Le principe d’égalité et la discrimination positive

Le principe d’égalité

L’article 1er de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen précise que tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. L’égalité n’est pas mentionnée dans l’article 2 Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui énumère les droits naturels et imprescriptibles de l’homme. La question se pose de savoir si et comment le droit, et notamment le droit français, va protéger l’égalité en droit.

On a une première réponse puisque, dans le Préambule de 1946, l’égalité apparaît comme un principe fondamental. Il est fait mention qu’il ne peut y avoir de discriminations en raison de la race, de la religion, des croyances, ou entre hommes et femmes.

A) Le rattachement accessoire du principe aux textes qui le fondent

Dans sa Jurisprudence, le Conseil Constitutionnel n’éprouve pas la nécessité de donner un fondement constitutionnel explicite au principe d’égalité. Dans une décision de 1987, il va dire pour consacrer l’égalité que pour recevoir une prestation sociale, le législateur va fixer une condition de résidence, mais en vertu du principe d’égalité, il ne pourra y avoir de discrimination du fait de cette condition entre les allocataires de cette prestation sociale. Cela illustre le fait que le Conseil Constitutionnel n’est pas regardant avec les principes. Il parle d’égalité et de discrimination, alors que ce n’est pas mentionné dans la Constitution.

Les sources du principe sont très nombreuses car l’égalité est mentionnée dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, elle apparaît aussi dans le préambule de 1946 et dans le corps de la Constitution de 1958. Tout comme la liberté, l’égalité est un principe gigogne

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B) Les cas d’application du principe d’égalité 

L’égalité, de manière classique, s’applique dans le cadre de l’égalité devant la justice, ou dans le cadre de l’égalité devant les charges publiques (fiscalement). L’égalité s’applique aussi en matière de droits économiques et sociaux, car du préambule de 1946 découle un droit à plusieurs choses.

  • Égalité dans la représentation des salariés

  • Égalité du traitement hommes / femmes

  • Égalité devant les prestations sociales

Aujourd’hui on a une remise en cause du principe d’égalité. Les constituants de 1789 imaginaient un système abstrait dans lequel on serait libres et égaux en droit. Depuis 1789, plusieurs questions ont été posées à propos de cette égalité en droit car elle n’est pas parvenue à faire disparaître les inégalités. On ne peut pas remédier aux inégalités avec l’égalité en droit. Il a été posé la question de savoir comment aider les catégories défavorisées quand on parle d’égalité en droit. Peut-on aujourd’hui combiner une citoyenneté abstraite avec une appartenance à des cultures ou à des religions différentes ?

Peut-on aider les femmes à obtenir une place équivalente à celle des hommes dans les institutions politiques ?

Avec ces questions, on se rend compte que l’égalité en droit est insuffisante, c’est la raison pour laquelle il existe aujourd’hui un traitement équitable de l’égalité. Avec l’équité, on va introduire des inégalités pour rétablir une égalité de fait (question des discriminations). 

C) Entre non-discrimination et droit à l’indifférence

Le principe d’égalité pris dans le cadre de l’égalité de fait implique de discriminer, c’est à dire de traiter différemment.

Xavier Bioy → « La non-discrimination c’est à la fois l’aspect négatif de la dignité et de l’égalité et le degré minimum et formel de l’égalité. Le principe de non-discrimination refuse de différencier selon des critères qui constituent la personnalité de l’individu (c’est l’aspect négatif de la non-discrimination, non-discriminer, c’est pouvoir traiter des personnes différentes de la même manière). L’égalité de fait implique au contraire de réserver ou de créer juridiquement des avantages pour certains.

  • Cet aspect positif amène ainsi à différencier pour égaliser, tous on droit à l’égalité, mais l’égalité n’est pas la même pour tous ».

  • L’aspect négatif de la non-discrimination découlant de l’égalité en droit : l’indifférence à la personne

La non-discrimination implique de ne pas tenir compte de différences et va se manifester sous la forme d’un droit subjectif. Comme on parle de non-discrimination, on va avoir la notion de discrimination directe et indirecte.

  • On parle de discrimination directe quand des personnes en situation identique sont traitées de manière différente. Cela prive les personnes de leur accès au droit en totalité. Ce comportement peut être sanctionné par le juge et il est beaucoup sanctionné par le juge européen.

  • On parle de discrimination indirecte ou « à rebours » quand elle traite de manière identique des personnes dont la situation est objectivement différente.

6 avril 2000, CEDH, « Thlimmenos c/ Grèce ». La CEDH distingue les deux types de discrimination et dit qu’il peut y avoir discrimination directe quand un individu dans une situation identique à d’autres est traité différemment, et indirecte quand sans justification objective et raisonnable les États n’appliquent pas un traitement différent à des personnes dont le situations sont sensiblement différentes. La CEDH donne ici une définition de la discrimination directe ou indirecte.

