L’attribution du nom à l’enfant et sa modification
La loi du 4 mars 2002 a profondément réformé les règles de dévolution du nom de famille, en supprimant le terme « nom patronymique » et en instaurant un régime commun pour les filiations légitimes et naturelles. Les dispositions, initialement prévues pour entrer en vigueur en septembre 2003, ont été modifiées par la loi du 18 juin 2003 et complétées par un décret du 29 octobre 2004, avant leur mise en application au 1er janvier 2005.
Ces dispositions permettent désormais aux parents de choisir le nom de famille transmis à l’enfant, dans les conditions suivantes :
- Filiation établie simultanément à l’égard des deux parents : Les parents peuvent transmettre :
- Le nom du père,
- Le nom de la mère,
- Ou leurs deux noms accolés, dans l’ordre de leur choix (dans la limite d’un seul nom par parent).
- Filiation établie successivement : Si l’un des parents reconnaît l’enfant après l’autre, son nom peut être ajouté au nom déjà transmis, dans un délai de 5 ans suivant la déclaration de naissance ou l’établissement du second lien de filiation (article 311-23 du Code civil).
- Filiation établie à l’égard d’un seul parent : L’enfant porte le nom de ce parent.
- Absence de choix ou désaccord : En cas de désaccord ou d’absence de déclaration conjointe, l’enfant porte le nom du père.
La réforme a été complétée par des modifications législatives et circulaires, notamment après la loi du 17 mai 2013, permettant une adaptation des règles aux nouvelles configurations familiales (ex. mariage pour tous).
- Le droit de la filiation
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Section 1- L’attribution du nom à l’enfant
I ) Lorsque la filiation est établie simultanément à l’égard des deux parents
Le fondement juridique est l’article 311-21 du Code civil. Cet article vise à établir un cadre égalitaire et uniforme pour attribuer le nom de famille à l’enfant dont la filiation est reconnue simultanément à l’égard de ses deux parents. Cela peut se produire :
- Au moment de la naissance
- Postérieurement, mais simultanément.
A) Catégories d’enfants concernés
-
Filiation établie à l’égard des deux parents au jour de la naissance :
-
Enfants conçus ou nés dans le mariage :
- Acte de naissance établissant la maternité (article 311-25) et la paternité par présomption (article 312).
- Possession d’état indivisible, souvent constituée avant la naissance (articles 310-1, 311-1 et 311-2).
-
Enfants nés hors mariage :
- Reconnaissance simultanée des parents au moment de la déclaration de naissance, ou antérieurement.
- Possession d’état établie à l’égard des deux parents avant la déclaration de naissance.
-
-
Filiation établie simultanément après la naissance :
- Enfants nés hors mariage :
- Reconnaissance par les deux parents postérieure à la déclaration de naissance.
- Acte de notoriété établissant la filiation à l’égard des deux parents.
- Enfants nés hors mariage :
B) Règles relatives à l’attribution du nom
-
Choix volontaire des parents :
Lorsque la filiation est reconnue à l’égard des deux parents, ceux-ci peuvent choisir le nom de l’enfant par déclaration conjointe auprès de l’officier d’état civil. Les options sont les suivantes :- Nom du père.
- Nom de la mère.
- Double nom composé des noms des deux parents, accolés dans l’ordre de leur choix (limité à un nom de chaque parent).
Si l’un des parents porte un double nom, il peut choisir de transmettre uniquement un des deux noms.
-
Absence de choix volontaire :
En l’absence de déclaration conjointe, la loi attribue automatiquement le nom de :- Celui des parents à l’égard duquel la filiation est établie en premier lieu.
- Le père, si la filiation est simultanée.
-
En cas de désaccord :
Depuis la loi du 17 mai 2013, en cas de désaccord signalé à l’officier d’état civil, l’enfant portera :- Le premier nom de famille de chacun des parents, accolés dans l’ordre alphabétique (limité à un nom par parent).
C) Unicité du nom au sein de la fratrie
Pour préserver l’unité du nom au sein de la fratrie :
- Le choix du nom pour le premier enfant s’applique automatiquement aux enfants suivants, sauf disposition contraire.
- Cela garantit une cohérence familiale et évite des divergences au sein des fratries.
D) Cas particulier : enfant né hors mariage, père décédé avant la naissance
Si le père décède avant d’avoir pu reconnaître l’enfant, la mère peut prouver la possession d’état de l’enfant à naître pour obtenir un acte de notoriété. Cet acte permettra à l’enfant de porter le nom du père. Cela favorise l’unité du nom familial même en l’absence de reconnaissance prénatale.
