Le droit est constitué d’un ensemble complexe de normes juridiques disposées selon une organisation hiérarchique. Cette structure vise à assurer une cohérence dans l’application du droit en fixant des niveaux de force obligatoire pour chaque norme et en établissant les conditions de leur interaction. Cette hiérarchie repose sur la pyramide de Kelsen, qui organise les normes selon leur autorité respective.
Organisation verticale et horizontale des normes
Dans une perspective verticale, certaines normes sont supérieures à d’autres, ce qui implique que chaque norme doit être conforme à celles qui lui sont supérieures dans la hiérarchie. En revanche, la dimension horizontale renvoie à la diversité des normes au sein d’un même niveau, regroupées en fonction de leur domaine d’application (droit constitutionnel, droit international, droit européen, droit civil, etc.).
La pyramide de Kelsen
La pyramide de Kelsen représente cette hiérarchie. Elle se compose, en ordre décroissant de force obligatoire, des normes suivantes :
Le principe de légalité impose que chaque norme respecte celles qui lui sont supérieures. Toute infraction à ce principe constitue une violation susceptible de créer des désordres juridiques et d’engager la responsabilité de la collectivité publique. Par exemple, une loi ou un règlement contraire à un traité ou à une directive européenne peut être contesté devant les juridictions nationales ou européennes.
Pour garantir cette conformité, les nouvelles dispositions législatives ou réglementaires doivent être évaluées non seulement par rapport aux normes nationales existantes mais aussi en tenant compte des normes européennes et internationales en préparation. Ce respect de la hiérarchie est essentiel pour assurer la cohérence du droit et la sécurité juridique.
La pyramide de Kelsen est un schéma théorique illustrant la hiérarchie des normes juridiques dans une conception positiviste du droit, où les normes sont rangées selon leur importance et leur source. Chaque niveau doit respecter le niveau supérieur pour assurer la cohérence et l’unité du système juridique.
Cet échelon inclut les normes constitutionnelles et internationales, placées au-dessus de la loi nationale :
Constitution : Au sommet de la pyramide, elle fixe les fondements du système juridique. Le Conseil constitutionnel exerce un contrôle de constitutionnalité pour s’assurer qu’aucune loi ne contredit la Constitution avant sa promulgation, mais uniquement en amont (contrôle ex ante). Une fois promulguée, la constitutionnalité de la loi ne peut être contestée par les juges ordinaires, ce qui limite les possibilités de contestation ex post.
Traités internationaux et droit de l’Union européenne : L’article 55 de la Constitution française donne aux traités ratifiés une valeur supérieure aux lois, mais cette supériorité est soumise au contrôle des juges ordinaires (Conseil d’État et Cour de cassation), qui vérifient la conformité des lois aux traités internationaux, ce qu’on appelle le contrôle de conventionnalité. Le Conseil constitutionnel refuse de juger la conformité à la Constitution des lois de transposition des directives européennes, car elles font partie de l’ordre juridique communautaire, avec lequel le Conseil évite tout conflit direct.
L’échelon législatif est structuré par différents types de lois :
Lois organiques : Ces lois sont adoptées dans les domaines fixés par la Constitution (comme le fonctionnement des pouvoirs publics) et exigent des majorités renforcées. Elles possèdent une valeur hiérarchique supérieure aux lois ordinaires et encadrent des aspects essentiels de l’État.
Lois ordinaires : Votées par le Parlement (Assemblée nationale et Sénat), elles traitent des matières importantes énumérées dans l’article 34 de la Constitution, telles que les droits civiques, la nationalité et les droits de propriété. Les ordonnances, prises par le gouvernement dans des domaines relevant normalement de la loi, ont un caractère temporaire : elles acquièrent une valeur législative une fois ratifiées par le Parlement.
L’échelon infra-législatif regroupe les normes de nature réglementaire, élaborées par le pouvoir exécutif et les administrations locales :
Décrets : Pris par le président de la République ou le Premier ministre, les décrets d’application précisent les modalités d’exécution des lois, tandis que les décrets autonomes interviennent dans les domaines ne relevant pas du champ législatif (article 37 de la Constitution).
Arrêtés : Ils sont émis par des ministres, préfets, maires, ou présidents de conseils régionaux et concernent des règlements d’application locale ou sectorielle.
Circulaires et instructions : Ces textes internes servent surtout à interpréter les lois et à donner des directives aux fonctionnaires, mais n’ont pas de valeur normative.
