La provision du chèque
Le chèque est un instrument de paiement par lequel le titulaire d’un compte bancaire donne l’ordre à sa banque de payer une certaine somme à un bénéficiaire
- Créance entre le tireur et la banque tirée : la provision (forcément le solde d’un compte bancaire).
- Créance entre le tireur et le bénéficiaire : la valeur fournie.
La provision joue un rôle très important dans la particularité de la protection du droit du chèque.
.La provision du chèque est une somme égale au montant du chèque, qui doit exister sur le compte bancaire dès l’émission du chèque, y rester jusqu’à l’encaissement et pendant toute la durée de validité du chèque (soit 1 an en plus du délai d’encaissement – voir ci-dessous).
Le délai d’encaissement :
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- – 8 jours, si le chèque a été émis en France ;
- – 20 jours, si le chèque a été émis en Europe ou dans un pays méditerranéen ;
- – 70 jours, si le chèque a été émis dans le reste du monde.
Un chèque émis en France est donc valable pendant 1 an et 8 jours et la provision doit rester sur le compte pendant toute cette durée si le chèque n’a pas encore été encaissé.
Normalement, il n’est donc possible d’émettre un chèque que si on a sur compte la somme correspondante. Emettre un chèque si on n’a pas constitué la provision sur son compte est une émission de chèque sans provision.
I) L’exigence d’une provision préalable
A) Les caractères de la provision
Préalable
La provision doit exister au moment où le chèque est tiré (article L 131-4 CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER).
Le moment exact est celui de la création du chèque.
Atténuations :
– Réglementation concernant les chèques sans provision exige seulement qu’il y ait provision lors de l’émission du chèque (remise du chèque au créancier).
– Les banques ne vérifient la provision seulement au moment de la présentation du chèque au paiement.
Mais problème car il y a des délais de virement des crédits.
S’il y a plusieurs chèques, il faut faire attention.
La loi prévoit, avant d’appliquer les sanctions, qu’il y a des possibilités de régularisation.
Irrévocable
On ne peut pas retirer la provision une fois que le chèque a été émis.
Elle doit être maintenue car elle a été transmise au bénéficiaire du chèque : on ne peut plus la retirer ou la bloquer.
La provision doit être maintenue tant que le chèque n’a pas été présenté au paiement pendant un délai maximum d’un an (durée de prescription d’un chèque).
Disponible
Il ne suffit pas d’avoir un crédit sur le compte. Il faut que la somme sur le compte puisse être utilisée pour couvrir le chèque.
Ex 1 : La somme est saisie : elle est bloquée au profit de la saisie.
Ex 2 : la somme sert de provision à un autre chèque.
On peut avoir provision même si le compte est débiteur à partir du moment où le banquier a consenti une ouverture de crédit à son client.
La provision doit exister sur le compte sur lequel le chèque va être tiré.
Nuance : en pratique, les banques généralement donnent des facilités de caisse dans la mesure où elles voient qu’il y a de l’argent ailleurs.
B) La preuve de la provision
Principe
Article L 131-4 al 3 CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER : déroge au droit commun de la preuve et prévoit que c’est au tireur de prouver l’existence de la provision vis-à-vis du tiré et du bénéficiaire.
En général, la preuve se fait par tout moyen car c’est entre commerçants (banque et commerçants) sinon c’est la preuve du droit civil.
Procédés qui permettent d’établir l’existence de la provision
2 prévus par la loi :
– le visa
Article L 131-5 al 2 : il s’agit pour le banquier tiré de signer et de dater le chèque pour attester l’existence de la provision au jour où le visa est donné.
Le banquier est obligé de la faire sur demande du porteur du chèque. Mais il n’est pas obligé de bloquer la provision.
Ce procédé est très peu utilisé en pratique.
– la certification
Article L 131-14 CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER : donnée par le banquier tiré à la demande du tireur ou du bénéficiaire. En pratique, le banquier appose sur le chèque une formule de certification datée et signée avec mention du montant du chèque et désignation de l’établissement tiré. Les banques utilisent un tampon indélébile pour éviter les falsifications. La provision est bloquée au profit du bénéficiaire du chèque sous la responsabilité du banquier.
