La nécessité d’un juge impartial
Aucun doute sur cette qualité, toutes les normes processuelles le précisent. On se pose la question de qu’est-ce qu’un juge impartial ? Et qu’est- ce qu’il arrive quand un juge partial à rendu une décision ? (les parties peuvent demander la récusation du juge).
Que signifie juge impartial ? Les différentes normes processuels recourent à cette notion mais on ne la définit jamais réellement. Lorsque la norme est muette alors la jurisprudence l’a complète. CEDH : arrêt de principe PIRSAK vs Belgique du 1 Octobre 1982, la cour se risque à définir l’impartialité. En lisant cet arrêt on apprend que le juge qui est impartial doit présenter deux types d’impartialité, qui doit les présenté en même temps :
– impartial subjectivement (= personnel)
– impartial objectivement (=fonctionnelle, ou structurelle).
Cela signifie d’après la CEDH :
– impartial dans son fort intérieur c’est à dire le juge ne doit juger en droit et en équité si la loi le lui permet : surtout pas au regard de ces sentiments, ni en vertu de ses convictions personnelles (religieuse, politique, éthique), ni en fonction de son humeur.
– Il ne doit dans son action de juger n’avoir aucune idée préconçu quant à l’issus donné à l’affaire. Il doit y rentrer neutre sans pré jugement. Cette impartialité personnelle est difficile à prouver. La cour à posé une présomption : « tout les juges sont présumés être impartiales en leurs fort intérieures ». Présomption simple, peut être renversée par tout moyen. La preuve contraire découle de deux éléments objectifs, il suffit que l’on en prouve un et la preuve est apportée :
– existence d’un lien entre le juge et l’une des parties.
– existence d’une même affiliation entre le juge et l’une des parties
Vice objectif : lien de parenté, lien d’amitié, lien d’affection, ou un lien professionnel. Des que ce lien est prouvé, alors la présomption tombe. Cette position de la cour européenne a été suivit en droit français :
– cassation, chambre sociale (car souvent en matière Prud’homal que la question se pose) « conseil prud’homme dont la nièce vivait avec le salarié qui est jugé ». OU alors 3/07/2001 : pas impartial un conseiller prud’homme une femme qui est assisté par son mari qui est conseiller lui aussi. 16/09/2008 : n’est pas impartial un conseiller prud’homme devant lequel l’une des parties est le frère d’un conseiller prud’homal d’une des parties.
– Conseil d’Etat : 2 Octobre 1996 : pas impartial le juge administratif qui est la fille d’un conseiller municipale de la commune dont l’arrêté est examiné. 6 Mars 1898 : pas impartial le juge administratif qui siège dans une formation ayant compétence pour trancher du recours formé par les étudiants contre la délibération du jury qui les a ajourné alors que le juge est l’enseignants qui leurs a donné cours tout au long de l’année.
En droit processuel la question s’est posé : même appartenance politique, religieuse, syndicales, philosophique d’un juge et d’une parties peut être un indice qui peut renverser la présomption d’impartialité. Une partie de la doctrine va dans ce sens là, le juge doit être considéré comme partial. Mais la CEH ne va pas dans ce sens là) : arrêt SALAMAN vs Royaume-Uni du 15 Juin 2000 : la cour considère que l’appartenance à une même affiliation du juge et de l’une des parties n’est pas en soit de nature à faire douter de l’impartialité personnel du juge. Elle ajoute que cette même affiliation peut devenir un indice de partialité à condition qu’elle s’accompagne « d’élément particulier interne à l’objet du procès ». Cet arrêt a été confirmé plusieurs fois. Le principe est le suivant : le fait pour un juge et une partie d’appartenir à une même affiliation ne suffit pas pour caractériser la partialité. Logique car libertés fondamentales on ne peut priver le juge d’appartenir à tel ou tel religion. Par exception : cette même affiliation peut devenir un indice objectif qui permet de douter de l’impartialité personnel du juge si cette affiliation est accompagné d’élément particulier interne à l’objet du procès ». On n’a cependant aucun exemple, on attend un prochain arrêt.
– cassation, premier civil du 19 Décembre 2003 où l’on a considère que pour le juge et la partie d’appartenir à un même syndicat professionnel n’est pas en soit une preuve de la partialité du juge.