On va consacrer petit à petit la question de la non- discrimination. Tout d’abord au niveau des nations-unies, le principe est repris de façon quasi-systématique, mais son champs d’application varie selon les textes. Pour la Charte des Nations-Unies, il est fait référence à l’interdiction de toute discrimination fondée sur la race, le sexe, la langue ou la religion. Pour la Déclaration Universelles des Droits de l’Homme, chacun peut se prévaloir de ses droits sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, ou d’origine nationale. Le pacte international des droits civils et politiques précise que toutes les personnes ont droit sans discrimination à une égale protection devant la loi.

Au niveau du droit européen, c’est l’article 14 de la CEDH qui traite de la non-discrimination. Il nous dit que « la jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée sans distinction aucune fondée notamment sur le sexe, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques, ou toutes autres opinions, l’origine nationale, sociale, l’appartenance à une minorité, la fortune, la naissance, ou toute autre situation ». Dans un premier temps, cet article devait être utilisé seulement lorsqu’il était couplé à un droit garanti par la CEDH (exemple de l’arrêt Chassagnou). Il y a eu une évolution, car la CEDH a découvert un certain nombre de droits sociaux qu’elle a d’abord rattaché à des droits garantis. Par exemple, décision de 1996 rattachant le droit à une allocation chômage au droit au respect de ses biens. Elle va petit à petit découvrir des droits sociaux qu’elle va rattacher à l’article 14 de la CEDH. L’article 14 s’autonomise.

Exemple de Jurisprudence sur la discrimination non liée à un droit garanti → CEDH, 21 décembre 1999 « Salgueiro Da Silva Mouta c/ Portugal », on utilise seul l’article 14 à propos du refus de droit de garde opposé à un père en raison de son homosexualité. La CEDH condamne une différence de traitement qui repose sur l’orientation sexuelle du requérant.

La CEDH va même jusqu’à donner un effet horizontal à l’article 14 (concernant une personne privée face à une autre personne privée). Exemple d’un testament disputé entre frères et enlevant tous les droits à l’enfant adopté.

Le protocole n°12 de la CEDH traite aussi de la discrimination. Il est signé en 2000 et entre en vigueur en 2005.

Le droit communautaire consacre aussi ce principe de non-discrimination. Plusieurs éléments. Directive du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique. Cette directive définit la discrimination indirecte qui selon elle « se produit quand une disposition un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres, à moins que cette disposition, ce critère, ou cette pratique, ne soit objectivement justifié par un objectif légitime ».

La charte des droits fondamentaux parle de non-discrimination dans son chapitre 3.

Le TUE donne compétence à l’union pour prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination. La Cour de Justice de l’Union Européenne a une Jurisprudence importante, notamment sur la question de la parité, et peut, contrairement à la CEDH, corriger les dispositions internes.

Au niveau du droit interne, les articles qui touchent plus ou moins directement à la discrimination sont les article 6 (la loi doit être la même pour tous) et 13 (la contribution commune doit être également répartie entre tous les citoyens en raison de leurs facultés) de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

Le Conseil Constitutionnel a eu à se prononcer sur des questions de discrimination, et il suit le Conseil d’État puisqu’il dit que des modulations à l’égalité en droit seront possibles si elles reposent sur des critères objectifs et rationnels. Le Conseil Constitutionnel énonce qu’à des situations semblables, le principe d’égalité implique en principe un traitement semblable, mais l’application de ce principe ne fait pas obstacle à ce que des situations différentes fassent l’objet de solutions différentes. Pour le Conseil Constitutionnel, le législateur n’est pas obligé de traiter différemment des personnes dans des situations différentes. Le Conseil Constitutionnel a eu beaucoup à s’intéresser à cette question depuis l’introduction de la Question prioritaire de constitutionnalité. La 1e décision Question prioritaire de constitutionnalité (28 mai 2010) est une décision sanctionnant une discrimination (il s’agissait de l’obtention de pensions).

Au niveau du droit pénal, la non-discrimination est présente. Le Code pénal définit la discrimination comme « toute distinction opérée entre les personnes physiques en raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur orientation sexuelle, de leur appartenance à une ethnie ou une religion déterminée… »

Au niveau du droit social, le Code du travail a mis en œuvre un dispositif de lutte contre les discriminations par une loi du 27 mai 2008 énonçant « qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte ».

Les critères illégitimes de la discrimination : On a des interdits fondamentaux, qui signifie que le préambule de 1946, et la Constitution de 1958 ont posé des interdits fondamentaux cad concernent la discrimination fondé sur la race, la religion et les opinions politiques. Une loi du 1er juillet 1972, qui pénalise les comportements discriminatoires qui sont fondés sur les critères tels que la race, religion, opinion publique… mais ajoute les discriminations fondées sur les mœurs, le handicap, l’État de santé, et l’orientation sexuelle.

