Les différents systèmes de parties : BIPARTISME / MULTIPARTISME / TRIPARTISME
Les systèmes de partis constituent un élément structurant des régimes politiques démocratiques. Ils influencent directement la stabilité institutionnelle, la formation des gouvernements et la participation des citoyens. On distingue principalement trois configurations majeures : le bipartisme, le tripartisme, et le multipartisme. Chacun de ces systèmes repose sur des facteurs spécifiques, tels que les clivages sociopolitiques et le mode de scrutin, et produit des effets différents sur les institutions.
Au-delà de cette diversité, la manière dont ces systèmes influencent la formation des majorités parlementaires et la gouvernance est cruciale. Le multipartisme, notamment, soulève des enjeux particuliers en raison de la diversité des forces politiques en présence.
I. Le bipartisme : deux partis dominants
Le bipartisme se caractérise par la domination de deux partis principaux, chacun ayant la capacité d’exercer seul le pouvoir. Il existe deux formes principales de bipartisme, en fonction de l’influence des partis secondaires sur le jeu politique.
1. Le bipartisme vrai
Dans un bipartisme vrai, seuls deux grands partis dominent complètement la scène politique. Les petits partis, bien qu’existants, n’ont qu’un rôle marginal et ne peuvent influencer ni la formation du gouvernement ni les politiques menées.
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- Exemples notables :
- États-Unis : Les Républicains et les Démocrates sont les deux seules forces politiques significatives.
- Tous les sièges au Sénat et à la Chambre des représentants reviennent à ces deux partis.
- Ce système est renforcé par le mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour, qui pousse les électeurs à adopter un vote utile en faveur des candidats susceptibles de gagner.
- Royaume-Uni : Les Conservateurs et les Travaillistes alternent au pouvoir, tandis que les petits partis, comme les Libéraux Démocrates, n’ont qu’une influence ponctuelle.
Le bipartisme vrai offre des avantages :
- Une grande stabilité institutionnelle, car un parti majoritaire gouverne seul.
- Une alternance claire entre les deux partis, simplifiant la lecture politique pour les électeurs.
Cependant, ce système peut limiter la diversité d’expression politique, en marginalisant les opinions minoritaires.
2. Le bipartisme approché
Dans un bipartisme approché, deux grands partis restent dominants, mais un petit parti, souvent appelé « demi-parti », joue un rôle clé en empêchant l’un des deux grands d’obtenir une majorité absolue.
- Exemple typique :
- Allemagne (jusqu’aux années 2000) :
- Les deux grands partis étaient la CDU/CSU (Union chrétienne-démocrate et sociale) et le SPD (Parti social-démocrate).
- Le FDP (Parti libéral-démocrate), petit mais indispensable, jouait un rôle d’arbitre en s’alliant à l’un ou l’autre selon les circonstances.
Dans ce modèle, le demi-parti bénéficie d’un rôle stratégique :
- Il peut monnayer son soutien en échange de concessions politiques ou de postes ministériels.
- Toutefois, ce rôle peut agacer les deux grands partis, qui peuvent alors décider de s’allier temporairement pour marginaliser le demi-parti (coalitions dites « contre-nature »).
3. Les fondements institutionnels du bipartisme
Le bipartisme, qu’il soit vrai ou approché, est souvent favorisé par des institutions spécifiques, notamment :
- Le scrutin majoritaire uninominal à un tour, qui limite la représentation des petits partis et pousse les électeurs à se concentrer sur les deux principaux candidats.
- Une tradition politique et culturelle valorisant la stabilité et la clarté des alternances.
En conclusion, le bipartisme, qu’il soit pur ou approché, se distingue par sa capacité à garantir une gouvernance stable et des alternances politiques claires. Toutefois, il peut limiter la représentation des petites formations politiques, ce qui suscite parfois des critiques sur la diversité démocratique.
II. Le tripartisme : trois partis majeurs
Le tripartisme, où trois partis d’importance comparable dominent la scène politique, est une configuration rare et souvent transitoire. Il découle généralement de clivages sociaux ou culturels qui structurent durablement l’électorat.
1. Caractéristiques du tripartisme
Dans un système tripartite, aucun des trois partis ne peut gouverner seul. Les coalitions deviennent donc nécessaires, mais elles sont souvent plus complexes à former que dans un bipartisme :
- Chaque parti doit évaluer ses alliances en fonction des compromis acceptables et des rapports de force.
- La répartition des portefeuilles ministériels ou la définition des priorités politiques demande davantage de négociations.
2. Exemples historiques et contemporains
- Belgique, Pays-Bas, Luxembourg : Ces pays ont longtemps connu un tripartisme basé sur des clivages religieux et idéologiques. Les trois partis principaux étaient :
- Les partis socialistes.
- Les partis démocrates-chrétiens (ou catholiques).
- Les partis libéraux.
- Ce système reflétait les divisions religieuses et culturelles (laïcs vs religieux) qui structuraient les sociétés.
3. Limites du tripartisme
Le tripartisme peut poser des défis arithmétiques et politiques :
- Les combinaisons nécessaires pour atteindre une majorité deviennent plus nombreuses, compliquant la formation des gouvernements.
