La liquidation et le règlement collectif des dettes en Belgique

Liquidation et règlement collectif des dettes en droit belge

A.  liquidation :

notion :

       liquidation = l’ensemble des opérations consécutives à la dissolution d’une personne morale que tendent à la réalisation de l’actif, au paiement des créanciers et à l’affectation du boni de liquidation éventuel aux fins poursuivies par la personne morale.(=>pour une société, répartition entrer associé ; pour une association, une société à finalité sociale, ou une fondation remise à une oeuvre désintéressée).

       opérations effectuées par un ou plusieurs liquidateur, organe de la personne morale, désignée par les statuts ou par l’assemblée générale.

       la liquidation fait naître un concours entre les créanciers si elle s’avère déficitaire (cass 4 janv. 2001).

       la jurisprudence a édifié un système qui contribue à la théorie du concours et qui s’applique à toutes les personnes morales.

Egalité des créanciers :

       consacré par l’article 190 du code des Sociétés.

       les liquidateurs engagent leur responsabilité personnelle s’ils favorisent certains créanciers.

       pour la cour de cassation cette disposition ne constitue pas simplement une règle de responsabilité des liquidateurs mais implique l’égalité que doit régner dans les répartitions de l’avoir social entre tous les créanciers chirographaires et détermine leurs droits (cass, 23 nov. 1939)

       la mise en liquidation fixe les droits des créanciers de manière irrévocable.

       la mise en liquidation fait obstacle aux voies d’exécution, les créanciers pouvant toutefois faire constater judiciairement leurs créances.

       dans les rapports entre les créanciers, le cours des intérêts est suspendu.

       les créanciers que contractent avec le liquidateur postérieurement à l’entrée en liquidation pour les besoins de la liquidation sont des créanciers de la masse. 

Possibilité de déclarer en faillite une société en liquidation :

       la liquidation ne fait pas obstacles à la déclaration en faillite de la société.

       en effet :

       malgré la liquidation, la société commerciale garde sa qualité de commerçant.

       une société en liquidation peut cesser ses paiements et avoir son crédits ébranlés. Mais ces conditions doivent s’apprécier différemment dans le cas d’une liquidation : le liquidateur ne peut payer immédiatement tous les créanciers et ce simple fait ne suffit pas à caractériser la cessation des paiements . le crédit est ébranlé si les créanciers refusent d’accorder des délais de paiements au liquidateur.

 la loi du 8 août 1997 confirme se principe.

Intérêt pour les créanciers de faire déclarer en faillite une société en liquidation :

       la liquidation offre aux créanciers moins de garanties que la déclaration en faillite.

       la liquidation est confiée à un liquidateur souvent lié au actionnaires ou anciens administrateurs, tandis que la faillite est jugé par un curateur indépendant.

       la liquidation n’est pas précédée par une période suspecte. Pour pallier les fraudes l’art 12 de la loi de 1997 prévoit qu’en cas de faillite d’une société en liquidation qui est prononcée plus de 6 mois après la dissolution, la date de la cessation des paiements peut être fixée au jour de la dissolution s’il existe des indices qu’elle a été menée dans l’intention de nuire aux créanciers.

B.   règlement collectif de dettes.

1.   généralité :

loi du 5 juillet 1998 :

       la loi du 5 juillet 1998 relative au règlement collectif de dettes et à la possibilité de vente de gré à gré des biens saisi a inséré dans le code judiciaire des dispositions relatives à la procédure de règlement collectif de dettes.

objectifs :

       le législateur a voulu une solution globale au surendettement[1][29].

       la loi prévoit 2 procédures :

 

       un règlement amiable : le juge désigne un médiateur de dettes, qui tente de négocier un plan avec les créanciers. S’il y a accord, le plan est homologué par le juge.

       un règlement judiciaire qui peur être imposé par le juge à défaut d’accord des créanciers.

       le plan de règlement poursuit une double finalité : rétablir la situation financière du débiteur en lui permettant de payer ses dettes + garantir au débiteur et à sa famille de mener une vie conforme à la dignité humaine.

2.   conditions :

Texte :

       article 1675/2 nouveau du code jude.

 pour introduire une demande de règlement collectif de dettes, le requérant doit remplir les conditions suivantes :

1)   personne physique : les personnes morales ne peuvent recourir à cette procédure.

2)   domicile en Belgique : cette condition s’apprécie au moment de l’introduction de la demande.

3)   qualité de non commerçant : il existe en effet des procédures collectives spécialement réservées aux commerçant (concordat et faillite). Mais la loi n’opère pas de distinction entre les dettes privées et les dettes professionnelles : elle s’applique aussi au dettes d’un titulaire d’une profession libérale ou par un indépendant non commerçant ( ex : agriculteur).

