Les procédures d’adoption des actes législatifs : L’intervention du triangle décisionnel
Le droit de l’Union européenne repose sur un système législatif complexe visant à prendre des décisions et à adopter des actes juridiquement contraignants. Au cœur de ce processus se trouve ce que l’on appelle le « triangle décisionnel », qui est constitué de trois institutions principales de l’Union européenne (UE) : la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne. Dans ce cours, nous allons examiner les différentes procédures d’adoption des actes législatifs au sein de l’UE, en mettant l’accent sur l’intervention du triangle décisionnel.
I. Les institutions du triangle décisionnel :
- La Commission européenne : La Commission européenne est l’institution qui propose de nouvelles législations au sein de l’UE. Elle est composée de commissaires désignés par les États membres et est chargée de représenter l’intérêt général de l’UE. La Commission européenne joue un rôle essentiel dans le processus législatif en initiant les propositions de législation et en veillant à ce que les traités et les politiques de l’UE soient respectés.
- Le Parlement européen : Le Parlement européen est l’institution législative directement élue par les citoyens de l’UE. Il représente les intérêts des citoyens européens et joue un rôle clé dans l’adoption des actes législatifs. Le Parlement européen examine les propositions législatives de la Commission européenne, les amende et les vote. Il participe activement aux discussions et aux négociations pour s’assurer que les intérêts des citoyens sont pris en compte.
- Le Conseil de l’Union européenne : Le Conseil de l’Union européenne est l’institution représentant les gouvernements des États membres. Il joue un rôle important dans le processus législatif de l’UE en coopération avec le Parlement européen. Le Conseil représente les intérêts nationaux des États membres et participe aux négociations sur les propositions législatives avec le Parlement européen.
II. Les procédures d’adoption des actes législatifs :
- La procédure législative ordinaire (ou procédure de codécision) : La procédure législative ordinaire est la procédure la plus couramment utilisée pour l’adoption des actes législatifs de l’UE. Elle implique la participation égale du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne. La Commission européenne propose une législation, qui est ensuite examinée et amendée par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne. Les deux institutions doivent parvenir à un accord sur un texte commun, qui est ensuite adopté comme acte législatif.
- La procédure de consultation : Dans le cadre de la procédure de consultation, la Commission européenne consulte le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne sur une proposition législative. Bien que le Parlement européen donne son avis
Le sujet est complexe : il existe différentes procédures législatives, le domaine d’application de chacune de ces procédures est non seulement variable (pour savoir quelle procédure s’applique il faut se référer à chaque disposition du traité) mais en plus ce domaine est fluctuant en fonction des traités.
Ces procédures font presque toujours intervenir la Commission, le parlement et le Conseil. Nous allons les distinguer en fonction des pouvoirs respectifs du Conseil et du Parlement dans l’adoption de la décision.
Section 1. Le point commun des procédures législatives : l’initiative de la Commission
L’exercice de la fonction législative est normalement subordonné à l’intervention initiale de la commission (la commission dispose du pouvoir d’initiative des actes de l’UE). C’est une des grandes différences entre les procédures législatives nationales et les procédures législatives de l’UE. Au sein des Etats membre nous retrouve peu ou prou le parlement ou le gouvernement.
Dans l’UE le parlement n’a pas (directement) le pouvoir d’initiative législative. Si les autres institutions (parlement et conseil) pouvaient amender, modifier l’initiative de la Commission, ce pouvoir d’initiative serait réduit à néant : ainsi, le droit d’amendement des institutions est encadré. Le conseil ne peut amender une proposition de la commission qu’à l’unanimité.
Dans la pratique ce quasi monopole s’est progressivement érodé parce qu’au fur et a mesure de l’augmentation des critique du déficit démocratique, il se trouve que cet accroissement des pouvoirs européens. +++++ Concrètement le parlement européen et le conseil ont obtenu un pouvoir de sollicitation de la Commission (ils peuvent demander à la Commission de leur proposer un acte : une «initiative de l’initiative». On ne sait pas si ce pouvoir de sollicitation est contraignant ou non, si la commission est obligée ou non de répondre positivement à cette sollicitation.