Les normes privées, édictées par des entités comme les associations, les copropriétés ou les entreprises, sont des règles propres aux communautés privées et ne figurent pas dans cette pyramide car elles ne relèvent pas de l’autorité publique ni du droit étatique.
La jurisprudence, en clarifiant et interprétant les lois, joue un rôle central dans la hiérarchie des normes, influençant l’application et la compatibilité des normes entre elles.
Une règle prétorienne est une norme créée par le juge à travers l’interprétation de textes de loi ou de règlements. Elle est considérée comme faisant corps avec la norme interprétée, occupant ainsi le même rang dans la hiérarchie. Par exemple, lorsqu’un tribunal interprète un traité, cette interprétation est traitée comme ayant la même valeur que le traité lui-même.
Dans certains cas, une règle prétorienne peut créer une norme nouvelle, ayant un effet similaire à celui d’une loi, notamment dans les situations où la législation est floue ou absente. Dans ces circonstances, la hiérarchie des normes est respectée, et toute question de conflit est tranchée devant les juridictions compétentes.
Les tribunaux garantissent le respect de la hiérarchie des normes en rendant les normes inférieures compatibles avec les normes supérieures. Cependant, lorsque cette harmonisation est impossible, le juge peut être amené à écarter ou à invalider la norme inférieure.
Contrôle par voie d’action : Le juge administratif peut annuler un acte administratif qui contrevient à une norme supérieure par voie d’action. Cette annulation a un effet « erga omnes » (à l’égard de tous), rendant l’acte invalide pour tous les cas futurs. Par exemple, le Conseil constitutionnel peut invalider une loi non conforme à la Constitution avant sa promulgation, mais il ne peut pas contrôler la conformité d’un traité à la Constitution.
Contrôle par voie d’exception : Dans ce cas, le juge écarte l’application d’une norme spécifique pour un litige particulier sans l’invalider de manière générale. Les juges administratifs et judiciaires peuvent, par exemple, écarter une loi ou un règlement contraire à un traité. Ce contrôle permet de traiter des exceptions de conventionalité (contradiction entre une norme nationale et un traité) et des exceptions d’illégalité (contradiction entre un règlement et une loi).
Restrictions du contrôle : Le juge judiciaire ne peut pas apprécier la légalité d’un règlement ou l’interpréter pour vérifier sa conformité aux normes administratives, car le contrôle de l’administration relève exclusivement des juridictions administratives. Néanmoins, en cas de voie de fait — lorsqu’une décision administrative porte une atteinte manifeste aux libertés individuelles sans fondement juridique — le juge pénal peut intervenir pour garantir la protection des libertés publiques.
Un point de tension demeure quant à la hiérarchie entre la Constitution, les traités internationaux et le droit de l’Union européenne. La Constitution est théoriquement supérieure aux traités, mais en pratique, les juridictions françaises, notamment le Conseil d’État, peuvent écarter une loi jugée contraire à un traité, même si cette loi a été jugée conforme à la Constitution. Cette situation reflète un compromis, où le juge administratif cherche à respecter la primauté du droit international et européen tout en préservant la souveraineté de la Constitution.
Les normes juridiques régissent la société en imposant des règles de conduite et en garantissant l’ordre public. Bien que le Parlement soit en principe responsable de l’élaboration des lois, d’autres sources participent également à la création des normes.
La loi, rédigée et votée par le Parlement, est une norme de droit écrite et obligatoire, appliquée une fois promulguée par le président de la République et publiée dans le Journal officiel. Les lois couvrent divers domaines essentiels tels que les droits civiques, le régime fiscal, les institutions publiques, etc. Qu’elles soient ordinaires, organiques, référendaires ou de finances, elles partagent un régime identique en matière de force obligatoire, d’interprétation et d’application.
La Constitution de 1958 confère au gouvernement le pouvoir de légiférer par voie de règlement dans des domaines ne relevant pas du champ législatif (article 37 de la Constitution). Les règlements, incluant les décrets et arrêtés, servent à mettre en œuvre les lois en fixant leurs modalités pratiques et en réglementant des domaines spécifiques.
En plus, le Parlement peut déléguer son pouvoir de légiférer à l’exécutif par le biais des ordonnances (article 38 de la Constitution). Ces ordonnances permettent au gouvernement de prendre des mesures normalement réservées au Parlement, mais elles doivent être ratifiées par le Parlement pour acquérir une valeur législative permanente.
Certaines règles de droit proviennent de la coutume ou de pratiques répétées, qui, bien que non écrites, sont reconnues et appliquées. La jurisprudence, quant à elle, est constituée des décisions des juridictions, qui interprètent la loi et parfois créent de nouvelles normes dans des domaines où la législation est lacunaire.
