Le complice d’une infraction pénale

La complicité en droit pénal.

La criminalité se manifeste de plus en plus part des activités organisées. Les bandes sont généralement hiérarchisées. Il y a tout d’abord les instigateurs puis les exécutants matériels ou encore les comparses qui vont fournir les renseignements. Pour des raisons de sécurité juridique, le droit pénal interne s’attache essentiellement à l’exécution matérielle de l’acte. Auteur de l’acte = toujours l’auteur matériel. Sont complices tous ceux qui participent à l’infraction sans en exécuter matériellement les actes constitutifs.

L’auteur matériel et le complice se situent sur des plans différents. Le plus visible = action de l’auteur matériel, celle du complice est moins visible. Complice = instigateur ou comparse. Il est plus ou moins punissable selon ce statut. La sanction du complice peut être à la hauteur de celle de l’auteur principal. Il faut déterminer quand le complice est punissable. Ch Crim 17 décembre 2002 (droit pénal 2003 commentaire 44) : il s’agissait de poursuites pour un délit de discrimination. Délibération d’un conseil municipal qui octroyait une subvention pour toute naissance dont un des parents est français. Le maire est absent le jour de la délibération du conseil. Donc il ne peut être reconnu comme auteur principal. Il a été déclaré coupable de complicité car il s’était félicité de la prise de décision.

1.La détermination de la complicité punissable.

L’art 127-7 Code Pénal prévoit deux formes distinctes de complicité :

  • -la complicité par aide et assistance ;
  • -la complicité par instigation.

Mais dans les deux formes on retrouve les mêmes trois éléments nécessaires pour que le complice soit punissable.

1° —> constat d’un acte matériel exécuté personnellement par le complice (mais pas l’infraction elle-même), en sachant qu’il participe à l’infraction.

2° La conscience de participer à l’infraction.

3° Le complice n’est punissable que si l’acte principal est punissable. Le plus compliqué.

  • 1. L’acte matériel exécuté personnellement par le complice.

Art 127-7 alinéa 2 du Code Pénal —> complicité par instigation (celui qui pousse à commettre une infraction) ou fourniture d’instructions. Pour qu’elle constitue, l’action doit être suffisamment précise, de simples conseils sans détails ne pourraient pas constituer un acte de complicité. La provocation doit être accompagnée de dons, de promesses, de menaces, d’ordres, abus d’autorité et de pouvoir. La provocation doit porter sur l’infraction. Exemples jurisprudentiels avec l’arrêt du 18 mars 2003 : est coupable de complicité de violence aggravée, le passager d’une voiture qui incite le conducteur à porter atteinte à l’intégrité physique d’un gendarme en disant « fonce, fonce ne t’arrête pas ». Arrêt du 6 juin 2002 : délit de mise en danger d’autrui en disant au chauffeur de griller le feu rouge.

Art 127-7 alinéa 1 Code Pénal —> fait de faciliter la préparation (avant) ou la consommation (pendant) d’une infraction par aide ou assistance. Il n’y a pas d’acte de complicité postérieur à l’infraction sauf en cas d’accords antérieurs car alors c’est un encouragement à la commission de l’infraction. Exemple de l’arrêt du 4 mai 2000 CH CRim : permission de sortie de prison et l’individu ne rentre pas avec utilisation d’un tiers pour faciliter sa fuite. Celui-ci est-il complice ? La Cour de Cassation considère qu’il s’agit d’un délit instantané entièrement consommé = à l’heure de la fin de permission de sortie, toute aide postérieure n’est pas punissable comme complice. Le ministère public ne pourra prouver qu’il y avait accord préalable.

  • 2. L’élément intentionnel.

Il s’agit de l’intention de la part du complice de participer à l’infraction, c’est-à-dire le fait de commettre l’acte matériel de complicité en connaissance de cause.