Le pouvoir d’initiative de la commission est encadré par différentes dispositions des traités : certaines dispositions imposent à la commission de proposer un acte dans un certain délai. À l’inverse, les traités encadrent et limitent ce pouvoir d’initiative par les principes du subsidiarité et de proportionnalité (ces principes limitent l’action de l’Union).
Le pouvoir d’initiative de la commission est concurrencé dans un certain nombre de domaine :
- • Dans le cadre de l’Union Economique et Monétaire (UEM), le pouvoir d’initiative appartient à la BCE.
- • Dans le cadre de la PESC, le pouvoir d’initiative appartient à la Commission mais aussi aux Etats membres.
- • La traité de Lisbonne à prévue une dernière dérogation à ce pouvoir d’initiative : il a crée un mécanisme d’initiative citoyenne. Il permet à 1 million de citoyen européen d’inviter la commission à agir, à proposer un acte dans un domaine de compétence de l’Union.
Le traité de Lisbonne distingue une procédure législative ordinaire et des procédures législatives spéciales.
Section 2. La procédure législative ordinaire (codécision)
Ce que le traité de Lisbonne désigne, c’est l’ancienne procédure qualifiée de co-décision, ce n’est pas une création ex-nihilo du traité. Ainsi, il s’inscrit dans le prolongement des traités antérieurs, nous assistons à une extension progressive du champs de cette procédure de co-décision.
A – Une extension progressive de son champ d’application
Le traité de Lisbonne n’a fait que la rebaptiser et l’étend de nouveau. L’origine de cette procédure est le traité de Maastricht. Cette dernière à permis de renforcer le caractère démocratique du processus décisionnel parce qu’elle attribue un véritable pouvoir législatif au parlement européen. Avant ce traité et avant la procédure de co-décision le parlement européen n’avais pas le dernier mot sur l’adoption des actes, le conseil pouvait passer outre son refus. Avec la procédure de co-décision l’adoption d’un acte nécessite l’accord du parlement et du Conseil.
Le traité de Maastricht n’avait mis en oeuvre cette procédure que de manière prudente, son champ d’application était limité. Les traités ultérieurs (Amsterdam, Nice, Lisbonne) ont eu pour effet d’étendre le champ d’application de cette procédure. Le traité de Lisbonne parachève cette évolution car la procédure de co-décision devient la procédure législative ordinaire, c-a-d qu’elle est utilisés dans à peu près 70 domaines d’intervention de l’Union. L’extension du champ d’application est toujours le reflet de la progression de la démocratisation du processus de décision (place le Conseil et le parlement européen sur un pied d’égalité).
B – Des modalités complexes Section
Distingue 3 phases, 3 lectures.
- La commission présente une proposition d’acte qui fait l’objet d’un avis du parlement européen (PE) qui est transmis au conseil
- Soit le conseil adopte l’acte tel quel
- Soit le conseil refuse d’adopter l’acte et auquel cas il va adopter une position renvoyer au parlement Européen.
- Deuxième lecture, le Parlement Européen dispose du plusieurs options
- Soit il approuve la position du conseil ou ne se prononce pas : l’acte est considéré comme adopté en 2e lecture
- Soit le Parlement Européen s’oppose : échec
- Soit le Parlement Européen peut proposer des amendements à la position du Conseil.
- 3e phases, les amendements sont transmis au Conseil.
- Le Conseil peut décider d’accepter les amendements : l’acte sera adopté
- Le Conseil peut s’opposer aux amendements : est dont réunis un comité de conciliation. Ce comité va être chargé de parvenir à un accord entre le Parlement Européen et le Conseil. Il est composé des membres des Conseils et d’un nombre égale du membre du Parlement Européen. Au terme des travaux de ce comité nous avons 2 possibilités :
- Soit le comité ne parvient pas à un accord : l’acte ne peut aboutir
- Soit le comité parvient à un compromis : ce compromis devra être avalisé par le Conseil et par le Parlement Européen.
- Si les 2 institutions refusent : échec de l’acte.
- Si les 2 institutions trouvent un accord : adoption de l’acte.
Il est rare qu’un acte soit définitivement rejeté.
