La présentation de la demande de brevet

La présentation de la demande 

C’est un dossier qui doit comporter un certain nombre de pièces et de documents. 

Pour obtenir un brevet, il faut déposer une demande de brevet. Trois voies sont aujourd’hui possibles :

 

  • le dépôt d’une demande de brevet français auprès de l’INPI ;
  • le dépôt d’une demande de brevet européen auprès de l’Office Européen des Brevets (OEB) ; une fois délivré, le brevet européen se divise en brevets nationaux couvrant les pays désignés dans la demande de brevet.
  • le dépôt d’une demande de brevet international auprès de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) ; cette voie dite PCT permet de centraliser la procédure de dépôts de brevets pour tous les pays signataires du traité.

En pratique, les entreprises françaises commencent par déposer un brevet national auprès de l’INPI. Elles reçoivent un rapport de recherche qui signale les antériorités éventuelles, et au vu duquel elles décident d’étendre ou non leur dépôt à l’étranger. L’extension doit se faire dans le délai de 1 an (dit de priorité) à compter du dépôt de la demande initiale.

Les éléments du dépôt doivent être rédigés en langue française :  

  • Sauf si le déposant est un ressortissant d’un état accordant un traitement équivalent aux français (condition de réciprocité) ;
  • Sauf si le déposant est cessionnaire d’une demande à l’étranger ;
  • Sauf si le déposant est titulaire d’un droit de priorité né d’une demande faite à l’étranger, à condition que le pays du dépôt initial accorde la réciprocité aux français.

Quand on dépose un brevet à l’étranger, dès lors que l’on n’entre pas dans ces conditions, il faut alors prendre en compte les frais issus des coûts de traduction. Cela entre en ligne de compte quand on fait des dépôts réflexes, c’est-à-dire en ne passant pas par un outil international, mais en le faisant directement dans le pays. 

La date de dépôt du brevet est attribuée à la date de la remise d’un certain nombre de pièces : 

  • Une déclaration de demande de brevet ;
  • L’identification du demandeur ;
  • Une description de l’invention ;
  • Une ou plusieurs revendications.

En outre, la demande peut comporter d’autres éléments (non obligatoires) : 

  • ·         La requête (A) ; 
  • ·         Des dessins (B) ; 
  • ·         Un abrégé technique (C). 

  

  1. La requête

La requête est une pétition, une demande en vue de la délivrance du brevet, c’est-à-dire quelque chose de formalisé. 

Elle doit obligatoirement comporter un certain nombre de mentions : 

  • L’identification des intervenants : on y trouve la désignation du déposant, la désignation de l’inventeur si ce n’est pas le déposant, et la désignation du mandataire si nécessaire ;
  • L’identification du titre demandé: le déposant doit indiquer quel titre de protection il demande, cela peut être : 

o   Un brevet ; 

o   Un certificat d’utilité qu’on appelle également le petit brevet. Sa particularité tient au fait que les conditions de protection sont un peu moins nombreuses et qu’en contrepartie, la durée de protection n’est que de 6 ans ; 

o   Un certificat complémentaire de protection qui s’appliquera aux médicaments. 

  • Le nom de l’invention : l’invention est identifiée par un nom ou par un titre dans lequel on pourra indiquer également l’existence de différentes revendications.

C’est à ce moment qu’il faut faire état de la priorité unioniste dont on entend bénéficier, dès lors qu’un dépôt a été effectué antérieurement dans un autre pays de la Convention d’Union de Paris. 

  1. La description
  2. Le principe de la description

La condition relative à la description est régie par l’article L.612-5 du Code de la propriété intellectuelle selon lequel « L’invention doit être exposée de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter ». On retrouve la référence à l’homme du métier présente pour l’appréciation de l’activité inventive. L’invention doit donc être décrite pour que l’homme du métier puisse vérifier la faisabilité technique de l’invention, mais également pour que toute personne intéressée puisse accéder au contenu inventif de la description lorsque celle-ci aura été publiée avec la demande de brevet. 

