Le principe de séparation des juridictions et ses garanties

La séparation des autorités administratives et judiciaires : principe et garantie du principe

La justice est d’abord une fonction: le pouvoir de faire régner le droit, statuer sur la base du droit, tranché des litiges qui naissent de la vie en société.

 La justice est aussi une institution : composée de l’ensemble des organes chargé d’exercer la fonction de jugé. La justice administrative peut se définir comme un sous ensemble de la justice en général. La justice administrative est administrative en raison des liens qu’elle entretient avec l’administration.

 D’un point de vue historique, la justice administrative s’est constitué comme un démembrement de l’exécutif, et elle se situe d’un point de vue organique du coté de l’exécutif et non du judiciaire.

 Cela peut paraitre une anomalie au principe de la séparation des pouvoirs (voulant que la puissance de juger soit séparée de celle de légiférer et exécuter). Mais au contraire, cette particularité peut être justifié au nom d’une conception stricte de la séparation des pouvoirs fondé sur l’idée que jugé l’administration c’est encore administré, et qu’il faut donc soustraire au juge judiciaire la fonction de juger l’administration.

 La séparation des autorités administratives et judiciaire (§1) se double d’une séparation des juridictions administratives et judiciaires (§2).

 §1 – Le principe de la  séparation des autorités administratives et judiciaires

A. Un legs de l’Ancien régime

 L’ancien régime a fait entrer dans notre droit l’idée d’une justice administrative spécifique.

 L’indépendance acquise par les Parlements sous l’ancien régime et leur tendance a s’immiscer dans l’action administrative se heurtait a la volonté du roi de leurs soustraire la connaissance des affaires intéressant directement son pouvoir et pour lesquelles des intérêts généraux était en cause.

 Avec Louis XIII le principe selon lequel juger l’administration c’est encore administré semble établi. L’édit de St Germain, en 1641 interdit au Parlement (les tribunaux judiciaires) de connaître des affaires de l’administration. Interdiction réitéré en raison de la résistance des parlements. Ce système va être conforté durant la Révolution par les constituants.

B. Un legs repris par les Constituants de 1790

 La séparation des pouvoirs implique de fixer des limites strictes au pouvoir judiciaire en l’empêchant d’empiéter sur la fonction législative mais aussi sur les fonctions administratives.

 Les fonctions judiciaire sont distinctes et demeurons toujours séparé des fonctions administratives. Rappel aux tribunaux l’interdiction de s’immiscer dans l’administration active.

 Cette Constitution ne prévoit pas a qui est confié le soin de trancher les litiges administratifs. Mal respecté, cette interdiction sera réitérée: défense faite aux tribunaux de connaître des actes d’administratif de toute espèce.

 Ce texte ne concerne pas le contentieux administratif. Les constituants on refusé au juge le pouvoir d’adresser des injonctions et d’annuler ou modifier les décisions de la puissance publique.

 Dès l’origine, avant la Révolution, la séparation des pouvoirs a la française a impliqué ce noyau dur de résistance a la compétence de l’autorité judiciaire.

 La décision du Conseil Constitutionnel « Conseil de la concurrence » en 1987 donne une valeur constitutionnelle (PFRLR) a la dualité des juridictions et a la compétence de l’autorité administrative.

§ 2 – La séparation des juridictions administratives et judiciaires

 Pour résoudre les problèmes posé par le dysfonctionnement de l’administration, des solutions ont été dégagé tout au long XIX siècle. Les constituants n’avaient pas créé de juge propre pour prendre en compte les litiges issus de l’action administrative.

 La théorie du ministre juge a fonctionné sous des modèle différents d’abord de justice retenue (A) puis délégué (B), avant d’être abandonné, avec l’avènement d’un Juge Administratif autonome (C ). Trois étapes :

 

A. La justice retenue

 Pour éviter l’immixtion du Juge Judiciaire dans l’administration, les hommes de la Révolution avait fait de l’administration son propre juge. La théorie des ministres juges fait de tous ministres, pour les affaires administratives contentieuses ressortissant de ses attributions, un juge du droit commun en premier ressort.

 Dès la création du Conseil d’Etat (1799), la justice administrative est confié a une administration consultative. Les litiges sont d’abord porté devant les ministres dont la décision peut être contesté en appel devant le CE. Mais le Conseil d’Etat ne possède que des pouvoirs de justice retenu parce que la décision elle même appartient au chef de l’Etat. Justice retenue : la décision est exécutoire qu’après la signature du roi/ chef de l’Etat.