En résumé : L’article 311-21 du Code civil propose un système égalitaire permettant aux parents de choisir le nom de leur enfant en cas de filiation simultanée. En cas de désaccord ou d’absence de choix, des règles automatiques et uniformes s’appliquent. Ce cadre vise à garantir la cohérence au sein des fratries et à promouvoir l’égalité entre les parents.
II- Si la filiation n’a pas été établie simultanément avec les deux parents :
Lorsque la filiation n’est pas établie simultanément, l’enfant porte d’abord le nom du parent reconnu en premier. Lors de l’établissement du second lien, les parents peuvent opter pour un nom double, sous réserve du consentement de l’enfant à partir de 13 ans. Les changements de nom sont désormais soumis à des règles strictes, imposant des procédures plus complexes et limitant les possibilités d’accords simplifiés entre parents.
A) Régime applicable selon l’article 311-23 du Code civil :
-
Nom attribué à la naissance :
- L’enfant porte le nom du parent avec lequel la filiation est établie à la date de la déclaration de naissance.
-
Établissement ultérieur du second lien de filiation :
- Pendant la minorité de l’enfant, les deux parents peuvent choisir un nom double par déclaration conjointe devant l’officier d’état civil, conformément aux modalités prévues par l’article 311-21.
- Consentement de l’enfant : Si l’enfant est âgé de plus de 13 ans, son consentement personnel est requis pour tout changement de nom (loi du 8 janvier 1993).
-
Usage du nom de l’autre parent :
- L’article 43 de la loi du 23 décembre 1985 autorise l’usage du nom de l’autre parent non transmis, si ce dernier dispose de l’autorité parentale.
-
Filiation non établie :
- Si la filiation n’est pas du tout établie, l’enfant porte le nom de la mère mentionné dans l’acte de naissance. Cependant, ce nom ne constitue pas une preuve de filiation s’il n’est pas accompagné d’une possession d’état (article 337).
- Si aucun nom n’est attribué, l’officier d’état civil donne plusieurs prénoms, dont l’un devient le nom de famille en cas d’établissement ultérieur de la filiation.
B) Conséquences des abrogations législatives :
-
Suppression des articles 334-1 à 334-6 :
- Impact sur les parents non mariés :
Les parents d’enfants nés avant le 1er janvier 2005 ne peuvent plus effectuer une déclaration conjointe pour substituer le nom du père à celui de la mère devant le greffier en chef du tribunal judiciaire. - Changement de compétence :
Le juge aux affaires familiales (JAF) n’est plus compétent pour statuer sur les changements de nom d’enfants nés hors mariage, quelle que soit leur date de naissance.
- Impact sur les parents non mariés :
-
Procédure pour changer le nom après le 1er juillet 2006 :
- Un changement de nom est désormais soumis à la procédure des articles 61 et suivants du Code civil, nécessitant un motif légitime. Cette procédure est réputée lourde et coûteuse.
-
Application immédiate de la loi nouvelle :
- La loi du 17 mai 2013 ne contient pas de dispositions transitoires spécifiques. Elle est donc applicable immédiatement, même aux situations en cours.
III ) Si la filiation est adoptive : adoption simple et adoption plénière
Adoption simple : le nom de l’adoptant s’ajoute à celui de l’adopté, selon des règles d’accord ou, à défaut, de substitution partielle basées sur l’ordre alphabétique. L’adopté majeur ou âgé de plus de 13 ans doit consentir à ces changements.
Adoption plénière : le nom de l’adoptant remplace celui de l’adopté, mais des règles spécifiques s’appliquent en cas d’adoption par un couple pour préserver l’unité familiale. Les adoptants ont une marge de manœuvre quant au choix du nom transmis, avec le consentement requis de l’adopté dès 13 ans.
1. Adoption simple
Principe :
L’adoption simple conserve le nom d’origine de l’adopté tout en ajoutant celui de l’adoptant.
Modifications issues de la loi du 17 mai 2013 :
- Article 363 du Code civil :
- Lorsque l’adopté ou l’adoptant (ou les deux) porte un double nom, l’adoptant choisit le nom transmis, dans la limite d’un seul nom pour chacun.
- Si l’adopté est âgé de plus de 13 ans, son consentement est nécessaire pour le choix du nom conservé et l’ordre des noms.
Règles spécifiques :
- En cas de désaccord ou d’absence de choix :
- L’enfant porte son premier nom d’origine suivi du premier nom de l’adoptant, selon l’ordre alphabétique.
- En cas d’adoption par deux époux :
- L’enfant conserve son nom d’origine et prend celui de l’un des adoptants, selon le choix des époux (dans la limite d’un nom pour chacun).