 

Mais différence entre les systèmes dit ouverts, ou les systèmes fermés à la sanction de la discrimination. Qu’est ce que cela signifie ? Dès lors, qu’est inscrit l’adverbe notamment dans la loi, dans la convention, dans une norme, donc système ouvert. Et système fermé, quand les États protègent les droits fondamentaux.

 

La liste des critères illégitimes : c’est l’interdiction de la discrimination fondé sur la nationalité, sauf pour le domaine de l’accès à la fonction publique. Ensuite, interdiction du racisme, la Cour EDH nous dit dans un arrêt de 2005, Timishev contre Russie, faits : attitude discriminatoire de la part des autorités russes à l’égard d’un citoyen d’origine Tchéchène, et donc pour la Cour « nul différence de traitements fondé exclusivement ou fondé de manière décisive sur l’origine ethnique d’une personne n’est susceptible d’être justifié dans une société démocratique contemporaine construite sur les principes de pluralisme, et du respect des différentes cultures ».

 

Il existe, une convention internationale, qui porte sur l’élimination de toutes formes de discriminations raciales, qui date de 1965, entré en vigueur en 1969, et ratifié par la France en 1971, le préambule précise que  » les États signataires sont convaincus que toutes doctrine de supériorité, fondé sur la différenciation entre les races est scientifiquement fausse, moralement condamnable et socialement injuste et dangereuse « . En France, La loi Gayssot en 1990, nous explique qu’elle condamne les propos révisionnistes, et négationnistes cad les thèses qui ont nié la reconnaissance du génocide juive durant la Seconde Guerre Mondiale. Par contre en 2011, une loi avait été crée qui faisait la même chose pour le génocide arménien. Le Conseil Constitutionnel en 2012, a sanctionné cette loi car il a considéré que le législateur, outre passait ses pouvoirs car il se prend pour un historien. L’ensemble de ces jurisprudences qui viennent sanctionner les pratiques discriminatoires vont conduire à un développement du principe d’égalité. On parle du déploiement de l’égalité.

 

L’aspect positif de la non discrimination : c’est la reconnaissance des différences. C’est un droit à l’égalité réelle qui conduit à reconnaître les différences de chacun.

 

Le droit à l’égalité fait partie du droit à l’égalité professionnelle, domaine où on a eu beaucoup de législation. Une loi en 2001, relative à l’égalité professionnelle entre hommes et femmes ; loi de 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Dans la fonction publique, cette question est apparu assez tôt dans la jurisprudence du Conseil d’État, ce n’est qu’en 1936 que le Conseil d’État reconnaît l’aptitude des femmes à accéder aux emplois publiques. . Au niveau communautaire, des directives viennent parlaient de l’égalité professionnelle, une directive de 2000, sur l’égalité de traitement dans l’emploi ; directive de 2004 traitant de l’égalité des sexes dans l’accès aux biens et aux services.

Le critère de l’orientation sexuelle, en France on a travaillé à la dépénalisation de l’homosexualité après Vichy. La CEDH a toujours jugé, sur le fondement de l’art 14, qu’une distinction en fonction de l’orientation sexuelle est discriminatoire si elle manque de justification objectif et raisonnable. Dans arrêt de 2003, L et V contre Autriche, la Cour condamne la législation autrichienne qui établissait des âges différents pour l’interdiction des relations hétérosexuelles et hétérosexuelles. Mais la législation autrichienne n’a pas changé, elle reste assez verrouillée. Par contre, la cour laisse une forte marge d’appréciation aux États sur la question du mariage entre personne du mm sexe. C’est une marge nationale d’appréciation.

 

En France, on ne peut plus dire qu’on opère une égalité réelle. Dès 1999, le rapport Bellorgey souhaite ardemment lutter contre les discriminations, pousser et souhaite la réflexion sur les laideurs sociales de notre société cad qu’on est plus devant une égalité réelle. En France, il existe un principe général d’égalité. On fait la différence entre principe général du droit et ce droit à l’égalité apparaît dans le domaine professionnelle, plus généralement la parité hommes/femmes. Il a conduit à une modification de la Constitution en 1999 en son article 3, on a inscrit que la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes, au mandat électoraux et fonctions électives. On a deux lois en 2000, 6 juin et 4 juillet qui instaurent des quotas dans les scrutins de listes. Une loi du 9 mai 2001, instaure des quotas voire pour certaines instances, une égalité « parfaite » au sein d’instance paritaire professionnelle. Une loi du 27 janvier 2011, parle d’égalité de représentation au sein des conseils d’administration, et de Conseil de surveillance.

Dans le domaine éducatif, on a un droit à une égale égalité des chances, une égale éducation. Par exemple, Sciences Po Paris, est habilité a adopté des procédures d’admissions, comportant des « modalités particulières destinées à assurer un recrutement diversifié parmi l’ensemble des élèves de l’enseignement du second degré « . Le Conseil Constitutionnel a validé cette pratique au nom de l’égalité des chances.

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