B. La justice déléguée

En 1872, passage a la justice délégué. Les décisions deviennent exécutoire dès leur lecture sans que l’autorité extérieur est appelé a les approuver. le Conseil d’Etat peut prendre en son nom des décisions propres.

Cette étape qui s’inscrit encore au sein de la théorie du ministre-juge puisque le conseil d’Etat n’est qu’un juge d’attribution et n’a compétence que dans les cas expressément prévus par la loi. Le juge de droit commun => ministre. Les requêtes des particuliers doivent être porté devant lui et devant le Conseil d’Etat qu’en appel.

C.Un juge administratif indépendant

L’arrêt CE 1889 Cadot parachève cette évolution en reconnaissant au juge administratif la compétence générale pour connaître des recours dirigés contre les décisions administratives. C’est la naissance de la juridiction administrative.

Le Conseil d’Etat se reconnaît juge de droit commun en premier et dernier ressort des recours en annulation des actes administratif et des recours en indemnité formé contre la collectivité publique. Au sein de l’administration, les fonctions juridictionnelles et actives sont désormais dissociées.

La séparation des autorités administrative / judiciaire se double d’une nouvelle séparation entre juridiction administrative et administration active. Hormis ses origines consultative, la juridiction administrative repose sur une conception originale, selon laquelle un Juge Administratif ne doit pas être spécialisé en Droit Administratif, mais un Juge ayant l’esprit de l’administration. Statuer en matière de contentieux administratif c’est encore administré.

Le choix de confier a un ordre juridictionnel spécifique le contrôle des activité de la puissance publique est majoritaire en Europe. Les autres ont dans leur ordre juridictionnel unique créé des tribunaux spécialisé dans les affaires administratives.

La hausse du contentieux administratif est un fait. L’augmentation du contentieux en 10 ans a été de 60% devant les Tribunaux Administratifs, et 130% devant les CAA.

Cet afflue de recours distingue la justice administrative de la justice civile : hausse soutenue qui va se poursuivre. Mais le juge judiciaire est saisie de beaucoup plus de recours.

La structure des Juridictions Administratives tends a se rapprocher des Juridictions judiciaires, elle ne connait pas de tout les recours pour les actes pris par l’autorité administrative. Les limites de sa compétence soulèvent de délicat problème de répartition.

Le principe de séparation des juridictions et sa garantie

II – LES GARANTIES DU PRINCIPE DE SÉPARATION 

Une fois établit l’existence de deux ordres de juridiction, doivent être déterminés les règles président la répartition des compétences entre eux.

 Conçus comme un moyen pour empêcher le juge ordinaire de statuer sur le contentieux de l’administration, ces mécanismes sont aussi des garanties qui permettent de protéger la compétence de l’autorité judiciaire (II).

  Les règles de répartition ont un caractère d’ordre public, qu’il s’agisse de la compétence matérielle ou territoriale. Les parties peuvent invoquer à tout moment l’incompétence de la juridiction saisie.

  La soumission de l’administration a deux droits et deux juges, peut donner lieu a des conflits de compétence, soumis a un juge particulier (§1). Au cours d’un procès, des questions accessoires mais dont la résolution est essentielle pour trancher le litige risque de ce poser, un mécanisme ce mets alors en place (§2).

 

  §1. Le Tribunal des conflits 

  Créer par la loi du 24 mai 1992. Même si le Tribunal des Conflits n’est pas souvent saisi (40 affaires par an) son intervention est déterminante. Il règle les conflits de compétence. Remède aux divergences d’interprétation de la règle de séparation.

   A. Organisation du Tribunal des conflits 

  Organisé dans un souci de parité et d’équilibre, le Tribunal des Conflits est composé de 9 membres. En tranchant des problèmes de compétence, le Tribunal des Conflits peut être amené a se prononcer indirectement sur des questions de fond mais il n’est pas une cour suprême puisque les 2 juridictions ne sont pas tenu d’appliquer sa jurisprudence, même si elle a une grande autorité.

B. Les compétences du Tribunal des conflits 

  La mission du Tribunal des Conflits est de régler les conflits de compétence. Un conflit de compétence peut apparaitre dans plusieurs cas différents. Exceptionnellement, le Tribunal des Conflits peut se prononcer sur des questions de fond.

 1) Le conflit positif 

  C’est le cas lorsqu’un litige étant porté devant un Juge Judiciaire l’administration soutient que le règlement du différend doit échapper a l’autorité judiciaire, soit parce qu’il relève de la compétence de la juridiction administrative, soit parce qu’il met  en cause un acte administratif échappant a tout contrôle juridictionnel.

