Le principe de la légalité des délits et des peines

La signification du principe de la légalité des délits et des peines

Pour analyser dans le détail la notion d’infraction pénale, il faut présenter les différents éléments constitutifs de ceux-ci. Il y un élément intentionnel, un élément matériel, un élément légal.

L’élément légal, c’est à dire, le principe de légalité des délits et des peines dispose qu’on ne peut être condamné pénalement qu’en vertu d’un texte pénal précis et clair. Le principe de légalité des délits et des peines résulte de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

  1. A) Les éléments constitutifs de l’infraction pénale : zoom sur l’élément légal

En vertu du principe de légalité des délits et des peines, un texte normatif doit préalablement incriminer le comportement infractionnel troublant la paix sociale. Cela correspond à l’élément légal de l’infraction. Ensuite, il faut démontrer que les circonstances dans lesquelles le délinquant est passé à l’acte correspondent à la réalisation du comportement incriminé par le législateur. Ici, on s’intéresse à l’élément matériel de l’infraction. Enfin, l’auteur de l’acte doit être conscient du caractère délictueux de son geste. C’est l’élément moral. Nous évoquerons dans ce cours l’élément légal de l’infraction.

En tant qu’élément constitutif de l’infraction pénale, l’élément légal repose sur un principe fondamental. Nulle infraction ne peut être poursuivie, nulle peine ne peut être subie en dehors de toute disposition en principe légale préalablement érigée à cet effet. Nullum crimen nulla pena sine lege. Cette règle correspond au principe de la légalité des délits et des peines énoncé par Beccaria dès la Révolution française. En ce sens, il est intéressant de préciser comment ce principe s’est affirmé au fil des âges. Mais il faut avoir présent à l’esprit que le libellé de cet adage formulé au 18ème ne correspond plus véritablement à la signification que l’on entend lui donner aujourd’hui.

  1. B) La signification du principe de la légalité des délits et des peines : la source légale

La reconnaissance de la règle : le principe de la légalité des délits et des peines est relativement récent puisqu’il est apparu au moment de la RF à la suite des idées nouvellement soutenues par Cesare Beccaria et relayées par les philosophes des Lumières. Depuis cette époque, ce principe est unanimement reconnu en droit interne comme en droit international. En droit interne, on retrouve ce principe fondamental dans les textes contemporains de l’époque. D’abord dans l’article 8 de la DDHC de 1789 : « nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement aux délits et légalement appliquée. » Article 4 devenu aujourd’hui article 111-3 dans le nouveau code pénal : « nul ne peut être puni pour un crime ou un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi ». En droit international, ce principe est repris par la DUDH de 1948 et la convention européenne des droits de l’homme de 1950.

L’explication de la règle : les textes précités posent tous une seule et même règle selon laquelle « nul ne peut être poursuivi et sanctionné qu’en vertu d’une règle de droit préexistante à son acte ». Ce principe est particulièrement protecteur des libertés individuelles puisqu’il permet de prédéfinir les comportements illicites. Ce principe est également protecteur des éléments de la société car il tend à jouer un rôle préventif au regard de la délinquance et il apporte des garanties essentielles au fonctionnement de la justice pénale.

La délimitation de la règle : on peut remarquer que les textes précités font tous référence à la loi comme textes préalables définissant la sanction et l’infraction pénale, c’est d’ailleurs de là que le principe de la validité tire son nom. Cette garantie fondamentale est inhérente au bon fonctionnement de la justice pénale sachant que le droit pénal renferme de nombreuses règles attentatoires aux libertés individuelles de la personne poursuivie. En confiant au législateur le soin de prévoir quel comportement est constitutif d’une infraction pénale et en lui laissant le soin d’y attacher la sanction correspondante, on permet ainsi à la souveraineté populaire de prédéfinir les modalités de la réaction sociale. La loi n’a plus le monopole de la définition ni des infractions ni des sanctions pénales. Elle est concurrencée par d’autres textes pour ne pas dire d’autres sources normatives, tantôt au niveau externe, à tel point qu’il est préférable de parler de principe de textualité.

Critiques de la règle : ce principe de légalité représente une contrainte. Même si le principe est fermement ancré, force est de constater qu’il ne rencontre plus le même succès qu’il y a 2 siècles. En effet, les craintes de voir resurgir les abus pratiqués sous l’Ancien Régime se sont dissipées. Aujourd’hui, l’heure est plutôt à la critique. Sur le plan criminologique, on reproche au principe de légalité une trop grande rigidité. Certes, il invite le législateur à cerner avec précisions les contours d’un acte antisocial donné. Mais, il ne lui permet pas d’envisager toutes les manifestations possibles de cet acte.

Ex : le Happy Slapping ou « baffe joyeuse », il a fallu une intervention législative en 2003 pour incriminer ce comportement car elle ne correspond pas à l’infraction de coups et blessures volontaires. De même, le texte normatif ne se contente par d’ériger un comportement donné en infraction. Il prévoit également la sanction pénale correspondante. Et sur ce point aussi, une évolution est perceptible ces dernières années puisque, outre la sanction pénale encourue, le juge pénal se voit offrir une multitude de mesures au nom de la personnalisation de la peine. Sur le plan, technique, le principe de légalité ne permet plus de faire la différence entre des situations factuelles très voisines les unes des autres. En effet, en raison de l’inflation législative, on remarque que le législateur a de plus en plus tendance à réserver des incriminations distinctes pour des comportements qui sont très proches les uns des autres. Par exemple, en matière de trafic de stupéfiant, ce n’est pas une infraction globale. Plusieurs incriminations peuvent en découler.