Cette partialité doit se vérifier dans ces fonctions. La cour européenne a considéré que le juge doit être déclaré partial en raison de ces fonctions dans 2 hypothèses :
– quand dans le cadre d’une même affaire, le juge cumule plusieurs fonctions.
– Le juge qui rejuge une même affaire.
Il n’est pas rare car ca arrive souvent : on observe une diminution du nombre de magistrat (cette année 70 places alors que normalement 162). De plus, il y a une augmentation des affaires à traités. La CEDH considère en vertu de cette impartialité que dans une même affaire, un juge ne doit pas cumuler plusieurs fonctions. S’il cumul plusieurs fonctions alors il sera réputé partial : Trois observations :
– le cumul n’est interdit que si même affaire, dans les faits il est difficile de savoir si c’est même affaire. Identité des parties, identité objet et identité moyen
– le cumul est une cause de partialité que ce juge exerce ces différentes fonctions en même temps ou successivement. Peu importe ca le rend partiale dans ces fonctions. Exemple matière civil : un juge de la mise ne Etat qui est en même temps juge rapporteur. Successif : matière pénal : juge d’instruction et quelque temps plus tard il va juger. C’est interdit !
– les fonctions cumulés peuvent être de nature différentes finalement :
La règle est simple le seul fait pour un juge dans une même affaire de cumuler une fonction juridictionnelle avec une fonction administrative est contraire au principe d’impartialité, parce qu’il existe dans le système juridictionnel françaises deux fonctions:
α . Le cumul d’une fonction juridictionnelle avec une fonction administrative de conseil
Interdit car impossibilité de cumuler plusieurs fonctions. La Cour Européenne Droit de l’Homme arrêt PROCOLA contre Luxembourg 28 septembre 1995: était en cause le conseil d’état luxembourgeois qui à l’époque, un des juges pouvaient exercer deux fonctions dans la même affaire; conseiller et il pouvait également juger l’affaire. La CEDH a répondu que le juge ne pourra pas cumuler au sein d’une même affaire ces deux types de fonction. 16 octobre 1996: législateur n’a confié au conseil d’état une fonction uniquement législative et réserver la fonction juridictionnelle au Cour administrative luxembourgeoise.
1) Les attributions consultatives du Conseil d’état
L’arrêt procola a remis en cause le rôle de notre conseil d’état français qui exerce une fonction consultative et une fonction juridictionnelle car juge de cassation dans l’ordre administratif, donc il peut arriver qu’un même conseiller conseille et juge. Le Conseil d’Etat conseille le gouvernement français car sur certains points l’avis du Conseil d’Etat est obligatoire, mais ce Conseil d’Etat conseille également les juges administratifs du fond, puisque n’importe quel juge du fond peut saisir pour avis le Conseil d’Etat. Notre Conseil d’Etat peut conseiller et juger et il arrive qu’un même conseiller dans la même affaire cumule la fonction consultative et la fonction juridictionnelle. Cette situation française est contraire aux exigences européennes. Dès le lendemain de l’arrêt PROCOLA le Conseil d’Etat a mis en place un usage selon lequel le conseiller qui a siégé dans une section consultative ne se retrouve pas ensuite au sein de la section du contentieux dans la même affaire. Le droit processuel ne peut pas se contenter d’un simple usage, il faudra un texte, une loi, un règlement, tant que ça n’est pas le cas le droit français reste contraire à la CEDH.
2°) Les attributions consultatives des Tribunaux Administratifs et des Cour Administrative d’appel
Le Tribunal Administratif exerce deux fonctions: juger (au premier degré) et une fonction consultative au près du préfet du département. (R212-1) précise que le Tribunal Administratif peut conseiller juridiquement le préfet du département; Devant un Tribunal Administratif il peut arriver que pour la même affaire un juge conseille et juge (contraire à l’arrêt PROCOLA)
Même chose pour la Cour d’Appel: deux fonctions: juge mais a également une fonction consultative (R212-1) le Cour d’Appel peut conseiller le préfet de région.
Conseil d’Etat a pris les devants et a créé un usage; usage selon lequel le magistrat qui a conseillé ne peut plus par la suite se retrouver dans la formation de jugement de la même affaire.
