La modification du contrat de travail par l’employeur

LE POUVOIR DE MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL

La question de la qualification du contrat de travail est intéressante d’un point de vue théorique mais en pratique c’est une question qui se pose dans un contexte contentieux particulier. En gros, c’est parce qu’il y a qualification du contrat de travail qu’il y a contentieux. Il y a deux contextes de contentieux :

– Celui des ruptures à l’initiative du salarié.

– Celui des ruptures à l’initiative de l’employeur.

Lorsqu’un salarié prend acte de la rupture du contrat de travail, ou la prise d’acte est consécutive à une faute suffisamment grave de l’employeur et à ce moment là la rupture provoquera les effets d’un licenciement Sans Cause Réelle et Sérieuse. Ou la faute de l’employeur n’est pas assez grave et la rupture sera équivalent à une démission. C’est tout ou rien.

Les actes imposés au salarié par l’employeur sont soit dans son pouvoir soit non.

Le plus souvent le contexte du contentieux est lié à la rupture à l’initiative de l’employeur.

Exemple : employeur tente d’imposer au salarié une modification du contrat. Si la modification relève d’un élément du contrat alors le refus du salarié n’est pas fautif. Par la suite le salarié est licencié. Quelle est la cause du licenciement ? Selon la cour de cassation, il s’agit d’un motif économique qui est la cause première de la proposition de modification du contrat (exemple baisse de salaire à la base).

Exemple : employeur tente d’imposer au salarié une modification du contrat. Si la modification relève d’un élément du pouvoir. Imaginons qu’il y a des difficultés économiques. Augmenter la cadence du salarié fait partie du pouvoir de direction de l’employeur. L’employeur donne donc un ordre. Le salarié refuse est il est donc fautif. Il est donc licencié pour faute. Le licenciement est disciplinaire.

  1. A) Modification du contrat de travail en l’absence de clause

Qu’est-ce qui appartient au pouvoir, qu’est-ce qui n’appartient pas au pouvoir ?

1) Le salaire

Le salaire est contractuel car il s’agit de la contrepartie du pouvoir. Donc une modification du salaire est une modification contractuelle.

Lorsqu’une part du salaire est issue d’un avantage, d’un engagement unilatéral de l’employeur, la cour de cassation admet que la disparition de cet usage ou engagement unilatéral puisse emporter disparition sans modification du contrat de travail de cette part du salaire (exemple : 13ème mois).

2) Le lieu de travail

Soc. 4 mai 1999, Hczysczyn >> Si le salarié est dans le secteur géographique, alors la mutation appartient à l’employeur. Si le salarié est hors du secteur géographique, il s’agit d’une modification du contrat. Qu’est-ce qu’un secteur géographique ? Versailles Chartes = même secteur géographique ? On est hors secteur géographique. La région parisienne aurait été le même secteur géographique.

3) La nature du travail

La place dans la hiérarchie est une modification du contrat même si le salaire est maintenu. La qualification professionnelle relève du contrat également.

4) Le titulaire du pouvoir

Il s’agit de l’employeur. Si on chose celui qui est détenteur du pouvoir, on ne modifie pas le contrat. Si on change d’employeur, on change de cocontractant. Il y aurait donc une modification du contrat de travail. Mais, en droit du travail, il y a une exception :

Article L1224-1 Code du Travail : les contrats de travail sont transférés. Le nouvel employeur récupère les contrats. Ce changement d’employeur est d’ordre public. Le salarié ne peut donc pas refuser ce changement.

Pour la CJUE il existe un refus car c’est une modification du contrat de travail et pour exprimer son refus il démissionne.

Article L8241-2 de la loi du 28 juillet 2011 par lequel, désormais, en cas de mise à disposition d’un salarié à titre gratuit, il y a un changement qui est une modification du contrat donc il existe un droit au refus à la mise à disposition à titre gratuit du salarié.