Si le requérant a eu autrefois la qualité de commerçant, il ne peut introduire une requête que 6 mois après la cessation de son commerce, ou de la clôture de la faillite. => car un commerçant peut toujours 6mois après la cessation de son activité être déclaré en faillite.

4)   difficultés durables : le requérant doit éprouver de manière durable des difficultés de payer ses dettes exigibles ou à échoir. Ce déséquilibre doit s’apprécier entre les dettes et les revenus (pas entre passif et actif). Si une personne n’éprouve que des difficultés financières temporaires, elle ne peut recourir à cette procédure (elle peut toujours demander des délais de paiement).

5)   absence d’organisation d’insolvabilité : le requérant ne peut avoir organisé manifestement son insolvabilité, mais la loi n’exige pas qu’il soit de bonne foi. Le terme manifestement indique que le juge doit apprécier prima facie.

3.   procédure :

introduction de la demande :

       le débiteur introduit par requête la demande de règlement collectif de dettes, en indiquant l’objet et le motif de la demande, un état détaillé des éléments actifs et passifs du patrimoine, l’identité des créanciers, et les raisons de l’impossibilité de rembourser ses dettes.

       vu la définition de difficulté durable il aurait judicieux de viser aussi ses revenus.

Juge compétent :

       le juge des saisies du domicile du débiteur au moment de l’introduction de la demande.

Décision d’admissibilité :

       le juge statue sur l’admissibilité dans les 8 jours du dépôt.

       s’il déclare la demande admissible, le juge doit nommer un médiateur de dettes

       le médiateur doit être un avocat, un officier ministériel, un mandataire de justice ou une institution agréée à cet effet par l’autorité compétente. Il doit être indépendant et impartial à l’égard des parties.

       il perçoit des honoraires, payées de manière privilégiée par le débiteur et s’il reste un solde impayé, par le fond de surendettement financé par les institutions de crédits.

       dans les 24h du prononcé de la décision d’admissibilité, le greffier doit adresser un avis de règlement collectif de dettes au fichier central des avis de saisie.

       la décision d’admissibilité est susceptibles de tierce-opposition dans le mois de la notification. Elle est aussi susceptible d’appel mais il n’a pas d’effet suspensif.

Plan de règlement amiable :

       le médiateur de dette établit un projet de plan de règlement amiable.

       ce plan doit être approuvés par toutes les parties : le débiteur, le conjoint, ses créanciers, ses cautions.

       la loi ne limite ni la durée, ni le type des mesures que ce plan peut comporter.

       en cas d’approbation le plan est renvoyé au juge pour homologation.

Plan de règlement judiciaire :

       si le médiateur constate qu’il n’est pas possible de conclure un accord sur un plan de règlement amiable rapidement, il informe le juge.

       le juge doit entendre les parties.

       le juge peut soit imposer un plan de règlement judiciaire, soit si la procédure est irréalisable rejeter la demande de règlement.

       le plan de règlement judiciaire peut comporter les mesures suivantes :

       report ou rééchelonnement des dettes en principal, intérêts et frais.

       réduction des taux d’intérêt conventionnels aux taux d’intérêt légal.

       suspension de l’effet de sûretés réelles et de l’effet des cessions de créances.

       remise de dettes, partielles, totales, des intérêts moratoires, indemnités et frais liés au recouvrement amiable ou judiciaire.

       le juge ne peut décider d’autre remise partielle de dettes que moyennant certaines conditions sévères :

       le débiteur doit le demander.

       les mesures visées à l’art 1675/12 ne permettront pas de réaliser le plan.

       tous les biens saisissables doivent être réalisés

       le solde restant dû doit faire l’objet d’un plan de règlement dans le respect de l’égalité des créanciers.

       la remise dette n’est acquise que si le débiteur respecte le plan de règlement judiciaire et sous la réserve de retour à meilleur fortune avant la fin du plan de règlement judiciaire (article 1675/13). La loi est muette sur l’hypothèse dans laquelle le retour à meilleur fortune se produit après l’échéance du plan.

       le juge ne peut accorder comme remise de dette :

1)   les dettes alimentaires non échues.

2)   les dettes constituées d’indemnités accordées pour la répartition d’un préjudice corporel causé par une infraction.

3)   les dettes d’un failli qui subsistent après la clôture de la faillite. => un failli non excusable ne peut bénéficier d’une remise de dette.

       le juge subordonne ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à garantir ou à faciliter le paiement des dettes (recours au service social, vente de certains biens, déménagement vers un logement moins coûteux) et interdit au débiteur d’accomplir des actes qui aggraveraient son insolvabilité.

       le juge peut déroger aux articles 1409 et 1412 du C. jud. (sur les biens insaisissables) par une décision spécialement motivée. Par exemple, si 2 cohabitant bénéficient de rémunérations inférieures au seuil de saisissabilité, le juge peut en cumulant, ordonner l’utilisation d’une partie pour exécuter le plan.

       le plan de règlement ne peut excéder 5 ans, sous réserve du délai de remboursement des contrats de crédits ; il doit avoir une durée minimale de 3 ans dans le cas visé à l’article 1675/13.

       le médiateur de dettes est chargé de suivre et de contrôler l’exécution des mesures prévues dans le plan de règlement amiable ou judiciaire.