La Constitution française de 1958 est au sommet de la hiérarchie des normes en France. Elle s’impose aux lois, règlements et traités dans l’ordre interne, et détermine ainsi les fondements du droit français.
La Constitution prime sur toutes les autres normes juridiques internes, y compris les lois et règlements. Cependant, la théorie de la loi écran, établie par le Conseil d’État dans l’arrêt Arrighi (CE, 1936), limite le contrôle de constitutionnalité des actes réglementaires : si un règlement découle directement d’une loi, le Conseil d’État refuse de juger de sa constitutionnalité, puisqu’il n’a pas le pouvoir de censurer les lois.
L’article 66 de la Constitution confère au juge judiciaire le rôle de gardien des libertés individuelles, le rendant ainsi responsable de sanctionner toute atteinte à ces libertés. Cela confirme la suprématie de la Constitution en protégeant directement les citoyens contre les violations de droits fondamentaux.
L’article 54 de la Constitution stipule qu’un traité international ne peut être ratifié s’il contient des dispositions contraires à la Constitution. En 1992, cet article a été révisé pour permettre à 60 députés ou 60 sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel en cas de doute sur la conformité d’un traité à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel s’est appuyé sur cet article pour déclarer certains traités incompatibles avec la Constitution, empêchant ainsi leur ratification. Un exemple notable est sa décision de 1999 déclarant la Charte européenne des langues régionales et minoritaires contraire à la Constitution, entraînant son rejet.
Le droit de l’Union européenne (UE) se distingue par sa primauté et son effet direct dans les États membres, comme le montrent plusieurs décisions importantes de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) :
Van Gend en Loos (CJCE, 1963) : La Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a jugé que le droit communautaire a un effet direct. Cela signifie que les particuliers peuvent invoquer les normes européennes devant les juridictions nationales, même sans transposition en droit interne.
Costa c/ ENEL (CJCE, 1964) : Cet arrêt consacre la primauté du droit communautaire sur les droits nationaux, stipulant que, dans le cadre des compétences de l’Union, le droit européen prévaut en cas de conflit avec une loi nationale.
Internationale Handelsgesellschaft (CJCE, 1970) : La CJCE affirme que le droit communautaire prime même sur les normes constitutionnelles nationales. Cet arrêt établit que, en cas de contradiction, les normes de l’UE doivent être appliquées, indépendamment des dispositions constitutionnelles de l’État membre.
Tanja Kreil (CJCE, 2000) : En cas de conflit entre le droit de l’UE et une norme constitutionnelle nationale, cette dernière doit être écartée au profit de la norme européenne, confirmant ainsi l’autorité du droit de l’UE au-delà des constitutions nationales.
Ces décisions montrent comment la CJUE a consolidé la primauté du droit de l’UE et l’effet direct de ses normes, parfois même face à des normes constitutionnelles nationales, établissant une jurisprudence qui s’impose aux États membres en cas de conflit juridique.
Cette jurisprudence de la CJUE pose des tensions avec le Conseil d’État français, qui dans l’arrêt Sarran et Levacher (CE, 1998) a réaffirmé la supériorité de la Constitution sur les traités dans l’ordre interne. Selon le Conseil d’État, la primauté du droit de l’UE ne s’étend pas au-dessus de la Constitution.
Problème de contrôle des actes communautaires en droit interne
Les actes communautaires échappent généralement au contrôle du Parlement et du Conseil constitutionnel malgré les dispositions de l’article 88-4 de la Constitution. Toutefois, le gouvernement a pu obtenir un avis du Conseil d’État pour vérifier la compatibilité d’un acte communautaire avec la Constitution. Par exemple, l’adoption de la directive sur le mandat d’arrêt européen a conduit à une révision de la Constitution en 2003 (CE, avis 2002).
Ainsi, la Constitution reste la norme suprême dans l’ordre juridique interne français, mais son rapport au droit de l’UE est marqué par des compromis et des tensions, reflétant un équilibre délicat entre souveraineté nationale et engagements européens.
La loi parlementaire est une règle de droit votée par le Parlement (Assemblée nationale et Sénat), représentant la souveraineté nationale et incarnant l’expression de la volonté générale des citoyens. Elle se distingue de la loi constitutionnelle (émanant du pouvoir constituant pour modifier la Constitution) et de la loi référendaire, adoptée directement par le peuple sur proposition du président de la République, notamment pour les sujets relatifs à l’organisation des pouvoirs publics (comme le passage au quinquennat en 2000).
