La protection du consommateur par l’information et la réflexion

LA PROTECTION DU CONSOMMATEURS AVANT L’ACTE DE CONSOMMATION

Toute opération juridique est fondée sur l’existence et l’intégrité du consentement des parties. Le législateur, dans ce domaine et dans d’autres, va essayer d’agir en amont de la décision de consommation afin d’obtenir le consentement le plus éclairé de la part du consommateur.

La question que pose en général le droit de la consommation c’est celle de savoir jusqu’où doit aller cette assistance préalable.

Le législateur va agir en droit de la consommation sur trois terrains, qui ne sont pas isolés. Le premier terrain est l’information, le deuxième est la réflexion, et le troisième est la réglementation des comportements des professionnels.

CHAPITRE 1 : L’information

En droit, initialement dans le code civil, l’information que l’on envisageait était celle que l’on faisait pour soi. Le co-contractant devait s’informer sur sa situation. Ensuite cela a évolué et on a pris en compte l’information par le co-contractant, il y a eu une prise de conscience sur l’inégalité de certains co-contractants.

On a vu la nécessité, pour qu’il fonctionne bien, d’un équilibre du contrat. La notion de bonne foi a également pris davantage de force.

Cette information peut soit être prévue expressément par un texte spécial, mais même en l’absence de texte spécial on considère que les deux parties doivent bénéficier de l’information, et lorsqu’elles ne sont pas au même niveau pour accéder à l’information la partie la plus faible doit être informée par le co-contractant.

Exemple : en matière de cautionnement, on garantie un débiteur, on veut savoir si ce débiteur a des chances un jour de payer, donc on aimerait savoir si ce débiteur, au jour où l’on s’engage, s’il est solvable. La meilleure information viendrait de sa banque, mais la banque peut opposer le secret professionnel. On est donc en situation d’inégalité, et dans ce cas il y a une obligation d’information de la banque.

Cette obligation d’information c’est la possibilité d’obtenir pour le plus faible des deux des renseignements objectifs et pertinents, comme par exemple les caractéristiques d’un produit ou d’un service. Cette obligation doit être distinguée de deux autres informations : l’obligation de mise en garde (avertissement d’un danger), et l’obligation de conseil (apporter au consommateur des éléments de choix, et l’orienter en fonction des spécificités de sa situation).

Exécuter et réaliser l’information est une tâche difficile, spécialement en droit de la consommation.

La première difficulté est le fait que la compréhension des consommateurs est hétérogène, parce que leur niveau intellectuel est différent. Se pose donc la question de se faire comprendre.

Le second problème en matière de consommation est qu’il ne faut pas oublier le rôle que joue le coup de cœur. Lorsque l’on rappelle le raisonnable à cette victime du coup de cœur elle n’est pas prête à l’entendre.

La troisième difficulté est le manque d’éducation en matière de consommation, c’est un problème plutôt national. Les français ne savent pas lire une étiquette ou un contrat.

Autre difficulté : l’information peut prendre la forme de ce que l’on appelle le formalisme informatif, exemple : mention manuscrite obligatoire. On s’est rendu compte que sur la prise de conscience ce formalisme était relativement inefficace parce que les gens ne pensent pas à ce qu’ils écrivent mais ils pensent à ne pas se tromper et à recopier convenablement.

Autre problème : la question du coût. L’information a un prix que les professionnels répercutent sur le consommateur.

Dernière difficulté principale : l’information peut avoir des effets pervers, même lorsqu’elle est réussie. On considère qu’il y en a deux essentiels parce qu’elle déresponsabilise le consommateur qui n’écoute pas forcément ce qu’on lui dit, et cela peut même encourager la mauvaise foi (on demande l’annulation pour non information).

Quelles sont les sanctions de la violation de l’obligation d’information ?

La sanction générale est la nullité relative pour vice du consentement. Mais de plus en plus il y a une seconde catégorie de sanctions, qui sont les sanctions spéciales : c’est une nullité cette foi ci fondée sur la seule preuve du défaut d’information, peut importe que cela ait gêné ou non de ne pas être informé. La troisième catégorie de sanctions sont les sanctions pénales.

