La perte de nationalité par déchéance de nationalité ou désobéissance

La Perte Imposée

 Il  n’y  a  pas  d’ambigüité  car  la  perte  est  décidée à titre de sanction pure et simple : 

          soit   qu’il   s’agisse   de   punir   la   désobéissance   grave   et   caractérisée   à   une   injonction   du  gouvernement français, 

          soit   qu’il   s’agisse   d’exclure   de   la   communauté   nationale   pour   déchéance   un   français   récent,  généralement naturalisé, qui se révèle indésirable.

Mise à jour   :  Suite aux attentats du BATACLAN et du Stade de France de 2015, le président de la République annonce le 16 novembre 2015 au Parlement réuni en Congrès vouloir étendre la déchéance de la nationalité française aux binationaux nés français, sanction déjà prévue par l’article 25 du code civil pour les binationaux naturalisés français. À cet effet, un nouvel article 3-1 serait inséré dans la Constitution du 4 octobre 1958

Selon différents sondages réalisés en 2015, une majorité de Français se déclarait favorable à la déchéance de nationalité des terroristes binationaux

Le 11 décembre 2015, le Conseil d’État, saisi pour avis juridique, confirme le risque d’inconstitutionnalité imposant une modification de la constitution. La mesure envisagée par le Gouvernement pourrait se heurter à un éventuel principe fondamental reconnu par les lois de la République interdisant de priver les Français de naissance de leur nationalité et qu’elle poserait la question de sa conformité au principe de la garantie des droits proclamé par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.Lors du débat devant la Commission des Lois constitutionnelles, de la Législation et de l’Administration générale de la République de l’Assemblée nationale le 27 janvier 2016, Manuel Valls présente des amendements au texte : Ainsi les « binationaux n’apparaissent plus dans le projet de réforme, ils seront bien, en pratique, les seuls concernés, puisqu’il n’est pas question de rendre apatrides des Français de naissance.Finalement, le 30 mars 2016, le Président de la République met un terme à ce débat en enterrant le texte.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9ch%C3%A9ance_de_la_nationalit%C3%A9_fran%C3%A7aise

 

&1) La perte par déchéance : la déchéance de nationalité

 Le Code civil distingue la perte de la nationalité, qui résulte d’un constat (articles 23 à 23-9), de la déchéance de la nationalité française décidée par le pouvoir exécutif (articles 25 à 26). Cependant les articles 23-7 et 23-8 relèvent des deux pratiques, prévoyant un constat à la suite d’une action gouvernementale.

Article 23-7 du Code civil

L’article 23-7 du Code civil dispose que « le Français qui se comporte en fait comme le national d’un pays étranger peut, s’il a la nationalité de ce pays, être déclaré, par décret après avis conforme du Conseil d’État, avoir perdu la qualité de Français49. » Cette disposition est issue d’un décret-loi du 12 novembre 1938 d’Édouard Daladier et reprise dans l’ordonnance du 19 octobre 1945 prise par Charles de Gaulle4. Elle est jugée conforme par le Conseil d’État par la décision « Époux Speter » rendue le 7 mars 1958, puis le 20 mars 1964 (« Sieur et dame Cornakowski »). Le défaut de loyalisme à la France par l’allégeance à une entité étrangère, utilisé à 523 reprises entre 1949 et 1967 contre des binationaux dans le cadre de la Guerre froide, s’applique aussi bien aux Français de naissance qu’aux naturalisés.

Article 23-8 du Code civil

L’article 23-8 du Code civil dispose que « perd la nationalité française le Français qui, occupant un emploi dans une armée ou un service public étranger ou dans une organisation internationale dont la France ne fait pas partie ou plus généralement leur apportant son concours, n’a pas résigné son emploi ou cessé son concours nonobstant l’injonction qui lui en aura été faite par le Gouvernement. »

Article 25 du Code civil

L’article 25 du Code civil organise les conditions de la déchéance de la nationalité française, limitée aux personnes naturalisées depuis moins de 10 ans (ou 15 ans en cas de terrorisme), en application de l’article 25-1.

