Les issues et les incidents de la saisie-vente
Selon le site des huissiers de justice « http://www.huissier-justice.fr », la saisie-vente est un acte par lequel l’Huissier de Justice établit au domicile du débiteur (ou en tous lieux) l’inventaire précis des objets et des meubles lui appartenant. Ces biens ainsi répertoriés restent à l’endroit où ils se trouvent et ne peuvent plus être déplacés tant que la dette n’est pas réglée. Si le débiteur ne règle pas entièrement sa dette ou ne prend pas d’engagement de paiements échelonnés, les biens saisis pourront alors être vendus dans un délai d’un mois soit directement par le débiteur (vente amiable) sous le contrôle de l’Huissier de Justice, soit en salle des ventes (vente forcée). La saisie vente peut s’effectuer sur tous les biens mobiliers (non seulement les meubles et objets mais aussi les parts de sociétés, le contenu d’un coffre, les véhicules) mêmes s’ils sont détenus par quelqu’un d’autre. A NOTER : seule une saisie sur 100 s’achève par la vente effective des objets appartenant au débiteur.
Section 1 : Les issues de la saisie-vente
Si le débiteur ne s’exécute pas volontairement, la saisie-vente débouche sur la vente des biens saisis, 2 modalités:
1) La vente amiable des biens saisis
- Le Juge de l’exécution (JEX) : désignation, compétence, procédure
- L’huissier et les personnes chargées de l’exécution
- Les procédures civiles d’exécution : définition, domaine…
- Le créancier saisissant et le débiteur saisi
- La saisissabilité des biens du débiteur
- Quels sont les biens insaisissables?
- Les conditions relatives à la créance, cause de la saisie
A compter de la notification de l’acte de saisie, le débiteur a 1 mois pour procéder à la vente amiable de ses biens, ce délai est impératif. La vente amiable est privilégiée car elle permet le plus souvent d’obtenir un meilleur prix notamment s’il s’agit d’un bien d’une nature spécifique. Cependant, en pratique, les propositions reçues après le délai d’1 mois ne sont pas automatiquement rejetées car elles sont souvent favorables au créancier.
Concrètement, le débiteur informe l’huissier par écrit des propositions d’achat des biens mobiliers saisis et lui indique le délai proposé par l’acquéreur pour consigner le prix. L’huissier communique ces propositions au créancier par LRAR. A partir de là, les créanciers ont un délai de 15 jours pour prendre partie (i.e. donner ou non leur accord), leur silence vaut acceptation des propositions. Si les propositions de vente sont acceptées directement ou par silence, le débiteur procède à la vente amiable du ou des biens saisis, le prix est consigné entre les mains de l’huissier du créancier saisissant. Le respect du délai de consignation est important à 2 points de vue:
– il conditionne le transfert de propriété et la délivrance du bien
– à défaut de consignation dans le délai convenu, la vente amiable est inopérante (il y aura vente forcée des biens saisis)
Si l’un des créanciers refuse les propositions faites par le débiteur, la vente aux enchères publiques est possibles mais n’est pas systématique. Elle ne peut intervenir avant l’expiration du délai d’1 mois imparti au débiteur pour vendre ses biens à l’amiable, délai qui est alors augmenté en cas de besoin, du délai de 15 jours laissé aux créanciers pour prendre partie. La vente amiable est favorisée au maximum. Finalement, ce n’est qu’à l’expiration d’un délai de 6 semaines (1 mois + 15 jours) qu’il sera procédé
2) La vente forcée des biens saisis
Des formalités préalables sont nécessaires avant de procéder à la vente par adjudication.
- A) Les formalités préalables
Il en existe 2: une publicité pour obtenir le meilleur prix, un PV de vérification des biens saisis.
1) La publicité préalable
Cette publicité est obligatoire, elle est effectuée par affiche indiquant précisément les lieux, jours et heures de la vente aux enchères et la nature des biens saisis qui vont être vendus. Ces affiches sont apposées à la mairie de la commune où demeure le débiteur ainsi qu’au lieu de vente. La vente par adjudication peut également être annoncée le cas échéant par voie de presse, cette formalité plus coûteuse est souvent utilisée pour la vente des biens d’une certaine valeur ou présentant des spécificités.
Cette publicité a lieu au plus tôt 1 mois après l’acte de saisie éventuellement augmenté de 15 jours s’il y a eu des propositions de vente amiable, et au moins 8 jours avant la date fixée pour la vente forcée.
Le débiteur est informé par huissier des lieux, jours et heures de la vente aux enchères par huissier.
2) Le PV de vérification des biens saisis
Ce PV dresser la l’huissier permet de s’assurer qu’aucun bien n’a disparu ou été dégradé. Si des biens ont disparu ou été, l’huissier dresse un PV de disparition ou de détérioration.
