Le naturalisme de la scolastique médiévale

  • Le naturalisme de la scolastique médiévale.

Sont redécouverts en Occident grande partie des textes d’Aristote en particulier grâce à des traductions ayant traversé le monde arabe et leurs écrits sont conservés. Redécouverte = choc pour théologie et philosophie médiévale. La scolastique = école de philo et théologie qui, dès 13ème siècle, tente de réconcilier philo antique (grecque/aristotélicienne) à doctrine chrétienne marqué par augustinisme. Nouvelle synthèse entre Grèce antique et christianisme marqué par St Augustin créée par scolastique influence fortement notion de droit, de loi et de justice.

A) Choc de relecture d’Aristote.

Traductions d’Aristote en latin viennent des traductions arabes -> savants se procurent traductions arabes puis les traduisent en latin. Grande époque du monde arabe avec de grands philosophes phares pour pensée musulmane de l’époque. On constate qu’un auteur n’ayant pas connu christianisme propose lecture très équilibrée du monde avec définitions du droit et de justice très intéressantes pour monde médiéval. Du côté de l’Eglise, méfiance car + Aristote = admiré, + parole divine et interprètes = menacés. Lecture d’Aristote risquait de brouiller esprits. En pensant monde intelligemment sans Dieu comme le faisait Aristote, autorité de l’Eglise perdait tout fondement. Comme d’autres philo grecs, Aristote voit nature comme ensemble harmonique, gouverné par lois que les hommes seraient cap de découvrir. Tous présupposés chrétiens = mis à mal. Dans ces conditions, certains philosophes/théologiens vont être tentés de supprimer essentiel de la dimension divine de leur pensée -> philosophe andalou Averroès (1126-1198) : théologien de l’islam, juriste installé à Cordoba et il exerce fascination sur théologiens chrétiens. Il affirme autonomie de l’ordre naturel par rapport à ordre surnaturel. Si monde = rationnel et que création = rationnelle, acte de création de monde # mystérieux -> nier idée que Dieu = créateur du monde et que monde résulte d’un phénomène scientifique. Averroès pense qu’Ancien Testament contient explication fausse mais, faute de mieux, convenable en attendant de découvrir lois profondes qui régissent nature. Finalement, philosophe (homme cultivé) peut faire économie de la religion quant aux choses du monde. Raison et foi = ><. Alors que depuis 1000 ans environ, on concevait monde à travers création divine et omniprésence de Dieu dans chaque moment quotidien de vie terrestre, on mesure dimension révolutionnaire et subversive du propos. St Thomas d’Aquin va se situer en retrait par rapport à ces vues assez largement iconoclastes d’Averroès.

B) La subordination du législateur chez Thomas d’Aquin.

Entreprise de Thomas d’Aquin consiste à réaliser importation de la doctrine aristotélicienne sans remettre fondamentalement en cause vision chrétienne du monde. Pensée = la plus aboutie à cette époque -> conciliation entre philo grecque et conception du monde chrétienne. Pour Thomas d’Aquin, philo et théologie = domaines distincts mais pas séparés. Averroès oppose acte rationnel du monde (philo) et acte irrationnel de foi (théologie). Pour autant, Thomas ne suit plus St Augustin pour qui philo = absorbée par théologie. Pour St thomas d’Aquin, théologie et philo ne doivent ni s’opposer ni aboutir à anéantissement de l’une par l’autre -> les 2 domaines doivent se compléter. Domaine de la connaissance parfaite = en Dieu mais connaissance du monde par philo et raison permet de se rapprocher de la connaissance de Dieu. On parachève œuvre de Dieu en cherchant par raison et philo à comprendre œuvre accomplie par Dieu dans création. Différence fondamentale avec Augustin. Pour Thomas, théologie fournit explication générale du commencement et de la fin de toute chose à la lumière de la révélation divine qui reste très utile -> grâce divine ne doit pas entrer en concurrence avec raison. Foi et grâce permettent de stimuler et de perfectionner la raison. Nature = parfaite parce que créée par Dieu et rechercher vois de la nature en pensant que création divine parfaite # contraire et raison = stimulée. Entre Bible et écrits des philosophes, il doit y avoir synthèse possible, points d’accord et, s’il y a points de désaccord, logique pas encore découverte par théologiens. Il faut inviter gens de la scolastique à rechercher logique profonde de l’ensemble (Bible et savoirs des philosophes) pour comprendre harmonie profonde.

1) Finalité du législateur.

