Le recours en annulation en droit de l’Union Européenne
Le recours en annulation fait parti des recours pouvant être exercés devant la Cour de justice de l’Union européenne. Par ce recours, le requérant demande l’annulation d’un acte adopté par une institution, un organe ou un organisme de l’Union européenne.
- I) INTRODUCTION Le recours en annulation est un des recours pouvant etre exercés devant la CJUE :
La Cour de justice peut être amenée à l’exercer par divers voies :
- la voie du recours préjudiciel en appréciation de validité,
- la voie de deux recours directs (en annulation ou en carence contre une abstention illégale d’une institution de l’Union européenne
- le recours en manquement ; Il permet à la Cour de justice de contrôler le respect par les États membres des obligations qui leur incombent en vertu du droit de l’Union
- le recours en annulation ;le requérant demande l’annulation d’un acte émanant d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union (notamment règlement, directive, décision).
- le recours en carence ;Il permet de contrôler la légalité de l’inaction des institutions, d’un organe ou d’un organisme de l’Union. Lorsque l’illégalité de l’omission est constatée, il appartient à l’institution visée de mettre fin à la carence par des mesures appropriées.
- la voie de l’exception d’illégalité régie par l’article 277 du TFUE. Il s‘agit de soulever une exception d’illégalité de l’acte sur le fondement duquel un autre acte attaqué devant la Cour de justice a été adopté. Elle se distingue de la possibilité dont tout justiciable dispose devant le juge national qui s’apprête à appliquer cet acte.
– Dans quelles conditions peut-elle être soulevée ? À l’occasion d’un litige soumis à la Cour de justice elle-même, quel que soit le recours (en carence, en annulation, en responsabilité extra-contractuelle de l’Union européenne) ; il n’est pas exclu qu’elle puisse être soulevée à l’occasion d’un recours en constatation de manquement, mais pas dans le cadre d’un renvoi préjudiciel. C’est la même logique que l’exception de recours parallèle.
- Les institutions de l’Union Européenne (cours)
- La répartition des compétences dans l’Union Européenne
- La comitologie, l’exécution des actes européens par la Commission
- L’exécution des actes européens par les États membres
- Le principe de la compétence d’attribution de l’Union Européenne
- La mise en œuvre de la compétence de l’Union Européenne
- Le principe de subsidiarité en droit de l’Union Européenne
– Quels sont les actes concernés ? Avant le traité de Lisbonne, le TCE ne permettait de la soulever qu’à l’encontre d’un règlement arrêté en co-décision ou adopté par le Conseil ou la Commission ou la BCE. La Cour de justice avait étendu l’applicabilité de l’exception d’illégalité à tout acte de portée générale aux effets analogues à ceux d’un règlement ; cette extension aurait pu valoir au sujet d’une directive adressée à tous les Etats membres. L’article 277 du TFUE consacre cette évolution, l’exception pourra être soulevée à l’encontre d’un acte de portée générale, mais pas d’un acte de portée individuelle.
L’exception n’était par ailleurs possible qu’à l’encontre d’actes adoptés par certaines institutions uniquement ; désormais, elle peut viser tout acte de portée générale adopté par une institution, un organe ou un organisme de l’Union.
II ) Qu’est ce que Le recours en annulation?
Il y a plusieurs recours en annulation :
- le recours en annulation du droit commun prévu par l’article 263 du TFUE (ancien article 230 du TCE moyennant quelques changements) ; il doit être formé dans un délai de deux mois suivant la publication de l’acte ou de sa notification ou, à défaut, du jour où le destinataire en a eu connaissance. Ce délai s’applique avec rigueur sauf exceptions particulières posées par la jurisprudence ;
- avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, dans le cadre de la structure en piliers, il y avait un recours propre au troisième pilier ouvert aux seuls Etats en vue de contester des décisions-cadres ou des décisions adoptées par le Conseil dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale. Avec l’effacement de la structure en piliers, il sera mis un terme à ce recours, sous réserve du délai transitoire de cinq ans pour les actes de droit dérivé adoptés avant l’entrée en vigueur du traité ;
- le traité de Lisbonne introduit un recours à l’encontre d’actes adoptés dans la cadre de la PESC ; la Cour de justice peut connaître de recours en annulation contre des actes qui la contraignent de la part de personnes physiques ou morales.
quelles sont les conditions de recevabilité du recours en annulation.?
- – Nous étudierons ici les conditions relatives aux actes.
- – Les conditions relatives aux requérants sont étudiés ici : les conditions relatives au recours en annulation (les requérants privilégiés et ordinaires)
- Les actes
- a) L’identification des actes attaquables
Il doit s’agir d’actes imputables à une institution, un organe ou un organisme de l’Union européenne. Cette formulation est très générale, elle couvre :
- • les actes législatifs,
- • les actes du Conseil, y compris ceux de la coopération pénale (qui ne relèvent plus du recours exorbitant),
- • les actes du Parlement européen destinés à produire des effets juridiques vis-à-vis des tiers,
- • les actes de la BCE,
- • les actes de la Commission,
- • s’y ajoutent les actes adoptés par la Cour des comptes.
Le traité de Lisbonne, par sa formulation générale, a élargi cette liste aux actes du Conseil européen, qui est désormais juridiquement qualifié d’institution de l’Union européenne, et au delà, à toute organisation n’ayant pas la qualité d’institution.