Types de lois parlementaires
Lois organiques : Fixent l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics dans des domaines limitativement définis par la Constitution (ex. : statut des magistrats, organisation des élections). Elles suivent une procédure particulière et sont soumises à un contrôle obligatoire de constitutionnalité avant promulgation.
Lois ordinaires : Règles de droit générales votées par le Parlement dans les domaines prévus par la Constitution. Elles doivent être adoptées en termes identiques par les deux chambres du Parlement, mais en cas de désaccord, l’Assemblée nationale a le dernier mot. Les lois ordinaires peuvent émaner d’un projet de loi (proposé par le Premier ministre) ou d’une proposition de loi (déposée par les parlementaires).
Lois de finances et lois de programme :
Limites du domaine législatif : Article 34 de la Constitution
La Constitution de 1958, dans son article 34, délimite strictement le domaine de la loi, conférant au Parlement le pouvoir de fixer des règles et principes fondamentaux dans des domaines spécifiques :
Ces limitations permettent de distinguer le domaine législatif de celui du réglementaire, dévolu à l’exécutif pour toutes les matières non expressément prévues dans l’article 34 (voir article 37 de la Constitution).
Encadrement de la loi parlementaire
Irrecevabilité et contrôle par le Conseil constitutionnel : Si le Parlement souhaite empiéter sur le domaine réglementaire, le gouvernement peut opposer une irrecevabilité au texte. Si le Parlement insiste, le gouvernement peut saisir le Conseil constitutionnel pour empêcher la promulgation de la loi, dans le respect de la séparation des pouvoirs.
Contrôle de constitutionnalité : En France, le contrôle de constitutionnalité des lois parlementaires n’intervient qu’avant promulgation, lorsque le Conseil constitutionnel est saisi. Cela le distingue des cours constitutionnelles d’autres pays (comme la Cour suprême aux États-Unis), où les lois peuvent être contestées pour inconstitutionnalité même après leur adoption.
Publication et hiérarchie des lois et règlements
Les lois parlementaires, une fois adoptées, sont publiées dans le Journal officiel de la République française. Elles sont hiérarchiquement supérieures aux règlements, qui peuvent inclure les décrets et arrêtés, tous subordonnés à la loi pour respecter la hiérarchie des normes juridiques.
Les règlements en droit français regroupent les actes juridiques émanant du pouvoir exécutif (le président de la République et le Premier ministre) et sont des sources de droit subordonnées aux lois. Ils se composent principalement des décrets et des arrêtés, mais ici, nous nous concentrons sur les décrets.
Types de décrets
Décrets simples : Signés par le Premier ministre, ils concernent des décisions n’exigeant pas une procédure plus élaborée et sont souvent utilisés pour des mesures techniques ou organisationnelles.
Décrets en Conseil des ministres : Prises par le Président de la République et adoptées lors d’un Conseil des ministres, ces décrets concernent généralement des décisions importantes, notamment en matière de défense, de sécurité, ou de nominations aux postes de haute fonction publique.
Décrets en Conseil d’État : Ce type de décret est pris après consultation et avis obligatoire d’une section spécialisée du Conseil d’État, garantissant un contrôle de conformité avec les normes supérieures. Ils concernent souvent des domaines plus complexes ou sensibles, nécessitant une expertise approfondie.
Règlements d’application et règlements autonomes
Les décrets se distinguent également en fonction de leur rapport à la loi :
Décrets d’application : Pris pour l’application d’une loi, ils en précisent les modalités pratiques (dates, conditions, méthodes). Une loi ne peut généralement pas être appliquée sans ses décrets d’application, lesquels assurent que les dispositions législatives soient exécutées conformément à l’intention du législateur.
Décrets autonomes : Adoptés dans des matières n’étant pas du domaine législatif, tels que ceux relatifs à la procédure civile. Conformément à l’article 37 de la Constitution, ces décrets relèvent exclusivement du pouvoir réglementaire de l’exécutif, sans intervention préalable du Parlement. Ils permettent au gouvernement de réglementer les domaines qui échappent à la loi parlementaire.
Hiérarchie et conformité des règlements
Dans la hiérarchie des normes juridiques, les règlements doivent respecter les lois ainsi que les traités internationaux et la Constitution. En cas de non-respect, un particulier peut contester un règlement par un recours pour excès de pouvoir devant les juridictions administratives, lesquelles peuvent annuler le règlement en cas d’illégalité.
