La procédure applicable au divorce contentieux

Quelle procédure pour le divorce contentieux ?

LA DÉFINITION DU DIVORCE :

Le divorce est la seule dissolution du mariage du vivant des époux. Il doit être prononcé par autorité de justice et pour des causes prévues par la loi. Si les romains avaient usé du divorce, celui-ci était inconnu de l’ancien droit, le christianisme condamna l’institution du divorce.

UN PEU D’HISTOIRE DU DIVORCE :

C’est la thèse de l’insociabilité du mariage qui fût consacré, seul la séparation de corps était admise. La révolution remit le divorce au jour avec la loi du 20 Septembre 1792 qui l’admît. Non seulement pour des causes déterminées par la loi mais aussi par consentement mutuel et même pour incompatibilité d’humeur.

Le code ouvrit une médiane entre l’ancien droit et le divorce.

Le Code civil ouvrit une voie médiane entre l’indissolubilité absolue et le divorce ouvert par la révolution. Le Code a maintenu le principe du divorce conformément à la philosophie individualiste de l’époque, conformément au principe de laïcité mais aussi sous l’influence personnelle de Bonaparte qui comptait l’utiliser un jour.

Le code de 1804 supprima le divorce pour incompatibilité d’humeur et réduisit le nombre de causes déterminées par la loi en les rattachant à la seule idée de faute.

La chute de l’Empire entraina celle du divorce ce fut le retour à la monarchie et donc à la religion catholique c’est ainsi qu’une loi du 16 mai 1816 abolit le divorce.

Il a fallu attendre la IIIème république et la célèbre loi Naquet du 27 juillet 1884 pour que le divorce soit rétabli. Le débat fut extrêmement vif puisqu’à l’époque la séparation de l’Eglise et de l’Etat n’était pas encore prononcée. Seul le divorce pour faute était admis. L’évolution postérieure fut marquée par une facilitation croissante du divorce.

C’est d’abord la jurisprudence qui a assoupli cette loi en interprétant très largement la notion d’injure grave qui était une faute causant le divorce.

Dans les années 1960 l’évolution des mœurs appelèrent à l’évolution des lois, il n’était plus admis que dans une société prônant l’épanouissement individuel 2 personnes qui souhaitent divorcer ne le puissent pas. Les tribunaux ont d’abord déguisé des divorces par consentement mutuel en divorce pour faute dans lesquels les fautes étaient constituées de toute part par les parties.

La loi du 11 juillet 75 repose sur 3 principes directeurs:

– La multiplication des cas de divorce, maintien du divorce pour faute mais elle admet d’autres causes (rupture vie commune en cas de séparation de fait ou de maladie incurable d’un époux, consentement mutuel)

Volonté de dédramatiser la procédure et cela s’est manifesté par l’institution au sein du TGI d’un juge aux affaires matrimoniales

Volonté de concentrer au moment du prononcé du divorce le règlement complet des conséquences pour éviter le contentieux d’après divorce.

I) La procédure applicable au divorce contentieux

La principale innovation de la loi de 2004 est d’avoir créé un tronc commun procédural au divorce contentieux, c’est-à-dire le divorce pour faute, pour ADLC et le divorce accepté. La procédure comprend 3 phases, la requête, la tentative de conciliation et l’instance.

A) La requête initiale

Selon l’article 251 du code civil, l’époux qui forme une demande en divorce présente par avocat une requête au juge sans indiquer les motifs du divorce. Depuis la loi de 2004 la requête est indifférenciée dans la mesure où la cause du divorce n’est plus mentionnée.

Les époux l’extériorisent seulement après l’audience de conciliation et pourront en changer à tout moment de la procédure. L’objectif de cette mesure est d’apaiser l’audience de non conciliation puisque les faits qui justifient la demande n’apparaissent pas dans la requête et ne seront pas discutés.

B) L’audience de conciliation

Sous l’empire de la loi de 1875 l’audience de conciliation avait pour but la réconciliation des époux.

Aujourd’hui l’objectif n’est plus le même, l’article 252 précise que le juge cherche à concilier les époux tant sur le principe du divorce que sur les effets. Cette audience a donc pour effet de chercher l’apaisement, d’inciter les époux à une préparation consensuelle et responsable des effets du divorce.

Le juge reçoit d’abord chacun des époux séparément (art 252-1) puis les invites tous deux devant lui avec leurs avocats. A l’issue de cette audience le juge rend une décision, dans le cas très marginal de réconciliation elle est constatée par PV ce qui met fin à la procédure engagée.

Dans le cas contraire le juge a 2 possibilités :

– Il décèle les signes d’une réconciliation possible et peut alors suspendre l’audience en laissant aux époux un temps de réflexion de 8 jours à 6 mois maximum.

– Il peut aussi rendre une ordonnance de non conciliation autorisant l’époux qui a présenté la requête initiale à assigner son conjoint et il incite les époux à régler les conséquences du divorce à l’amiable dans un projet de règlement présenté lors de l’audience du jugement.

Il prend dans tous les cas une série de mesures provisoires pour assurer l’existence des époux et de leurs enfants jusqu’à la date à laquelle le jugement de divorce passera en force de chose jugée.

C) L’instance

Une fois l’ordonnance de non conciliation rendue, l’époux demandeur ou les 2 époux en cas de divorce accepté peut former une demande introductive d’instance en divorce soit pour acceptation du principe de la rupture du mariage soit pour ADLC soit pour faute.

