Qu’est ce que le Recours en Excès de Pouvoir ?
Le recours pour excès de pouvoir (REP) est un recours formé devant un tribunal administratif, par lequel le requérant (demandeur) demande au juge administratif de contrôler la légalité d’une décision administrative (arrêté, décision implicite de rejet conséquence du silence gardée par l’administration pendant deux mois,…), et d’en prononcer l’annulation si elle est illégale.
Introduction
Le juge administratif contrôle la légalité des actes administratifs par le moyen d’un recours spécifique, le Recours en Excès de Pouvoir, dont l’objet est de demander l’annulation d’un acte administratif pour excès de pouvoir. Faire respecter le principe de légalité pour le juge administratif consiste à examiner le rapport de conformité entre l’acte administratif attaqué et l’ensemble des normes supérieures. On prend la Constitution, traités, lois, actes règlementaires, actes individuels, collectifs, particuliers. Il ne faut pas oublier les PGD et plus largement toutes les règles jurisprudentielles qu’il a posé depuis 1870.
Quand on retrace la pyramide, on voit tout de suite que selon que l’acte attaqué devant le juge administratif est un acte administratif individuel ou règlementaire, la légalité supérieure est différente. Si c’est un acte individuel qui est attaqué, le juge va vérifier que l’acte individuel est conforme aux actes règlementaires qui lui ont servit de base légale (ou de fondement textuel). Si c’est un acte règlementaire qui est attaqué, le bloc de légalité par rapport auquel le juge va apprécier la légalité de l’acte attaqué on aura les lois, traités et constitution.
Quand le juge administratif vérifie la conformité des actes administratifs par rapport aux normes supérieures, il faut savoir ce qu’est la conformité.
Même si l’administration prend des actes administratifs qui ne sont pas susceptibles de Recours en Excès de Pouvoir (acte de gouvernement, mesures d’ordre intérieur, circulaires et directives, actes préparatoire, confirmatifs etc.), elle est tenue par le principe du respect de légalité. C’est le supérieur hiérarchique qui contrôlera le respect des normes supérieures et le respect aussi des règles de compétence. Le recours hiérarchique est de droit, il existe même sans texte contre tout acte administratif. Il est possible de faire un recours hiérarchique : vérifier la légalité de l’acte et son opportunité. Le contrôle hiérarchique fait donc partie des contrôles administratifs. Le recours gracieux est aussi toujours possible, il est porté devant l’auteur même de l’acte. Si un administré est mécontent d’un acte administratif qui lui est opposé il peut successivement demander un recours gracieux et ensuite un recours hiérarchique.
Si un administré a l’intention de saisir le juge administratif après le recours administratif d’un Recours en Excès de Pouvoir, il faut que l’administré respecte deux conditions. Premièrement il doit choisir entre le recours gracieux et le recours hiérarchique. Deuxièmement, il faut former le recours administratif choisi dans le délai du Recours en Excès de Pouvoir pour le conserver. Dans un délai de 2 mois à partir de la notification des actes individuels ou de la publication des actes règlementaires. Pour conserver le délai du recours il faut exercer le recours administratif dans le délai de 2 mois du Recours en Excès de Pouvoir, c’est-à-dire dans le délai de 2 mois qui suit la notification individuelle ou la publication de l’acte règlementaire. Après la réponse du recours hiérarchique par exemple, on a encore 2 mois. On conserve donc le délai de Recours en Excès de Pouvoir.
On doit avoir un réflex conditionné.
WANTED : Arrêt du 17 février 1950 Dame Lamotte : le Recours en Excès de Pouvoir est ouvert même sans texte contre tout acte administratif qui a pour effet d’assurer conformément aux PGD le respect de la légalité.
D’où vient le Recours en Excès de Pouvoir ? Il trouve son origine dans une construction jurisprudentielle du Conseil d’Etat à parti de la loi du 24 mai 1872. Mais avant il existait des Recours en Excès de Pouvoir devant le CE. C’est lui, compétent pour traiter des affaires contentieuses, a admis des recours en annulation des actes administratifs. La construction commence en 1832 sous la Monarchie de juillet, le Conseil d’Etat va rendre une série d’arrêt au visa de la loi de séparation 1790 et va admettre le recours en annulation des actes administratifs pour « incompétence ou excès de pouvoir ». On est à une époque de justice retenue, c’est le chef de l’Etat, le roi, qui rend la justice sur avis du Conseil d’Etat qui agit en la forme contentieuse indépendamment de sa fonction consultative qui à l’époque était la plus importante. En 1832, le terme incompétence est entendu au sens large parce qu’il couvre déjà la violation des droits.