L’exigence de description conduit l’inventeur à divulguer à tous le contenu intellectuel de son invention. Par cette caractéristique, le brevet se distingue du savoir-faire qui est protégé par le secret. Une fois la demande de brevet publiée, le titulaire du brevet libère l’accès intellectuel à son invention. En revanche, le monopole d’exploitation attaché à son brevet ferme l’accès matériel à son invention. Les concurrents auront connaissance du contenu inventif mais n’auront pas le droit de l’exploiter commercialement. Cela fait dire à une partie de la doctrine que le brevet est une forme de contrat social : d’un côté l’inventeur s’engage à divulguer son invention et à enrichir les ressources intellectuelles du monde entier, de l’autre, l’Etat s’engage à reconnaître à l’inventeur un monopole d’exploitation.  

  1. Les modalités de la description

La description consiste dans l’identification de l’objet de l’invention, et le contenu de cette exigence est précisé par l’article R.612-12 du Code de la propriété intellectuelle. 

La description doit ainsi : 

  • Préciser le domaine technique auquel se rapporte l’invention ;
  • Préciser l’état de la technique antérieur ;
  • Exposer l’invention telle qu’elle est exposée dans les revendications, dans des termes permettant la compréhension du problème technique et celle de sa solution ;
  • Indiquer en détail au moins un mode de réalisation de l’invention ;
  • Expliciter la manière dont l’invention est susceptible d’application industrielle.

La description doit en quelque sorte convaincre l’examinateur de la brevetabilité de l’invention et de sa faisabilité.  

Pour procéder à la description d’un produit, deux techniques sont envisageables en pratique. D’une part, on peut décrire le produit en lui-même selon sa forme ou sa composition. D’autre part, on peut décrire le produit par son procédé d’obtention. Dans tous les cas, il faudra tenir compte des exigences légales qui imposent d’expliquer au moins un mode de réalisation de l’invention (voir supra). 

Pour autant, cette description a fait l’objet d’un assouplissement pour tenir compte de certaines particularités.  

  1. L’assouplissement de l’exigence de description suffisante

L’article L.612-5 du Code de la propriété intellectuelleexige que la description soit claire et complète pour l’homme du métier. Cette exigence s’explique dans la mesure où elle vise à garantir d’une part la bonne intelligence de l’invention par le public, et d’autre part une accessibilité réelle à l’invention. L’invention doit être réalisable. Il faut donc convaincre l’homme du métier du caractère réalisable de l’invention, et c’est ce degré de conviction qui peut poser des difficultés.  

En principe, il faut que l’homme du métier, à la seule lecture de la description et sans avoir recours à des éléments extérieurs, puisse exécuter lui-même l’invention. Il faut que l’on puisse mettre à la disposition de l’homme du métier des outils assez convaincants pour lui garantir la faisabilité de l’invention. Il doit trouver l’équilibre entre ce qu’il doit divulguer et ce qu’il ne doit pas divulguer, pour ne pas faire bénéficier de tous les résultats de ses recherches à l’intégralité de ces concurrents.  

On peut considérer, à l’appui de l’OEB, que l’exposé de l’invention est insuffisant lorsqu’il laisse l’homme du métier dans le doute et que ce dernier ne peut exécuter l’invention en utilisant ses compétences et en effectuant un nombre raisonnable de tentatives.  

Il n’est pas exigé une « exécutabilité » parfaite. On peut admettre un nombre raisonnable d’échecs, notamment en raison du caractère hautement technologique de l’invention. Cela peut tenir à différents facteurs, comme le fait d’utiliser des produits instables au départ. On peut considérer que l’exposé est suffisant chaque fois que l’homme du métier peut, sans effort excessif, grâce aux indications fournies et à ses connaissances, réaliser des variations de l’invention ayant le même effet.  

L’une des difficultés de la description suffisante, au-delà de celle de l’exécutabilité, tient à la reproductibilité de l’invention. L’homme du métier doit pouvoir obtenir l’invention avec des efforts raisonnables pendant toute la durée du brevet. Dans le domaine de l’inerte (matière morte), on va considérer que la reproductibilité découle de l’exécutabilité (ce que l’on a réussi une fois, on peut le répéter à l’infini). En revanche, s’agissant de la matière vivante, il est possible que bien qu’exécutable, l’invention ne soit pas reproductible à l’infini. Il n’est pas certain que l’inventeur puisse garantir que le résultat produit pourra être obtenu de manière identique chaque fois qu’il est souhaité. On s’est alors demandé si, dans ce cas, on ne pouvait pas envisager d’admettre que la condition de description suffisante aux fins de reproductibilité n’était pas satisfaite dès lors que le produit revendiqué dans la demande de brevet était auto-réplicable. On utiliserait la faculté d’autoréplication de certains organismes vivants pour garantir la reproductibilité à l’infini de l’invention.  