Recours en annulation contre les actes du Conseil :
- jusqu’à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, lorsqu’il adoptait des actes dans le cadre du volet communautarisé par le traité d’Amsterdam de l’ancien pilier III (flux migratoires), le recours en annulation était exclu en ce qui concernait les actes du Conseil portant sur le maintien de l’ordre public et la sécurité intérieure ; cette restriction a disparu ;
- s’agissant des actes dits décisions adoptées par les Etats membres au sein du Conseil, les actes ainsi adoptés ne peuvent faire l’objet d’un recours en annulation ;
- la Cour de justice a admis la possibilité d’un recours contre un acte du Conseil portant conclusion d’un accord international par l’Union européenne, la Cour de justice accepte de contrôler à posteriori l’accord conclu.
Recours en annulation contre les actes du Parlement européen
Une telle possibilité n’était pas prévue aux origines : le Parlement n’avait pas de pouvoir de décision. La Cour de justice a, de façon prétorienne, admis la légitimation passive du Parlement européen, c’est-à-dire la possibilité d’agir en annulation contre de tels actes. Il l’a fait en deux temps :
- en 1983 en s’appuyant sur le traité CECA, qui permettait l’exercice d’un tel recours,
- puis par l’arrêt du 23 avril 1986 Parti écologiste Les Verts c./ Parlement européen. La Cour de justice en a tiré la conclusion que les actes du Parlement européen pouvaient faire l’objet d’un recours en annulation lorsqu’il s’agissait d’actes destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers. Le traité de Maastricht a entériné cette audace en reprenant les mots mêmes de la Cour de justice.
L’abstention d’une institution, même illégale, n’ouvre pas droit au recours en annulation car il existe à cette fin le recours en carence.
Ne sont pas concernés les actes déclaratoires, les actes décisoires, les actes confirmatifs, de même que les actes du Médiateur, ainsi que les actes purement internes à une institution (règlement intérieur).
- b) L’exercice du recours contre les actes attaqués
Cas d’ouverture (moyens invocables à l’appui d’un recours en annulation) :
- la légalité externe : ces moyens sont d’ordre public et peuvent être soulevés d’office, à tout moment par les parties ; il s’agit :
— de l’incompétence :
– l’incompétence de l’auteur de l’acte au moment de l’adoption de l’acte ;
– l’incompétence en raison du lieu, l’acte n’aurait pas dû s’étendre géographiquement comme il l’a fait ;
– l’incompétence en raison de l’objet, l’acte empiète sur les compétences réservées aux Etats ou à une autre institution de l’Union ;
— de la violation des formes substantielles : la jurisprudence évite de tomber dans un formalisme tatillon ; l’expression retenue par le traité de violation des formes ne permet pas de prendre la mesure d’une nuance qui existe entre les règles de forme (qui président à la formulation de l’acte, soit visa et motivation) et les règles de procédure (règle de vote, de consultation, de procédure visant à garantir les droits de la défense) ;
- la légalité interne ; il s’agit :
■ des moyens qui visent à la sanction de la violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application ;
■ le détournement de pouvoir, c’est-à-dire l’exercice délibéré d’un pouvoir dans un but autre que celui assigné au détenteur de ce pouvoir, mais il y a aussi un manque de circonspection grave, équivalent à la méconnaissance du but légal assigné à l’institution pour exercer la compétence qui lui a été attribuée. Ces cas sont très rares compte tenu de la difficulté de démontrer ce détournement de pouvoir.
Office du juge de l’annulation
Aucune disposition des traités ne vise à déterminer l’intensité du contrôle de la Cour de justice. Elle prend en compte l’existence au profit de l’institution, notamment en matière économique, d’une marge discrétionnaire d’appréciation que le juge ne peut ignorer, et ce par l’exercice d’un contrôle restreint de l’acte soumis à son examen.
Il comportera la recherche du détournement de pouvoir, la vérification de l’exactitude matérielle des faits, un contrôle limité à l’erreur manifeste dans la qualification juridique de ces faits. Si le recours est fondé, l’arrêt déclarera l’acte nul et non avenu, comme le précise l’article 264 du TFUE, soit dans son ensemble, soit en partie si la disposition illégale est détachable du reste de l’acte.
Autorité de l’arrêt d’annulation
L’arrêt d’annulation est pourvu de l’autorité absolue de chose jugée, mais ce n’est pas vrai pour l’arrêt qui rejette le recours en annulation car il ne vaut que pour la partie qui a exercé le recours, et ne vaut nullement pour la contestation de l’acte par une autre partie dans un autre cas.
Les institutions de l’Union européenne dont émane l’acte annulé sont tenues de prendre en compte le dispositif de l’arrêt, mais aussi et surtout les motifs de l’annulation, afin d‘adopter un nouvel acte purgé de ces vices qui ont conduit à l’annulation de l’acte initial.
Si l’institution en question ne tire pas les conséquences dans un délai raisonnable, il s‘agira d’une carence dont pourra résulter un recours en carence, et, si elle produit un dommage, un recours en responsabilité de l’Union.
Effet dans le temps
L’arrêt en annulation est pourvu d’un effet rétroactif sous réserve de la possibilité pour la Cour d’indiquer, si elle l’estime nécessaire, les effets qui doivent être considérés comme définitifs et qui ne seront pas rétroactivement remis en cause.
Avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, cette faculté de maintien définitif de certains effets passés de l’acte annulé (selon l’article 231 du TCE) ne visait que les règlements, mais la Cour de justice avait appliqué cet effet aux directives adressées à tous les Etats membres.
- Les requérants (cliquez sur le lien ci-dessous)
les conditions relatives au recours en annulation (les requérants privilégiés et ordinaires)