Le contrôle de légalité des actes administratifs par la juridiction pénale

LES ACTES ADMINISTRATIFS SOUMIS AU CONTRÔLE DU JUGE PÉNAL

Les juridictions pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité. Cela n’a pas toujours été le cas.

  1. avant le nouveau code pénal

La jurisprudence avait marqué de très nombreuses hésitations sur la nature exacte des actes susceptibles de donner lieu à un contrôle de légalité par les juridictions pénales. Pour le tribunal des conflits, seuls les actes réglementaires pouvaient donner lieu à un tel contrôle, mais pas les actes individuels. Pour la chambre criminelle, la solution était différente, et les actes individuels entraient dans le champ du contrôle à la condition qu’ils soient clairs. Encore doit on ajoute que la jurisprudence semblait hésitante et qu’elle avait semblé revenir en 1993 à la solution du tribunal des conflits.

Autre hésitation de cette Jurisprudence, l’objet de l’acte. La chambre criminelle avait semblé limiter le contrôle aux seuls actes constituant le fondement de l’incrimination, excluant donc du contrôle les actes administratifs invoqués comme moyen de défense. Elle avait semblé évoluer vers une conception plus large du contrôle dans les dernières années.

  1. l’extension du contrôle par le nouveau code

L’article 111-5 du nouveau code a clarifié et simplifié la question dans lesens d’une conception plus large du pouvoir de contrôle des juridictions pénales. « Les juridictions pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis. »

Sont donc visés tous les actes administratifs unilatéraux, réglementaires ou individuels. A priori, les contrats sont exclus du contrôle, et c’est la solution qu’a donné la cour de cassation en 1995 (Crim. 25 sept. 1995 ; Bull. Crim. n° 279).

Seuls les actes administratifs, réglementaires ou individuels, entrent dans les prévisions de l’article 111-5 du Code pénal

C’est, dès lors, à tort que le juge répressif se fonde sur ce texte pour apprécier la validité d’un contrat administratif (décision rendue en matière de pompes funèbres).

A propos du même contentieux, la cour a, en 1997,approuvé une cour d’appel d’avoir apprécié la régularité de la constitution d’une régie municipale ; La limite ne sera pas toujours simple compte tenu de l’articulation entre acte unilatéraux et contrats.

Les limites antérieures ont donc disparu :

-il peut donc s’agir d’un acte individuel,

-il importe peu qu’il soit clair ou qu’il nécessite une interprétation

-il peut tout aussi bien être invoqué en défense equ constituer le fondement des poursuites.

On a ainsi pu exciper de l’illégalité :

-d’actes individuels comme une assignation à résidence, le refus d’un maire d’autoriser un bal public, un arrêté d’expulsion, un refus de remise de permis de conduire etc.

– d’actes administratifs réglementaires dont dépendaient la solution d’un procès pénal, comme ceux qui, sur renvoi d’un article du code de la santé publique, précisent la liste des plantes et substances classées stupéfiants.

Une limite subsiste

C’est celle qui est formulée par le texte : « lorsque, de cet examen,dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis ».

Sens de cette limite : l’examen de la légalité d’un acte, même lié aux motifs des poursuites, peut très bien n’avoir aucune incidence sur le litige pénal. (Crim 5 oct. 1989 B. n° 467). Une décision de refus de licenciement d’un délégué du personnel par un inspecteur du travail peut bien être illégale, cela ne rend pas pour autant la décision de licenciement justifiée, et si l’infraction consiste à licencier sans autorisation, cette illégalité du refus ne fait pas disparaître l’infraction.

La chambre criminelle semble par ailleurs considère que le juge pénal ne peut étendre son contrôle à un acte étranger au procès mais dont la légalité est liée à celle d’un autre acte dont dépend la solution du procès. Crim 3 juin 1998 B n° 182