Les arrêts de travail : maladie et accident de travail

LES ARRÊTS DE TRAVAIL EN CAS D’ACCIDENT OU MALADIE

En cas d’accident ou de maladie non professionnel, le salarié peut bénéficier d’un arrêt de travail : le contrat de travail est alors simplement suspendu. Lors de ces évènements, le salarié doit respecter certaines obligations et peut bénéficier d’une indemnisation. Toutefois, une absence prolongée ou des absences fréquentes peuvent entraîner le licenciement.

Section 1 – les obligations des parties pendant la période de suspension

Les obligations principales des parties sont suspendues : pas de travail, pas de rémunération.

  • 1 – La portée de la suspension sur les obligations du salarié

Le salarié est dispensé de collaborer avec son employeur (soc 25 juin 2003). Mais il reste un lien, le contrat n’est pas rompu. Il reste une obligation de loyauté. Ex : il ne peut pas refuser de communiquer à l’employeur des informations qu’il détient et qui sont nécessaires à l’activité de l’entreprise (ex : rendre les dossiers qu’il détient). Mais il n’est pas tenu de fournir une prestation de travail.

== Question relative à l’exercice d’une autre activité par le salarié alors qu’il est censé rester chez lui : Cass dit que le fait pour le salarié d’exercer une autre activité ne constitue pas en soi un manquement à son obligation de loyauté (soc 16 juin 1998 : carte postale de Yougoslavie. Licenciement pour faute. Employeur invoque violation des obligations vis-à-vis de la SS. Cass : violation des obligations du salarié envers la SS ne peut justifier un licenciement).

== Pour que l’activité du salarié justifie un licenciement, il faut qu’elle soit caractéristique d’un acte de déloyauté. Ex : salarié qui vient travailler quelques heures pour remplacer un ami ne caractérise pas un acte de déloyauté (soc 2002). Soc 21 oct. 2003 : un mécanicien réparait des véhicules pour son compte et en faisant appel à un autre salarié de l’entreprise => atteinte aux intérêts de l’entreprise => acte de déloyauté, justifiant le licenciement.

  • 2 – La portée de la suspension sur les obligations de l’employeur

Principe : l’employeur n’a pas à verser au salarié une rémunération. Exceptions : très souvent dans les CC, on prévoit que l’employeur pendant une certaine période va verser des compléments de salaires au salarié.

Cette obligation est souvent conditionnée par une contre visite médicale : un médecin envoyé par l’employeur examine le salarié. Si le salarié refuse, il ne commet aucune faute justifiant son licenciement. Il perd seulement son droit aux indemnités de salaires conventionnelles. Soc 13 juil. 2004 : le salarié ne commet aucune faute quand il s’en tient aux prescriptions de son médecin traitant.

Section 2 – la rupture du contrat de travail pendant cette suspension

L122-45 : le licenciement en raison de l’état de santé du salarié sauf inaptitude régulièrement constatée par le médecin du travail, est un licenciement discriminatoire donc nul. On ne peut pas justifier le licenciement par la maladie mais le licenciement n’est pas interdit.

Distinction entre maladie faisant suite à un accident domestique ou une maladie non professionnelle et suspension faisant suite à un AT ou une maladie professionnelle.

  • 1 – Suite à un accident ou une maladie d’origine non professionnelle

Jurisprudence admet que le licenciement puisse être justifié quand il est motivé non pas par la maladie mais par les conséquences de l’absence du salarié sur la situation de l’entreprise = perturbations que l’absence du salarié occasionne (Jurisprudence constante : soc 13 janv. 2001). 2 conditions :

– absence prolongée ou absences répétées perturbant le fonctionnement de l’entreprise. c’est cette perturbation qui justifie le licenciement

– ces perturbations doivent entraîner la nécessité de remplacer le salarié de manière définitive.

== Modalités de ce remplacement définitif ?

L’employeur doit-il procéder au recrutement avant le licenciement ou licencier et mettre en Âœuvre ensuite la procédure de recrutement ? Soc 10 nov. 2004 : le remplacement définitif doit intervenir dans un délai raisonnable après le licenciement. Délai apprécié souverainement par les juges du fond en tenant compte des spécificités de l’entreprise et de l’emploi concerné ainsi que des démarches faites par l’employeur en vue du recrutement.

== Problème de la motivation de la lettre de licenciement : quand a-t-on un motif suffisamment précis ?

– au départ : soc 10 nov. 2004 : cass considère qu’il suffit de mentionner que le salarié doit être remplacé définitivement

– revirement : soc 19 oct. 2005 : la lettre doit indiquer l’existence de perturbations et la nécessité de remplacer définitivement

  • 2 – En cas d’AT ou de maladie d’origine professionnelle

L122-32-2 : pose une interdiction de licenciement à peine de nullité du licenciement. Sauf faute grave (ex : actes de déloyauté pendant la suspension) ou impossibilité non liée à l’accident ou à la maladie de maintenir le contrat de travail. (Ces 2 conditions sont les mêmes que pour la grossesse).

« Impossibilité non liée à l’accident ou à la maladie de maintenir le contrat de travail » = un motif éco ne caractérise pas en soi l’impossibilité de maintenir le contrat : soc 17 nov. 2004.

