Le droit de propriété

 Le droit de propriété

Le droit de propriété est défini à l’article 544 du Code civil comme le droit d’user, de jouir et de disposer de la chose de la manière la plus absolue pourvu que l’on n’en fasse pas un usage contraire aux lois et aux règlements. Par ailleurs, la déclaration de 1789 précise que le droit de propriété est un droit inviolable et sacré. A l’heure actuelle, c’est un droit constitutionnel.

1° Les prérogatives du propriétaire

  1. Les caractères du droit de propriété

a.1 Le caractère exclusif


Cela signifie que le titulaire du droit de propriété peut utiliser seul son bien. Il existe des limites comme les servitudes de passage, de même, certaines législations (ex : en Suisse on oblige les propriétaires de forêt à laisser les gens aller librement).

a.2 Le caractère perpétuel


Cette affirmation repose sur deux principes :


– la propriété ne s’éteint pas par le non-usage. En effet, lorsqu’un propriétaire n’utilise pas son bien en aucun cas on ne peut lui prendre ou lui reprendre ce bien. Toutefois, si un tiers vient profiter de la négligence ou de l’absence du propriétaire et utilise à son tour le bien, au bout de trente ans, ce bien est à lui. En conséquence, le droit de propriété n’est pas menacé par une prescription extinctive mais il est menacé au contraire par une prescription acquisitive. A l’heure actuelle, le droit de propriété se trouve menacé par des lois nouvelles. Ainsi, une loi oblige les partenaires institutionnels à ouvrir leurs biens aux sans abris lorsqu’ils ne sont pas utilisés.


– le droit de propriété n’est pas limité dans sa durée. Le droit de propriété se transmet indéfiniment de générations en générations par voie successorale. Ce principe n’est cependant pas absolu, ainsi en droit anglais le droit de propriété s’éteint au bout de 99 ans. En droit français, il y a aussi des exceptions avec les concessions funéraires (qui ne sont plus en droit perpétuel) et les concessions de parking. De même, il existe d’autres droits réels limités dans le temps comme l’usufruit qui est un droit viager (il disparaît à la mort de l’usufruitier). Le droit de propriété littéraire et artistique est limité à 50 ans après la mort de l’auteur, après il tombe dans le domaine publique.

a.3 Le caractère absolu


Un droit absolu est un droit qui n’est pas contrôlé, c’est-à-dire qu’il n’est pas soumis à la surveillance ou à l’avis du juge. Cependant ce principe connaît de plus en plus de limites :


– les limites légales, certaines lois, en urbanisme et en construction, viennent limiter les propriétaires dans l’exercice de leurs droits. Ainsi on ne peut construire où l’on veut (ex : interdiction de construire en littoral), comme l’on veut (ex : couleurs de la façade, matériaux utilisé pour les toits…).


– les limites jurisprudentielles qui se fait à travers la théorie de l’abus de droit qui est apparu avec l’affaire Clément Bayard (des ballons dirigeables venaient s’échouer sur un terrain privé, le propriétaire, excédé y a planté des pieux). L’abus de droit est défini par l’intention de nuire. Ultérieurement, dans l’affaire du docteur Secret (radiologue dont les appareils faisaient des parasites au vendeur de radio voisin) on a retenu la négligence coupable sans intention de nuire. La jurisprudence, à l’heure actuelle, a tendance à se placer du côté du voisin. Elle sanctionne lorsque la nuisance est anormale, le propriétaire doit soit compenser en nature (ex : détruire une construction si elle cache le soleil), soit compenser en équivalent.

  1. Les composantes du droit de propriété

b.1 Le droit d’usage : l’usus


L’usus permet au propriétaire de tirer toute l’utilité de son bien économique (ex : cultiver ses terres).


Par ailleurs, l’usus, en principe, est exclusif mais il existe des limites qui peuvent émaner soit du juge, soit du législateur :


– les limites par le biais du juge reposent sur la théorie d’abus de droit, le juge va venir contrôler l’utilisation du bien et vérifier qu’il ne nuît pas aux autres et notamment aux voisins.


– les limites par le biais du législateur, en effet tout le droit de l’environnement et celui de l’urbanisme contribuent à venir limiter l’usus (ex : le périmètre classé impose l’avis de l’architecte des bâtiments de France).

b.2 Le droit de percevoir les fruits : le fructus


On appelle fruit tout ce qui est produit à intervalle régulier sur le capital sans en altérer la substance. Un produit se trouve également prélevé sur le capital mais il n’est pas régulier et il altère la substance du capital (ex : le charbon).
Il existe trois catégories de fruit :

– les fruits naturels (ex : les châtaignés, les fraises de bois, les champignons qui ne sont pas récoltés…).
– les fruits industriels (ex : les pommes, les oranges qui nécessitent la main de l’homme et une récolte importante…).
– les fruits civils (ex : les loyers, les rentes, les dividendes…).


