Le droit de la carte de paiement

Le cadre juridique de la carte de paiement :

Le législateur distingue deux cartes : carte de paiement stricto sensu et carte de retrait.

  • CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER ; L132-1 donne une définition de la Carte de paiement : toute carte émise par un établissement de crédit, ou par une institution et permettant à son titulaire de retirer ou transférer des fonds
  • Carte de retrait : toute carte émise par un établissement, une institution ou un service, mentionnés à L518-1 et permettant à son titulaire, exclusivement de retirer des fonds.

La carte de paiement est définie par la qualité de l’émetteur et par sa fonction.

  • Émetteur : Nécessairement un établissement de crédit ou l’un des organismes visés par L518-1 (Trésor public, Banque de France, services financiers de la Poste, de la caisse des dépôts et consignation …).
  • Fonction : Transférer ou retirer des fonds

Ici, il ne s’agit ni de la carte de garantie de chèque, ni de la carte de crédit au sens strict, permettant à leur titulaire d’obtenir une ligne de crédit, qu’il utilise à leur convenance (carte Kangourou).

La carte de paiement ne s’analyse pas en une carte de crédit, même lorsque le contrat prévoit un débit différé des opérations réalisées à l’aide de la carte.

Section I : Avantage et inconvénient de la carte de paiement :

Avantages :

pour l’émetteur : c’est un instrument dont l’émetteur facture le coût aux utilisateurs, le

porteur paye une cotisation annuelle et le fournisseur adhérant au système paye une commission proportionnelle à chaque opération.

Pour le fournisseur : grâce à la garantie de paiement dont elle est assortie.

Pour le porteur : elle assure les fonctions diverses que les autres instruments de

paiement n’assurent pas, retrait d’espèce, change, paiement à l’étrangers et assurances diverses.

Inconvénients :

Le principal est son exposition à la fraude : la fraude aux cartes de paiement augmente chaque année.

Pour y pallier, les réponses sont à la fois techniques : sophistication des cartes.

Mais aussi juridiques : le droit de la carte de paiement est un droit récent, c’est la loi du 30/12/1991, qui a posé les principales dispositions en matière de carte de paiement CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER ; L132-1 à L132-6.

Ce dispositif a été modifié par la loi 15/11/2001 sur la sécurité quotidienne.

Lorsque la loi ne régit pas la question, c’est le droit commun qui s’applique : le droit des contrats, notamment celui du contrat porteur et contrat adhérent.

Section II : le cadre juridique de la carte bancaire :

Deux contrats types encadrent l’opération du paiement par carte, élaboré par le groupement des cartes bancaires. Ce groupement est un GIE, crée en 1984, par les groupes concurrents : carte bleue et le groupe Eurocard-MasterCard.

L’intérêt du GIE est d’offrir aux consommateurs français, l’interbancarité, c’est à dire la possibilité d’utiliser n’importe quelle carte dans n’importe quel distributeur et auprès de tout fournisseur adhérant, peu important le banquier du fournisseur.

  • 1°)- Le contrat adhérent :

Le contrat adhérent est celui liant le fournisseur à l’émetteur. Il lie donc une banque à un professionnel qui adhère au système national des paiements par carte.

Ce professionnel peut être un commerçant, mais aussi une profession libérale.

Ce contrat comprend aujourd’hui deux volets :

le volet classique : adhésion au système de paiement de proximité.

le nouveau volet : adhésion au système de paiement à distance : paiement par correspondance, par téléphone, par terminal électronique pour lesquels la transaction est réalisée au moyen d’un numéro de carte de paiement.

A)- Obligations de l’adhérent :

Elles sont énumérées dans le contrat, mais trois obligations essentielles de l’adhérent :

– il s’engage à accepter le paiement par carte.

Mais le contrat prévoit que l’obligation peut faire l’objet de dérogations pour des paiements inférieurs à certaines sommes ou lorsque le fournisseur a des raisons légitimes de refuser le paiement (carte suspecte, vente de timbres fiscaux : pas de marge, mais il paye des frais).

– Le fournisseur s’engage à payer à l’émetteur une commission proportionnelle sur le montant des achats payés par carte.

Selon certains arrêts, un affilié qui adhère au réseau, mais encaisse lui-même les factures au lieu de les adresser à la banque, ceci pour éviter le paiement des commissions, commet une faute contractuelle justifiant la rupture de la convention.

– Le fournisseur s’engage à se conformer à certaines procédures de sécurité. Cette obligation se décline en deux types d’obligations :

  • Il s’engage à vérifier la régularité de la signature du porteur, la validité de la carte, la liste des cartes d’opposition.

Mais la généralisation des terminaux électroniques de paiement (TEP) dispense le fournisseur de procéder lui-même à ces vérifications, qui sont effectuées automatiquement par le terminal.

  • Il s’engage à s’équiper d’un matériel agréé par l’émetteur, généralement fourni par la banque. Le contrat prévoit la faculté pour la banque, d’imposer le changement de matériel en vue d’améliorer la sécurité du paiement par carte. Mais le fournisseur paye la location du matériel.

Mais l’émetteur doit mettre à la disposition des adhérents des terminaux de paiements fiables, qui sont à même de rendre compte des vérifications informatiques relatives au porteur et à son compte.

B)- Obligations de l’émetteur :

Le banquier émetteur s’engage à payer le fournisseur, à créditer son compte, au vu des factures ou des enregistrements présentés par le fournisseur.

