnaissance est entachée d’un vice de forme (ex : reconnaissance seulement souscrite par acte sous seing privé) ou quand elle concerne un enfant qui ne pouvait pas être reconnu (exemple: enfant incestueux), alors la nullité sera absolue et ouverte à tout intéressé durant 30 ans.
  • Quand le consentement a été vicié par l’erreur, la violence ou le dol, la reconnaissance est entachée d’une nullité relative ; seul l’auteur peut l’exercer dans un délai de 5 ans. La nullité est susceptible de confirmation.

Cette annulation est destinée à sanctionner la méconnaissance des conditions de validité de la reconnaissance. Dans les 2 cas de nullités, l’annulation produira des effets rétroactifs conformément au droit commun mais ne saurait toutefois entraîner la répétition des aliments jusque là versés à l’enfant quand elle est le fait de son auteur même (s’il a fait une reconnaissance mensongère).