Le recours en responsabilité de l’Union européenne

Le contentieux de la responsabilité contractuelle et extracontractuelle de l’Union Européenne

Le recours en responsabilité est un des recours qui être exercés devant la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne). Ce recours permet aux États membres et aux particuliers qui ont subi un dommage d’obtenir réparation de la part de l’institution qui en est à l’origine.

Il existe deux types de recours en responsabilité de l’Union européenne :

  • – le contentieux de la responsabilité extra-contractuelle : ces recours mettant en cause la responsabilité contractuelle de l’UE lorsque celle-ci est partie à un contrat;
  • – le contentieux de la responsabilité contractuelle : ces recours mettent en cause la responsabilité extracontractuelle de l’UE en raison d’un dommage causé par ses organes ou ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.

Cette distinction est parfois difficile à établir mais est fondamentale pour deux raisons :

  • le juge compétent ne sera pas le même ; pour la responsabilité extracontractuelle, c’est la CJUE ; pour la responsabilité contractuelle, c’est le juge du contrat, donc soit la CJUE soit le juge national ;
  • le droit applicable ne sera donc pas le même.

I ) Le contentieux de la responsabilité contractuelle de l’UE : la responsabilité contractuelle de l’Union Européenne

Les organes (les institutions) et les agents (fonctionnaires, salariés des institutions) de l’Union peuvent conclure des contrats qui engagent la responsabilité de l’UE (Union Européenne).

Toutefois, La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) ne sera pas automatiquement compétente pour statuer sur les litiges nés de ces contrats. En effet, le recours en responsabilité ne peut être formé devant la Cour de Justice de l’Union Européenne que si une clause compromissoire le prévoit. En clair, le contrat auquel l’Union est partie doit obligatoirement comporter une clause prévoyant la compétence de la Cour de Justice de l’Union Européenne en cas de litige. En l’absence de telle clause, les juridictions nationales seront compétentes pour statuer sur le litige né du contrat.

  1. II) Le contentieux de la responsabilité extracontractuelle de l’UE : la responsabilité extra-contractuelle de l’Union Européenne

Le contentieux de la responsabilité extracontractuelle est régi par l’article 340 du TFUE : «l’Union doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des Etats membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents, dans l’exercice de leurs fonctions».

C’est une reprise de l’article 288 du TCE sauf que le traité de Lisbonne étend le champ de la responsabilité extracontractuelle de l’Union européenne ; avant, seule la responsabilité extra-contractuelle de la Communauté était envisagée (donc pas dans le cadre des piliers II et III car ils n’étaient pas prévus et impossibilité logique de prévoir un tel recours car l’Union n’avait pas la personnalité juridique) ; maintenant, c’est étendu à la matière pénale, mais cette voie de droit n’est toujours pas ouverte en matière de PESC.

Les règles qui régissent l’engagement de la responsabilité extra-contractuelle sont jurisprudentielles, le traité est silencieux : il appartient à la Cour de justice de dégager les principes généraux communs. Ce sont eux qui régissent la détermination du fait générateur et les conditions de l’engagement de cette responsabilité.

La Cour de justice reconnaitra la responsabilité de l’UE si trois conditions sont réunies:

  • le requérant a subi un fait générateur c’est à dire un dommage
  • les institutions européennes ou les agents de ces institutions ont eu un comportement illégal au regard du droit européen;
  • il existe un lien de causalité directe entre le dommage subi par le requérant et le comportement illégal des institutions européennes ou de leurs agents.

  1. A) Le fait générateur
  2. La nature du fait générateur
  3. a) L’exigence d’une faute

La responsabilité de l’Union européenne peut être engagée du fait d’un acte matériel, mais aussi du fait d’un acte juridique nécessairement de droit dérivé (car l’acte doit être fautif et l’on imagine mal un traité de l’Union être fautif), lequel peut très bien ne pas être obligatoire, il suffit qu’il ait induit en erreur et ait conduit à un dommage.

C’est une responsabilité pour faute, le fait générateur doit être fautif : généralement, la faute constituée par une illégalité, mais toute illégalité ne suffit pas à être à l’origine valable de l’engagement de la responsabilité : il faut une inégalité suffisamment caractérisée. La jurisprudence a repris une logique juridique allemande et a considéré dans un premier temps dans un arrêt du 2 décembre 1971 Aktien que s’agissant d’un acte normatif impliquant des choix de politiques économiques, la responsabilité de la Communauté ne saurait être engagée qu’en présence d’une violation suffisamment caractérisée d’une règle supérieure de droit protégeant les particuliers.