Les arrêtés sont des actes administratifs à portée générale ou individuelle, subordonnés aux décrets et dépendant du rang de l’autorité qui les émet. Ils participent à l’application des lois et des règlements, selon les instructions du pouvoir exécutif.
Types d’arrêtés
Les arrêtés sont classés selon leur auteur :
Différence entre arrêtés et autres actes administratifs
Les arrêtés ne sont pas assimilables à certains autres actes de l’administration :
Rôle des arrêtés dans le cadre réglementaire
L’article 37 de la Constitution précise que le pouvoir réglementaire couvre les matières qui ne relèvent pas du domaine législatif. Dans ces cas :
Hiérarchie et conformité des arrêtés
Les arrêtés doivent respecter la hiérarchie des normes :
Contrôle de légalité des arrêtés
Les arrêtés sont soumis à un contrôle de légalité, ce qui permet aux particuliers de contester leur conformité aux normes supérieures par deux voies principales :
Recours en annulation pour excès de pouvoir :
Exception d’illégalité :
Les ordonnances sont des actes législatifs ayant une position intermédiaire entre la loi et le règlement. Prévue par l’article 38 de la Constitution de 1958, l’ordonnance permet au gouvernement de légiférer temporairement dans des domaines réservés à la loi, sous réserve d’une autorisation préalable du Parlement.
Évolution historique des ordonnances
Avant 1958, le recours à des actes similaires aux ordonnances (appelés décrets-lois) avait lieu dans des contextes spécifiques :
Avec la Constitution de 1958, le recours aux ordonnances a été institutionnalisé et encadré par l’article 38.
Cadre juridique actuel : Article 38 de la Constitution
L’article 38 prévoit que le gouvernement peut demander l’autorisation du Parlement pour légiférer par ordonnances dans des domaines réservés normalement au pouvoir législatif, afin d’exécuter son programme. Cette autorisation est encadrée par une loi d’habilitation, qui délimite le champ d’application et la durée pendant laquelle le gouvernement peut recourir aux ordonnances.
Domaines d’application
Les ordonnances sont utilisées dans divers secteurs importants du droit, notamment :
Procédure d’élaboration
La procédure d’élaboration des ordonnances suit un cadre précis établi par la loi d’habilitation :
Après leur publication, les ordonnances peuvent être soumises à ratification par le Parlement, leur donnant alors valeur de loi.
Contrôle et valeur juridique des ordonnances
Les ordonnances constituent donc un instrument puissant pour le gouvernement, permettant de répondre rapidement aux besoins législatifs tout en respectant les principes constitutionnels
La loi est une règle de droit écrite, promulguée par le Parlement ou issue de l’exécutif (dans le cas des ordonnances et règlements). Une fois promulguée et publiée, elle devient obligatoire pour tous les citoyens jusqu’à son éventuelle abrogation.
Processus d’entrée en vigueur de la loi
L’entrée en vigueur de la loi se déroule en deux phases :
Abrogation de la loi
La loi reste applicable tant qu’elle n’est pas formellement abrogée. Cette abrogation peut se faire de plusieurs façons :
Principe de l’obligation de connaissance de la loi
Le principe selon lequel « nul n’est censé ignorer la loi » s’applique : chaque citoyen est présumé connaître les lois en vigueur. Ce principe est essentiel pour l’égalité, empêchant les individus d’invoquer leur ignorance de la loi comme défense. Il incombe donc à chacun de se renseigner, notamment auprès des professionnels du droit, tels que les avocats et les notaires.
Caractère impératif et supplétif de la loi
La loi peut être de deux natures :
Application dans les contrats : principe de consensualisme
Dans le cadre des contrats, la loi adopte un principe de consensualisme, selon lequel un contrat est parfait dès que les parties se sont accordées sur les éléments essentiels, tels que l’objet du contrat et le prix. Les dispositions légales supplétives interviennent uniquement si les parties n’ont pas stipulé de règles précises sur d’autres aspects secondaires (comme les modalités de livraison), offrant une base commune mais adaptable aux préférences individuelles.
La jurisprudence est l’ensemble des décisions rendues par les juridictions sur des questions de droit, contribuant à l’interprétation et à l’application de la loi. Elle constitue une source importante du droit en France, notamment dans des domaines où les textes sont incomplets ou silencieux, comme certaines questions de responsabilité civile ou de protection des consommateurs.