3°) Les attributions consultatives de la Cour de Cassation :
L’arrêt PROCOLA remet également en cause le fonctionnement de la Cour de Cassation.
La Cour de Cassation juge et a une fonction consultative: n’importe quel juge du fond peut saisir pour avis la Cour de Cassation, donc peut arriver qu’un conseiller à la Cour de Cassation dans la même affaire est conseillé puis jugé.
Elle a aussi mis en place un usage: usage selon lequel le conseiller qui a participé à la formation pour avis ne peut plus par la suite siéger dans la formation de jugement dans la même affaire.
Il ne s’agit que d’un usage, il n’est pas certain que le droit processuel puisse se contenter d’un usage.
β. Le cumul d’une fonction juridictionnelle avec une fonction administrative de contrôle :
Se retrouve principalement au sein de la Cour des Comptes qui vient juger les comptables publics et vient contrôler la bonne utilisation des données publiques. Il peut arriver qu’un conseiller à la Cour des Comptes puisse avoir contrôlé et puis jugé ce qui est contraire à l’exigence d’une impartialité structurelle.
Question jamais posée devant la CEDH, mais une nouvelle fois le Conseil d’Etat a pris les devants avec 3 arrêts rendus le 23 février 2000 le 28 septembre 2001, 4 juillet 2003: -Le conseiller de la cour des comptes qui a siégé dans la formation administrative de contrôle ne peut plus siéger dans la formation contentieuse afin de préserver l’exigence européenne d’impartialité. Décision de justice mais pas de texte.
Observation: Ce qui vaut ici pour la cour des comptes vaut également pour toutes les autres juridictions financières françaises. (Ex: la Cour de discipline budgétaire et financière, La Chambre régionale des comptes)
De toute évidence l’impartialité structurelle interdit également qu’un même juge rejuge la même affaire, on emploie souvent l’expression suivante: « qui a jugé ne peut rejuger ».
Tout simplement parce que celui qui a déjà jugé et amené à rejuger aura forcément un préjugé, but du principe d’impartialité: écarter tout type de préjugé.
Il faut distinguer deux situations différentes:
-il est des hypothèses ou un même juge est amené à rejuger la même affaire en raison de l’exercice du droit de recours.
-Un même juge est amené à rejuger une même affaire en dehors de toute voie de recours. (Ex: juge des référés peut intervenir en référé
Dans toute procédure il existe deux catégories de voie de recours:
-voie de recours de réformation; le plaideur demande à un autre juge de réexaminer l’ensemble de l’affaire (cas de l’appel, ou du pourvoi en Cassation)
-voie de recours de rétractation: le plaideur s’adresse au même juge et lui demande de lui même réexaminer l’ensemble des affaires. (L’opposition, la tierce opposition, le recours en révision)
α ) En présence d’une voie de recours de réformation :`
ll ne fait aucun doute que l’exigence processuel d’impartialité interdise au juge qui a jugé lors de la première instance de juger à nouveau dans l »instance sur voie de recours.
3 conséquences:
– ce principe signifie que la règle d »impartialité implique qu’un même juge ne puisse siéger dans la formation de la cour d’appel si il a déjà jugé dans la formation de première instance. Cette solution est inscrite en France dans un article du code de l’instruction judiciaire (L111-9)
– la règle d’impartialité implique également qu’un même juge ne puisse siéger dans une formation de jugement de la Cour de Cassation au Conseil d’Etat si il a déjà siégé auparavant dans la formation de jugement qui a rendu la décision contre laquelle le pourvoi est formé.
