La responsabilité des banques sur les comptes bancaires

Responsabilité des établissements de crédit liée aux comptes bancaires

Droit commun de la responsabilité : contractuelle à l’égard de ses clients 1147 du code civil, délictuelle à l’égard des tiers.

Les tribunaux apprécient sévèrement la responsabilité des établissements de crédit (logique consumériste). Responsabilité de plus en plus recherchée, dans trois catégories de situations.

  1. A) Généralités sur les comptes bancaires

Matériellement, tableau avec débits et crédits.

C’est un contrat (convention de compte de dépôt remis à l’ouverture du compte : convention cadre) passé entre le banquier et son client, soumis au droit commun des contrats.

Compte de dépôt = dépôt et retrait d’argent, simple instrument de paiement. Pendant longtemps il était surtout utilisé par les particuliers.

Compte courant = sous-entend une relation d’affaires. Avant, la distinction était effectuée selon la qualité du titulaire. Mais avec l’évolution des relations des particuliers (découvert, prêt…) avec la banque, relation créditeur débiteur, le compte de dépôt peut fonctionner comme un compte courant.

==> Différence fondamentale : instrument de paiement pour les particuliers, instrument de paiement et de crédit pour les entreprises.

Le compte courant obéit à un régime différent que celui du compte de dépôt, d’où l’intérêt d’une distinction.

Talère : « le compte est un récipient dans lequel on fait rentrer les créances (…) ».

« Effet novatoire » d’une créance = changement de nature de la créance qui n’est plus individuelle (quand elle entre en compte elle perd son individualité. Seul le solde du compte est une créance).

Comptes spéciaux :

Compte d’épargne: compte de dépôt mais qui bénéficie de certains avantages en matière d’intérêts (compte rémunéré) et dans certains cas d’un traitement fiscal particulier des intérêts. En contrepartie, cet argent est indisponible pendant un certain nombre d’années (très souvent).

Un même compte peut avoir plusieurs titulaires : «compte-joint» = compte collectif, dont l’intérêt est que le compte peut fonctionner avec la signature d’un seul (inconvénient est qu’il y a solidarité).

Compte indivis est aussi un compte collectif, mais dans lequel il n’y a pas de solidarité entre les titulaires du compte.

Quand il y a plusieurs comptes mais un même titulaire : solidarité entre les comptes ?

La jurisprudence refuse le lien entre chaque compte : autonomie des comptes.

REMARQUE : Sauf volonté des parties «convention de compensation».

  1. B) Les obligations liées à l’ouverture d’un compte

1) Le droit au compte

Un banquier peut-il refuser d’ouvrir un compte ?

Jusqu’à la loi de 1984, le banquier n’était pas tenu d’ouvrir un compte à un nouveau client (liberté du commerce et de l’industrie, contrat intuitu personae).

Première nuance apportée par la loi bancaire du 24 janvier 1984: l’article 58 d’alors a indirectement consacré ce principe ==> les personnes qui s’étaient vues refuser l’ouverture d’un compte par plusieurs banques avaient la faculté de s’adresser à la Banque de France pour lui demander de désigner un établissement bancaire qui était alors tenu d’ouvrir le compte.

Aujourd’hui la situation a évolué pour les personnes physiques, depuis la loi du 29 juillet 1998 lutte contre l’exclusion qui a modifié L.312-1 code monétaire et financier (qui reprenait l’article 58 de la loi de 1984) «Toute personne physique ou morale domiciliée en France, dépourvue d’un compte de dépôt, a droit à l’ouverture d’un tel compte dans l’établissement de son choix».

Al 2 : déclaration sur l’honneur que le demandeur ne détient aucun compte. En cas de refus, la personne peut saisir la Banque de France afin qu’elle en désigne un.

==> La situation n’a pas beaucoup changé, pas de sanction prévue à l’égard des établissements de crédit.

2) Vérifications que doit faire le banquier lors de l’ouverture d’un compte

  • Vérifications légales

L.563-1 et L.563-4

Identité

Domicile

La loi envisage ces deux vérifications sans donner de précisions quant aux modes de vérification ==> jurisprudence : passeport, carte d’identité (pas carte de séjour ou certificat d’exil politique) et titre de séjour.

