La séparation des pouvoirs, de la théorie à la pratique

La Séparation des Pouvoirs (de la théorie de Montesquieu et Lock) à la pratique,

  • Elle est l’autre grand pilier de l’État libéral. La séparation des pouvoirs est un principe systématisé par Montesquieu et Locke afin de garantir la liberté (Selon Montesquieu, le pouvoir arrête le pouvoir), et a été repris par l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme (« toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution »).

Cette théorie de la séparation des pouvoirs a fait l’objet d’interprétations. On distingue :

  • la séparation rigide des pouvoirs, qui conduit au régime présidentiel, avec un seul exemple, les Etats-Unis (les trois expériences françaises de 1791, de l’an III et de 1848 ont rapidement échoué)
  • la séparation souple, qui permet d’identifier le régime parlementaire (il existe des moyens d’action réciproques, censure et dissolution, entre le pouvoir législatif et exécutif).

SECTION I : La Théorie de la séparation des pouvoirs

SOUS-SECTION I : Les Origines de la théorie

Aristote avait commencé à travailler sur la séparation des pouvoirs dans son ouvrage « politique » il distingue le corps des magistrats et le corps judiciaire.

John Lock en 1690 « traité du gouvernement civil » distingue 3 fonctions : la fonction législative élaborer les lois, la fonction exécutive faire exécuter ces lois, et la fonction fédérative en charge de la sécurité et de la diplomatie.

Pourquoi John Lock considère la séparation des pouvoirs ?

Il y a une formule qui est très intéressante, « la tentation de porter la main sur le pouvoir serait trop grande si les même personne qui ont le pouvoir de faire les lois avait aussi entre les mains e pouvoir de les faire exécuter; car elle pourrait se dispenser d’obéir aux lois qu’elles font » si tous les pouvoirs sont concentrés dans une seule main on prend le risque d’un pouvoir arbitraire qui ne respecterait même pas ses propres règles. Il développe cette conception car l’Angleterre bien avant la France est préoccupée par a question de séparation des pouvoirs, elle a en effet connu entre le XIe et le XIIIe une monarchie absolue, mais en 1215, le roi s’engage à lever l’impôt avec le consentement de son conseil.

Avancée obtenue par la grande charte de 1215, à partir de là c’est le conseil qui détient le véritable pouvoir financier. Le conseil va tellement s’élargir dans sa composition qu’il va devenir un parlement avec le« magnum consilium » (les nobles qui constituent le parlement) et de l’autre un « commune consilium » qui lui est composé de non-noble. Au XVe s c’est ce qui deviendra la chambre des lords et la chambre des communes. Au XVIIe s après une période très trouble de l’histoire d’Angleterre et un pouvoir très autoritaire avec la dynastie des Stuarts, après deux révolutions en1640 et 1688, les anglais vont même tenter avec Cromwell.

On va alors changer de dynastie, avec une dynastie d’origine hollandaise, mais les monarques de cette dynastie ne maitrisent pas la langue. Ce n’est donc pas le monarque qui exerce le pouvoir mais le parlement, progressivement le roi vaperdre une partie de ses pouvoirs qui sera récupérée par le parlement, ce qui va aboutir à la rédaction d’un acte très célèbre dans l’histoire constitutionnel de la Grande-Bretagne, le « bill of rights» du 22 février 1789. Il s’agit d’un texte qui est imposé par le parlement au monarque pour limiter les pouvoirs du monarque, par exemple le roi perd le droit de suspendre une loi, de lever l’impôt, c’est en ce contexte là en 1789 que John Lock théorise la séparation des pouvoirs. Elle ne part pas d’une conception intellectuelle mais de la pratique, pour John Lock puisque ça marche en Grande-Bretagne, cela doit fonctionner ailleurs.