C’est aussi sous la monarchie de juillet, par une ordonnance du 12 mars 1831 que fut créé la fonction de ministère public auprès du Conseil d’Etat et qui va devenir plus tard commissaire du roi, puis commissaire du gouvernement puis rapporteur public aujourd’hui. Au départ cette personne exerçait les fonctions du ministère public comme en pénal, mais ils ont exercés ces fonctions en toute indépendance et ont exigé aussi bien le rejet des recours particuliers que des recours administratifs. Donc ca n’a jamais été au sens pénal du terme. Le nom de commissaire du roi figure dans un arrêt de 1842. Le nom de commissaire du gouvernement est consacré par un décret du 25 janvier 1852 sous la deuxième république. Le nombre des recours a augmenté nettement à partir d’un décret du 2 novembre 1864 qui a facilité l’accès au prétoire du Conseil d’Etat par différentes procédures : dispense de frai pour les Recours en Excès de Pouvoir, dispense d’avocat aussi dans cette matière et aussi de pension, et aussi l’assimilation à une décision de rejet du silence gardé par l’administration pendant 4 mois et à partir de cette assimilation les recours des administrés se sont multipliés. En Allemagne jamais le silence de l’administration ne s’est transformé en rejet. C’est de 1864 que nait le détournement de pouvoir.
Arrêt du 25 février 1964 : il a consacré le détournement de pouvoir, c’est-à-dire l’usage par une autorité administrative de ses pouvoirs dans un but autre que celui pour lequel ils lui ont été conférés. Par exemple la recherche d’un intérêt privé.
Il y a des étapes :
Etape de la loi du 24 mai 1872, article 9, le recours en annulation pour excès de pouvoir est ouvert contre les actes administratifs. Cette loi délègue la justice au CE de façon définitive. Instaure le TC. le Conseil d’Etat devient une juridiction totalement indépendante, il faut une juridiction qui départage les compétences. Le Tribunal des Conflits avait déjà été institué en 1851 mais avait disparu.
Etape de l’arrêt Cadot du 13 décembre 1889 : décide que le Conseil d’Etat est compétent pour connaitre d’une décision d’un maire et de son conseil municipal refusant une indemnité à un agent municipal du fait du préjudice qu’il subit suite à la suppression de son emploi dans la commune. A la fois il signifie que le Conseil d’Etat est compétent pour connaitre de la demande en annulation de décisions de refus et le Conseil d’Etat est aussi éventuellement compétent pour accorder ou non l’indemnité demandée. Cet arrêt montre bien que toute demande d’indemnité à l’administration doit commencer par une demande d’annulation de l’acte administratif qui rejette l’octroie de l’indemnité demandée. Donc tout recours en plein contentieux comporte nécessairement aussi la demande d’annulation d’un acte administratif pour excès de pouvoir. L’arrêt Cadot met fin à la théorie du ministre juge, il n’est plus le premier degré de juridiction administrative, c’est le Conseil d’Etat qui devient compétent en premier et dernier ressort de tous les litiges administratifs, litiges pour excès de pouvoir ou en indemnisation.
Arrêt du 6 décembre 1907 Compagnie des chemins de fer de l’Est : pour la première fois accepte la recevabilité du Recours en Excès de Pouvoir contre des règlements d’administration publique (RAP) pris par le PR, on est sous la 3ème République, et qui jusqu’alors étaient considérés comme des actes de nature administrative. Les RAP étaient pris par le PR sur délégation législative. C’est de ce grand arrêt que date l’importance du critère organique en droit administratif ! L’acte administratif est alors défini par le Conseil d’Etat comme étant un acte pris par une autorité administrative, peu importe que le domaine des actes soit un domaine législatif. Le contrat administratif est aussi défini par référence au critère organique. Donc depuis 1907 tous les actes pris par une autorité administrative sont susceptibles de Recours en Excès de Pouvoir, mais il y a deux catégories qui échappent au Recours en Excès de Pouvoir :
Et encore, il y a deux exceptions. Le Recours en Excès de Pouvoir a eu tendance à grignoter ces deux domaines.