Elle est bloquée pour une durée de 8 jours (délai de présentation du chèque).
Les interdits bancaires ne peuvent pas tirer d’autres types de chèque.
1 prévu par la pratique :
– le chèque de banque
La jurisprudence considère que c’est équivalent au chèque certifié.
Com., 10 décembre 1974, D1975, p 345, Gavalda.
C’est un chèque à l’ordre d’un bénéficiaire tiré par une banque sur l’un de ses établissements bancaires. Le tireur et le tiré sont des banques.
La banque n’acceptera de fournir un tel chèque que s’il y a provision sur le compte.
Le but de ces 3 formules, c’est de permettre au bénéficiaire de s’assurer de l’existence de la provision.
II) La transmission de la provision
Grand principe du droit cambiaire.
A) Le caractère immédiat du transfert
Article L 131-20 CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER : le seul transfert prévu est celui qui se réalise lors de l’endossement.
Doctrine et jurisprudence reconnaissent que la provision est transmise lorsque le chèque est remis au bénéficiaire (= émission et non création).
Com., 31 janvier 2006, D2006, AJ 573 : La cour rappelle que les 2 dates sont différentes et que la date d’émission ne peut pas être présumée comme étant celle de la création.
Le transfert est immédiat et automatique.
Aucune stipulation n’est nécessaire.
Le tireur est juridiquement dessaisi de la provision et ne peut donc plus la retirer.
Problème des chèques de garantie :
Chèque remis matériellement entre les mains d’un commerçant en contrepartie d’un bien qui a été loué.
L’idée sous-jacente est qu’il est convenu entre les parties que le chèque ne sera encaissé que si le bien n’est pas remis en bon état ou n’est pas remis du tout.
Moyen de remplacer le dépôt d’une somme d’argent.
Que se passe-t-il si le commerçant remet le chèque à l’encaissement ?
Le droit du chèque est très sévère à ce sujet :
– le chèque est valable même si le tireur avait prévenu le commerçant qu’il n’avait pas provision sur son compte (la provision n’est pas une condition de validité).
– La banque doit le payer si la provision est sur le compte sinon c’est un chèque sans provision.
Le bénéficiaire a une obligation de restitution du chèque ou d’une somme équivalente.
B) Les effets du transfert de la provision
Le porteur du chèque devient propriétaire de la provision.
Effets vis-à-vis du tireur
– Le tireur est dessaisi irrévocablement de la provision de sorte que le décès ultérieur du tireur est sans effet sur le paiement du chèque.
– Si le contrat sous-jacent est éteint entre temps, ce problème est à régler sur le terrain du droit commun et non pas du droit du chèque. Suivant le droit du chèque, la provision a été transmise et donc le banquier doit payer la somme inscrite sur le chèque.
– En cas de redressement judiciaire ou de liquidation du tireur après la remise du chèque, le chèque devra être payé par la banque.
Vis-à-vis du tiré
L’effet principal est que le tiré a une obligation de payer le chèque.
La seule exception c’est quand une opposition a été faite dans des conditions régulières.
Quand il y a présentation de plusieurs chèques en même temps :
Suivant la doctrine, on doit tenir compte de la date d’émission du chèque.
Si même date : on tient compte du n° de série du chèque sur le chéquier.
Mais la jurisprudence n’est pas certaine et certains arrêts ont retenu la date de présentation.
CA Paris, 10 janvier 1997, D aff 1997, p 249
Vis-à-vis des créanciers du tireur
Les créanciers du tireur ne peuvent plus faire saisir la somme en question à partir du moment où elle n’appartient plus au tireur.
Ce principe a été battu en brèche par la réforme de 1991 sur les saisies.
En effet, l’article 47 de la loi du 9 juillet 1991 sur les procédures civiles d’exécution prévoit une solution différente.
Elle prévoit en cas de saisie attribution, le solde du compte à la date de la saisie est retenu comme pouvant être saisi.
Ce solde peut être modifié pour tenir compte des chèques antérieurs à la saisie à condition que les chèques en question aient déjà été remis à l’encaissement ou lorsque le chèque a été porté au crédit du compte mais est revenu impayé.