SOUS-SECTION II : La Consolidation par Montesquieu

Montesquieu rédige en 1748, « l’esprit des lois » avec cet ouvrage il fait une nouvelle interprétation de la séparation des pouvoirs, pour lui le bien suprême c’est la liberté, il faut donc organiser le pouvoir pour préserver la liberté car tous les régimes politiques ne la permettent pas. Pour lui le pouvoir est parfois l’ennemi de la liberté, il dit que la liberté se trouve uniquement dans des gouvernements modérés avec cette formule célèbre :

« Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser, il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites »

Le pouvoir appel le pouvoir contre la liberté, il faut donc limiter ce pouvoir. La difficulté est alors de trouver le moyen de le limiter pour aboutir à ce fameux gouvernement modéré. Montesquieu est un magistrat et sait que la règle de droit peut être contournée, il faut donc du droit pour limiter le pouvoir mais c’est insuffisant.

« Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir »Montesquieu

On en arrive donc à la séparation des pouvoirs pour que chaque pouvoir se tempère l’un l’autre et s’équilibre. La principale idée de Montesquieu est d’absolument éviter la concentration des pouvoirs dans les mains d’un seul. Montesquieu distingue trois sortes de pouvoir, la puissance législative (faire la loi), la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit des gens (faire la paix, la guerre et gérer la diplomatie) et la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit civil (la justice, punir les crimes et régler les différends entre particulier). Pour Montesquieu il faut absolument séparer ces fonctions, il a des développements dans lesquels il explique qu’on ne peut faire la loi et juger sans faire courir un danger aux libertés.

« Le juge pourrait avoir la force d’un oppresseur » Montesquieu

Mais il va plus loin car il considère que chaque pouvoir doit appartenir à une partie différente de la société. Montesquieu est lui-même un aristocrate attaché à la monarchie, il essaye donc de préserver les intérêts du roi et de l’aristocratie. Le pouvoir de faire la loi, Montesquieu considère qu’il faut le partager entre le peuple par l’intermédiaire d’une chambre basse (équivalent de la chambre de commune) et l’aristocratie par la chambre haute.

Le roi lui a le pouvoir exécutif, notamment l’exécutif du droit des gens. Mais au moment de sa théorie, la monarchie va être remise en cause, Montesquieu va alors l’assouplir pour ne pas vexer le roi, il explique que les pouvoirs ne doivent pas être totalement hermétiques les uns par rapport aux autres, il faut prévoir des relations entre ces pouvoirs, Montesquieu raisonne non pas en terme de séparation stricte mais en réalité une séparation souple. C’est l’idée selon laquelle les pouvoirs doivent fonctionner sur le modèle des poids et des contrepoids « checks and balances », autrement dit les pouvoirs s’équilibre les uns les autres mais pour cela ils doivent entretenir des relations entre eux, par exemple Montesquieu considère que le monarque peut avoir un droit de véto sur les lois et empêcher son application. Mais le pouvoir législatif peut aussi contrôler la fonction exécutrice, si les lois sont appliquées à l’intérieur même du pouvoir législatif on a aussi ce pouvoir législatif car la chambre haute et la chambre basse peuvent se neutraliser et s’équilibrer.

SOUS-SECTION III : L’Evolution du principe

Le principe de séparation des pouvoirs a beaucoup évolué, selon les pays.

Au début le gouvernement lui demande de faire les lois, mais de plus en plus le gouvernement ne se contentent pas d’appliquer les lois, mais il peut les suggérer ils peuvent avoir l’initiative législative.

Le gouvernement fixe la ligne directrice et le parlement vote les lois conformes à la ligne gouvernementale. Dans l’esprit de Montesquieu on parle bien de fonction exécutive, se contenter d’appliquer les textes, actuellement on est passé de la fonction exécutive à a fonction gouvernementale.

A l‘inverse nous pourrons voir que les parlements eux ont perdu une partie de leur autorité. Il reste alors au parlement le vote de la loi, et le contrôle de l’application de la loi, donc le contrôle du gouvernement. L’un des éléments du changement sont en partis les politiques eux-mêmes parce que les partis politiques sont apparus tardivement, lors de l’apparition étaient peut structurés et progressivement ils vont mieux se perfectionner, s’organiser et gagner en influence sur le fonctionnement du parlement mais aussi sur le fonctionnement exécutif.