Loi de janvier 2007, celui qui enregistre une image d’une infraction:

  • Al 1: le fait d’enregistrer sciemment des images relatives à des atteintes volontaires à l’intégrité de la personne est constitutif d’un acte de complicité. Cela n’était pas le cas auparavant.
  • Al 2: la diffusion des images est une infraction autonome car elle est postérieure à l’agression: elle est punie de 5 ans de prisons et 75 000 euros d’amende.

L’art 121-7 Code Pénal emploie l’expression « sciemment », c’est-à-dire ayant connaissance du projet délictuel. La recherche de cette condition est plus importante en ce qui concerne la complicité par aide ou assistance car l’individu peut commettre l’acte matériel sans le savoir. En revanche, dans l’instigation par provocation ou fourniture d’instructions, par hypothèse la personne la fait directement pour l’infraction, c’est-à-dire en connaissance de cause. Les actes d’instigation comprennent en eux-mêmes l’intention de participer à l’infraction (mais l’élément de l’intention est tout de même exigé).

Doit-il y avoir correspondance exacte entre l’acte commis par l’auteur principal et l’acte initialement prévu avec le complice ?

Exemple : Le complice qui donne des indications sur la façon de pénétrer dans un bâtiment quand le propriétaire est absent. Ce dernier est présent et l’auteur principal panique et commet des violences sur celui-ci. Y-a-t-il complicité d’un vol simple, c’est-à-dire de ce qui rentre dans le projet de cambriolage, ou complicité de l’acte effectivement commis, peu importe qu’il n’y est pas de correspondance ? La jurisprudence n’exige pas une correspondance exacte. Elle sanctionne le complice comme complice, des actes effectivement commis, à condition que le complice ait eu connaissance des éléments principaux du projet. Justification : le projet criminel est amené à être modifié dans son exécution et le complice prend le risque d’encaisser pour ce va effectivement se passer. Cependant, si l’exécution du vol se termine par un meurtre, on peut dire qu’il y a dénaturation du projet et le complice n’encaissera que pour le vol et non pour le meurtre, qui n’était pas prévisible. Ce sera le cas quand le complice n’a fait que fournir les plans, alors que s’il fournit une arme à l’auteur principal, il sera tenu complice du meurtre, même s’il n’était pas question de meurtre dans le projet. Le ministère public peut toujours dire qu’il n’y a pas eu modification du projet. Il n’y a pas de solution sûre dans ce domaine. En tout état de cause, dans le montant de la peine il sera tenu compte de la prévisibilité de ce qui s’est effectivement passé —> individualisation de la peine prononcée par rapport à la peine encourue. Il est toujours possible de plaider qu’il y avait un projet et deux actes matériels d’exécution, le complice étant étranger au deuxième acte.

  • 3. L’existence d’un fait punissable.

Cette infraction principale doit être un crime ou délit dans la complicité par aide ou assistance. Il ne peut donc pas y avoir de complicité par aide ou assistance d’une contravention. Exemple : pour le tapage nocturne, si un individu prête un instrument à un ami en sachant qu’il fait une fête et qu’il va jouer toute la nuit, il n’y a pas acte matériel de complicité.

En revanche, il peut s’agir d’un crime, délit ou contravention dans la complicité par instigation. Exemple : Le patron d’un chauffeur de taxi qui lui demande de ne pas respecter le quota d’heures de conduite. On dit que le complice se raccroche à la criminalité de l’auteur principal, on parle de criminalité d’emprunt.

Ch.crim. 25 nov.1962 (Dalloz 1963 p.221), Affaire Lacour

Un docteur veut se débarrasser de son beau-fils. Il paie un tueur à gage en lui donnant toutes les instructions. Il y a acte matériel de provocation et volonté de participer à l’infraction. Le tueur ne tue pas le beau-fils et va dénoncer le docteur. Celui-ci est poursuivi et acquitté car il n’y avait aucun acte principal punissable puisque le tueur n’avait même pas essayé de tuer. L’acte est trop loin de l’acte principal projet. Il n’y a pas eu le moindre trouble, même si il y a une dangerosité sociale. Par sécurité juridique, on ne sanctionne que lorsqu’il y a trouble à l’ordre public.