- En l’absence de choix ou en cas de désaccord, les mêmes règles d’ordre alphabétique s’appliquent.
Particularités de l’adoption simple de l’enfant du conjoint :
- Le juge peut autoriser l’enfant à conserver uniquement son nom d’origine.
Modification du nom après adoption :
- À la demande de l’adoptant, le tribunal peut décider :
- Que l’adopté ne portera que le nom de l’adoptant.
- Que l’enfant conserve son nom d’origine (notamment en cas d’adoption par le conjoint de son parent).
- Le consentement de l’adopté est nécessaire s’il est majeur ou âgé de plus de 13 ans.
2. Adoption plénière
Principe : L’adoption plénière substitue intégralement le nom de l’adoptant à celui de l’adopté, sauf règles spécifiques en cas d’adoption par un couple.
Règles après la loi du 17 mai 2013 :
- Les adoptants (ou l’adoptant et son conjoint en cas d’adoption de l’enfant du conjoint) choisissent le nom dévolu à l’enfant :
- Soit le nom de l’un des deux adoptants.
- Soit leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi (limite d’un nom pour chacun).
Règles applicables en l’absence de choix :
- L’enfant porte :
- Le premier nom de l’adoptant et, le cas échéant, celui de son conjoint ou du second adoptant, selon l’ordre alphabétique.
- Si le couple a déjà des enfants adoptés ou biologiques, le même nom s’applique pour garantir l’unité familiale.
Autres dispositions :
- Les adoptants portant un double nom peuvent décider de ne transmettre qu’un seul de leurs noms.
- Consentement de l’enfant :
Si l’enfant a plus de 13 ans, son consentement est requis pour le choix ou la modification du nom.
Prénoms de l’adopté : Les prénoms peuvent également être modifiés par décision judiciaire (article 357 alinéa 7 du Code civil).
IV) Hypothèses qui n’existent plus : ;la légitimation
Note : La légitimation, autrefois applicable pour conférer à l’enfant des droits égaux à ceux d’un enfant légitime, a été supprimée par l’ordonnance de 2005.
Règles antérieures :
- En cas de légitimation par mariage ou par autorité judiciaire, l’enfant pouvait changer de nom, selon des modalités encadrées par l’article 311-21.
- La modification du nom nécessitait le consentement de l’enfant majeur.
Section 2- Les modifications du nom de l’enfant
Un changement de nom peut intervenir en cas de modification de l’état civil de l’enfant, qu’il s’agisse de l’établissement ou de la modification d’un lien de filiation, ou dans des situations particulières prévues par la loi.
Cas de modification :
-
Établissement ou modification d’un lien de filiation :
- Si un lien de filiation est établi ou modifié (par exemple, reconnaissance paternelle tardive, adoption, contestation de filiation), l’enfant peut changer de nom pour porter celui de son parent.
- Si l’enfant est mineur, le changement de nom s’applique automatiquement. Cependant, si l’enfant est âgé de plus de 13 ans, son consentement est requis (article 61-3 du Code civil).
- Si l’enfant est majeur, le changement de nom n’est possible qu’avec son consentement exprès.
-
Demande de changement pour motif légitime :
- L’article 61 du Code civil prévoit la possibilité de demander un changement de nom pour des motifs légitimes (exemple : pour éviter un nom ridicule, pour honorer un parent ayant élevé l’enfant, ou dans le cadre d’une volonté de simplification en cas de noms longs et complexes). Cette demande doit être adressée au ministère de la Justice et publiée au Journal officiel.
-
Adoption :
- En cas d’adoption plénière, le nom des parents adoptifs remplace celui d’origine de l’enfant.
- Dans une adoption simple, le nom de l’adoptant peut s’ajouter ou remplacer celui des parents biologiques, selon les modalités prévues par la loi.
Consentement de l’enfant :
- Toute modification du nom d’un enfant âgé de 13 ans ou plus nécessite son consentement personnel, sauf si elle résulte d’un changement de filiation.
- En cas de contestation de filiation, la jurisprudence a confirmé que les enfants majeurs conservent le droit de refuser le changement de leur nom (Cour de cassation, deuxième chambre civile, 27 novembre 2001).
Résumé : L’attribution et la modification du nom de l’enfant reflètent les évolutions des structures familiales modernes. La loi permet une plus grande souplesse dans le choix et la modification du nom, tout en respectant les principes d’égalité entre les filiations légitimes et naturelles. Le consentement de l’enfant, dès l’âge de 13 ans, souligne l’importance croissante accordée à son autonomie et à ses droits individuels.