Lorsque les partis politiques étaient peut structurer, les parlementaires étaient beaucoup plus libre dans leurs façon de concevoir les textes et de les voter.

SECTION II : Les Différentes formes de séparation des pouvoirs

SOUS-SECTION I : Une Séparation des pouvoirs pervertis

En réalité il y a des régimes dans lesquels il n’y a pas véritablement de séparation des pouvoirs, il y a encore des régimes de confusion absolue des pouvoirs.

C’est ce qu’il y a de plus facile à détecter, il y a aussi des cas de confusion relative, là aussi on a de la séparation alors qu’on est en réalités un système de confusion, qui peut être au profit d’un pouvoir. Le régime d’assemblée par exemple où le parlement dispose de la réalité du pouvoir et l’exécutif ne sert pratiquement à rien.

SOUS-SECTION II : La Séparation souple des pouvoirs et la séparation stricte des pouvoirs

  1. La Séparation souple des pouvoirs

Nous étudions donc ici le régime parlementaire.

Les Principes

Un régime parlementaire est un régime dans lequel le gouvernement est politiquement responsable devant le parlement et où le parlement peut faire l’objet d’une dissolution par l’exécutif. On parle alors de séparation souple parce qu’on est dans un système où les pouvoirs interagissent l’un sur l’autre. Dans un système de séparation souple les pouvoirs son distinct mais ils sont dépendants les uns des autres de manière équilibrée.

Lorsqu’on a un chef de l‘état monarque héréditaire il n’est pas dépendant du parlement, alors que le gouvernement va être dépendant du parlement, il est le produit de l’élection parlementaire, on va nommer premier ministre un homme ou une femme soutenue par le parlement. Le gouvernement est donc forcément le prolongement de la majorité parlementaire. Dans certains cas même le chef de l’état peut être élu par le parlement. Le gouvernement est responsable devant le parlement, quand le parlement pousse le gouvernent à la démission c’est une motion de censure, en le renversant ou l’obligeant à démissionner, c’est la responsabilité politique du gouvernement à l’égard du parlement.

La dépendance du législatif a plusieurs formes de dépendance.

La dissolution, l’exécutif dissout le parlement, le parlement est sanctionné par l’exécutif et renvoie les parlementaires devant les électeurs.

Lorsque le parlement fait l’objet d’une dissolution, la parole revient au peuple, il tranche entre l’exécutif et le législatif. Il y a néanmoins une autre forme de dissolution pratiqué en Allemagne et en Grande-Bretagne, dissolution récompense, le pouvoir exécutif prononce la dissolution du parlement au moment où la conjoncture politique est favorable au parlementaires ils sont réélus et plus nombreux.

Il y a tout de même d’autre moyen pour permette au gouvernement et au parlement de travailler ensemble, dans un régime souple l’initiative des lois est partagé entre le gouvernement et le parlement. Le texte de loi peut être proposé par le parlement mais aussi par le gouvernement. Le gouvernement dépose des projets de lois et le parlement des propositions initiative parlementaire, pour l’équilibre des pouvoirs il y a la technique de la délégation du pouvoir législatif, domaine du parlement il doit voter la loi, mais il autorise le gouvernement à élaborer seul le texte, ce sont les ordonnances art. 38.

Dernier domaine où il y a un travail conjoint entre le parlement et le gouvernement, ce sont les traités internationaux, le traité signé par le ministre ou le président de la république, il faut que le parlement autorise sa ratification pour que le traité soit définitivement accepté. Le parlement autorise le pouvoir exécutif le président, a ratifié pour finalisé le traité.