Pour le domicile pas la carte d’identité ni le passeport : lettre de bienvenue envoyée par la banque plus justificatif (facture, loyer…).

==> Un établissement de crédit qui ne vérifie pas ces données pourrait voir sa responsabilité mise en jeu.

Ne vérifie pas la moralité de la personne : casier judiciaire, statut marital, état de santé, etc.

  • Capacité et pouvoir de la personne demandant l’ouverture du compte
  • Spécimen de la signature.
  1. C) Obligations du banquier lors du fonctionnement du compte

1) Obligation de tenir le compte

Le banquier doit respecter les ordres de son client. Il peut être responsable le banquier, lorsqu’il commet une erreur comptable (erreur due à un traitement informatique n’est pas une excuse valable).

Relevé bancaire envoyé obligatoirement tous les mois.

Deux mois pour contester le compte, au-delà la responsabilité n’est plus possible. Depuis un arrêt de la Cour de cassation, chambre mixte: l’approbation du compte n’empêche pas le client de mettre en jeu la responsabilité contractuelle de l’établissement de crédit (approbation tacite).

2) Obligation de surveiller le compte

A nuancer avec le principe de la non ingérence du banquier dans les affaires de ses clients (ne se préoccupe pas de l’origine des ressources et de la destination des débits).

L’obligation de surveillance apparaît surtout à l’égard de la lutte contre le blanchiment d’argent. L.563-3 code monétaire et financier «Toute opération important qui se présente dans des conditions inhabituelles de complexité et qui ne paraît pas avoir de justification économique ou d’objet licite, doit faire l’objet de la part de l’organisme financier un examen particulier».

Loi 12 juillet 1990 relative au blanchiment des capitaux, puis décret qui précise : montant supérieur à 150 000€, soupçon quant à l’origine des capitaux.

«Déclaration de soupçon» formulée auprès d’un organisme : le TRACFIN (www.tracfin.minefi.gouv.fr/)

Autre dérogation : surveillance quand un client a fait l’objet d’incidents de paiement (pas d’obligation légale, approche jurisprudentielle). Non respect : responsabilité délictuelle ou contractuelle du banquier.

Obligation au secret professionnel «secret bancaire»

Prévu par L.511-33 al 1er code monétaire et financier (désigne toutes les personnes tenues au secret professionnel ==> salariés des établissements de crédit). Toute infraction serait punie d’1 an d’emprisonnement, d’une amende de 15 000€.

Contenu du secret bancaire

Toutes les informations à caractère confidentiel sont du domaine du secret bancaire = toutes celles qui se rapportent à des éléments précis et chiffrés.

En revanche, il peut communiquer des renseignements d’ordre général, s’il ment il commettrait une faute.

Situation où la loi autorise et oblige le banquier à divulguer des informations

  • ==> Blanchiment d’argent
  • ==> Autorités fiscales 1987 c. général des impôts et douanières 65 et 465 c. douanes
  • ==> Procureur de la République, police judiciaire… dans le cadre d’une procédure pénale.
  • ==> Procédure civile: pour connaître l’état des comptes…
  • ==> Procédure commerciale: procédures collectives (redressement ou liquidation judiciaire).
  • ==> Commission Bancaire
  • ==> AMF
  • ==> Commission de surendettement des particuliers
  1. D) Obligations du banquier liées à la résiliation du compte

Quand le compte a été ouvert pour une durée déterminée (rare), il prend fin au jour de l’échéance du compte.

Généralement il est ouvert pour une durée indéterminée: chacune des parties peut rompre unilatéralement le contrat.

Difficulté sur le délai de préavis à respecter. Pas nécessaire de préciser les raisons de la clôture. En revanche, la jurisprudence considère que le banquier doit respecter un délai de préavis qui doit être déterminé par le contrat ou à défaut un délai raisonnable.

==> Responsabilité contractuelle du banquier.

Effets de la clôture : conduit à une période de liquidation dont le but consiste seulement à faire apparaître le solde définitif.

Pendant cette période, il appartient au banquier, sous peine de commettre une faute engageant sa responsabilité, de payer aux tiers les différents effets (chèques, cartes…) émis antérieurement à la clôture du compte.