LA QUALIFICATION PÉNALE DES FAITS
Le principe de légalité impose que l’on rattache le fait que l’on soumet au juge pénal à une qualification pénale abstraite, une infraction. Un comportement, même s’il nous choque, ne peut être pénalement sanctionné que s’il entre dans les prévisions d’un texte pénal.
De la qualification découlera ensuite un régime juridique : la prescription de l’action publique sera, en principe, de 3 ans pour une infraction délictuelle ou de 10 ans si l’infraction est criminelle, la tentative sera punissable pour tel délit mais pas pour un autre, l’intention sera requise pour l’une et pas pour l’autre.
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Bref, on ne peut pas raisonner en droit pénal autrement qu’à partir d’une infraction donnée ce qui suppose qu’on ait posé, qu’on ait choisi une qualification. De la qualification découlera aussi la peine encourue et c’est dire le caractère déterminant de l’opération.
Le rapprochement des faits avec une infraction et donc avec sa définition obligera peut être le juge à interpréter la loi pénale mais les deux opérations sont intellectuellement distinctes, et c’est la confrontation du texte incriminé avec les faits qui donnera sa solution à la question de la qualification. Est-ce que ce fait peut être qualifié comme étant telle infraction donnée ?
A partir de là une des questions essentielles sera de savoir comment va-t-on procéder et quel régime juridique va s’appliquer lorsque plusieurs qualifications pénales paraissent pouvoir s’appliquer à un fait, ou à un ensemble divisible ou indivisible de faits, et de comprendre aussi comment cette qualification que l’accusation propose, en quelque sorte, peut évoluer en cours d’instance.
C’est là une matière assez difficile pour les étudiants en règle générale.
Elle est un peu obscurcie par des présentations doctrinales divergentes, y compris dans les manuels. Certains auteurs emploient des expressions identiques en leur donnant un contenu différent. Exemple : le « concours idéal d’infractions » n’a pas le même contenu chez M. Merle et Vitu que chez M. Desportes et Le Gunehec. Des situations, et des solutions jurisprudentielles seront classées comme concours réel d’infractions chez Desportes et Le Gunehec alors que Merle et Vitu les analysent comme concours idéal d’infractions.
Et puis nous sommes en présence d’applications assez nuancées en droit positif qui relèvent plus parfois de la casuistique que de principes et d’exceptions cohérents qui seraient à l’œuvre dans la Jurisprudence.
Repartons de notre question : « lorsque plusieurs qualifications pénales paraissent pouvoir s’appliquer à un fait, ou à un e nsemble divisible ou indivisible de faits, comment va s’opérer la qualification pénale et quel régime juridique va s’appliquer? »
Résumons :
Il y a des séries de cas où, après réflexion, on conclura qu’il n’y a, pour un fait ou un ensemble de faits, une seule qualification pénale, une qualification exclusive qui peut donc être retenue. On essaiera de classer ces séries, et de les caractériser, mais on sera bien obligé de dire que dans ces catégories, on trouve aussi des exceptions.
Il y a aussi des cas où on va pouvoir dégager, dans un ensemble, dans une même action délinquante, des faits matériellement distincts qui peuvent chacun recevoir une qualification différente. Et à coté de ces hypothèses, on retrouvera aussi nos exceptions aux qualifications exclusives.
Dans tous ces cas, la justice pénale va analyser ces situations comme une pluralité d’infractions. Et ces situations appartiennent à une catégorie plus large que l’on appelle les « concours réels d’infractions ».
On en profitera donc pour présenter cette notion, définie dans le code sous la notion de concours d’infractions, et nous verrons qu’au delà des cas
évoqués dans notre question de départ, un [ fait, ou à un ensemble divisible ou indivisible de faits] cette notion de concours réel d’infractions recouvre toutes les hypothèses où une même personne a commis plusieurs infractions sans que la première ne soit définitivement condamnée. Le code pénal a institué un régime juridique qui s’applique à l’ensemble de ces concours réels d’infractions.
Et puis il y a encore une autre situation où, même après réflexion, plusieurs qualifications s’appliquent à un même fait et on est là devant un concours de qualifications pour un même fait. Nous verrons que le droit donne une solution de principe à cette situation, assortie d’un régime juridique particulier mais qu’il existe aussi des solutions particulières liées à ce qu’on appellera un « concours idéal d’infractions» dont le régime juridique rejoint celui du « concours réel d’infractions ».