  1. B) La modification du contrat en présence de clauses contractuelles

1) Accroissement du pouvoir

Clause de mobilité, géographique, professionnelle, de flexibilité : toutes ces clauses sont valides mais contrôlées par la jurisprudence avec principalement deux logiques :

– L’atteinte aux droits fondamentaux. Une clause qui accroît trop les pouvoirs de l’employeur peut porter atteinte aux droits fondamentaux du salarié. L’article L1121 du Code du Travail est utilisé maintenant pour vérifier les clauses de mobilité.

– Le contrat de travail doit avoir un objet déterminé ou déterminable de l’article 1129 du Code Civil. Les obligations contractuelles doivent avoir un objet déterminé ou déterminable. Quel est l’objet du contrat de travail ? Un travail subordonné. Il doit donc y avoir des frontières déterminées à la subordination.

La cour de cassation annule les clauses des contrats qui sont des clauses de flexibilité car elles sont souvent insuffisamment précises.

2) Les clauses d’accroissement du contrat

Le pouvoir de l’employeur, encore une fois, doit pouvoir être réduit et ce même jusqu’à zéro, jusqu’à disparition du contrat. La liberté est un droit fondamental. On peut très bien signer un contrat dont les dispositions contractuelles ne seront modifiables en aucun cas. Ainsi, les clauses d’accroissement du contrat sont valides mais encore faut-il qu’elles soient bien rédigées sinon il y a le risque de la jurisprudence du 3 juin 2003 de la chambre sociale, Suret et Resoserv >> jurisprudence sur les clauses informatives du contrat. Était indiqué dans le contrat l’adresse du lieu de travail. Pour la cour de cassation, il s’agit d’une clause informative sans force impérative. On peut donc changer le lieu de travail dans le même secteur géographique. Si l’adresse avait été spécifiée comme étant une disposition contractuelle au sein du contrat alors dans ce cas, le salarié aurait pu invoquer une modification de son contrat de travail.

  1. C) La modification du contrat de travail avec la présence d’une convention collective

Article L2254-1 du Code du Travail : cet article est très ancien mais il est toujours d’actualité. Il n’a pas été modifié. Les conventions collectives s’appliquent sauf disposition plus favorable du contrat de travail. La convention collective s’est un accord entre les organisations syndicales et l’employeur ou un groupement d’employeurs. L’employeur ne peut pas modifier le contrat de travail. Le syndicat non plus en droit français. Dans d’autres pays on considère que dans certains cas le syndicat est le représentant du salarié dans le sens de mandataire. En droit français, la convention collective s’applique à tous, qu’ils soient syndiqués ou non. Le syndicat n’agit pas en tant que mandataire mais représente l’intérêt des salariés. Il n’est ni le commettant ni le mandataire des salariés. C’est une entité propre qui n’est pas le porte-parole de la volonté individuelle des salariés. C’est pourquoi la convention collective ne peut pas modifier le contrat de travail. Ce droit positif explique l’article L1222-8 du Code du Travail.

Le patronat français tient le raisonnement suivant : j’ai signé une convention collective, qui prévoit par exemple une baisse de salaire de 20%. Je n’ai pas signé la convention seul. Pour le patronat français les résistants individualistes devraient être pendus. On comprend moins que certains syndicats suivent ce point de vue.

Pour essayer de faciliter la vie des employeurs qui tentent de dégager les salariés récalcitrants, le législateur a fait un effort. Article L1222-8 du Code du Travail. Il est prévu que le salarié qui refuse une baisse de salaire puisse être licencié pour motif personnel. On garde l’idée d’un droit au refus mais il y a un licenciement qui n’est ni fautif, ni pour inaptitude ni pour motif économique.

Article L3122-6 du Code du Travail (Loi Warsmann) >> Ce texte vient casser la jurisprudence qui disait que lorsqu’une convention collective réalise une modulation du temps de travail importante, elle peut être considérée comme une modification du contrat de travail. Cet article nous dit qu’un accord de modulation du temps de travail n’est pas une modification du contrat de travail. C’est donc une détermination de ce que le contrat ne contient pas par la loi. Ainsi, les contrats ne contiennent pas l’organisation du travail, c’est un pouvoir qui appartient au pouvoir de l’employeur. Ainsi, le refus du salarié de la modulation de son temps de travail sera sanctionné par un licenciement disciplinaire.