Peut être sanctionné, non seulement un acte consommé (acte qui va jusqu’au bout du projet) mais aussi l’acte seulement commencé, au titre de la tentative. La complicité d’une tentative est elle-même punissable puisque la tentative elle-même est un acte principal punissable. Mais la tentative de complicité n’est pas punissable puisque l’acte principal n’est pas commis. Ch.crim. 5 mais 1998 (commentaire n°110)

Pour qu’il y ait évasion, il faut une infraction. Il s’agit du cas d’u détenu qui s’échappe d’un fourgon laissé ouvert. Il n’avait pas la permission de sortie mais était juste mal surveillé. Comme il n’y avait pas d’infraction pénale, le tribunal déclare qu’il n’est pas coupable d’évasion. Une fois qu’il est parti, il rencontre quelqu’un qui l’aide de détacher ses menottes. Cette personne est poursuivie pour complicité d’évasion. Elle a été relaxée pour deux raisons :

  • -puisqu’il n’y avait pas de délit d’évasion, il n’y avait pas d’acte principal punissable ;
  • – de plus, l’acte d’aide est postérieur à l’infraction.

Cas de complicité d’une tentative, donc cas où punissable :

Ch.crim. 6 sept. 2000 (droit pénal 2001 commentaire n°50)

Un individu essaie d’empêcher un expert judiciaire de rendre un rapport exact, afin de tromper un tribunal pour obtenir quelque chose. Forme d’escroquerie. En l’espèce, l’expert s’est rendu compte de la manœuvre et dénonce l’individu. Il y a tentative d’escroquerie punissable. Or l’individu avait agit sous les instructions de son employeur. —> Acte principal punissable et début de trouble à l’Ordre Public. L’employeur est coupable de tentative d’escroquerie. Si l’employeur avait refusé de tromper l’expert, il n’y aurait pas eu d’acte principal et donc l’employeur n’aurait pas été coupable. Notion de tentative : modalité d’exécution de l’infraction où l’auteur principal ne va pas jusqu’au bout de l’infraction. L’acte matériel suffit pour l’acte principal.

2.La répression de la complicité.

En vertu de l’art 121-6 Code Pénal, le complice est puni comme auteur, la peine encourue étant la même. Il y a une indifférence entre le complice et l’auteur principal. Ce qui ne signifie pas que la peine prononcée sera le même. Deux raisons :

– Seulement le maximum encouru est semblable. Dans cette limite, le juge prononce la peine qu’il veut. Le complice sera toujours mieux traité. Tout dépend des circonstances de l’entreprise criminelle et des personnalités du complice et de l’auteur principal (par exemple, la qualité de récidive joue).

  • Même le maximum encouru ne sera pas toujours identique pour l’auteur principal e le complice, car les causes légales d’aggravation ou d’atténuation de la peine peuvent être distinctes pour l’un et l’autre.

Il existe une distinction entre cause réelle et cause personnelle d’aggravation :

  • Les causes réelles tiennent aux circonstances de l’infraction. Les causes légales réelles d’aggravation de la peine s’appliquent au complice même s’il ne les avait pas prévues, car il a pris le risque de leur existence en participant à l’entreprise criminelle.
  • Les causes personnelles tiennent pour la plupart à une qualité de l’auteur de l’acte. Un exemple de cause personnelle d’aggravation : le législateur a prévu que dans certains cas, l’état de récidive est une cause d’aggravation de la peine encourue. Cause personnelle d’atténuation : entre 13 et 18 ans, les mineurs peuvent être déclarés responsables pénalement, en quel cas ils bénéficient d’une atténuation légale de la peine encourue. Les causes personnelles d’aggravation et d’atténuation s’appliquent de façon distributive à l’auteur et au complice car elles sont étrangères à l’entreprise criminelle. Et ne concernent que la personne. Exemple : le lien de parenté —> lors d’une infraction sur un membre de la famille, il y a circonstances aggravantes. L’aggravation ne s’applique qu’aux récidivistes.