« L’individu qui a acquis la qualité de Français peut, par décret pris après avis conforme du Conseil d’État, être déchu de la nationalité française, sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride :

  1. S’il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ;
  2. S’il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit prévu et réprimé par le chapitre II du titre III du livre IV du code pénal ;
  3. S’il est condamné pour s’être soustrait aux obligations résultant pour lui du code du service national ;
  4. S’il s’est livré au profit d’un État étranger à des actes incompatibles avec la qualité de Français et préjudiciables aux intérêts de la France. »

— Article 25 du Code civil

L’article 25 est déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 23 janvier 2015, à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité.

La procédure de déchéance

La procédure de déchéance de nationalité est régie par l’article 61 du décret no 93-1362 du 30 décembre 1993 : le ministre chargé des naturalisations doit notifier à l’intéressé les motifs de droit et de fait justifiant la déchéance de nationalité ; l’intéressé dispose d’un délai d’un mois pour faire valoir ses observations ; à l’expiration de ce délai, le Gouvernement peut déclarer, par décret motivé pris sur avis conforme du Conseil d’État, que l’intéressé est déchu de la nationalité française. Ce décret motivé peut naturellement faire l’objet d’un recours gracieux ou d’un recours contentieux pour excès de pouvoir devant le Conseil d’État55.

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C’est  un  cas  de  perte  particulier  que  du  reste  la  Code civil présente comme un cas différent des autres cas. Il a en lui-même et dans son appellation quelque chose d’infâmeux. Il   s’agit   d’exclure   de   la  nationalité  française,  un  français  qui  l’a  acquise  en  cours  d’existence  et  qui  s’est  rendu  coupable  de  forfaits ou de faits   si   condamnables   qu’il   ne   parait   plus   envisageable   de   le   maintenir   dans   la  communauté nationale. En  règle  générale,  il  s’agit  de  personnes dont la procédure de naturalisation a été mal instruite et qui ont été naturalisé   en   méconnaissance   d’un   fait   qui aurait du empêcher la naturalisation comme le fait de vivre de proxénétisme. 

 Cette perte est prononcée par décret après  avis  conforme  du  Conseil  d’Etat et après que la personne concernée ait pu se défendre. 

 Depuis une loi du 16 mars 1998, ce cas de perte  par  déchéance  est  assorti  d’une  règle de prévention de l’apatridie  car  il  ne  peut  être  prononcé  que  si  l’intéressé  à  une  autre  nationalité.  Il  est  cependant  curieux  qu’il  y  ait  une  règle  de  prévention  de  l’apatridie  alors  qu’il  n’y  en  a  pas  pour  la  perte par désobéissance car les deux pertes sont graves.  Mais la loi du 26 novembre 2003 fait courir le risque de déchéance :   pour des faits perpétrés dans  les  années  qui  suivent  l’acquisition  de  la  nationalité  française   pour des faits commis antérieurement à cette acquisition. 

 Dans la période  antérieure  à  l’acquisition ou dans les 10ans  qui  suivent  l’acquisition  de  la  nationalité française, l’article  25  du  Code civil énumère 4 types de faits ou de forfaits reprochables : les 3 premiers types doivent avoir conduits à une condamnation et le 4ème se suffit à lui-même, en dehors de toute condamnation.

  —>  Au  terme  de  l’article  25,  4° : « peut  être  déchu  de  la  nationalité  française,  celui  qui  s’est  livré  au  profit  d’un  Etat  étranger  à  des  actes  incompatibles  avec  la qualité de français et préjudiciables aux intérêts de la France. » Il  n’est  pas  exigé  que  la  personne  ait  été  condamnée  par  son  comportement  c’est-àdire que son comportement suffit.

 —>  Dans   les   autres   cas,   il   faut   une   condamnation   et   un   de   ces   cas   n’a   plus   d’importance,   à   savoir   le  français  récent  condamné  pour  s’être  soustrait aux obligations du service national.

  —>  Les deux autres sont : « peut être déchu celui qui est condamné pour un crime ou pour un délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme » : article 25, 1°.

  —>  De même peut être déchu, « celui condamné pour certains crimes ou certains délits figurant dans le Code pénal »,   il   s’agit   pour   l’essentiel   d’atteintes   à   l’administration   publique   causées   par   des  personnes exerçant une fonction publique.

 Le  crime  ou  le  délit  de  droit  commun  n’est  plus  une  cause  déchéance  depuis  la  loi de mars 1998. Il y a déchéance pour des comportements gravement contraires au loyalisme à l’égard  de  l’Etat  ou  de  la  nation  française.

