Le concours réel d’infractions

LE CONCOURS RÉEL D’INFRACTIONS

Il y a concours réel d’infractions »lorsqu’une infraction est commise par une personne avant qu’elle n’ait été définitivement condamnée pour une autre infraction »(Code pénal, article 132-2).

A La notion de concours réel d’infractions dans le code

Partons tout d’abord de la notion qui est dans le code, la notion de concours d’infraction, et disons qu’elle va recouvrir en jurisprudence des situations très variées au plan des faits :

Le jeune délinquant compulsif qui se voit reprocher et comparaît pour les vingt deux vols d’auto radio et les huit dégradations qu’il a commis dans les soixante douze dernières heures, l’escroc qui vient de comparaître pour une infraction et qui, pendant le délibéré, s’en va commettre une filouterie d’aliments à la « brasserie du palais », le conducteur d’un véhicule qui cause un accident et prend la fuite, le patron qui ne tient pas le livre de paie et emploie clandestinement un salarié.

Tous ces cas ont un point commun : « une infraction (ou plusieurs) a été commise par une personne avant que celle-ci ait été définitivement condamnée pour une autre infraction » et c’est la définition très large que donne le code pénal du concours d’infractions à l’article 132-2. Notons tout de suite au travers des exemples que je vous ai donnés que ces infractions peuvent être jugées ensemble ou séparément, dans un ou plusieurs tribunaux.

Le législateur a dit « concours d’infractions » ; il est resté prudemment à l’écart des discussions doctrinales et n’a pas parlé de concours réel ou de concours idéal. Il a donné une définition du « concours d’infractions » très simple, très large et il a ensuite défini un régime juridique pour ces concours d’infractions. Et c’est à la Jurisprudence de préciser ce qu’elle fait entrer dans cette définition car le problème reste entier : quand y a t-il deux infractions plutôt qu’une seule comme dans les cas que nous venons de voir ?

B En Jurisprudence, la notion de concours d’infractions en cas de pluralité de faits

En jurisprudence la notion de concours d’infractions recouvre donc :

1) des infractions multiples, identiques ou différentes, mais consistant en des actes susceptibles d’être appréhendés séparément. Ils peuvent avoir été commis en des temps ou des lieux différents ou surdes victimes différentes.

2) une action délictueuse qui forme un ensemble homogène mais qui est matériellement divisible en plusieurs infractions et chaque qualification peut s’appliquer à des faits bien circonscrits, distincts les uns des autres.

Les exemples sont nombreux. Ici, au contraire de ce qu’on a vu tout à l’heure, on n’estime pas illogique de poursuivre les deux infractions, même si la seconde pourrait sembler aussi la suite logique de la première ou si l’une des infractions peut sembler incluse dans l’autre. La jurisprudence ne voit pas les choses de cette façon, et poursuit les deux infractions estimant que les faits sont constitutifs de deux infractions dont les éléments constitutifs sont bien distincts.

Exemple : défaut de maîtrise d’un véhicule et délit de fuite, Crim. 18 mars 1992 B119

Autres exemples :

Blessures volontaires et omission de porter secours, 24 juin 1980 B202, Blessures involontaires et omission de porter secours

Enlèvement de mineurs et séquestration, 21 fév. 197 B 80 Détournement d’aéronef et prise d’otage, 22 nov. 1983 D1984 IR227 L’usage de documents obtenus indûment et le recel 26 avril 1983, B 117

Travail clandestin et non tenue d’un livre de paie 7 avril 1994 Dt pénal n° 220

Dans tous ces cas on peut estimer qu’on est en présence de concours d’infractions qui sont des concours réels, des concours matériels d’infractions dans lesquels on a des faits distincts sur lesquels on applique des qualifications distinctes. A quoi aboutit-on en termes de répression ?

C Régime du concours d’infractions

Que tous ces faits soient jugés ensemble ou séparément, une chose est claire : il y a autant de déclarations de culpabilité que d’infractions retenues.

C’est au niveau des peines que cela se complique.

Sans entrer dans le détail, disons qu’il y a plusieurs systèmes possibles : – le non cumul des peines,

-à l’opposé, le cumul illimité,

-entre les deux un système d’aggravation de peines mais sans cumul illimité.

-et encore un autre système, l’application possible des peines les plus fortes.

Le droit pénal français a évolué du principe de non cumul des peines vers l’application des peines les plus fortes.

  • 1 En cas d’unicité de procédure

En cas d’unicité de procédure : on peut prononcer chacune des peines encourues de même nature dans la limite du maximum le plus élevé en cas de concours de qualifications criminelles et /ou délictuelles et toutes les peines encas de concours de qualifications contraventionnelles.

Exemple : le prévenu est poursuivi pour deux délitsqui l’un et l’autre lui font encourir une peine d’emprisonnement (5 ans l’u n et 3 ans l’autre) et une peine d’amende (5000 euros l’une et 10 000 l’autre) . On va pouvoir le condamner pour ces deux infractions ensemble, à une peine d’emprisonnement et une peine d’amende et on ne peut aller pour l’un e et l’autre qu’au maximum encouru pour la plus forte des sanctions de chaque nature, la plus forte des peines d’emprisonnement 5 ans et la plus forte des peines d’amende 10 000 euros même si ces deux peines sont chacune attachée à une des deux infractions et non à la même.

  • 2 En cas de pluralité de procédure

En cas de pluralité de procédure, on va cumuler les peines dans la limite du maximum légal encouru pour l’infraction la plus sévèrement sanctionnée, avec une confusion possible des peines de même nature prononcées sauf les contraventions.

Exemple : quelqu’un est condamné à trois ans pour abus de confiance et à 9 ans pour extorsion, par deux tribunaux différentsà quelques jours d’intervalle la première condamnation n’étant pas définitive lorsque la seconde survient, il exécutera dix ans, maximum encouru pour l’extorsion qui est l’infraction la plus sévèrement sanctionnée. Mais il aura possibilité d’obtenir aussi une confusion totale ou partielle entre les 9 ans et les 3 ans de sorte que la peine d’emprisonnement au total peut être ramenée à 9 ans.