En principe, la propriété du capital emporte la propriété des fruits (l’accessoire suit le principal), de même la perception des fruits est exclusive et absolue.
Le législateur est venu limiter le fructus, d’une part les fruits industriels se trouvent fortement limités par des quotas, la jachère ou encore les appellations contrôlées, d’autre part les fruits civils sont limités avec notamment les limites d’augmentation de loyer voire les plafonnements.

b.3 Le droit de disposer de la chose : l’abusus


Cela signifie que le propriétaire peut librement faire disparaître son bien de son patrimoine.


On distingue deux types d’abusus :
– l’abusus matériel, il s’agit de faire disparaître le bien matériellement du patrimoine par la destruction ou par l’abandon.
– l’abusus juridique, il s’agit de faire passer un bien de son patrimoine dans le patrimoine d’un tiers par le biais d’une convention tel que la vente, l’échange, la donation ou l’apport en société.


Le législateur est venu restreindre cet abusus par différentes mesures, d’une part par l’obtention du permis de démolir pour l’abusus matériel, d’autre part par le droit de préemption qui empêche le propriétaire de choisir librement son acheteur (ex : le droit de préemption de la ville pour faire construire, du fisc quand il estime que le prix est trop bas , du locataire qui est prioritaire) pour l’abusus juridique.

2° L’acquisition et la conservation de la propriété

L’article 711 du Code civil précise que la propriété des biens s’acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaires et par l’effet des obligations.
L’article 712 du Code civil précise que la propriété s’acquiert aussi par accession, par incorporation et par prescription.

  1. Propriété et possession

La possession se définit par la détention ou la jouissance d’une chose ou d’un droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-même ou par une autre personne qui le fait en notre nom. On dit que la possession est la situation de fait alors que la propriété est la situation de droit. Le possesseur au vu et au su de tous s’affirme propriétaire de la chose.

a.1 La notion de possession
La possession se caractérise par la manifestation concrète et extérieure d’acte de propriété. On dit alors que le possesseur se comporte corps et âme en propriétaire. On va exiger de lui qu’il ait à la fois le corpus qui vise tous les actes matériels qu’un propriétaire a sur son bien (le voleur d’un véhicule a le corpus) et l’animus qui est le fait de vouloir se considérer et d’être considéré comme le véritable propriétaire (si le voleur met en vente le véhicule, il a alors l’animus). Cependant, il faut que la possession ne soit pas viciée. Dès lors que la possession est sans vice, elle va provoquer des effets.

a.2 Les effets de la possession
Lorsque le possesseur se trouve menacé dans sa possession, il peut agir pour faire cesser le trouble au possessoire. Lorsqu’il veut faire valoir un droit de propriété menacé ou acquis, il peut agir au pétitoire. Ainsi, par exemple, l’action en revendication d’un propriétaire se fera donc au tribunal de grande instance.

a.3 L’acquisition de la propriété immobilière par la possession
Il faut distinguer deux hypothèses, celle où le possesseur est de mauvaise foi et celle où le possesseur est de bonne foi. En effet, selon l’hypothèse, le délai de prescription sera plus ou moins long.

 » l’usucapion trentenaire : lorsque le possesseur de mauvaise foi possède, conformément aux exigences légales, le corpus et l’élément psychologique qu’est l’animus sur un bien pendant plus de trente ans alors ce bien lui appartient. Mais pour prescrire, il ne faut pas que la possession ait un vice. A cet égard, l’article 2229 du Code civil précise que la possession doit être continue et non interrompue, paisible et publique, non équivoque et à titre de propriétaire :
– la continuité de la possession s’apprécie en vertu de trois paramètres que sont d’abord l’interruption lorsque le délai se trouve arrêté par un événement naturel (ex : la mort du possesseur, le départ du possesseur pour un durée au moins égale à un an) ou par une interruption civile quand le véritable propriétaire fait une action, ensuite la jonction qui permet de joindre deux délais de possesseurs successifs afin d’avoir la possession du bien (ex : le père prescrit pendant 18 ans et qu’il décède, son fils devra prescrire pendant 12 ans pour obtenir la possession d’un bien) et enfin la suspension qui signifie que l’on ne peut pas prescrire contre quelqu’un qui ne peut se défendre (ex : un mineur, un adulte incapable).
– la possession doit être paisible, le droit ne tire aucune conséquence d’une possession violente (ex : séquestration, meurtre du propriétaire).
– la possession doit être non équivoque, cela signifie qu’il ne doit pas y avoir d’incertitude lors de la prise de possession.
– la possession doit être publique, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas être clandestine.

Lorsque la possession réunit toute les conditions, au bout de trente ans, la propriété est acquise. L’usucapion produit alors un double effet :
– un effet translatif, le bien va passer du patrimoine du véritable propriétaire dans celui du possesseur.
– un effet rétroactif, tous les actes accomplis sur ce bien seront réputés avoir été faits par le possesseur en tant que propriétaire et seront donc validés (ex : les loyers perçus lui seront définitivement acquis).