L’époux qui n’est pas demandeur peut former une demande reconventionnelle sur l’une de ces 3 causes de divorce, toutefois il est précisé à l’article 257-1 al 2 que lorsqu’à l’audience de conciliation les époux ont déclaré accepter le principe de la rupture du mariage et le prononcé du divorce sur le fondement de l’article 233 l’instance ne peut être engagée que sur ce même fondement.

La recevabilité de la demande introductive d’instance est en outre subordonnée à la production d’une proposition de règlement des conséquences patrimoniales et extrapatrimoniales du divorce. Cette proposition de règlement a pour but d’éviter les longues procédures qui opposent parfois les époux après le prononcé du divorce.

Pendant les 3 mois qui suivent l’ordonnance de non conciliation seul l’époux qui a présenté la requête initiale peut assigner son conjoint.

A l’issue de ces 3 mois il peut lui aussi assigner son conjoint en divorce. Une fois que l’assignation a été faite il y a une phase d’instruction de l’affaire, la phase dite de mise en l’état c’est le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES compétent pour toutes les demandes en divorce.

A l’issue de cette mise en l’état le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES va rendre un jugement, le plus souvent de divorce mais exceptionnellement il peut rejeter le divorce et rend alors un jugement de rejet. C’est notamment le cas lorsque l’époux défendeur a fait valoir une réconciliation ou bien lorsqu’il a réfuté les preuves produites par l’époux demandeur qui fondait sa requête.

Le jugement de rejet met fin à l’instance, il en résulte plusieurs conséquences:

– Le jugement de rejet rend irrecevable une demande en divorce ou en séparation de corps fondée sur le même grief, une nouvelle demande peut être formée mais elle doit reposer soit sur d’autres griefs soit sur une autre cause de divorce.

Les mesures provisoires prennent fin cependant il est rare que les époux reprennent la vie commune après une ordonnance de rejet, le juge peut prendre des mesures relatives à la contribution des charges du mariage, à la famille ou aux modalités d’exercice de l’autorité parentale.

Le plus souvent le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES va prononcer un jugement de divorce.

En cas de « divorce accepté » le juge prononce le divorce sans autre motif que le visa de son ordonnance qui a constaté l’acceptation du principe de la rupture du mariage par les conjoints.

Lorsque le divorce est prononcé pour « ADLC » le jugement ne doit pas faire référence à la cause du divorce.

Lorsque le divorce est prononcé pour « faute », le juge peut à la demande des conjoints seulement constater dans les motifs qu’il existe des faits constituants une cause de divorce sans les énoncer.

Dans cette hypothèse le juge doit préciser si le divorce est prononcé aux torts partagés de chacun des époux ou aux torts exclusifs de l’un d’eux.

La mention du jugement de divorce est alors retranscrite en marge de l’état civil de chacun des époux une fois que le jugement est devenu définitif c’est-à-dire soit après l’expiration des délais de recours soit après l’exercice des voies de recours prévues par la loi.

Seul l’appel formé dans le mois qui suit la signification du jugement et le pourvoi en cassation formé dans les 2 mois de la signification de l’arrêt sont signifiés.

II) Les modifications du fondement de la demande

Les époux peuvent à tout moment de la procédure changer de type de divorce soit en utilisant une passerelle vers un autre divorce soit en formant une demande reconventionnelle.

La loi de 2004 a encouragé ces modifications surtout au moyen de passerelles et aujourd’hui une section du code civil est consacrée à ces modifications.

1)Les passerelles

Une des modifications de la loi de 2004 est la création de passerelles entre différents divorces.

Afin de suivre au mieux la volonté des époux et surtout leur prise de conscience du caractère inéluctable du divorce, la loi de 1975 prévoyait que si les époux étaient d’accord ils pouvaient en cours d’instance substituer une demande de divorce par consentement mutuel à la demande qui était engagée sur une autre cause tant qu’aucune décision sur le fond n’avait été rendue.

La loi de 2004 a maintenu cette passerelle entre une procédure contentieuse et le divorce par consentement mutuel mais elle l’a élargie car elle peut être utilisée à tout moment de la procédure (article 247). A cette passerelle la loi de 2004 en a ajouté une autre, la passerelle d’un divorce pour faute ou pour ADLC vers un divorce accepté cette passerelle pouvant intervenir à tout moment de la procédure.

2) Les demandes reconventionnelles

C’est celle par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire.

Il est ainsi permis à l’époux défendeur de demander un divorce accepté ou pour ADLC ou pour faute. Le juge examinera d’abord la demande reconventionnelle (divorce pour faute). S’il rejette cette demande reconventionnelle le juge va statuer sur la demande initiale.

Dans cette hypothèse le demandeur initial peut également décider de modifier le fondement de sa demande et invoquer les fautes de son conjoint (article 247-2).

Ex : Si une épouse violentée et donc infidèle demande divorce pour ADLC, son conjoint forme une demande reconventionnelle pour faute, celle-ci peut former une modification de fondement de sa demande et invoquer les violences de son époux à son encontre.

Cependant si les époux ont accepté durant l’audience de conciliation le principe de la rupture du mariage et le prononcé du divorce sur le fondement de l’article 233 l’instance ne peut être engagée que sur ce même fondement.