SECTION 1 : L’information due par le professionnel

  • 1 : Les règles générales relatives à l’information

La première catégorie de règle concerne la formulation de l’information :

L ‘information doit être claire et compréhensive.

L’information écrite doit être lisible. Cela concerne notamment la taille des caractères, mais aussi les caractères gras ou la mise en italique pour attirer l’intention sur certains points.

L’emploi de la langue française : la loi du 4 aout 1994 impose l’usage obligatoire de la langue française dans la désignation, l’offre, la présentation, le mode d’emploi ou d’utilisation, la description de l’étendue et des conditions de garantie d’un bien, produit ou service, ainsi que pour les factures et quittances.

Ce domaine est assorti de dérogations lorsqu’il s’agit de la dénomination de produits typiques et de spécialités d’appellation étrangère, connues du plus large public. Par exemple on a admis qu’il n’y avait pas besoin de traduction pour le Whisky ou pour le Gorgonzola.

Sur le plan européen : la CJUE, dans une décision du 12 septembre 2000, a jugé que les dispositions des traités s’opposent à ce qu’une réglementation nationale impose l’utilisation d’une seule langue déterminée : la langue nationale, et ce essentiellement concernant les denrées alimentaires. Elle a ajouté qu’ il fallait admettre la possibilité d’une autre langue, facilement comprise par les acheteurs, ou bien encore que l’information des acheteurs soit assurée par d’autres mesures.

La décision a posé deux problèmes : quelle langue ? Quelles autres mesures ? (on pense par exemple aux dessins, pictogrammes).

Après cette décision, l’article R112-8 du code de la consommation a été complété et il prévoit que les mentions d’étiquetage peuvent figurer en outre (en plus du français) dans une ou plusieurs langues.

La jurisprudence est extrêmement stricte sur l’emploi de la langue française, y compris en matière d’informatique.

L’auteur de l’information :

En principe, c’est le co-contractant professionnel, mais le droit de la consommation considère que l’information peut être aussi donnée par le fabricant, ou encore toute personne dont le métier est de fournir des conseils.

Le bénéficiaire (le créancier) de l’information :

Il s’agit du consommateur, mais il peut aussi s’agir d’un professionnel lorsque sa compétence ne lui donne pas les moyens d’apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du bien ou du service proposé.

La preuve de l’information :

Cette preuve a longtemps pesé sur celui qui se plaignait de l’inexécution de l’information (majoritairement le consommateur). Depuis les années 1995, à la foi en jurisprudence et dans les textes, il est décidé que c’est celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information qui doit rapporter la preuve de l’exécution de son obligation, et ce par tout moyen.

Les caractères de l’information :

L’information doit être pertinente, claire et intelligible, elle ne doit pas consister en un fait connu de tous (le consommateur ne peut pas dire qu’il ne savait pas que le tabac était mauvais à la santé, par exemple).

L’information doit être proportionnée aux dangers encourus, proportionnée à la nouveauté du produit, ainsi qu’à sa complexité.

L’information doit également être objective.

La date de l’information :

La plupart des informations doivent être délivrées lors de l’offre de contrat, avant l’acceptation. Certaines informations, plus limitées, doivent être données au plus tard au moment de la livraison, c’est par exemple le cas du service après vente ou des modalités de rétractation.

  • 2 : le contenu de l’information

Il n’y a pas de texte général susceptible de s’appliquer dans toutes les situations de consommation.

Quelques illustrations d’obligation d’information : L’article L111-1 du code de la consommation prévoit une information sur les caractéristiques essentielles du produit. Cette obligation est mise expressément à la charge du vendeur.

L’article L113-3 du code de la consommation vise l’information sur le prix et les conditions de vente. Tout vendeur de produit ou tout prestataire de service doit par tout procédé approprié informer le consommateur (…) .

Une troisième obligation vise également tout ce qui est produit et service et concerne les délais de livraison, avec la nécessité d’indiquer une date limite.