 » L’usucapion abrégé : le délai de trente ans se trouve réduit lorsque d’une part le possesseur est de bonne foi, c’est-à-dire qu’il doit avoir la croyance qu’il a obtenu le bien du vrai propriétaire, et d’autre part il faut avoir un juste titre qui est un acte qui s’il émanait aurait donc entraîné un véritable transfert de propriété. Le délai est soit de dix ans lorsque le bien se situe dans le ressort de la cours d’appel du domicile du propriétaire, soit de vingt ans lorsque le bien se situe en dehors du ressort de la cours d’appel du lieu où vit le propriétaire (ex : un bien situé à Paris et propriétaire à Paris : délai de dix ans, un bien situé à Paris mais propriétaire à Versailles : délai de vingt ans).

a.4 L’acquisition de la propriété mobilière par la possession
Selon l’article 2279 du Code civil  » en fait de meuble possession vaut titre « , ce qui signifie que la vente de meubles n’étant pas soumise à un formalisme strict notamment concernant la rédaction d’actes, elle se fait par simple tradition. Dès lors, le possesseur du meuble est présumé être propriétaire du meuble.

 » Cette règle ne s’applique pas à tous les meubles
La première exception vise les meubles incorporels, il s’agit là des droits de propriété littéraire et artistique et des droits de créance.
La deuxième exception concerne les meubles immatriculés (les bateaux, les navires, les avions, les aéronefs mais pas les véhicules automobiles ni les motos).
La troisième exception concerne les meubles par anticipation (les immeubles par nature à qui l’on confère la qualité de meuble par ce qu’ils sont voués à le devenir dans un avenir proche).

 » Il faut une dépossession volontaire
Il faut que le véritable propriétaire ait remis la chose de son plein gré à un individu qui l’a revendu à un sous-acquéreur. Dès lors, plusieurs situations sont à envisager :
– le détournement, le vrai propriétaire a alors remis la chose en vertu d’un contrat (ex : location, prêt, dépôt) et le possesseur ne rend pas la chose.
– l’annulation d’un contrat, la chose a été vendue mais le contrat a été annulé ultérieurement et celui qui a acheté la chose ne la rend pas.
– la close de réserve de propriété (CRP) qui est une close qui subordonne le transfert de propriété au complet paiement du prix, tant que le prix n’est pas payé l’acheteur n’est que possesseur mais rien ne s’oppose à ce qu’il revende les marchandises achetées (ex : un fournisseur vend avec CRP à un débiteur qui les revend à un sous-acquéreur qui s’il est de bonne foi peut invoquer 2279, le fournisseur quant à lui peut revendiquer le prix).

 » Le possesseur doit être de bonne foi.


Elle consiste soit dans la croyance que les marchandises ont été acquises du vrai propriétaire, soit dans l’ignorance de l’existence de la close de réserve de propriété. La bonne foi est toujours présumée et donc c’est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver. La bonne foi s’apprécie au moment de la prise de possession.

Lorsque les conditions de l’article de 2279 se trouvent réunies, cet article produit un double effet :
– un effet translatif, le possesseur est réputé être propriétaire comme s’il avait acquis le bien dans les conditions normales.


– un effet probatoire, c’est-à-dire qu’il emporte présomption de propriété au profit du possesseur.

 » Le cas des meubles perdus ou volés.


Dans ces deux hypothèses, il va de soi qu’il y a à l’origine dépossession involontaire. L’inventeur ou le voleur est forcément de mauvaise foi. En conséquence, l’article 2279 ne peut opérer. Le problème surgit lorsque les meubles en question se trouvent revendus à un sous-acquéreur de bonne foi mais il ne peut invoquer l’article 2279, en effet dans cette hypothèse l’article 2280 permet au véritable propriétaire de revendiquer son bien entre les mains du sous-acquéreur dans un délai de trois ans à compter du vol ou de la perte. Le sous-acquéreur possède alors la possibilité d’une action récursoire contre son vendeur au titre de la garantie d’éviction. Il pourra donc demander le remboursement du prix plus des dommages et intérêts. En ce qui concerne le possesseur de mauvaise foi, c’est-à-dire soit l’inventeur (celui qui a trouvé la chose), soit le voleur, soit le sous-acquéreur (en fonction du prix et des conditions de vente), il doit posséder l’objet pendant trente ans pour que celui-ci lui appartienne.

  1. Les autres modes d’acquisition de la propriété

b.1 L’acquisition de la propriété par l’accession


Il s’agit de la règle selon laquelle l’accessoire suit le principal, en cas de construction par un tiers sur le terrain d’autrui on envisage deux solutions :


– remise des parties en l’état, c’est-à-dire la destruction de l’édifice


– l’attribution au profit du constructeur d’une indemnité dans l’hypothèse où celui-ci est de bonne foi

b.2 Le transfert de propriété par convention


Il s’agit de l’échange ou de la vente, opère alors un contrat. Pour immeuble, le contrat doit être réalisé en forme authentique pour pouvoir publier.

Le cours de droit civil est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, biens, acteurs de la vie juridique, sources du droit, preuves, responsabilité…)

 

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