2 conséquences:
– libère le gardien
– fixe la limite temporelle dans laquelle les créanciers saisissant ou opposant peuvent faire valoir leur droit sur le prix de vente. Après la rédaction de ce PV, les créanciers opposant ne sont plus recevable, est favorisé le créancier poursuivant.
- B) La vente par adjudication
La vente forcée des biens saisis est faite par un officier ministériel: le commissaire priseur. Il a un monopôle dans la ville où se situe son office. Dans les communes où il n’y a pas de commissaire priseurs, la vente est réalisée par les notaires, huissiers, commissaires priseurs des villes avoisinantes. La vente est réalisée au lieu où se situent les biens saisis ou dans une salle des ventes. Si le déplacement des biens risque d’être onéreux ou difficile, la vente peut très bien se faire sur place.
L’adjudication est faite au plus offrant après 3 criées. Lorsque les enchères s’arrêtent, l’officier chargé de la vente rappel 2 fois le dernier prix avant de prononcer l’adjudication.
La vente est arrêtée lorsque le prix des biens vendus assure le paiement en principal, frais et intérêts de la créance cause de la saisie ainsi que les frais d’huissier.
L’adjudicataire doit payer le prix comptant et pour assurer l’effectivité des paiements, ceux-ci se font souvent en espèce ou par chèque de banque certifié. A l’issue de la vente l’officier ministériel dresse un acte avec les biens vendus, les montants perçus et la liste des adjudicataires.
Puisque le paiement se fait comptant, l’adjudicataire devient immédiatement propriétaire mais avec l’accord du commissaire priseur, il peut éventuellement verser le prix dans un délai convenu et alors il prendre possession du bien au moment du paiement.
La vente par adjudication produit tous les effets d’une vente à l’exception de la garantie des vices cachés qui n’est pas due au profit de l’adjudicataire. De plus, le produit de la vente est insaisissable tant qu’il n’est pas affecté au créancier poursuivant.
Enfin, si l’adjudicataire ne peut payer le prix, le bien est revendu à la folle enchère i.e. nouvelle vente aux enchères. Si le prix de vente de la seconde adjudication est inférieur à celui de la première, la différence est à la charge du fol enchérisseur (i.e. du premier faux acquéreur).
Section 2 : Les incidents de la saisie-vente
En principe, la saisie-vente est une procédure extrajudiciaire mais elle devient judiciaire en cas d’incident i.e. si d’autres créanciers viennent en concours avec le créancier saisissant (1) mais aussi si des tiers se prétendent propriétaires des biens saisis (2) ou encore si le saisi (le débiteur) invoque une cause de nullité (3).
1) Les concours de saisies
Même si la L91 a limité au maximum l’intervention des tiers, d’autres créanciers peuvent s’associer à cette procédure, ils disposent de 3 moyens:
– ils peuvent s’opposer à la première saisie
– étendre la première saisie
– demander à être subrogés dans les poursuites
- A) L’opposition à la première saisie
Tout créancier muni d’un titre exécutoire ayant une créance certaine, liquide et exigible peut former opposition à la saisie-vente, il dénonce un acte d’opposition au premier créancier mais il doit se manifester avant la vérification des biens saisis. L’acte contient la mention du titre exécutoire, le montant des sommes réclamées avec taux…
Prenant acte du ou des oppositions, le premier créancier poursuit la procédure de saisie-vente et une fois celle-ci réalisée, le prix obtenu sera réparti entre les différents créanciers grâce aux procédures de distribution (cf partie 4).
- B) L’extension de la première saisie
Elle peut se faire au profit des créanciers qui ont pratiqué une saisie conservatoire ou de ceux qui sont munis d’un titre exécutoire. L’huissier qui a connaissance d’une première saisie (par le débiteur ou le tiers qui doit le lui déclarer) ne peut pas se contenter de diligenter une procédure d’opposition, il doit en fait identifier les biens qui n’ont pas encore été saisis pour procéder à une extension de la procédure initiale i.e. pour étendre l’assiette de la première saisie. Ainsi, tout créancier opposant peut en fait étendre la saisie initiale à d’autres éléments du patrimoine du débiteur. Dès lors, un inventaire complémentaire est dressé puis signifié au premier créancier ainsi qu’au débiteur. Le premier créancier informé d’une modification de la consistance du patrimoine du débiteur peut lui aussi procéder à une saisie complémentaire.
Cette extension de l’assiette de la saisie influe sur le déroulement de la saisie du fait du nouveau délai d’1 mois laissé au débiteur pour pouvoir vendre ses biens à l’amiable.