Pour les contrats souscrits sous forme électronique, il faut une information beaucoup plus ciblée : indiquer les différentes étapes à suivre pour conclure le contrat, préciser les moyens techniques pour identifier les erreurs commises dans la saisie des données et les corriger. Il faut aussi indiquer les langues proposées pour la conclusion du contrat, et en cas d’archivage les modalités de cet archivage ainsi que l’accès au contrat archivé.

L’information environnementale : À partir du 1er janvier 2011, le consommateur doit être informé par tout procédé approprié du contenu en équivalent carbone des produits et de leur emballage, ainsi que de la consommation de ressources naturelles ou encore de l’impact sur les milieux naturels qui leur sont imputables au cours de leur cycle de vie.

Arrêt de la Cour de cassation, 2009 : une dame achète un rat, mais il donne une maladie à toute la famille. Devait elle-être informée de cette transmissibilité ? La Cour de cassation a répondu par l’affirmative.

Arrêt Cour de cassation, 6 oct. 201, « Darty » dans le cadre de la vente d’ordinateur : vise des informations qui sont nécessaires au consommateur moyen. L’arrêt précise également qu’il faut une information lui permettant de prendre une décision en connaissance de cause, et a propos des ordinateurs il s’agit du prix, des conditions d’utilisation et plus précisément quels logiciels sont susceptibles d’être installés.

Section 2 : L’information par des signes d’identification

Il s’agit de signes distinctifs qui démontrent les qualités d’un produit. Ces signes distinctifs ont plusieurs objectifs : informer le consommateur, faire la promotion du bien ou du service. Ces signes seront fiables dans la mesure où ils seront délivrés par des organismes indépendants.

Il faut distinguer ces signes distinctifs des marques, qui ne garantissent pas la qualité d’un produit ou d’un service. La marque sert à désigner la personne qui fournit le produit ou le service de ses concurrents.

  • 1 : Les signes distinctifs du droit français

*Le premier signe c’est ce qu’on appelle les appellations d’origine, visées à l’art. L115-1 du code de la consommation.

Que faut-il entendre par appellation d’origine ? C’est la dénomination d’un pays, d’une région, ou d’une localité servant à désigner un produit qui en être originaire, et dont la qualité et les caractéristiques sont dues au milieu géographique comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains, un savoir faire.

Ces appellations doivent être distinguées des simples indications de provenance qui n’indiquent aucune qualité spécifique.

Il y a deux catégories d’appellations d’origine : les appellations d’origine simple (AO), qui sont utilisables uniquement pour des produits non alimentaire et non agricole, et les appellations d’origine contrôlée (AOC). Ces AOC ne concernent que les produits alimentaires et agricoles, qui doivent remplir un certain nombre de conditions :

  • il faut avoir une notoriété établie
  • il faut avoir reçu un agrément donné par un organisme spécialisé : l’institut national de l’origine et de la qualité.

Cette appellation procure une protection absolue pour des produits similaires, mais elle peut également être plus large que les produits similaires et peut s’étendre à des produits non similaires, avec une condition supplémentaire : l’utilisation pour des produits non similaires serait susceptible de détourner, ou d’affaiblir la notoriété de l’appellation d’origine.

Affaire 1993 : YSL avait baptisé un de ces parfums « Champagne », et les producteurs de Champagne se plaignaient qu’on déplaçait leur notoriété sur des produits non similaires. La CA a décidé que le terme Champagne avait une telle notoriété qu’on ne pouvait pas l’étendre à d’autres produits. Le parfum a été rebaptisé « Ivresse ».

*Labels et certification des produits agro-alimentaires :

Ces labels et certifications attestent qu’un produit possède des caractéristiques spécifiques préalablement fixées dans un cahier des charges.

Ces labels opèrent à deux niveau : Il y a le label rouge, qui atteste d’un niveau de qualité supérieur, par référence à un ensemble de critères. Ensuite il y a les certifications qui attestent seulement que le produit est conforme à certaines caractéristiques spécifiques.

*La marque NF (norme française) :

Elle atteste que le produit ou le service qu’elle désigne satisfait aux exigences d’une norme qui est élaborée au sein de l’association française de normalisation, que l’on appelle la l’AFNOR. Cette marque NF peut s’appliquer à tous les produits et services, mais elle est souvent utilisée pour des produits industriels (notamment électroménager).