En matière juridique et politique, Thomas reprend schéma de la philo aristotélicienne -> homme = animal politique (être sociable). Fait de vivre en communauté = chose naturelle. Sociétés humaines (politiques) sont dans nature et nature conforme à volonté divine. Communautés politiques peuvent tendre vers leur propre perfection que ne désapprouvera pas Dieu car il en est l’auteur. Cette perfection = paix, bien commun. Moyen de nourrir paix et bien commun = justice. Finalité du politique  < finalité théologique pour une durée infinie. Mais finalité politique > finalité individuelle. Bien commun > intérêt particulier parce que le tout > parties. Contrairement aux penseurs du Contrat social, Thomas pensent que sociétés politiques = naturelles -> résultat de comportements dans nature qui est voulue par Dieu. Bien commun et paix (finalités politiques) # finalités ultimes. Grâce à cette finalité, on peut tout de même avoir vie politique heureuse, vertueuse et qui permet aux hommes par connaissance des choses politiques à perfectionner ordre de Dieu. Comment accéder à connaissance des choses du politique sur Terre ? Pour Thomas d’Aquin, on le peut par délibération, par échange d’arguments… raison pas totalement obscurcie, hommes pas condamnés à obéissance absolue à foi -> hommes cap de légiférer. Au sommet de l’édifice, il y a Dieu qui a créé monde et ordre parfait. A l’intérieur de cet ordre, il y a différents ordres (humain, animal, végétal, minéral). Ordre politique -> communautés pas cap de perfection (réservée à Dieu) mais cap de tendre vers perfection. Sociétés politiques seraient parfaites si hommes obéissaient parfaitement à ordres divins mais hommes = pêcheurs. Nécessité d’organiser mode de vie acceptable en politique pour bien commun -> vertu de justice. Ordre de la famille permet, pour Thomas d’Aquin, de sauvegarder espèce et de se procurer choses nécessaires à vie terrestre. Le + important = idée que nature est certes créée par dieu mais nature, puisque Dieu = bon, est logique, pacifique et connaissable. Et tous ordres sont compatibles les uns avec les autres (en harmonie) dans une harmonie générale qui est celle du monde créé par Dieu.

2) Bornes du pouvoir législatif royal.

Dans hiérarchie des normes conçue par scolastiques, il y a au sommet loi divine (contenue dans les Saintes Ecritures). Il faut obéir à loi divine parce que l’obéissance à ces lois-là permettra à chaque homme d’accéder au paradis. Mais ces lois dont beaucoup concernent rapports de l’homme à Dieu ne sont pas suffisantes pour garantir paix et bien commun sur Terre. Il faut des lois pour gouverner peuple.

Les lois humaines ne seront valables qui si elles sont confrontées à finalité propre : paix et bien commun au moyen de la justice.

Logique thomiste : valeur d’une loi ne dépend pas de son auteur mais de sa conformité à la justice. En d’autres termes, ce qui rend la loi valable, c’est qu’elle est juste. Donc, dans une société monarchique, le roi # libre d’édicter n’importe quelle loi. Roi = soumis à la justice. Et c’est dans cette mesure là qu’on peut distinguer roi d’un tyran/despote -> tyran s’impose par force, violence et roi s’impose par justice, aptitude à pourvoir à la paix et au bien commun.

Comment concrètement savoir si une loi est juste ? Mécanismes institutionnels de vérification existent au Moyen-âge car roi # absolu jusqu’au 16ème siècle. Réponse théorique = loi doit satisfaire le + grand nombre d’où importance dans monarchie médiévale des mécanismes de délibération par lesquels on va produire du consensus. A la fin, roi décide mais, avec délibération, décision n’apparaîtra pas autoritaire.  Point de vue de la philo du droit, droit = droit que parce qu’il est juste. Loi = véritable loi que parce qu’elle est juste. Critère du droit = critère de fond (lié au contenu). Une loi interdit aux maires (consuls) de lever impôts sans consentement des citoyens (administrés) et de s’approprier les biens des administrés. Ville menacée d’invasion -> il faut en quelques jours renforcer fortifications de cette ville et budget de la ville ne le permet pas. Il faut aussi exproprier habitants près des fortifications pour que défense soit le + efficace possible. Si consul demande levée d’impôts et exproprie citoyens, il commet une infraction mais pour Thomas d’Aquin, est-ce que cette décision = juste et conforme au bien commun ? Réponse = oui car sinon ville envahie et bien commun n’aurait pas pu être satisfait. En respectant droit, consul aurait laissé provoquer destructions et pertes considérables. Fond du droit lui impose de préserver vie de ses concitoyens. Il existe une justice en soi et un droit en soi qui ne sont pas toujours dans la loi des hommes. Aujourd’hui, depuis 16ème siècle, on considère que droit est dans la loi et que lois peuvent changer au gré du législateur. Mais depuis 1980, la loi se découvre nouvelle limite au-dessus d’elle -> droits fondamentaux des individus.

Conception de St Thomas d’Aquin ont fait objet de vives critiques car elles conduisaient à une sorte d’autonomisation du pouvoir politique à l’autorité divine (laïcisation). Le champ d’intervention de l’Eglise était sorti des politiques. Certains écrits de St Thomas d’Aquin sont déclarés comme hérétiques par université de Paris. La conversion de l’Eglise à une conception autonomiste est confirmée et Thomas d’Aquin est canonisé par pape après.

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