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Le droit d’alerte des délégués du personnel

Le droit d’alerte des délégués du personnel 

 L’élection d’un délégué du personnel est obligatoire dans toute entreprise dont l’effectif est d’au moins 11 salariés. Ses attributions sont définies spécifiquement par le Code du travail.

Aux termes des articles L.2313-1 et L.2313-2 du Code du travail, le délégué du personnel a pour principales missions :

  • De présenter à l’employeur les revendications, aussi bien individuelles que collectives, des salariés concernant les salaires et l’application du droit du travail dans l’entreprise ;
  • De saisir l’employeur s’il constate une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique ou mentale ou aux libertés individuelles. C’est notamment le cas en matière de harcèlement sexuel ou moral, ou encore de discrimination ;
  • De saisir l’inspection du travail de toutes plaintes et observations relatives à l’application de la législation du travail. Il peut également, s’il le souhaite, accompagner le contrôleur du travail lors de sa visite au sein de l’entreprise ;
  • D’assister, sur le fondement des articles L.1232-4 et L.1332-2, les salariés lors de leur entretien préalable au licenciement ou à une sanction disciplinaire.

 Nous étudierons ici le droit d’alerte.

 

A. La notion de droit d’alerte 

Les délégués du personnel ont une mission générale au terme de laquelle ils doivent veiller au respect des droits de la personne et des libertés individuelles dans l’entreprise.

 Ainsi dans le cadre de la protection des libertés individuelles des salariés, et de la lutte contre la discrimination, les délégués du personnel bénéficient d’une arme appelée le droit d’alerte.

 Ce droit d’alerte est régi par les dispositions de l’article L422-1-1 du code du travail, qui prévoit que si un délégué du personnel constate directement ou par l’intermédiaire d’un salarié qu’il existe dans l’entreprise une atteinte au droit des personnes à leur santé physique ou mentale ou aux libertés individuelles qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnées au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur.

 Dans tous ces cas, le délégué  du personnel dispose du droit d’alerte qui lui permet d’informer l’employeur, de l’alerter et de lui demander que cesse immédiatement le trouble.

 

 B. Les situations justifiant du droit d’alerte 

  Les situations visées dans les dispositions de l’article L422-1-1 du code du travail, sont très larges et englobent notamment (liste n’est pas limitative) les mesures discriminatoires en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de promotion professionnelles, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.

 

Il est important de préciser que le droit d’alerte peut être mis en œuvre aussi bien en cas de harcèlement moral que sexuel.

 La cour de cassation a été contrainte d’apporter certaines précisions afin d’éviter ou de limiter les dérives éventuelles. Ainsi dans un arrêt du 26 mai 1999, la chambre sociale de la cour de cassation a précisé que le délégué du personnel peut également utiliser la procédure du droit d’alerte en cas de discrimination à son égard.

 Dans un arrêt du 10 décembre 1997, la chambre sociale de la cour de cassation a considéré que le délégué du personnel peut également faire usage du droit d’alerte pour réclamer le retrait d’éléments de preuve obtenus par l’employeur au moyen de méthodes frauduleuses qui constituent une atteinte au droit des personnes et aux libertés individuelles.

 Mais en revanche, le délégué du personnel ne peut pas utiliser le droit d’alerte pour agir en nullité du licenciement prononcé par l’employeur à la suite d’une atteinte au droit des personnes ou aux libertés individuelles, car la contestation du licenciement n’est pas un droit collectif mais un droit individuel propre à chaque salarié.

 Enfin dans un arrêt du 3 février 1998, la chambre sociale de la cour de cassation a considéré que le délégué du personnel ne peut pas faire usage de son droit d’alerte pour réclamer le paiement d’arriéré de salaires ou d’heures supplémentaires.

 

C. Les conditions de mise en œuvre du droit d’alerte 

  • La première étape est constituée par la constatation d’une atteinte au droit des personnes, que cette constatation soit faite par le délégué du personnel en personne ou qu’elle soit faite par un salarié de l’entreprise qui en informe le délégué du personnel.

 Dans ce cas-là dès la constatation des faits, le délégué du personnel doit en informer immédiatement l’employeur.

  • La seconde étape oblige l’employeur de procéder immédiatement et sans délai à une enquête avec le délégué du personnel. Ensuite et simultanément au démarrage de l’enquête, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour que cesse le trouble.

 En cas de carence de l’employeur ou en cas de divergence (plus fréquent) sur la réalité de la discrimination et si aucune solution ne soit trouvée avec l’employeur, le délégué du personnel ou le salarié concerné par le trouble peut saisir directement le bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui statuera alors en urgence.

  • Dernière étape, si le conseil de prud’hommes est saisi, il pourra ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette discrimination ou le trouble et assortir sa décision d’une astreinte (somme d’argent par jour de retard dans l’exécution de l’obligation à laquelle est condamner une partie si elle n’exécute pas l’obligation mise à sa charge dans le délai qui lui est imparti. Ceci permet de contraindre la partie de s’exécuter).

 Ce droit d’alerte ne reste pas cantonner dans la théorie du droit du travail, c’est quelque chose qui est utilisé pas de manière fréquente mais qui est souvent utilisé pour contraindre l’employeur à entamer un dialogue avec les salariés plus exactement leurs représentants.

Isa Germain

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