La présence d’une convention collective rend plus fragile la résistance du contrat.

Futur article L5125-2 >>

1er disposition importante au futur article L 5125-1 et suiv du Code du Travail prévoit de nouvel convention collective qui ont le nom d’accord de maintien de l’emploi. Ce sont des accords qui en échange d’un accord de l’employeur de ne pas maintenir l’emploi accord au même employeur une réduction de certains avantage sociaux. Cette idée de négociation est une idée ancestrale dans certains cas les employés acceptent.

Dans le projet d’abord, ces accords de maintien de l’emploi seront plus encadré. Ce sont des accords qui seront possible en cas de grave difficulté conjoncturelle.

Ce sont des accords qui devront être majoritaire. Ce sont des accords qui devront être signés par des syndicats qui ont plus de 50% de suffrages exprimés. Ces accords ne peuvent pas baisser les salaires en dessous du SMIC + 20 %. Ce sont des accords de deux ans maximum. Durée pendant laquelle les contrats individuels de travail sont suspendu pendant la durée de l’application de l’accord. Au bout de deux ans, le salaire redevient intégral.

La loi crée comme possibilité supplémentaire d’imposer un peu la convention collective aux salariés. Article L 5125-2 futur essaye de crée une situation intermédiaire. L’accord ne s’impose pas à l’individu et il n’a pas droit au refus non plus, on essaye de faire un truc entre les deux. Lorsqu’un ou plusieurs salariés refusent l’application de l’accord à leur contrat de travail, leur licenciement repose sur un motif économique est prononcé selon les modalités d’un licenciement individuel pour motif économique ».

Grave difficulté conjoncturelle – CC de « maintien dans l’emploi » – Refus (non fautif) – Licenciement

Les conséquences pratiques sont faibles car la cause du licenciement est dans la convention collective, à la condition que la convention collective soit valide. Et quand est-elle valide ? En cas de grave difficulté conjoncturelle.

Le contrat individuel de travail ne peut pas se voir imposé de destruction par convention collective. En principe la convention collective ne peut pas modifier le contrat car le pouvoir unilatéral de l’employeur ne peut pas modifier le contrat, le syndicat ne peut pas modifier le contrat.

Si la convention collective peut modifier le contrat c’est parce qu’il existe un pouvoir supérieur au contrat qui est un pouvoir de modifier le contrat et qui est accordé à la convention collective. Il s’agit d’un pouvoir législatif supérieur au contrat admis en droit positif.

Cela ne remet pas en cause la théorie contractuelle dans son ensemble. Mais les textes nouveaux apportent une exception au principe qui demeure qui est l’impossibilité de la convention collective de modifier le contrat de travail mais une exception est apportée à l’article L 5125-2.

L 2242-23 futur prévoit une nouvelle exception. Le schéma de cette article est le même que celui de l’article précédent. La convention collective s’impose au contrat individuel aux salariés qui peuvent refuser et donc ils seront licenciés pour motif économique. Par convention collective, on va organiser la mobilité des salariés.

Dans le projet de loi, les accords de mobilité interne sont prévus que dans le cas ou ne sont pas prévu des licenciements économiques.

Lorsqu’il n’y a pas de suppression d’emploi alors on peut réaliser un accord de mobilité interne.

Les accords de mobilité interne ne seront pas valides en l’absence de suppression d’emploi, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de licenciement. Ce qui ne veut pas dire qu’ils ne seront pas licenciés, des personnes seront recrutés pour les remplacer.

Les accords de mobilité peuvent considérablement accroitre la soumission des salariés et ceci contre les dispositions du contrat individuel.

Ce n’est plus le contrat individuel qui est la source du pouvoir patronal, la source du pouvoir patronal de mutation est dans la convention collective.