Les contrats réels

Les contrats réels

Les contrats réels se définissent comme ceux dont la formation implique non seulement l’accord des volontés mais aussi la remise de la chose qui fait l’objet du contrat. Tant que cette chose n’est pas remise, le contrat n’est pas considéré comme conclu. L’accord de volonté ne suffit pas à lui seul. Cette notion de contrat réel est un héritage de droit romain. Il est généralement considéré que cette notion a été reconduite par le Code Civil pour 3 types de contrats.

La raison en est que le code civil fait de la remise de la chose un élément de la définition de chacun de ces 3 contrats :

· Le prêt : cela concerne aussi bien le prêt à usage privé abordé à l’art 1975. C’est le prêt d’un corps certain (on prête sa voiture), mais cela concerne aussi le prêt de consommation visé à l’art 1892 qui est celui qui apporte sur une chose consomptible. (le prêt d’argent).

· Le dépôt défini par l’article 1919.

· Le contrat de gage (art 2073). C’est celui par lequel un débiteur remet un meuble à son créancier pour garantir le paiement de sa dette. Si le débiteur paye, le créancier devra restituer le gage au débiteur.

Dans ces 3 hypothèses on considère que le contrat n’est pas formé tant que la chose n’a pas été remise à celui qui pourra ou devra la restituer au dépositaire au préteur et ou au créancier gagiste.

A cette liste il faut ajouter un 4ème contrat non prévu par le code. C’est un contrat dont la validité est reconnue par la jurisprudence. La donation manuelle. La donation est solennelle. Il ne serait pas possible de contraindre une partie à passer devant le notaire pour le don de chose immobilière comme l’argent ou la bague de la grand-mère.

Pour cela la Jurisprudence admet la validité des dons manuels. Des donations qui s’effectuent par remise de la chose de main à main. Dans cette hypothèse cette remise est une condition de formation de la donation.

A. Justification de la catégorie des contrats réels

Il y a 2 justifications :

· Les contrats que l’on vient d’énumérer sont réels car la remise de la chose en est un préalable logique et nécessaire. L’emprunteur, le dépositaire ou le créancier ne sauraient être obligés à restituer la chose si celle-ci ne leur a pas été préalablement remise. Certains contrats ont pour préalable la remise d’une chose et qui pourtant ne sont pas considérés comme des contrats réels (le bail la remise du bien loué n’est pas une condition de formation du bail. Le bail est un contrat consensuel) le contrat de transport de marchandise : la remise de marchandise au transporteur n’est pas une condition de formation de ce contrat.

· La mise de la chose dans les contrats réels remplit le rôle, la fonction d’une formalité solennelle. La nécessité de remettre la chose permet d’attirer l’attention de celui qui doit se dessaisir de la chose sur les conséquences du contrat projeté. Cette explication est adaptée pour la donation manuelle.

La donation manuelle échappe à l’exigence de l’acte notarié car l’exigence tenant au dessaisissement du donateur remplit une fonction équivalente au passage devant chez le notaire.

Dans les deux cas la condition : on protège le donateur contre le risque d’un engagement irréfléchi, d’un engagement pris à la légère. Cette explication peut convenir également dans le cas du contrat de gage et dans le cas du contrat de prêt. En effet il est exigé que la chose soit remise protège le préteur et le débiteur dans le cas du contrat de gage contre le risque d’un engagement pris à a la légère. .

L’explication ne tient n’est pas valable en ce qui concerne le contrat de dépôt. En effet le déposant n’a aucune raison d’être protégé contre le risque d’un engagement pris à la légère. Par définition le contrat est fait dans le profit du déposant.

B. La promesse de contrat réel

Par définition le contrat réel n’est pas valablement conclu tant que la chose qui en est l’objet n’a pas été remise. Cependant il se peut que le contrat réel ait fait l’objet d’une promesse antérieure (le préteur a promis de prêter une chose à l’emprunteur, le débiteur a promis de remettre une chose en gage au créancier, le donateur a promis de donner une chose au donataire). La question qui se pose est la valeur de cette promesse de contrat réel. La promesse de contrat réel ne vaut pas contrat définitif. Si la promesse de contrat réel équivalait au contrat définitif. Le contrat ne serait plus réel mais consensuel. Cette solution étant exclu 2 solutions restent envisageables.

· La promesse de contrat réel n’a aucune valeur : c’est la solution adopté par la jurisprudence à l’égard de la donation manuelle.

· La promesse à la valeur d’un avant contrat : si le promettant se dérobe, c’est à dire ne donne pas suite à sa promesse, il peut être condamné à des dommages et intérêt pour réparer les préjudices subis par l’autre partie. Cet avant contrat ne vaut pas le contrat définitif, ce qui se traduit par le fait que le promettant ne peut pas être condamné à remettre la chose. C’est la solution adopté par la jurisprudence à l’égard des promesses de gage.

C. L’avenir des contrats réels

En règle générale les auteurs sont très critiques à l’égard de la catégorie des contrats réels. Les auteurs considèrent que la notion a sa place dans le cas de la donation manuelle. En effet dans la donation manuelle, il est évident que l’après remise de la chose protège le donateur. La JP a connu une évolution ressente qui va dans le sens d’une restriction. Cette évolution est relative au prêt d’argent. Traditionnellement la jurisprudence estimait que le prêt d’argent était un contrat réel. Elle en déduisait que la promesse de prêt d’argent ne valait pas prêt. Depuis un arrêt rendu le 28 mars 2000 cette solution ne s’applique plus au prêt consenti par un professionnel du crédit (par une banque). Depuis cet arrêt il est jugé que le prêt d’argent consenti par une banque n’est pas un contrat réel. Ce prêt est un contrat consensuel et donc synallagmatique. Pour expliquer cette évolution, on peut se reporter à l’idée selon laquelle dans un contrat réel on cherche à protéger le consentement de celui qui doit se dessaisir de la chose. Or le préteur professionnel du crédit n’a pas besoin d’être protégé contre le risque d’un engagement irréfléchi. Le préteur professionnel ne court pas de risque à prêter. Il fait commerce de l’argent en prêtant.