Les Variantes de la séparation souple des pouvoirs :

Il y a deux grandes formes de séparations des pouvoirs :

Régime parlementaire dualiste,

Le chef de l’Etat joue un rôle important, il peut prononcer la dissolution du parlement (chambre basse), il peut pousser le gouvernement à la démission, ce gouvernement peut être aussi contraint de démissionner par le parlement. Le gouvernement est politiquement responsable devant le chef de l’Etat et devant le parlement, c’est une double responsabilité.

C’est sous cette forme dualiste que le régime parlementaire est arrivé en Angleterre au XVIIIe jusqu’en 1804. La France a aussi connu des périodes de régime parlementaire dualiste au XIX, sous la restauration et la monarchie de juillet, la Ve république est aussi considérée comme une forme de régime dualiste, art. 49 :

« Le gouvernement est responsable devant le parlement »

Le gouvernement est également responsable devant le chef de l’Etat, le président peut exiger du premier ministre qu’il lui présente la démission de son gouvernement.

La difficulté qui peut apparaitre est de savoir qui est le plus légitime que l’autre ? Il y a un problème de relation entre les pouvoirs, le chef d’Etat s’affaiblit mais qui reste en place en période de cohabitation et le gouvernement collabore avec le parlement. Evolution du régime dualiste, il s’efface.

Le régime parlementaire moniste,

Le chef de l’Etat n’a pratiquement pas de pouvoir, pas pouvoir pour dissoudre le parlement et le gouvernement n’a aucune forme de responsabilité devant le chef de l’Etat, seulement responsable devant le parlement. Et dans le cadre du régime moniste, le parlement est totalement prépondérant, c’est le parlementarisme absolue, régime d’assemblé. Le parlement peut renverser comme bon lui semble, censure le gouvernement. Ce qui provoque un phénomène d’instabilité ministérielle, changement de gouvernement successif sous la IIIe et IVe république. Dans un régime parlementaire moniste le droit de dissolution ne s’applique pas, l’exécutif ne peut pas dissoudre la chambre basse. Il y a déséquilibre des pouvoirs, le gouvernement n’est pas responsable devant le chef de l’Etat, celui-ci n’a pas de pouvoir.

Le régime moniste peut être à prépondérance du parlement, mais aussi à prépondérance du gouvernement, c’est un régime parlementaire à l’anglaise ou parlementarisme majoritaire, il n’y a pas d’instabilité gouvernemental, le gouvernement dure, car le parlement ne censure pas le parlement. Dans les régimes parlementaire moniste avec prépondérance du parlement, il y a éclatement des régimes politique, en revanche dans le régime parlementaire à l’anglaise, il y a un bipartie dont un forcément majoritaire, le parti majoritaire choisie donc un chef du gouvernement en adéquation avec le parti majoritaire, le parti fait bloc derrière le gouvernement, celui-ci est donc fort est stable. Ce qui disparait est la responsabilité du gouvernement devant le parlement, ce qui ne disparait pas est la dissolution, on se trouve dans la dissolution récompense, le gouvernement dissous la chambre basse au bon moment, le moment qui présente le moins de risque. Sous la IVe république le parlement a rendu la France difficilement gouvernable, quand le G. De Gaulle a fait rédiger la constitution de la Ve république, il a souhaité faire sortir la France du régime moniste pour le dualisme qui est rationalisé car la constitution donne les moyens aux gouvernements d’orienter et de contrôler par le pouvoir exécutif, d’où la stabilité de la Ve république.

  1. La Séparation stricte des pouvoirs : régime présidentiel

Le pouvoir exécutif et législatif sont totalement indépendant l’un de l’autre, les organes sont séparé, les fonctions aussi la loi dépend uniquement du législatif, le législatif ne peut pas censurer l’exécutif à l’inverse l’exécutif ne peut dissoudre le pouvoir législatif. C’est un régime d’isolement des pouvoirs, le modèle des Etats-Unis est celui-ci, le président ne peut rien faire sur la chambre et le sénat. En réalité il n’y a jamais de séparation totalement stricte des pouvoirs, cela n’existe pas les pouvoirs sont obligés d’entretenir des relations entre eux.