Art.122 D92 En principe, il est procédé à la vente aux enchères publiques de tous les biens restant à l’expiration de tous les délais impartis pour procéder à la vente amiable. Mais parfois, la vente forcée peut être organisée en plusieurs fois pour tenir compte de l’expiration de chaque délai d’1 mois.
- C) La subrogation des les poursuites du premier saisissant
Suite à l’opposition des créanciers, le premier saisissant poursuit seul la vente mais les créanciers qui se sont associés à la procédure peuvent être subrogés dans les droits du créancier poursuivant si celui-ci ne procède pas à la vente forcée à l’expiration des délais. Ce cas est fréquent en pratique car le premier créancier qui a connaissance de l’existence d’autres créanciers peut très bien ne pas souhaiter poursuivre la vente qui ne lui procurera plus le même avantage. Le créancier doit alors faire délivrer par huissier une sommation au premier créancier de procéder dans les 8 jours aux formalités de la mise en vente par adjudication des biens saisis. Ce n’est que si cette sommation est infructueuse que le créancier est subrogé de plein droit dans les droits du premier saisissant. A partir de là, le premier créancier est déchargé de ses obligations, de plus, il doit remettre au créancier subrogé les pièces utiles pour que celui-ci puisse poursuivre la procédure.
2) Les contestations des tiers
Seuls les biens appartenant au débiteur peuvent faire l’objet d’une saisie. L’huissier ne vérifiant pas la propriété des biens saisis, les risques de saisir les biens d’un tiers ne sont pas exclu. Le tiers peut donc faire obstacle à la saisie. D92 Article 128 réserve au tiers une action spécifique: action en distraction de biens saisis.
- A) L’action en distraction de biens saisis
Cette action est ouverte plus largement que l’action en revendication. En effet, Code Civil Article 2279 al.2 l’action en revendication suppose que le propriétaire allègue le vol ou la perte du bien. Pour l’action en distraction, le tiers n’a pas à justifier de l’existence d’un vol ou d’une perte. La demande est présentée au JEX du lieu de la saisie et elle doit être présentée avant la vente des biens. Elle peut être présentée par lettre simple ou LRAR ou par assignation. Dans tous les cas, elle doit être accompagnée des titres attestant de la propriété. Si le tiers agit avant la distribution du prix de vente, l’action se reporte sur le prix par le mécanisme de la subrogation réelle.
En revanche, si les sommes ont été distribuées, Article 129 autorise le tiers à recourir à l’action de droit commun i.e. à intenter une action en revendication i.e. le tiers ne peut alors agir qu’en cas de vol ou perte des biens saisis.
- B) Les effets de l’action en distraction de biens saisis
C’est une action conservatoire, provisoire qui tend à extraire de la saisie, de la vente, par la simple apparence de la propriété sans qu’il soit statué au fond sur le point de savoir qui est le véritable propriétaire. Le juge peut:
– rejeter la demande: le bien peut être vendre et la procédure de saisie se poursuit normalement
– accueille la demande: il exclut le ou les biens du lot des biens saisis, ce n’est qu’une procédure conservatoire i.e. la question de la propriété, s’il y a lieu, sera tranchée au fond au titre d’une action pétitoire intentée devant le TGI. La saisie-vente se poursuivra pour le surplus des biens saisis.
3) Les contestations du débiteur
Le débiteur peut contester la validité de la saisie mais aussi la saisissabilité des biens.
- A) La contestation de la validité de la saisie
Jusqu’à la vente des biens, le débiteur peut demander la nullité de la saisie pour vice de forme (une mention manque) ou pour vice de fond (extinction de la créance, non propriété du bien). Si le juge prononce la nullité, la saisie est nulle et non avenue i.e. sans effet. Cependant, si la nullité est prononcée après la vente mais avant la distribution du prix, le débiteur peut dans ce cas simplement réclamer la restitution du produit de la vente.
En principe, l’action en nullité ne suspend pas les opérations de saisie. Toutefois, en pratique, l’huissier a souvent tendance à suspendre les opérations de saisies comme c’est le cas pour les contestations relatives à l’insaisissabilité des biens.
- B) La contestation relative à l’insaisissabilité des biens
Elles sont portées devant le JEX, le débiteur a 1 mois pour agir à compter de la signification de l’acte de saisie. Dans ce cas, le créancier est entendu ou au moins appelé à l’audience et cette demande suspend la procédure de saisie pour les biens dont le caractère saisissable est contesté. La procédure se poursuit pour les autres biens, la vente peut être poursuivie pour les biens dont le caractère saisissable n’est pas contesté.
2 cas de figure:
– le juge fait droit à la demande: les biens sont déclarés insaisissables et donc exclu de la procédure de saisie-vente, il y a alors une réduction de l’assiette de la saisie.
– le juge déboute: les biens sont saisissables, ils peuvent être vendus selon la procédure normale.