- Les procédures législatives spéciales
Le traité de Lisbonne a laissé substituer des procédures qui existaient auparavant et qui constituent dorénavant les procédures spéciales. Le traité prévoit que dans certains cas les actes législatifs seront adoptés
- • Soit par le Conseil après approbation du Parlement Européen
- • Soit par le Conseil après consultation du Parlement Européen
- • Soit par le Parlement Européen après approbation du Conseil. Beaucoup plus rare que les précédents cas.
Cela nous fait 3 procédures législatives spéciales différentes.
Si le traité de Lisbonne a prévus des procédures spéciales c’est essentiellement car les Etats membres ont voulus préserver le pouvoir de décision du Conseil (donc leur pouvoir de décision) dans certain cas : pour éviter l’application de la procédure ordinaire qui place le Conseil et le PE sur un pied d’égalité.
A – La procédure consultative
À l’origine des traités, cette procédure était la plus importante quantitativement. Son champ d’application s’est progressivement réduit au fur et à mesure que le champ de la co-décision progressait. Ceci étant, la procédure de consultation conserve des ++ importantes en matière fiscale notamment. Cependant, même dans le cadre de cette procédure du consultation où les pouvoirs du PE sont restreints la Cour de Justice à déployé des efforts importants pour donner un maximum de poids à ce avis donné par le parlement. La cour de justice à imposé 2 choses :
- • Elle a imposé au Conseil de faire tout ce qui était en son pouvoir pour obtenir l’avis du parlement (le conseil doit laisser un certain délai au parlement avant de se prononcer)
- • La cour de justice a imposé l’obligation pour le conseil de consulter de nouveau de PE lorsqu’il entend adopter un acte qui est substantiellement différent de celui sur lequel le parlement avait été consulté.
B – La procédure de concertation
Elle est issue d’une déclaration commune du PE, du Conseil et de la Commission du 4 mars 1975.
Elle n’est pas issue des traités mais de la pratique, c’est un dérivé de la procédure de consultation : car la procédure de concertation permet lorsque le PE a rendu un avis contraire à l’adoption d’un acte de mettre en place une commission de concertation (membre du Conseil et du PE) qui sera chargée de rapprocher les point de vue du PE et du Conseil. Les résultats de cette procédure reste modeste car le Conseil garde le dernier mot dans l’adoption de l’action. Même si la commission de concertation n’est pas parvenue à un accord c’est au final le conseil qui décidera si l’acte doit être adopté ou non.
Cette procédure est marginale et s’applique plutôt dans les domaines financiers.
C – La procédure de coopération (pour mémoire)
Disparue ors que traité de Lisbonne. Elle donnait plus de pouvoir au PE parce que lorsqu’il y avait un désaccord entre le parlement et le conseil sur l’adoption d’un acte, le Conseil ne pouvait pas passer outre le désaccord du parlement qu’en adoptant l’acte à l’unanimité.
D – La procédure d’approbation (ex-avis conforme)
Cette procédure n’est pas une création du traité de Lisbonne mais a été crée par l’Acte Unique Européen. Cette dernière donne à l’avis qui est rendus un caractère contraignant : lorsque le Conseil sollicite l’avis du Parlement dans le cadre d’une procédure d’approbation et que le parlement s’opposer à l’adoption d’un acte le Conseil ne peut pas passer outre ce refus. La différence majeure avec la procédure de co-décision est que dans la procédure d’approbation le seul choix offert à l’institution de rejeter ou accepter l’acte et NON de l’amender. Elle est rarement utilisé pour des actes législatifs, elle est surtout mise en oeuvre pour l’approbation des adhésions et les ratifications de traité.
Section 3 – Le cas de l’ex-deuxième pilier (la politique étrangère et de sécurité commune)
Le traité de Lisbonne a exclue l’adoption d’acte législatif dans ce domaine. Dans le cadre de la PESC des actes sont adoptés mais ce ne sont jamais des actes législatifs. Cette adoption est exclus car le point commun de toutes ces procédures est de faire intervenir la Commission, le PE et du Conseil. Cela permet d’éviter la mise en oeuvre de procédure qui prévoit l’intervention conjointe de ces 3 institutions et de réserver dans ce domaine le pouvoir de décision au Conseil SEUL.