Rôle de la jurisprudence : En l’absence de texte clair, la jurisprudence comble les lacunes législatives. Elle distingue les dispositions impératives, nécessaires à l’intérêt général (par exemple, celles concernant la protection des consommateurs), des dispositions supplétives, qui s’appliquent seulement en l’absence d’accord contraire entre les parties.
Importance dans le droit : La jurisprudence occupe une place cruciale car elle permet une adaptation continue du droit aux évolutions sociales. Par exemple, la responsabilité du vendeur professionnel pour les défauts cachés est une question largement précisée par les décisions judiciaires, permettant une meilleure protection du consommateur face aux vices cachés.
Pour comprendre l’impact de la jurisprudence, il est nécessaire de connaître l’organisation judiciaire française, qui inclut diverses juridictions étatiques mais exclut les organismes privés d’arbitrage (souvent utilisés dans les litiges commerciaux sur demande des parties). Les juridictions sont divisées selon deux types de compétence :
Compétence d’attribution : Elle désigne la catégorie de juridiction qui sera compétente selon la nature de l’affaire. Par exemple, les tribunaux civils (comme le tribunal judiciaire) tranchent les litiges entre particuliers, tandis que le tribunal de commerce est compétent pour les affaires commerciales.
Compétence territoriale : Cette compétence détermine la localisation de la juridiction à saisir, en fonction du domicile du défendeur ou du lieu où s’est produit le fait générateur du litige. En règle générale, c’est le tribunal du ressort où habite le défendeur qui est compétent pour juger de l’affaire.
Les juridictions administratives traitent des litiges relevant du droit public et opposant des particuliers à des personnes publiques (État, collectivités territoriales, établissements publics).
1. Les tribunaux administratifs
Les tribunaux administratifs sont les juridictions de droit commun en matière administrative. Ils sont compétents, sauf lorsqu’un texte attribue un litige à une autre juridiction administrative spécialisée. Ils examinent en premier ressort les actes et contrats administratifs passés par des autorités publiques dans leur ressort territorial.
2. Les cours administratives d’appel
Créées par la loi du 31 décembre 1987 et mises en place le 1er janvier 1989, les cours administratives d’appel jugent les appels contre les décisions rendues par les tribunaux administratifs. Elles n’interviennent pas sur les recours pour excès de pouvoir visant les actes réglementaires ni sur les recours en appréciation de légalité.
3. Le Conseil d’État
Le Conseil d’État assure une double fonction :
4. Le tribunal des conflits
Le tribunal des conflits résout les conflits de compétence entre les juridictions administratives et judiciaires, afin de protéger l’administration contre les empiètements du pouvoir judiciaire.
Elles connaissent des litiges, relevant du droit privé, concernant des particuliers, personnes privées, et parfois l’État ou les personnes publiques quand ils agissent comme des particulier (par exemple, activité commerciale des personnes publiques comme EDF ; accidents d’autos causés par des véhicules de l’Administration) : juridictions civiles. Elles ont aussi pour fonction d’appliquer les règles de droit pénal à ceux qui ont commis des infractions : juridictions répressives.
Les juridictions civiles se répartissent entre plusieurs types de tribunaux, chacun ayant des compétences spécifiques. Plusieurs réformes ont modifié leur organisation, en particulier la loi de programmation et de réforme pour la justice de 2019.
1. Tribunal judiciaire
La réforme de 2019 a fusionné le tribunal de grande instance (TGI) et le tribunal d’instance (TI) pour créer le tribunal judiciaire (TJ), qui devient la juridiction de droit commun pour les affaires civiles.
2. Tribunal de commerce
Les tribunaux de commerce sont des juridictions d’exception spécialisées en droit commercial et composées de juges élus parmi les commerçants.
3. Conseil de prud’hommes
Le conseil de prud’hommes est une juridiction d’exception composée de représentants des employeurs et des salariés, élus à parts égales. En cas de partage des voix, le juge départiteur (un juge du tribunal judiciaire) tranche.
4. Tribunal paritaire des baux ruraux
5. Les pôles sociaux des tribunaux judiciaires
Les tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) et les tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI) ont été supprimés en 2019 et leurs compétences transférées aux pôles sociaux des tribunaux judiciaires.
Depuis les réformes récentes, le tribunal judiciaire constitue désormais la juridiction de droit commun en matière civile. Les tribunaux spécialisés (prud’hommes, tribunaux de commerce, tribunaux paritaires des baux ruraux) conservent leurs compétences respectives, tandis que les pôles sociaux au sein des tribunaux judiciaires traitent des affaires relevant de la sécurité sociale et de l’incapacité.