Par la suite, la formule jurisprudentielle s’est notablement modifiée, et la jurisprudence est fixée par l’arrêt Bergaderm du 4 juillet 2000.

  • L’illégalité devait consister en la violation d’une règle supérieure du droit : cela signifiait-il droit primaire de l’Union seulement ? Ou toute règle supérieure à l’acte dommageable ? La jurisprudence a exclu cette formulation. Est maintenue l’exigence d’un acte violant une règle supérieure de droit protégeant les particuliers (c’est logique car c’est un recours subjectif).
  • La violation doit être suffisamment caractérisée. La caractérisation de la violation doit être proportionnelle au pouvoir de celui ayant adopté l’acte.
  • La formulation jurisprudentielle de 1971 concernait un fait générateur relatif à un acte normatif, ce qui semblait signifier que les conditions n’étaient requises qu’à propos d’un acte de portée générale ; mais l’arrêt de 2000 a abandonné la référence à la notion d’acte normatif.
  1. b) L’hypothèse écartée d’une responsabilité sans faute

Peut-on envisager l’hypothèse de responsabilité sans faute ? La jurisprudence communautaire a envisagé cette possibilité, mais cette hypothèse ne s’est jamais concrétisée, même du côté du Tribunal de première instance. L’arrêt FIAMM du 9 septembre 2008 a vu la grande chambre de la Cour de justice mettre un terme à ces velléités en excluant l’engagement de la responsabilité de l’Union sans faute.

  1. L’origine du fait générateur
  2. a) Le fait de l’agent de l’Union

Entraîne réparation le dommage commis en raison d’une faute de service de l’agent ; dès lors qu’un agent est mis en cause, cela peut être une situation difficile de savoir si la faute a été commise dans l’accomplissement des fonctions ou en dehors :

  • dans le premier cas, c’est l’Union qui répare selon condamnation de la Cour de justice, et elle peut exercer une action récursoire contre l’agent,
  • dans le second cas, c’est l’agent condamné par le juge national.
  1. b) Le fait de l’État membre dans la mise en oeuvre du droit de l’Union

Il faut distinguer trois situations :

  • soit l’acte a été correctement exécuté par l’Etat membre et seule la responsabilité de l’Union peut être engagée,
  • soit l’acte légal a été mal appliqué par l’Etat et seule sa responsabilité peut être engagée,
  • soit l’acte était illégal et l’Etat a mal appliqué, c’est-à-dire qu’il y a un cumul de responsabilités, mais le requérant doit introduire deux recours.
  1. B) L’engagement de la responsabilité
  2. Les conditions de recevabilité de l’action en responsabilité
  3. a) Les conditions générales

L’action en responsabilité extracontractuelle est ouverte à toute victime du dommage : Etat membre, personne physique ou morale dont le droit au recours ne connait pas les mêmes restrictions que dans le cadre du recours en annulation (pour autant, le requérant se heurtera aux conditions de fond rigoureuses pour obtenir l’engagement de la responsabilité de l’Union).

Le délai de recours est de cinq ans à compter de la survenance du fait générateur du dommage ; néanmoins, la jurisprudence considère que cela commence à courir à compter de la date de concrétisation du dommage.

La réalisation effective du dommage n’est pas une condition de recevabilité du recours, mais cela peut être une condition de fond.

  1. b) L’exception de recours parallèle

La victime du dommage doit-elle avoir agit au préalable en annulation contre l’acte illégal ? La Cour de justice y a renoncé car une telle exigence aurait eu un effet pervers. Cela n’est requis que dans le cas où par la voie du recours en annulation, le requérant aurait pu obtenir exactement la même satisfaction que s’il avait engagé la responsabilité de l’Union : c’est l’exception de recours parallèle.

  1. Les conditions de fond de la réparation
  2. a) Un dommage

Le dommage doit être né et actuel, c’est-à-dire déterminé, et la preuve doit être rapportée par la victime.

Il peut être matériel ou moral, et dans le premier cas, la réparation couvrira non seulement le préjudice subi, mais aussi le manque à gagner, c’est-à-dire le damnum emergens et le lucrum cessans.

  1. b) Un lien de causalité

La cause citée doit avoir eu pour effet le dommage rapporté. Il faut que le fait subi ait pu provoquer le préjudice dont on demande réparation.

Ce sont les mêmes conditions qu’en droit commun, vous pouvez donc cliquer sur les liens suivants (sur le lien de causalité) :

  • Le lien de causalité
  • Existence et preuve du lien de causalité
  • Définition et preuve du lien de causalité
  • La preuve du lien de causalité entre la faute et le dommage