 Les faits doivent être intervenus avant   l’acquisition   de   la   nationalité   française   ou   dans   les   10ans   qui  suivent cette acquisition. De même, le décret de perte doit intervenir dans les 10ans de la commission des faits reprochés : il y a alors un double délai. Mais l’article  25-1 du Code civil énonce que ces délais sont portés à 15ans  au  cas  d’actes  de  terrorisme  ou  aux  cas  d’atteinte  aux  intérêts  fondamentaux  de  la  nation. 

Ce  cas  de  perte  n’a  aucun  effet  collectif,  ni  d’effet  rétroactif.  C’est  un  cas  de  perte  rare  mais  il  peut  se  rencontrer. 

 

 

&2) La perte pour désobéissance

 Article 23-8 du Code civil : ce cas de perte a été rendu plus sévère par une ordonnance du 2 février 1961 c’est-à-dire à  la  fin  de  la  guerre  d’Algérie  et  de  la  période  de  décolonisation.  Aujourd’hui,  il  est  devenu  un  cas  rare  mais  ces  conditions  d’utilisations  pourraient  se  concrétiser  dans  certaines  situations  aujourd’hui.    

  —>  Concernant les conditions :

 

 —>  Il faut  d’abord  que  le  français  en  cause  fasse  partie  d’une  armée  ou  d’un  service public étranger ou d’une  organisation  internationale  dont  la  France  n’est  pas  membre.  Or,  le  texte  ajoute  qu’il  suffit  que le français en cause apporte son concours à cette armée ou à ce service public étranger ou à cette organisation internationale,   il   n’est   alors   pas   nécessaire   qu’il   en   fasse   partie.   Mais   le   fait  d’apporter  son  concours  sans  être  nécessairement  membre  peut  se  rencontrer  plus  fréquemment  que  celui  d’être  membre  à  proprement  parler  de  ces  organisations.

  —>  Il faut ensuite que le gouvernement  français  ait  ordonné  à  l’intéressé  de  cesser  son  emploi  ou  son  concours  et  qu’au  bout  du  délai  donné pour s’exécuter (entre 15 jours et 2mois), l’intéressé  ne  se  soit  pas exécuté.  

 

Dans ce cas, le gouvernement peut alors priver cette personne par décret, de la nationalité française et c’est  une  privation  pour  désobéissance  aux  injonctions  du  gouvernement ;

 L’ordonnance   de   1961   a   accentué   le   caractère   rigoureux   de   la   procédure   car   le   gouvernement   peut  passer outre un avis contraire du Conseil   d’Etat  et  il   suffit  alors  que  le  décret  soit  pris  en  conseil  des  ministres.

 Ce  cas  de  perte  est  aujourd’hui  le  seul  cas  de  perte  de  la  nationalité  française    le   risque  d’apatridie  n’est  pas  complètement  écarté  car  il  n’est  pas  exigé  que  la  personne  concernée ait une autre nationalité.  Mais on peut penser que le risque  d’apatridie  est  faible parce  qu’il  est  peu  vraisemblable  qu’un  français  à  ce  point  engagé  au  service  d’intérêts  étrangers  n’est  pas  une  autre  nationalité    et  parce  que  si  ce  français  n’a   pas   d’autres   nationalités,   il   est   peut   vraisemblable   qu’il   refuse   d’obéir   aux   injonctions   du  gouvernement  français  sachant  qu’il  risque  de  se  retrouver  apatride.

 

La perte prend effet à la date du décret et elle est individuelle. 

Au cours des dernières décennies,  il  ne  semble  qu’il  n’y ait eu qu’un cas de perte de ce type et certains ont conclu peut être rapidement que l’article  23-8 du Code civil serait  désormais  sans  effet.  C’est  une  appréciation peut être aventureuse pour deux raisons : 

  —>  dans un climat  mondial  qui  n’est  pas  absolument  pacifique  et  dans  lequel  il  y  a  des  risques  de  conflits graves. Un français peut prendre des risques de sanctions de ce type en se mettant aux services de causes que le gouvernement français considérerait comme hostiles à la France. 

  —>  il  n’est  pas  sur  que  ce  texte  soit  sans  effet  notamment  le  professeur  Paul  Lagarde  se  demande  si  son  effet  n’est  pas  d’être  dissuasif.

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