Elle n’est pas le signe d’une qualité supérieure, elle atteste seulement la conformité à une norme qui elle-même garantit l’aptitude à l’emploi dans certaines conditions de sécurité.

  • 2 : Quelques signes du droit communautaire

Le premier signe est ce que l’on appelle les appellations d’origine protégée, il y a aussi les indications géographiques protégées. Un règlement de 2006 a créé 3 signes de qualité : l’appellation d’origine protégée (AOP) qui désigne un produit étroitement lié à un terroir. Ensuite il y a l’indication géographique protégée (IGP) qui s’applique à un produit lié à un terroir, mais de manière beaucoup moins étroite. Enfin, la spécialité traditionnelle garantie (STG) : signe accordé à des produits agro alimentaires qui se distinguent nettement des produits similaires, et leur utilisation sur le marché fait apparaître une transmission entre générations depuis au moins 25 ans.

Le deuxième signe est le marquage CE : Ce marquage fait présumer que le produit est conforme aux dispositions d’une directive européenne dite « nouvelle approche », ce qui signifie qu’il doit y avoir réunion pour obtenir ce marquage de conditions essentielles relatives notamment à la sécurité (surtout sur les jouets, ou les appareils à gaz).

Pour certains produits, il suffit d’une déclaration du fabricant que son produit est conforme à la directive, pour obtenir le marquage CE. C’est ce que l’on appelle une auto certification.

Pour d’autres produits la déclaration du fabricant doit être précédée d’une attestation de conformité délivrée par un organisme national.

Le troisième signe du droit européen est le label écologique, ou éco label (fleur bleue) : ce label peut être appliqué à tous les produits qui respectent certaines normes sur tous les produits sauf aliments et médicaments.

CHAPITRE 2 : La réflexion

Comment dans le droit de la consommation on peut inciter un co contractant à réfléchir ?

Cette réflexion est rendue possible par le chapitre 1 (l’information). Mais en général par réflexion on entend deux techniques juridiques : le maintien de l’offre pendant un certain délai, avec l’interdiction d’accepter avant le délai et l’interdiction d’offrir des paiements.

La deuxième technique est la possibilité de rétractation.

Concernant le délai de réflexion :

La durée du délai varie suivant les cas. En principe, le délai n’est pas inférieur à 7 jours, et ce que l’on constate à l’heure actuelle c’est un allongement des délais qui sont souvent portés à 14 jours. C’est par exemple le résultat d’une directive de 2011, pour les démarchages.

Ce délai n’existe pas dans tous les contrats, il y a un certain nombre de fondements pour l’expliquer : la gravité de l’opération, mais aussi le risque de pression.

Ce qui est commun à tous les délais, c’est que le point de départ est la remise de l’offre.

En général, le délai est impératif, mais il y a quelques cas ou il est facultatif et où l’intéressé peut renoncer au délai.

Son non respect entraine en général la nullité du contrat, et enfin ce délai suspend l’exécution du contrat qui n’est réalisé qu’au bout de l’écoulement du délai.

Concernant le délai de rétractation :

La rétractation permet de changer d’avis.

En général, les délais sont les mêmes qu’en matière de réflexion (7 ou 14 jours).

L’acceptation ayant été donnée, le consommateur, pour exercer son droit de rétractation, doit faire un acte positif. Cet acte positif peut prendre des formes imposées par la loi, comme par exemple remplir le formulaire de rétractation qui est attaché au contrat et qui doit pouvoir en être détaché. Ce système de formulaire de rétractation se trouve dans le crédit à la consommation ou dans les ventes avec démarchages.

Très souvent, les versements de somme d’argent pendant le délai de rétractation sont interdites.

La rétractation est en général sans frais et sans justification, sous réserve de la déloyauté et de l’enrichissement sans cause du consommateur.

La jurisprudence et le droit communautaire considèrent que le contrat est formé dès la souscription, et que la rétractation va jouer comme une condition résolutoire.