1. La cour d’assises
La cour d’assises est une juridiction compétente pour juger les crimes, c’est-à-dire les infractions les plus graves, telles que le meurtre, le viol ou le vol avec armes. Les peines encourues vont de 15 ans de réclusion à la perpétuité. Elle est composée de trois juges professionnels et d’un jury de citoyens tirés au sort, comprenant six jurés en première instance et neuf en appel. Les décisions de la cour peuvent être portées en appel devant une autre cour d’assises, une possibilité instaurée en 2000 pour renforcer les droits de la défense.
2. La cour criminelle départementale
Depuis 2019, la cour criminelle départementale a été créée pour alléger le travail de la cour d’assises et éviter les longs délais de jugement. Elle juge certains crimes punis de 15 à 20 ans de réclusion (comme les viols et vols aggravés), mais sans jury, étant composée uniquement de cinq juges professionnels. Les affaires plus graves (pouvant entraîner 30 ans de réclusion ou la perpétuité) sont toujours jugées par la cour d’assises. En cas d’appel, le dossier est transféré à la cour d’assises.
3. Le tribunal correctionnel
Le tribunal correctionnel, formation spécialisée du tribunal judiciaire, est compétent pour juger les délits, c’est-à-dire les infractions passibles de peines allant jusqu’à 10 ans d’emprisonnement (20 ans en cas de récidive) ou d’importantes amendes, ainsi que de peines complémentaires (ex. interdiction d’exercer une profession). Les affaires mineures sont jugées par un juge unique, et les affaires plus complexes par une formation collégiale de trois juges. Cette juridiction statue publiquement, sauf si le huis clos est requis pour des raisons de sécurité ou de protection des victimes.
4. Le tribunal de police
Le tribunal de police est compétent pour les contraventions de 5ᵉ classe, qui incluent des infractions telles que les excès de vitesse majeurs ou la destruction de biens. Les peines prononcées sont principalement des amendes (jusqu’à 1 500 €, ou 3 000 € en cas de récidive) et peuvent inclure des peines complémentaires, telles que la suspension de permis ou la confiscation d’objets. Ce tribunal statue généralement en formation de juge unique, et les audiences sont publiques.
Ces modifications visent à améliorer l’efficacité de la justice pénale et à mieux répartir les dossiers entre les juridictions en fonction de la gravité des infractions jugées. Pour plus de détails, voir les sources sur le Ministère de la justice
Les normes de l’Union européenne (UE) régissent divers domaines stratégiques tels que le droit de la concurrence, la liberté d’établissement, la politique agricole commune, les transports, l’environnement, la protection des consommateurs, la fiscalité, la pêche, la circulation des personnes et les relations extérieures.
Types de normes de l’Union européenne
Les normes de l’UE se déclinent en trois catégories principales :
Les règlements :
Ce sont des actes législatifs de portée générale, obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans chaque État membre, sans nécessité de transposition dans le droit national.
Un règlement peut être invoqué par toute personne, physique ou morale, soit contre une institution de l’UE (effet vertical), soit dans un litige entre particuliers (effet horizontal).
Les directives :
Les directives obligent les États membres quant au résultat à atteindre, mais leur laissent le choix des moyens et de la forme pour leur mise en œuvre.
Si une directive n’est pas transposée dans le délai imparti, elle peut être invoquée directement par un individu devant les juridictions nationales, à condition qu’elle soit suffisamment claire et précise pour produire un effet direct.
Les décisions :
Les décisions de l’UE concernent des cas spécifiques et sont obligatoires uniquement pour leurs destinataires (États, entreprises ou particuliers).
Leur interprétation relève de la jurisprudence de la cour de justice de l’Union européenne (CJUE) en cas de litiges.
Origine des normes et processus d’adoption
Les normes de l’UE sont adoptées principalement par deux institutions :
La commission européenne : composée de membres désignés pour cinq ans par les gouvernements des États membres après approbation du parlement européen, la commission est chargée de proposer et d’initier les textes législatifs.
Le conseil de l’Union européenne : constitué des ministres des États membres en fonction du domaine législatif concerné, il prend les décisions finales sur les propositions législatives et assure leur adoption.
Publication et entrée en vigueur
Les règlements sont publiés dans le journal officiel de l’Union européenne (JOUE) et entrent en vigueur 20 jours après leur publication, sauf si un autre délai est spécifié.
Les directives et décisions doivent être notifiées à leurs destinataires, bien qu’elles puissent également être publiées dans le JOUE pour assurer leur visibilité.