Soc 15 mars 2005 : la cessation d’activité permet de caractériser l’impossibilité. La force majeure aussi.

Section 3 – La reprise du travail à l’issue de la suspension

Si la suspension a duré plus de 8 jours pour un AT ou maladie professionnelle ou plus de 21 jours pour accident ou maladie non professionnelle, cela donne lieu à un examen de reprise par le médecin du travail. Cet examen doit avoir lieu au plus tard dans les 8 jours suivant l’issue de la suspension. Soc 28 fév. 2006 : l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat donc il ne peut pas laisser le salarié reprendre son travail sans avoir fait procédé à l’examen médical par le médecin du travail. C’est une obligation.

  • 1 – Le médecin déclare le salarié apte

=> Le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire. Si l’employeur ne réintègre pas le salarié, le licenciement sera injustifié : licenciement sans cause réelle et sérieuse.

  • 2 – Le médecin déclare le salarié inapte à son emploi : l’inaptitude du salarié

A – Principe

L’inaptitude ne peut être constatée qu’à l’issue de 2 visites médicales espacées de 2 semaines (R241-51-1). L’employeur ne pourra pas procéder au licenciement pour inaptitude s’il n’y a eu qu’une seule visite médicale, sinon, le licenciement est nul (Jurisprudence constante : soc 26 mai 2004).

Exception : quand le médecin du travail indique expressément dans son 1er avis qu’il n’y aura qu’une seule visite ou que la reprise du travail occasionnerait un danger immédiat pour le salarié => possibilité de licencier.

B – Régime de l’inaptitude

L122-24-4 pour accident ou maladie d’origine non professionnelle et L122-32-5 et suiv. pour AT ou maladie professionnelle. Ces textes prévoient une obligation de reclassement à la charge de l’employeur : l’employeur doit tenter de le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités. Pour cela, l’employeur peut se fier aux observations faites par le médecin du travail dans l’avis d’inaptitude. En l’absence d’observations, l’employeur ne peut pas se sentir dispenser de l’obligation. Il doit au besoin solliciter les observations de la part du médecin du travail (soc 5 juil. 2006).

Le cadre de cette obligation de reclassement est l’entreprise ou, le cas échéant, le groupe auquel appartient l’entreprise. Jurisprudence très stricte. L’employeur doit dans tous les cas faire une rechercher effective de reclassement et le licenciement ne sera justifié que si le reclassement est impossible (ou si le salarié refuse les postes de reclassement). Même dans le cas où le médecin du travail aurait donné un avis d’inaptitude à tout emploi dans l’entreprise, ça ne dispense pas l’employeur de son obligation de reclassement (soc 7 juil. 2004). L’employeur doit faire des recherches, au besoin en mettant en Âœuvre des mutations, des transformations de postes de travail, des aménagements du temps de travailÂ… Dans le 1er arrêt l’employeur ne fait aucune recherche de reclassement => licenciement sans cause réelle et sérieuse. 2ème arrêt : l’employeur tente de transformer un poste et procède au licenciement => licenciement justifié.

C – Les conséquences du licenciement pour inaptitude

  1. Hypothèse de l’inaptitude faisant suite à une maladie ou un accident d’origine non professionnelle

– Si le reclassement s’avère impossible, le licenciement est justifié et le salarié a droit à l’indemnité légale de licenciement s’il a plus de 2 ans d’ancienneté. Il n’a pas droit à une indemnité compensatrice de préavis puisque l’inexécution du préavis est imputable à sa situation.

– Si l’employeur n’a pas respecté son obligation de reclassement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse => L122-14-4 et 5. Le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis. Jurisprudence considère que l’inexécution du préavis est imputable à l’employeur (soc 26 nov. 2002).

  1. Hypothèse de l’inaptitude faisant suite à un AT ou à une maladie d’origine professionnelle

On n’applique pas les indemnisations classiques. On applique L122-32-6 et 7 : régime indemnitaire particulier :

– si l’employeur a respecté son obligation de reclassement, le salarié a droit, selon L122-32-6, à une indemnité spéciale de licenciement, égale au double de l’indemnité de licenciement de droit commun (L122-9 donc deux ans d’ancienneté) ainsi qu’à une indemnité égale à l’indemnité compensatrice de préavis.

– Si l’employeur ne respecte pas son obligation de reclassement : dans ce cas, le salarié a droit aux indemnités de L122-32-6 mais en plus, le licenciement est injustifié => droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 12 derniers mois (L122-32-7).

D – Hypothèse où l’employeur ne licencie pas le salarié inapte

Si l’employeur reste passif (déclaration d’inaptitude mais l’employeur ne reclasse pas et ne procède pas au licenciement), L122-24-4 (accident et maladie d’origine non pro) et L122-32-5 (AT, maladie pro) : l’employeur a un mois à compter de l’avis d’inaptitude, soit pour reclasser soit pour licencier. S’il ne fait rien, l’employeur est tenu de reprendre le paiement des salaires.

Cass : le paiement des salaires ne dispense pas l’employeur de son obligation de reclassement. Le salarié peut à tout moment prendre acte de la rupture de son contrat de travail et dans ce cas, cette prise d’acte produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse : soc 3 mai 2006.