Nouveaux éléments :

       en cas de difficultés qui entravent l’exécution du plan ou de survenance de faits nouveaux, le médiateurs de dettes, le débiteur ou tout créancier intéressé peut faire ramener la cause devant le juge pour faire adapter le plan ou le faire révoquer.

       ex : survenance d’un créancier omis, accident, perte d’emploi ou au contraire, retour à meilleur fortune.

       le retour à meilleur fortune du débiteur n’entraîne donc aucune conséquence automatique (sous réserve des remises de dettes de l’art 1675/13), mais constitue un fait nouveau qui oblige le médiateur à ramener l’affaire devant le juge.

Déclaration de créance :

       les créanciers sont avertis de la décision d’admissibilité par le greffe.

       les créanciers doivent déclarer leur créance au médiateur de dettes dans le mois de l’envoi de la décision d’admissibilité.

4.   effets :

concours :

       la décision d’admissibilité de la demande en règlement collectif de dettes fait naître une situation de concours entre les créanciers.

       le concours vise tous les biens du requérant qui existaient au moment de la décision ainsi que les biens qu’il acquiert pendant la procédure.

       ces biens sont affectés à la satisfaction des créanciers et échappent à la libre disposition du débiteur.

       la décision d’admissibilité entraîne la suspension du cours des intérêts et l’impossibilité de procéder à des voies d’exécution sur les biens du requérant tendant au paiement d’une somme d’argent. Mais les créanciers peuvent encore procéder aux voies d’exécution qui tendent à une exécution en nature (ex : l’expulsion du logement)

       l’introduction de la demande n’a pas d’effet suspensif.

Interdiction pour le débiteur d’accomplir certains actes :

       tout acte étranger à la gestion normale du patrimoine.

       tout acte susceptible de favoriser un créancier, sauf le paiement d’une dette alimentaire mais à l’exception des arriérés de ceux-ci.

       d’aggraver son insolvabilité (nouveaux emprunts, réserver vacances).

 sauf autorisation par le juge.

       tout acte accomplis par le débiteur au mépris des effets attachés à la décision d’admissibilité est inopposable aux créanciers.

       mais comme le failli, le débiteur soumis au règlement collectif de dettes n’est frappé d’aucune incapacité.

Durée :

       les effets de la décision d’admissibilité prennent cours le premier jour qui suit la réception au fichier des avis de saisie de l’avis de règlement collectif de dettes.

       en principe, ils se prolongent jusqu’au terme ou à la révocation du plan.

Caution :

       les personnes qui ont constitué une sûreté personnelle en faveur du débiteur n’ont de recours à son encontre que dans la mesure où elles participent au plan et dans le respect de celui-ci.

       le législateur a voulu éviter que les cautions puissent se retrouver dans une situation plus favorable que les autres créanciers du débiteur.

5.   révocation du plan :

causes :

       le médiateur de dettes ou tout créancier intéressé peut demander au juge de révoquer la décision d’admissibilité ou le plan de règlement amiable ou judiciaire quand :

1)   le débiteur a remis des documents inexacts en vue d’obtenir le bénéfice de la procédure de règlement collectif de dette.

2)   il a fait sciemment de fausses déclarations

3)   il ne respecte pas ses obligations

4)   il a fautivement augmenté son passif ou diminué son actif

5)   il a organisé son insolvabilité.

       de +, pendant une durée de 5 ans après la fin du règlement amiable ou judiciaire comportant remise de dettes en principal tout créancier peut demander au juge la révocation de celle-ci, en raison d’un acte accompli par le débiteur en fraude de ses droits.

       les fraudes commises par le débiteur qui justifient la révocation de la remise de dettes, concernent surtout les actes destinés à soustraire de la masse des biens ou revenus disponibles. => notion de fraude = dans la relation paulienne.

       l’action aboutit à la révocation de la remise de dettes et par conséquent, du plan de règlement tout entier.

Effet :

       en cas de révocation, les créanciers recouvrent le droit d’exercer individuellement leur action sur les biens du débiteur pour la récupération de la partie non acquittée de leur créance. => la révocation profite à tout les créanciers.

Demandes successives :

      en cas de révocation du plan, le débiteur ne peut pas introduire de nouvelle requête visant à obtenir un règlement collectif de dettes pendant une période de 5 ans à dater du jugement de révocation. => pour éviter des demandes successives abusives.

   

[1][29] Surendettement : incapacité durable ou structurelle de faire face à ses obligations financières

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