Il s’engage aussi à prévenir les adhérents de toutes les oppositions qui pourraient être effectuées par les titulaires de la carte.

Cet engagement prend deux formes :

en deçà d’un certain montant conventionnellement garanti, l’engagement est ferme et définitif.

Il s’agit d’un engagement personnel et irrévocable de la banque.

L’absence de provision disponible sur le compte du titulaire de la carte n’a aucune incidence sur le paiement du fournisseur, ne permet pas de refuser le règlement.

Le montant conventionnellement garanti est défini par carte et par opération.

au-delà de ce montant, le banquier ne paye ne crédite le compte, que sous réserve d’encaissement.

Le contrat prévoit cependant, la faculté pour le fournisseur de demander une extension de la garantie conventionnelle.

Pour cela, dans une première étape, le fournisseur contacte le centre d’autorisation, qui vérifie que le montant de la transaction n’excède pas le plafond d’autorisation des dépenses, convenu entre le porteur et sa banque pour une période donnée, généralement de 30 jours glissants et le montant varie en fonction de la carte.

Si le seuil n’est pas dépassé, la garantie est étendue au montant de la transaction.

Dans une deuxième étape, si le seuil est dépassé, le centre interroge la banque du titulaire de la carte.

Si la banque autorise l’opération, la garantie est étendue au montant de la transaction.

Si la banque n’autorise pas, le commerçant peut accepter le paiement par carte, mais c’est à ses risques et périls, le banquier ne créditera son compte, que sous réserve d’encaissement, c’est à dire sous réserve que son propre compte soit crédité par le banquier titulaire de la carte.

  • 2°)- Le contrat porteur :

Le contrat porteur est celui qui lie le titulaire de la carte à son banquier.

Pour obtenir une carte, le client doit en faire la demande auprès de sa banque. Celle-ci examine le dossier, et accepte ou refuse de délivrer la carte.

En principe, la banque est libre dans ce choix, mais les cartes à autorisation systématique sont considérées comme faisant partie des services de base, que la banque doit offrir à ses clients, notamment lorsque la Banque de France, sur le fondement du droit au compte, enjoint la banque d’ouvrir un compte au client.

A)- Obligations du porteur :

– Le porteur s’engage à apposer sa signature sur la carte dès qu’elle lui est remise

Le porteur doit assurer la conservation de sa carte et de son code confidentiel, à défaut il engage sa responsabilité.

Taper le code confidentiel sur un terminal vaut signature et donc consentement et engagement et vérification de l’auteur.

– Le porteur s’engage à faire opposition en cas de perte ou de vol, dans les meilleurs délais.

Le contrat impose le délai, mais celui-ci ne peur descendre en dessous de deux jours francs à compter de la perte ou du vol.

– Le porteur s’oblige à vérifier l’existence sur le compte d’un solde suffisant et disponible au jour du débit, conventionnellement fixé.

– Le porteur s’engage à payer une cotisation forfaitaire annuelle, prélevée directement sur son compte.

Les conventions-types prévoient que le non-respect des obligations imposées au titulaire de la carte implique la résiliation du contrat et la restitution de la carte à l’émetteur. En cas de refus, il y a abus de confiance, le contrat-type stipulant que la carte reste la propriété de la banque.

Le titulaire de la carte, qui lui remise à titre de prêt à usage, ce qui l’expose en cas de non-restitution, à une poursuite pour abus de confiance

Il y a aussi une obligation de solidarité entre le titulaire de la carte et celui du compte bancaire. La question de la solidarité est susceptible de se poser dans deux cas.

Celui de la carte dite de société établie au nom d’une personne physique et dont les dépenses sont réglées par le débit du compte d’une personne morale.

Le second cas de solidarité résulte de la conjonction de la solidarité active découlant de la convention de compte joint cet de la solidarité passive découlant du contrat-type : les co-titulaires d’un compte joint sont solidairement tenus des conséquences financières résultant de la responsabilité du titulaire de la carte au titre de son utilisation et de sa conservation.

B)- Obligations de l’émetteur :

Le banquier s’engage à payer au nom et pour le compte du porteur au vu des enregistrements et factures transmis par les fournisseurs.

Avant de payer, le banquier doit vérifier éventuellement la conformité de la signature qui figure sur la facture, avec son spécimen.

Il doit aussi vérifier la régularité formelle et apparente de la facture.

Le contrat peut mettre d’autres obligations à la charge du porteur ou du banquier.

Mais il s’agit d’un contrat de consommation, soumis aux dispositions du Code de la Consommation, notamment L132-1 sur les clauses abusives, ce qui limite la possibilité pour le banquier d’aménager en faveur le contrat type.

L’émetteur doit aussi respecter certaines stipulations des contrats de carte.

Ex : le contrat Amex permet à l’émetteur de refuser au vendeur payé par carte, l’autorisation de règlement de la somme si la dépense « revêt un caractère anormal ou inhabituel ».

Cette clause est justifiée puisqu’elle protège à la fois l’émetteur et le titulaire de la carte.

Cour de cassation : cette clause constitue une obligation de vérification à la charge de l’émetteur.

Elle a considéré que l’émetteur aurait dû procéder à une vérification lors de la présentation d’une demande de règlement d’un montant particulièrement élevé au regard des mouvements du compte, ce qui aurait permis de bloquer une opération frauduleuse dans laquelle le commerçant d’un pays touristique avait très fortement majoré le prix d’un achat, libellé en monnaie locale.