Arrêt du Tribunal des Conflits du 27 novembre 1952 Préfet de la Guyane : ça concerne les actes émanant du pouvoir judiciaire. Cet arrêt distingue entre l’organisation du Service Public de la justice judiciaire et le fonctionnement du Service Public de la justice judiciaire. La distinction va servir de fondement à la reconnaissance de la compétence de la juridiction administration pour l’organisation du Service Public judiciaire. Tout ce qui a attrait à l’organisation des Service Public est une matière administrative. L’organisation des SPIC est une matière administrative alors même que les SPIC relèvent du droit privé. Pour le Service Public de la justice judiciaire le raisonnement est le même : tout ce qui concerne l’organisation du Service Public judiciaire est considéré comme une matière administrative relevant de la juridiction administrative et tous les actes pour cela sont susceptibles de Recours en Excès de Pouvoir. L’organisation du SPJ qui permet au juge administratif recouvre toute l’organisation des tribunaux et cours d’appel judiciaire et recouvre aussi toute la carrière des magistrats judiciaires. Donc tous les actes concernant les magistrats judiciaires, leur situations, leurs carrières, sanctions disciplinaires, tous ces actes administratifs relèvent de la juridiction administrative et sont susceptible de Recours en Excès de Pouvoir.
Arrêt du Conseil d’Etat du 5 mars 1999 Président de l’assemblée nationale : Concerne l’exercice des pouvoirs judiciaires. le Conseil d’Etat juge qu’il est compétent pour connaitre des contestations relatives à la passation des marchés de travaux publics passés par les services de l’Assemblée Nationale dans l’intérêt du fonctionnement des assemblées parlementaires. Toutes les contestations qui concernent la passation de ces contrats relèvent de la compétence de la juridiction administrative.
Donc normalement le juge administratif est compétent par le Recours en Excès de Pouvoir pour connaitre exclusivement des actes pris par des autorités administratives et pas par des autorités judiciaires mais il y a ces deux exceptions.
Les cas d’ouverture du Recours en Excès de Pouvoir sont les moyens d’annulation qu’un requérant peut valablement invoquer devant le juge administratif pour obtenir l’annulation de l’acte qu’il attaque. Il faut que ce soit un acte décisoire pris par une autorité administrative, un acte qui manifeste une volonté et qui en principe modifie l’ordonnancement juridique ou fait grief.
Remarque 1 : l’examen de ces moyens d’annulation conduit le juge à examiner le bien fondé de la demande d’annulation. Donc les moyens d’annulation articulés par le requérant vont conduire le juge à examiner le fond de l’affaire. Si le juge estime qu’il y a un moyen d’annulation qui est bien fondé, c’est-à-dire qui est justifié, que le requérant a argumenté de façon à ce que le juge considère qu’il a raison, le juge va annuler l’acte attaqué en retenant dans la motivation de son jugement un motif d’annulation qui va correspondre aux 4 cas d’ouvertures du Recours en Excès de Pouvoir :
Le requérant argumente des moyens d’annulation et le juge s’il considère que l’un de ces moyens est fondé, le juge va retenir un motif d’annulation. Moyen pour le requérant, motif pour le juge. Le requérant, au soutien de sa demande, invoque des moyens qui vont être fondés ou pas en fonction de la qualité de son argumentation. Alors que le juge est obligé de motiver (obligatoire depuis la révolution française) son jugement et donc le juge va retenir un motif d’annulation au titre de la motivation de son jugement. Le motif va correspondre au moyen.
Remarque 2 : avant l’examen du bien fondé de la demande, le juge administratif va devoir vérifier :
o l’acte doit être susceptible de Recours en Excès de Pouvoir,
o le requérant doit avoir un intérêt lui donnant qualité pour agir
o le requérant a saisi le juge dans le délai du Recours en Excès de Pouvoir c’est-à-dire 2 mois. Ce délai de 2 mois peut être prorogé si un recours administratif a été établit avant le recours contentieux.