Organisé pour protéger la compétence de l’autorité administrative, il a un caractère unilatéral. S’il estime que le Tribunal Judiciaire a été saisi a tord, le préfet lui adresse un déclinatoire de compétence en indiquant les motifs pour lesquelles, le Juge administratif est seul compétent.

Le tribunal peut soit accepter le déclinatoire (=> et se déclarer incompétent) ou le rejeter (=> attendre 15 jours pour statuer au fond, délai qui permet au préfet de suspendre s’il le souhaite la procédure et saisir le TC qui dispose de 3 mois pour infirmer ou confirmé la décision prise par le préfet).

2) Le conflit négatif 

  Il y a conflit négatif quand saisie successivement sur la même question le Juge Judiciaire et le Juge administratif se sont tout les deux déclaré incompétent. Chaque ordre estime que le litige relève de la compétence de l’autre ordre juridictionnel.

  Le plaideur saisi le Tribunal des Conflits une fois rendu la seconde décision d’incompétence afin que le TC désigne le juge compétent et annule la décision erronée.

  Ce mécanisme protège les justiciable contre le risque de déni de justice, mais il n’est assorti d’aucun délai.

  Le mécanisme de prévention des conflits négatifs a été institué en 1960 afin d’éviter ces lenteurs et d’empêcher la survenance d’un conflit négatif.

 Quand une juridiction a par une décision a affirmé son incompétence, la juridiction de l’autre ordre, saisie du même litige, ne peut pas se déclarer incompétent. Cette deuxième juridiction doit surseoir a statuer et renvoyer l’affaire au Tribunal des Conflits (procédure du renvoi obligatoire) qui statuera.

 3) Les difficultés sérieuse de compétence 

  Les 2 juridictions suprêmes (Conseil d’Etat et a la Cour de Cassation) peuvent saisir le Tribunal des Conflits si la question qu’elles ont à trancher soulève une difficulté sérieuse mettant en jeu la séparation des ordres. Bien qu’aucun conflit n’existe, les questions soulevé serait de nature a faire naitre un conflit dans une autre affaire. Renvoi facultatif.

  Exemple : CE 1978 Société Le profil (page 479 du manuel).

 4) Des questions de fond 

  Lorsque les décisions définitive prise par le Juge Judiciaire et le Juge administratif a propos d’un même litige présente des solutions contradictoire au fond => déni de justice => question déféré au TC qui statut définitivement sur le fond.

 §2. Les questions accessoires 

  La solution d’un litige, relevant soit du Tribunal des Conflits ou Tribunal Administratif, peut dépendre de l’examen d’une question accessoire, qui, si elle fera l’objet d’un litige principal ne relèverait pas du même ordre de juridiction.

 Deux solutions sont possible:

   Le juge principal compétent peut être invité à trancher a titre exceptionnel la question accessoire (le juge de l’action est le juge de l’exception). C’est la question préalable : question accessoire que le juge de l’action peut trancher lui même.

   On peut aussi vouloir faire prévaloir le principe de la séparation des pouvoirs: obliger le juge de surseoir a statué en renvoyant la question préalable a la juridiction normalement compétente pour trancher.

  Il s’agit de la question préjudicielle : question accessoire qui doit être soumise a l’autre ordre de juridiction.

 

 Le choix entre ces deux solutions est variable en fonction de la juridiction en question :

  • Devant le juge administratif : les questions accessoires sont toujours des questions préjudicielles.

  Le Juge Administratif est tenu de saisir le Juge Judiciaire avant de statuer lorsqu’il existe une difficulté en matière de nationalité, propriété, interprétation d’acte de droit privé.

  • Devant le juge pénal : le juge répressif a compétence pour interpréter les actes administratifs, réglementaire ou individuelle pour en apprécier la légalité, lorsque cet examen dépend à la solution du procès pénal qui lui est soumis. Il a le pouvoir de priver de tout effet un acte administratif et devant lui toute question accessoire est une question préalable. Devant le juge civil : il peut interpréter les règlements, mais ne peut interpréter les actes individuelles, ni apprécier la légalité des actes réglementaire ou individuelle depuis TC 1923 Septfonds.

 Depuis la décision du Tribunal des Conflits du 17 octobre 2011, le juge civil peut interpréter un règlement si relève d’une jurisprudence déjà bien établie.

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