La difficulté est que l’on renonce à ce qui justifie le droit exclusif du breveté, qui est la possibilité pour n’importe quelle personne d’accéder à un enseignement inventif. Il faut donc garantir sur le papier que l’invention que l’on revendique pourra être reproduite à l’infini sur la base non pas de ce résultat, mais de son procédé d’obtention. 

  1. Le dépôt de matières biologiques : palliatif d’une description insuffisante

Par un Traité international signé à Budapest en 1977, certains Etats ont eu l’idée d’offrir aux inventeurs travaillant dans le domaine des biotechnologies une procédure destinée à faciliter la description de l’invention. Selon ce traité qui a été intégré dans la législation française, il est possible de compléter la description de l’invention par le dépôt d’une matière biologique auprès d’un institut spécialisé dans la conservation des organismes vivants. Ce dépôt ne se substitue pas à la description, il la complète et il s’impose au demandeur dès lors que la matière biologique non accessible au public ne peut faire l’objet d’une description écrite suffisante. 

  1. Les revendications

La rédaction des revendications constitue un enjeu capital pour le demandeur en brevet, car c’est de leur contenu que dépend l’étendue de la protection découlant du brevet. C’est plus qu’une condition de forme, c’est ce qui va définir le champ d’application de la protection. Il y a un lien extrêmement ténu entre la description et les revendications. En effet, les revendications doivent se fonder sur la description. Plus encore, le législateur énonce que les revendications doivent être interprétées à la lumière des descriptions. Non seulement, on comprend les revendications grâce à la description, mais encore, l’on ne peut pas revendiquer au-delà de ce que l’on a décrit. La protection ne s’étend pas au-delà de ce que l’on a été capable de décrire.  

Les rédacteurs des revendications vont devoir trouver un point d’équilibre, un juste milieu entre des revendications qui doivent être fidèles à la description et qui doivent être suffisamment larges pour éliminer toute possibilité d’empiètement sur son terrain d’exclusivité. Si ces revendications sont trop larges, l’examinateur lui reprochera une distorsion entre les revendications et la description. Si elles sont trop étroites, le champ est ouvert pour la concurrence. 

Exemple : une société américaine a déposé une demande de brevet dans les années 1990 pour un système de vibrations communicantes. Il existe des systèmes de ce type notamment en ce qui concerne les consoles de jeux. Dans son brevet, la société avait pris le soin d’expliquer que ce principe pouvait s’appliquer sur les manettes.  

Selon le Code de la propriété intellectuelle, les revendications doivent être rédigées de manière claire et concise. Dans l’hypothèse où le demandeur ne parviendrait pas à fournir les caractéristiques techniques nécessaires à la définition de son invention, il est admis que le produit puisse être défini par son procédé de fabrication.  

Les revendications doivent être rédigées selon deux formes différentes :  

  • Les revendications dites structurelles : ce sont celles qui comportentl’indication des moyens mis en œuvre pour parvenir à une fonction déterminée, à un résultat. On définit ici les composantes de l’invention ;
  • Les revendications dites fonctionnelles : ce sont celles qui indiquent le résultat produit par l’invention.

L’invention revendiquée ne peut pas s’étendre au-delà de l’invention décrite. La méconnaissance de cette règle est sanctionnée par le rejet de la demande ou l’annulation du brevet délivré. C’est la raison pour laquelle l’article L. 613-14 du Code de la propriété intellectuelle permet à l’inventeur de renoncer à une ou plusieurs revendications, ou à limiter la portée du brevet en modifiant une ou plusieurs revendications. 

  1. ­Les dessins et l’abrégé du contenu technique de l’invention

Les dessins servent à interpréter les revendications, et ils ne sont pas obligatoires et ne doivent être déposés que si la description et les revendications y font référence. 

L’abrégé du contenu technique est un résumé de l’invention. Il est établi à des fins strictement documentaires. C’est une pièce qui n’est pas nécessaire lors du dépôt de la demande de brevet, mais qui peut être remise ultérieurement. 

 

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