- En l’absence d’accords solides, le risque d’instabilité politique augmente.
En raison de ces difficultés, le tripartisme tend à disparaître ou à évoluer vers des formes de multipartisme ou de bipartisme approché.
III. Le multipartisme : diversité et fragmentation
Le multipartisme est caractérisé par une pluralité de partis significatifs, reflétant une diversité d’opinions politiques. Il peut être divisé en deux formes principales : multipartisme pur et multipartisme corrigé.
1. Le multipartisme pur
Dans cette configuration, aucun parti ne domine réellement, et les forces politiques sont très fragmentées :
-
Plusieurs partis, souvent entre cinq et dix, disposent de poids similaires (10 à 20 % des voix chacun).
-
Les alliances nécessaires pour former une majorité sont nombreuses et complexes, conduisant à une grande instabilité.
-
Exemples :
- Quatrième République française :
- Avec un système proportionnel, les coalitions se succédaient rapidement, provoquant une instabilité chronique.
- Finlande : Le multipartisme y a longtemps créé des majorités composites, bien que le paysage politique se soit stabilisé récemment.
2. Le multipartisme corrigé (avec un parti dominant)
Le multipartisme corrigé est une forme plus structurée, où un parti dominant se détache nettement des autres.
-
Ce parti, souvent incontournable pour toute coalition, obtient environ 35 % des voix, avec une avance significative (10 à 15 points) sur son concurrent le plus proche.
-
Exemples :
- Suède : Les sociaux-démocrates dominaient pendant des décennies, souvent autour de 40 % des voix, rendant difficile toute opposition organisée.
- Italie (avant 1990) : La Démocratie chrétienne, située au centre du spectre politique, se maintenait au pouvoir grâce à l’absence d’alliance entre la gauche communiste et la droite conservatrice.
Dans ce système, le parti dominant peut :
- Soit gouverner en minorité avec des accords ponctuels.
- Soit s’allier à des partis plus petits pour former une majorité stable.
3. Les facteurs favorisant le multipartisme
Le multipartisme est souvent lié :
- À un scrutin proportionnel, qui favorise la représentation de petits partis.
- À une société politiquement, culturellement ou économiquement fragmentée, reflétant une pluralité d’intérêts.
4. Avantages et inconvénients
-
Avantages :
- Il offre une meilleure représentation des sensibilités politiques.
- Les gouvernements de coalition peuvent inclure plusieurs visions, favorisant des compromis.
-
Inconvénients :
- Il engendre une instabilité chronique, avec des alliances fragiles et changeantes.
- La fragmentation peut diluer la responsabilité politique, rendant les gouvernements moins efficaces.
En conclusion, le multipartisme, qu’il soit pur ou corrigé, reflète une démocratie pluraliste, mais il peut complexifier la gouvernance et nuire à la stabilité politique.
IV. Les implications des systèmes de partis sur les institutions démocratiques
Les systèmes de partis déterminent non seulement le fonctionnement des institutions, mais aussi les modalités de participation politique et l’efficacité des gouvernements. Ces implications varient considérablement selon la structure du système partisan.
1. Impact sur la formation des gouvernements
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Bipartisme :
- Simplifie la formation des gouvernements. Un parti majoritaire gouverne seul, et l’alternance se fait directement entre deux grandes forces.
- Exemple : Aux États-Unis, le président est presque toujours soutenu par une majorité au Congrès, même si des divergences peuvent apparaître entre les chambres.
-
Tripartisme :
- Nécessite souvent des alliances, qui, bien qu’assez stables, impliquent des négociations approfondies entre les trois partis principaux.
- Exemple : En Belgique, les coalitions tripartites sont courantes pour concilier les intérêts des partis socialistes, libéraux et chrétiens-démocrates.
-
Multipartisme :
- Dans le multipartisme pur, la fragmentation complique fortement la constitution de majorités, augmentant le risque d’instabilité.
- Dans le multipartisme corrigé, l’existence d’un parti dominant facilite la gouvernance en structurant les alliances.
- Exemple : En Italie, avant les années 1990, la Démocratie chrétienne, parti dominant, s’imposait comme le pivot des coalitions successives.
2. Conséquences sur la stabilité politique
- Les systèmes bipartites favorisent une stabilité durable grâce à des alternances claires.
- Le tripartisme peut produire des gouvernements stables, mais les négociations complexes entre trois acteurs peuvent générer des blocages ponctuels.
- Le multipartisme, surtout lorsqu’il est pur, est souvent associé à une instabilité chronique due à la volatilité des coalitions.
3. Rôle des électeurs dans le choix des gouvernants
Le type de système partisan influe directement sur le rôle de l’électorat :
- Dans un bipartisme, le vote a une valeur directe, les électeurs choisissant clairement entre deux visions de la gouvernance.
- Dans un multipartisme, le choix des électeurs peut être dilué, les coalitions se formant souvent après les élections. Cela peut générer une frustration liée à l’écart entre les promesses électorales et les compromis de gouvernement.
Le cours complet de droit constitutionnel est divisé en plusieurs parties :
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- Le préambule de la constitution de 1958 Le bipartisme, le multipartisme et le tripartisme Les formes de l’Etat (unitaire, fédéral, composé)