– la règle d’impartialité implique encore qu’un même juge ne puisse siéger dans la formation de jugement d’une juridiction de renvoi après cassation. Mais également celui qui a jugé avant la cassation ne peut pas rejuger l’affaire par la suite. S’agissant de cette troisième conséquence elle a été réaffirmé par la CEDH dans un arrêt VAIVANT contre France: il résulte de cet arrêt que le seul fait que la juridiction de renvoi soit composée d’un juge qui auparavant avait déjà jugé l’affaire soit parce qu’il faisait partie de la cour de cassation, ou du conseil d’état, ou d’avant, ne suffit pas pour rendre ce juge partial. Car cet arrêt dit: que tout dépend des questions que la juridiction de renvoi doit trancher. Deux solutions d’après cet arrêt: lorsque la cassation est fondée sur une irrégularité de fond dans ce cas là il est certain que la juridiction de renvoi ne doit être composée d’aucun des juges qui ont siégé précédemment, en revanche deuxième hypothèse lorsque la cassation est fondée sur une irrégularité de forme (vice de procédures, incompétence) ici la cour européenne considère que la juridiction de renvoi peut exceptionnellement être composée par un juge qui a déjà jugé précédemment. Cette distinction n’a aucune incidence en droit français, car il est allé au delà des exigences européennes: L431-4 précise que dans tous les cas la juridiction de renvoi après cassation ne doit comporter aucun des juges qui a siégé précédemment.
β ) En présence d’une voie de recours de rétractation
Lorsque la voie de recours qui est formée est une voie de recours de rétractation, alors la CEDH considère qu’exceptionnellement le même juge est autorisé à rejuger la même affaire sans que cela compromette la règle d’impartialité. Arrêt THOMANN contre SUISSE (règle suisse identique à la française dans ce cas) du 10 juin 1996. Cette solution est logique car l’essence même d’une voie de recours de rétractation est de revenir précisément devant le juge qui s’est trompé et de lui demander de parfaire la décision précédemment rendue. Ce même juge peut juger donc dans les deux cas.
α ) Le juge qui a statué au pénale peut-il ensuite statué au civil ?
La CEDH n’a jamais eu à se poser la question, mais en revanche la cour de cassation dans un arrêt du 29 septembre 2004 précise que la règle d’impartialité interdit à un juge qu’il puisse siéger d’abord au pénal puis au civil dans la même affaire. L’inverse est-il possible ? Il faut savoir que cette hypothèse ne peut pas se rencontrer en droit français : article 5 du Code de Procédure Pénale : « la partie qui a exercé son action devant une juridiction civil ne peut plus la porter devant une juridiction pénale ». Il existe une option en droit français :
—
Victime peut saisir soit la juridiction civile (Dommage et Intérêt), soit Juridiction Pénale (constitution de partie civil), article 3 Code Procédure Pénale. ce choix est irrévocable. Une fois que la victime a exercé son choix, il n’est plus possible de revenir en arrière. Cette irrévocabilité ne joue que dans un sens. Cette option n’est irrévocable que si la personne a d’abord choisit le pénal (raviser pour finalement choisir le juge civil).
β) Le juge qui a statué en référé (urgence en droit) peut-il ensuite statué sur le fond de l’affaire ?
Il arrive parfois qu’un même juge est appelle à statué en référé puis il est appelle à juger sur le fond de l’affaire quelque mois plus tard. La CEDH n’a pas répondu à la question. Ainsi la Cour de cassation : avec une évolution (avant 1998 : oui le juge peut juger de la même affaire). En 1998, deux arrêts de revirement (6 Novembre 1998) : deux particularités : directement l’assemblée plénière
– le revirement n’a été que partiel, en effet on distingue le référé
– provision et d’un autre coté tous les autres référés. Si le juge est intervenu dans un référé provision (somme d’argent), le juge ne peut pas statuer par la suite sur le fond de l’affaire (impartialité oblige), dans tout les autres cas de référé (il en existe sept, donc les six autres), le juge peut intervenir par la suite sans que son impartialité soit compromise. Dans le référé provision, le juge des référés à l’obligation de vérifier que l’obligation du créancier n’est pas « sérieusement contestable ». L’assemblée plénière estime qu’un juge qui estime si caractère contestable, alors il a un pré jugement puisqu’il donne son avis. Dans les autres référés, les juges doivent vérifier l’urgence et non le fond de l’affaire.
On a observé une certaine résistance des juges du fond : il faudrait pour eux décider si un juge ne puisse jamais intervenir dans les référés. Le seul cumul fait douter de l’impartialité du juge. Ce mouvement de contestation à été suivit par la chambre commerciale dans un arrêt du 9 Octobre 2001 : laisse entendre que le principe d’impartialité s’oppose à ce qu’un juge des référés interviennent au principat de l’affaire, quelque soit la nature du référés.
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