Primauté et applicabilité directe des normes de l’Union européenne
Les normes de l’UE bénéficient d’une primauté sur les lois nationales, ce qui implique que :
Applicabilité directe : les normes de l’UE s’intègrent immédiatement dans l’ordre juridique des États membres, contraignant les juridictions nationales et permettant aux particuliers de s’en prévaloir directement.
Supériorité sur les lois nationales : en cas de conflit, les normes de l’UE priment sur les lois nationales, entraînant l’abrogation implicite des lois antérieures et l’invalidité des lois postérieures incompatibles.
Interprétation des normes par la cour de justice de l’Union européenne
Les juridictions nationales, notamment les cours suprêmes, peuvent demander à la cour de justice de l’Union européenne (CJUE) une interprétation des normes de l’UE dans le cadre d’un renvoi préjudiciel. L’interprétation de la CJUE s’impose aux juridictions nationales pour garantir une application uniforme du droit de l’UE dans l’ensemble des États membres.
Les traités internationaux sont des accords officiels conclus entre États souverains pour établir des règles dans les relations entre États ou avec les individus (par exemple, les normes de transport maritime et aérien). Ces accords, aussi appelés conventions, pactes ou chartes, définissent des normes auxquelles les signataires doivent adhérer.
Classification des traités selon le nombre d’États signataires
Traités bilatéraux : conclus entre deux États, ils concernent souvent des aspects économiques ou fiscaux :
Commerce : Certains traités d’établissement garantissent aux citoyens d’un pays signataire la possibilité d’exercer des activités commerciales dans l’autre pays.
Fiscalité : Des accords visent à éviter la double imposition des revenus des citoyens dans les deux États.
Douanes : Ils facilitent le commerce transfrontalier par l’harmonisation des droits de douane.
Traités multilatéraux : conclus entre plus de deux États, ils abordent des domaines variés et visent souvent des objectifs économiques ou politiques. Par exemple :
Les accords de Bretton Woods (1944) ont institué le Fonds monétaire international (FMI) pour stabiliser les relations économiques mondiales.
La Charte des Nations unies (1945) établit des principes de coopération internationale pour la paix et la sécurité.
Types de traités selon leur contenu juridique
Les traités sont également distingués selon leur portée juridique :
Traités portant « loi uniforme » : Ils unifient les règles internes des États signataires sur un sujet particulier. Par exemple, la Convention de Genève sur le chèque (1931) établit des normes uniformes sur l’usage des chèques.
Traités portant « unification internationale » : Ils appliquent des normes unifiées uniquement aux relations internationales entre États, sans imposer ces normes dans le droit interne des signataires. Un exemple est la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises (1980), qui régit les transactions commerciales internationales.
Entrée en vigueur d’un traité
Pour qu’un traité entre en vigueur, il doit suivre plusieurs étapes :
Négociation et signature : Les représentants des États rédigent et signent l’accord.
Ratification : En France, le président ratifie le traité. Toutefois, si le traité modifie une loi interne, il nécessite une autorisation préalable du Parlement.
Publication au Journal officiel : Cette publication est nécessaire pour que le traité devienne opposable aux citoyens.
Statut des traités dans l’ordre juridique français
Selon l’article 55 de la Constitution française, un traité régulièrement ratifié et publié a une autorité supérieure aux lois, qu’elles soient antérieures ou postérieures. Cependant, les dispositions constitutionnelles restent supérieures : si un traité est incompatible avec la Constitution, il ne peut être ratifié sans modification de celle-ci.
Rôle des tribunaux dans l’interprétation des traités
Les tribunaux nationaux doivent interpréter les clauses ambiguës des traités, même en matière de droit international public, limitant ainsi l’interprétation exclusive du gouvernement.
Les traités du Conseil de l’Europe et la Convention européenne des droits de l’homme
Le Conseil de l’Europe, créé en 1949, rassemble aujourd’hui 46 États et promeut les valeurs européennes à travers des traités, dont la Convention européenne des droits de l’homme (1950). Cette convention garantit plusieurs droits fondamentaux, notamment :
Droit à la vie et à la liberté
Interdiction de la torture, de l’esclavage et de la peine de mort
Droit à la justice équitable, présomption d’innocence et respect de la vie privée et familiale
Liberté de pensée, de conscience, de religion et d’expression
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), basée à Strasbourg, peut être saisie individuellement par toute personne estimant que ses droits ont été violés par un État membre, après l’épuisement des recours internes. Ses arrêts sont contraignants pour les États condamnés, qui doivent adapter leur droit interne pour s’y conformer.
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