Parmi les 4 cas d’ouvertures, un seul suffit à obtenir l’annulation de l‘acte. et le juge administratif observe ce que l’on appelle la règle de l’économie de moyens : s’il trouve un moyen d’annulation fondé il va retenir le motif d’annulation correspondant et ne va pas examiner les autres motifs d’annulation. Ces 4 cas d’ouverture se subdivisent en 2 catégories :
Attention : quand on relève des irrégularités dans un acte, ce sont des illégalités externes.
Il s’agit de l’incompétence de l‘auteur de l’acte attaqué. A la demande du requérant le juge va examiner si les règles de compétence prévues par les textes ont été respectées par l’administration. Le juge va vérifier que l’auteur de l’acte attaqué détenait bien la compétence à la fois matérielle ( : compétence ratione materiae) et temporelle ( : compétence ratione temporis).
L’incompétence est soit matérielle (l’autorité intervient dans un domaine relevant de la loi, de la compétence d’un juge ou d’une autre autorité administrative), on parle alors d’usurpation de pouvoir ; soit territoriale (autorité agissant hors de sa circonscription ou pour des personnes n’en faisant pas partie), soit temporelle et dans ce dernier cas l’autorité n’est pas encore compétente ou ne l’est plus.
Motif de l’acte ; trois cas
. l’erreur de droit : la décision se fonde sur une norme qui n’existe pas( le juge emploir souvent ce terme : « défaut de base légal »)
. L’erreur dans la qualification juridique des faits (CE, 4 avril 1914, GOMEL : dans les faits, le permis de construire d’une immobilisation était refusé aux motifs que cette immobilisation portait atteinte à la « perspective monumentale » que la place beauvau incarnait, le juge a sanctionné la décision considérant que cette place n’était en aucun cas une « perspective monumentale ; et CE, 19 mai 1933, Benjamin, réunion interdite par le maire pour des motifs d’ordre public, le juge censure car la réunion n’était pas de nature à troubler l’ordre public puisque des mesures autres pouvaient êtres prises que l’interdiction), la décision est fondée sur une qualification des faits erronés.
. L’erreur de fait : les faits sur lesquels se fonde la décision n’existent pas. C’est ainsi la décision de révoquer un maire qui est censurée puisqu’en l’espèce, le juge constate qu’il avait toutes les précautions nécessaire pour garantir la dignité d’une sépulture.
La forme des actes administratifs n’est pas une condition très exigeante. En effet, un acte administratif peut être matériel (fleurir une tombe), verbal (Epoux Bertin) et peut porter n’importe quelle dénomination. Donc la forme des actes n’est pas exigeante.
ex : le contreseing, la signature de l’autorité n’est pas celle de l’autorité prévue.
le processus de la décision et notamment les procédures substantielles n’ont pas été respectées (comme la consultation d’une autorité par exemple). . La forme affecte la présentation de l‘acte et donc l‘acte lui-même alors que la procédure concerne l’édiction de l‘acte, la façon dont il est pris.
C’est un moyen d’annulation qui concerne le but de l’acte. On peut découper un acte administratif en 3 morceaux. Premièrement tout acte administratif a des motifs même s’ils n’apparaissent pas forcément noir sur blanc dans l’acte. Deuxièmement un contenu matériel. Troisièmement un but. Le juge va faire porter son contrôle sur la légalité de ces trois éléments de l’acte administratif.
Le cas historique est celui de la jurisprudence « Pariset et Laumonier-Carol », en l’espèce le juge annule la décision car sous prétexte d’insalubrité et de dangerosité, le préfet fait fermé des établissements de fabrique d’allumette pour l’indemnisation d’une exprorpiation que la loi prévoyait. Le détournement peut donc être de nature privée CE, 13 mars 1934 Demoiselle Rault ; ou initié dans un intérêt public : CE, 4 juillet Beaugé).
il s’agit tout simplement de la violation d’une règle de droit (norme supérieure à l’acte admininstratif : loi, PGD, internationale) C’est un moyen d’annulation générique qui recouvre en réalité plusieurs contrôles différents. La violation de la loi concerne le contrôle des motifs et le contrôle du contenu de l’acte. Donc c’est un moyen d’annulation particulièrement large. C’est un peu une catégorie four tout.
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